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9 mars 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/14516
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 2
ARRÊT DU 09 MARS 2023
(n° , 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/14516 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGIRZ
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juillet 2022 -Président du TC de PARIS 04 – RG n° 2021038536
APPELANTE
S.A.S. CLEAQ SERVICES (Anciennement TRILIZ), RCS de Paris sous le n°840 056 642, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Assistée à l’audience par Me Julie WALRAFEN, avocat au barreau de PARIS, toque : R041
INTIMEE
S.A.S. FLEET, RCS de Paris sous le n°848 427 449, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée et assistée par Me Arnaud CONSTANS de la SELEURL SELARL Constans Avocat, avocat au barreau de PARIS, toque : A0110
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 19 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre
Thomas RONDEAU, Conseiller
Michèle CHOPIN, Conseillère chargée du rapport
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
*****
EXPOSE DU LITIGE
La société Triliz, créée en 2018 et devenue ensuite Cleaq Services, propose la location de matériel informatique à une clientèle professionnelle ainsi que des services associés. La société Fleet, créée en 2019, est concurrente de la société Triliz.
Par ordonnance du 18 mai 2021, le tribunal de commerce de Paris a ordonné une mesure d’instruction sollicitée sur le fondement des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile par la société Fleet et commis à cet effet la société [B]-Duhamel, huissiers de justice.
Par ordonnance du 27 janvier 2022, le tribunal de commerce de Paris a rejeté la demande de rétractation formée par la société Triliz, confirmé son ordonnance du 18 mai 2021 et les parties ont été convoquées à l’audience du 11 mai 2022 pour la levée de séquestre.
Lors de cette audience, la société Fleet a demandé au tribunal de commerce, aux termes de ses conclusions, de :
– ordonner la levée du séquestre de l’ensemble des documents se trouvant entre les mains de Me [B], huissier de justice associé de la société [B]-Duhamel, par application de l’ordonnance rendue le 18 mai 2021,
– exclure des éléments concernés par la levée du séquestre les éventuelles correspondances échangées exclusivement entre la société Triliz et son/ses avocat(s), couvertes par le secret professionnel ;
– condamner la société Triliz à payer à la société Fleet la somme de un euro à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
– condamner la société Triliz à payer à la société Fleet la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– rejeter toute demande ou prétention contraire de la société Triliz,
– condamner la société Triliz aux entiers dépens.
Par arrêt du 5 octobre 2022, la cour d’appel de Paris a confirmé l’ordonnance rendue le 27 janvier 2022.
Par ordonnance contradictoire du 7 juillet 2022, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :
– débouté la société Triliz de sa demande de sursis à statuer ;
– ordonné la levée du séquestre de l’ensemble des documents se trouvant entre les mains de Me [B], huissier de justice associé de la société [B]-Duhamel par application de l’ordonnance rendue le 18 mai 2021 par M. [P], délégué du président du tribunal de commerce de Paris ;
– dit que Me [B], huissier de justice associé au sein de la société [B]-Duhamel, ès-qualités de séquestre, ne pourra procéder à la libération des pièces retenues comme devant être communiquées lors de la levée du séquestre, qu’après que tous les délais d’appel soient expirés, que dans cette attente la société [B] Duhamel prise en la personne de l’un de ses associés, ès qualités conservera sous séquestre l’ensemble des pièces ;
– débouté les parties de toutes leurs autres demandes ;
– condamné la société Triliz à verser à la société Fleet la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société Triliz aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 58,92 euros TTC dont 9,61 euros de TVA ;
– rappelé que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision en application de l’article 514 du code de procédure civile.
Par déclaration du 29 juillet 2022, la société Triliz a interjeté appel de l’ensemble des chefs du dispositif de la décision.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 2 janvier 2023, la société Triliz demande à la cour de :
– déclarer l’appel recevable ;
– infirmer l’ordonnance rendue le 7 juillet 2022 en ce qu’elle a statué par les chefs suivants :
‘ ordonné la levée du séquestre de l’ensemble des documents se trouvant entre les mains de Me [B], huissier associé de la société [B] Duhamel par application de l’ordonnance rendue le 18 mai 2021 par M. [P], délégué du président du tribunal de commerce de Paris,
‘ dit que Me [B], huissier de justice associé au sein de la société [B] Duhamel, ès qualités de séquestre, ne pourra procéder à la libération des pièces retenues comme devant être communiquées lors de la levée du séquestre, qu’après que tous les délais d’appel soient expirés, que dans cette attente la société [B]- Duhamel prise en la personne de l’un de ses associés, ès-qualités conservera sous séquestre l’ensemble des pièces,
‘ débouté les parties de toutes leurs autres demandes mais uniquement lorsqu’il débouté la société Triliz de ses demandes ;
‘ condamné la société Triliz à verser à la société Fleet la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Et, statuant à nouveau,
– juger que les pièces suivantes ne sont pas conformes au champ de l’ordonnance ayant autorisé les mesures car en langue anglaise ou contenant le terme « fleet» en minuscle :
pièces jointes des numéros 160 ; 161 et 387 ; 411 à 413 ; 415 à 422 ; 424 à 463 ; 464 à 466 ; 482 ; 485 ; 511 ; 512 ; 515 ; 531 à 543 ; 545 ; 546 ; 547 ; 553 à 560 ; 564 à 565 ;
– ordonner l’exclusion des pièces suivantes :
pièces jointes des numéros 160 ; 161 et 387 ; 411 à 413 ; 415 à 422 ; 424 à 463 ; 464 à 466 ; 482 ; 485 ; 511 ; 512 ; 515 ; 531 à 543 ; 545 ; 546 ; 547 ; 553 à 560 ; 564 à 565 ;
– juger que la société Triliz est recevable et bien fondée à se prévaloir des dispositions des articles L. 151-1 et suivants et R. 153-1 et suivants du code de commerce, la loi relative à la protection du secret des affaires ainsi que celles relatives à la loi relative sur les données personnelles et le secret des correspondances ;
– juger que les pièces suivantes sont soumises au secret des affaires conformément aux dispositions des articles L. 151-1 et suivants et R. 153-1 du code de commerce :
1 à 9, 12 à 27, 31, 33, 36, 37, 39, 40, 47, 160, 161, 183, 184, 188, 195, 209, 238, 239, 241, 258, 244 à 247, 271, 280 à 287, 333, 334 à 354, 373 à 375, 387, 409, 410, 411 à 475, 482, 485 à 488, 494 à 500, 511 à 518, 521 à 543, 545 à 547, 553 à 566 ; 569 ;
En conséquence, ordonner leur exclusion ;
En tant que de besoin, juger que (i) les pièces 1 à 9, 12 à 26, 36, 37, 40, 409, 410, 469 à 475, 486 à 488, 516 à 518, 526 à 530, 561 à 563 sont protégées par la loi relative aux données personnelles et (ii) 47, 160, 161, 183, 184, 188, 195, 209, 238, 239, 241, 244 à 248, 271, 280 à 287, 333, 334 à 354, 373 à 375, 387 ;
En conséquence, ordonner leur exclusion ;
En conséquence de ce qui précède :
– fixer un calendrier aux fins de :
‘ procéder à l’examen des pièces séquestrées,
‘ se faire communiquer, non contradictoirement, le mémoire confidentiel au soutient des pièces dont les informations sont soumises à la protection du secret des affaires,
– débouter la société Fleet de sa demande de mainlevée intégrale du séquestre ;
– limiter la communication aux seules pièces non couvertes par le secret des affaires ;
A titre subsidiaire,
– ordonner, l’exclusion des pièces protégées par le secret des affaires, la loi sur les données personnelles et le secret des correspondances à l’issue d’un tri contradictoire ;
En conséquence,
– fixer un calendrier aux fins de:
‘ procéder à l’examen des pièces séquestrées,
‘ permettre aux parties, sous le contrôle de la Cour, de débattre contradictoirement, par application des articles R. 153-2 et suivants du code de commerce, des pièces devant être exclues ;
En tout état de cause,
– débouter la société Fleet de toutes ses demandes, fins et prétentions ;
– condamner la société Fleet à payer la somme de 10.000 euros à la société Triliz, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société Fleet aux entiers dépens.
La société Triliz soutient en substance que :
– la fin de non recevoir tirée de l’absence de l’huissier de justice à la procédure d’appel est infondée, ce dernier, qui n’est pas partie à la procédure, n’avait pas à être intimé,
– l’ordonnance rendue est contraire au dispositif de celle ayant autorisé les mesures,
– elle a ordonné la levée totale du séquestre sans apprécier si les pièces saisies étaient protégées par des dispositions légales,
– devront ainsi être exclues les pièces saisies en violation des mesures autorisées, les pièces sans lien avec l’objet des mesures ou les prétentions de la société Fleet, et contenant des informations confidentielles, sensibles et souvent stratégiques ou des données personnelles protégées par la loi, dont la production n’est pas nécessaire au litige,
– les éléments saisis outrepassent les mesures autorisées, certains documents étant en langue anglaise ou comportant le terme “fleet” en minuscule,
– certains élément sont protégés par le secret des affaires et sans liens avec les prétentions de la société Fleet, s’agissant de documents tratégiques et prévisionnels, liés à la clientèle de la société Trilz et son développement, ou relatifs aux négociations ou accords avec des prestataires externes,
– d’autres sont couverts par la réglementation relative aux données personnelles et/ou le secret des correspondances doivent être exclus de la communication s’agissant de mots de passe, de codes de développement ou d’un pacte d’actionnaire, par exemple,
– les communiquer constituerait en effet une menace de pillage massif de la société Triliz,
– les accusations de la société Fleet sont de mauvaise foi, alors que la société Triliz n’est pas à l’origine du litige, de sorte que la demande de dommages intérêts pour appel abusif sera rejetée.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 29 décembre 2022, la société Fleet demande à la cour, de :
A titre principal,
– juger que l’appelante n’a pas intimé la société [B]- Duhamel, séquestre, de telle sorte que l’ordonnance du 7 juillet 2022 est passée en force de chose jugée à son égard ;
Par conséquent,
– déclarer irrecevables les demandes de la société Cleaq services quant à la libération du séquestre, et en tout état de cause mal fondées et confirmer l’ordonnance du 7 juillet 2022 ;
– subsidiairement, déclarer la décision à intervenir opposable à la société [B]- Duhamel ;
En tout état de cause,
– confirmer l’ordonnance du 7 juillet 2022 en ce qu’elle a ordonné la levée du séquestre de l’ensemble des documents se trouvant entre les mains de Me [B], huissier de justice associé de la société [B] Duhamel par application de l’ordonnance rendue le 18 mai 2021,
– confirmer l’ordonnance du 7 juillet 2022 en ce qu’elle a débouté la société Cleaq services de ses demandes et l’a condamnée à 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;
Y ajoutant,
– condamner la société Cleaq services à payer à la société Fleet la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’appel ;
– condamner la société Cleaq services à payer à la société Fleet la somme de 1 euro au titre de l’abus du droit d’appel ;
– rejeter toute demande ou prétention contraire de la société Cleaq services ;
– condamner la société Cleaq services aux entiers dépens.
La société Fleet soutient en substance que :
– aucun appel n’a été formé contre le séquestre, la scp [B]-Duhamel, huissiers de justice,
alors qu’elle était défenderesse en première instance, de sorte que l’ordonnance rendue est passée en force de chose jugée à son endroit,
– par conséquent, et pour ce seul motif, la levée de séquestre devra avoir lieu selon les termes de l’ordonnance rendue,
– subsidiairement sur ce point, la cour d’appel pourrait rendre cet arrêt opposable à l’huissier de justice, une telle solution permettant l’exécution de l’arrêt à intervenir en évitant d’éventuelles difficultés,
– la levée de séquestre a été prescrite à bon droit,
– l’ordonnance ayant été signifiée le 22 juin 2021, la saisine du juge de la rétractation devait intervenir dans le délai d’un mois, soit le 22 juillet 2021 au plus tard, alors qu’elle n’a eu lieu que le 9 août 2021, et c’est donc l’ensemble des pièces saisies qui doit être remis,
– les demandes de la sociétéTriliz méconnaissent le principe du contradictoire et les articles R 153-2 et suivants du code de commerce,
– la société Triliz ne peut solliciter l’exclusion de pièces et dans ce cas, aucun tri contradictoire n’a lieu, et invoquer le secret des affaires au titre de certaines d’entre elles,
– la demande d’exclusion des pièces ne peut être accueillie dans la mesure où ni la société Fleet, ni son conseil, ni la cour d’appel n’en a connaissance,
– l’appel interjeté est abusif, la société Triliz n’ayant de cesse de retarder la libération des pièces saisies.
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
SUR CE,
Sur la force de chose jugée de l’ordonnance rendue à l’encontre de la scp [B]-Duhamel, huissiers de justice
La société Fleet soutient qu’en l’absence d’appel formé contre le séquestre, l’ordonnance rendue est passée en force de chose jugée à son encontre puisqu’il n’est pas intimé.
L’article 4 du code de procédure civile dispose que l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
L’article 31 du code de procédure civile prévoit que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention.
En l’espèce, la société [B]-Duhamel, huissiers de justice a été commise en la personne de Me [B] pour exécuter la mesure d’instruction ordonnée par ordonnance du 18 mai 2021.
Toutefois, bien que la société [B]-Duhamel figure dans l’ordonnance du 7 juillet 2022 comme “défenderesse”, ce qui constitue de toute évidence une erreur matérielle, celle-ci n’a developpé ou subi aucune prétention, les demandes soumises au premier juge n’étant pas dirigées contre elle.
Cette mention de la société [B]-Duhamel sur l’ordonnance rendue comme “défenderesse”n’a donc pas pour effet de lui conférer la qualité de partie à l’instance, étant précisé qu’il n’appartient pas à l’huissier de justice désigné de participer aux débats, dans la mesure où il est tenu d’exécuter la décision.
Dans ces conditions, n’ayant pas de prétention à faire valoir au sens des articles 4 et 31 du code de procédure civile, la société [B]-Duhamel qui ne peut être considérée comme partie à l’instance, ne devait pas non plus être intimée, de sorte que, contrairement à ce que soutient la société Fleet, l’ordonnance du 7 juillet 2022 n’a acquis aucune force de chose jugée à son endroit.
Pour ces mêmes motifs, la société [B]-Duhamel n’étant pas partie à l’instance, il n’y a pas lieu de lui rendre cet arrêt opposable, étant précisé qu’il a été commis aux fins d’exécuter la mesure d’instruction prévue par l’ordonnance du 18 mai 2021.
Cette prétention sera rejetée.
Sur la levée de séquestre
La société Triliz demande à ce que soient exclues de toute communication les pièces saisies en violation des mesures autorisées, les pièces sans lien avec l’objet des mesures ou les prétentions de la société Fleet, et contenant des informations confidentielles, sensibles et souvent stratégiques ou des données personnelles protégées par la loi, dont la production n’est pas nécessaire au litige, certains éléments étant protégés par le secret des affaires et sans liens avec le litige, d’autres étant couverts par la réglementation relative aux données personnelles et/ou le secret des correspondances.
L’article R 153-1 du code de commerce dispose que lorsqu’il est saisi sur requête sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ou au cours d’une mesure d’instruction ordonnée sur ce fondement, le juge peut ordonner d’office le placement sous séquestre provisoire des pièces demandées afin d’assurer la protection du secret des affaires.
Si le juge n’est pas saisi d’une demande de modification ou de rétractation de son ordonnance en application de l’article 497 du code de procédure civile dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision, la mesure de séquestre provisoire mentionnée à l’alinéa précédent est levée et les pièces sont transmises au requérant.
Le délai d’un mois visé dans le texte susvisé ne s’applique qu’à la levée de la mesure de séquestre de sorte que son non respect n’a aucune incidence sur la recevabilité de la demande de rétractation de l’ordonnance sur requête, fondée sur les dispositions de l’article 497 du code de procédure civile qui ne fixent aucun délai pour l’exercer.
En l’espèce, il apparait que :
– l’ordonnance rendue le le 27 janvier 2022 a déclaré que l’action en rétractation n’est pas forclose, les dispositions de l’article R 153-1 du code de commerce ne s’appliquant qu’à la procédure de tri des pièces et non à l’instance en rétractation,
– la cour d’appel qui a dans son arrêt du 5 octobre 2022 confirmé cette ordonnance en ce qu’elle a rejeté cette demande de rétractation n’avait pas été saisie de ce point,
– l’ordonnance du 18 mai 2021 ordonnant une mesure d’instruction in futurum dans les locaux de la société Triliz a été signifiée à cette dernière par acte du 22 juin 2021, le délai prévu par l’article R 153-1 du code de commerce expirant le 22 juillet 2021,
– le placement de l’assignation en rétractation est survenu le 9 août 2021, ce qui ne fait pas débat.
Il n’est donc pas établi dans ces conditions que la société Triliz ait placé l’assignation en rétractation et saisi le juge de la rétractation avant le 22 juillet 2021 d’une demande de modification ou de rétractation de son ordonnance en application de l’article 497 du code de procédure civile dans le mois de cette signification de l’ordonnance du 18 mai 2021, de sorte que le délai de l’article R 153-1 du code de commerce n’a pas été respecté.
Par conséquent, en l’absence de demande de protection du secret des affaires dans ce délai, la société Triliz se trouve irrecevable à invoquer cette protection dans la présente instance en ouverture de séquestre.
Par ailleurs, la société Triliz expose que parmi les éléments saisis figurent des documents en langue anglaise ou comportant le terme “fleet” en minuscule, ce qui aurait été exclu par l’ordonnance rendue le 18 mai 2021. Toutefois, si cette ordonnance prévoit bien l’utilisation de mots clés (dont le mot clé Fleet/Flit/Fleat), la société Triliz procède par simple affirmation lorsqu’elle produit une liste des pièces qu’elle estime concernées, étant rappelé que la mesure d’instruction a été jugée circonscrite dans le temps, et dans son objet par le tribunal de commerce puis par la cour d’appel. Alors qu’elle ne sollicite pas expressément une procédure de tri, permettant de classer ces pièces, la société Triliz ne caractérise pas in concreto leur absence d’utilité à la solution du litige, de sorte que les demandes relatives aux documents qu’elle identifie comme “dépourvues de lien avec le litige” ou en langue anglaise ou comportant le mot “fleet” en minuscules seront rejetées.
Ensuite, la société Triliz invoque des documents autrement protégés au titre de la loi sur les données personnelles et au titre du secret des correspondances.
Si le secret des correspondances ne constitue pas en lui-même un obstacle à la mise en oeuvre de mesures d’instruction, dès lors que les mesures sont indispensables à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées et ne portent pas une atteinte disproportionnée à ces secrets au regard du but poursuivi, force est de constater que la société Triliz ne caractérise pas plus l’absence d’utilité de ces pièces au litige et n’explique pas en quoi elles seraient protégées par la “loi relative aux données personnelles”, qu’elle ne précise pas, ou par le secret des correspondances, étant observé qu’elle ne se réfère pas au secret professionnel.Il ne sera donc pas fait droit non plus à cette demande.
En conséquence, l’ordonnance sera confirmée en ce qu’elle a ordonné la levée de séquestre des pièces recueillies en exécution de l’ordonnance du 18 mai 2021et leur communication à la société Fleet.
Sur les autres demandes
Aucune faute n’étant démontrée dans l’exercice par la société Triliz de son droit d’agir, la demande de dommages intérêtspour procédure abusive formulée par la société Fleet sera rejetée.
Le sort des dépens a été exactement réglé par le premier juge.
Aucune considération d’équité ne commande de faire application au bénéfice de l’une ou l’autre des parties des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, de sorte que l’ordonnance rendue le 7 juillet 2022 sera infirmée en ce qu’elle a condamné la société Triliz à payer à l’intimée une somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Pour ce même motif, il ne sera pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en appel.
PAR CES MOTIFS
Confirme l’ordonnance rendue le 7 juillet 2022, sauf sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau, et y ajoutant,
Condamne la société Triliz aux dépens d’appel,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE