Location de matériel : 3 novembre 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 20-17.624

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Location de matériel : 3 novembre 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 20-17.624
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3 novembre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n°
20-17.624

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 novembre 2021

Cassation

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 751 F-D

Pourvoi n° V 20-17.624

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 NOVEMBRE 2021

M. [D] [B], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 20-17.624 contre l’arrêt rendu le 19 mai 2020 par la cour d’appel d’Amiens (chambre baux ruraux), dans le litige l’opposant à M. [H] [S], domicilié [Adresse 8], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Echappé, conseiller doyen, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [B], de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [S], après débats en l’audience publique du 21 septembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Echappé, conseiller doyen rapporteur, Mme Andrich, conseiller, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Amiens, 19 mai 2020), par acte du 25 janvier 1984, M. [B] a pris à bail une parcelle de quatre-vingt seize ares appartenant à M. [S].

2. Par acte du 29 décembre 2017, M. [S] a délivré à M. [B] un congé pour reprise à effet au 30 septembre 2019.

3. Par déclaration du 16 avril 2018, M. [B] a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en annulation du congé.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [B] fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes, de valider le congé et d’ordonner son expulsion, alors « que la régularité d’un congé s’appréciant à la date de sa délivrance, c’est à cette date que les juges du fond doivent se placer pour vérifier si l’omission ou l’inexactitude d’une mention obligatoire était ou non de nature à provoquer l’erreur du preneur ; qu’il est donc indifférent que celui-ci, postérieurement à cette date, ait été en mesure de connaître la situation exacte du bénéficiaire de la reprise ; d’où il suit qu’en retenant, pour écarter la nullité du congé, que M. [B], parce qu’il habite à proximité des domiciles successifs de M. [S], a eu nécessairement connaissance de son déménagement, survenu trois mois après la délivrance du congé, la cour d’appel a violé l’article L. 411-47 du code rural et de la pêche maritime. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 411-47 et L. 411-59 du code rural et de la pêche maritime :

5. Il résulte de ces textes que le bénéficiaire de la reprise doit justifier qu’il remplit la condition d’habitation du bien repris ou d’un bâtiment proche et que le congé doit l’indiquer à peine de nullité.

6. Pour valider le congé, l’arrêt retient que, concernant le logement à proximité de l’exploitation, M. [B], qui habite à proximité des domiciles successifs de M. [S], a eu connaissance du déménagement de celui-ci au sein de la même commune et ne justifie pas de l’existence d’un préjudice tiré de l’indication, dans le congé, d’une adresse devenue obsolète quelques mois plus tard.

7. En statuant ainsi, après avoir retenu que les mentions du congé relatives à l’habitation étaient, à la date de la délivrance de cet acte, affectées d’une incertitude sur la permanence de l’engagement pris par le bailleur, laquelle ne permettait pas de vérifier que les conditions de la reprise étaient réunies, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. En application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen entraîne, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif critiqué par le second moyen.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 19 mai 2020, entre les parties, par la cour d’appel d’Amiens ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Douai ;

Condamne M. [S] aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [S] et le condamne à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros.

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois novembre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [B]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté M. [D] [B] de l’intégralité de ses demandes, validé le congé délivré le 29 décembre 2017 par Monsieur [H] [S] à Monsieur [D] [B] aux fins de reprise de la parcelle sise à [Localité 4] lieudit “[Adresse 6]”, cadastrée section [Cadastre 9] d’une contenance de 96 ares, dit que Monsieur [D] [B] devrait libérer les terres au plus tard le 30 septembre 2019 et autorisé Monsieur [H] [S] à procéder à l’expulsion de Monsieur [D] [B] à compter du 1er octobre 2019, au besoin avec le concours de la force publique ;

Aux motifs propres que « L’article L. 411-47 du Code rural dispose que “Le propriétaire qui entend s’opposer au renouvellement doit notifier congé au preneur, dix-huit mois au moins avant l’expiration du bail, par acte extrajudiciaire. A peine de nullité, le congé doit :
– mentionner expressément les motifs allégués par le bailleur ;
– indiquer, en cas de congé pour reprise, les nom, prénom, âge, domicile et profession du bénéficiaire ou des bénéficiaires devant exploiter conjointement le bien loué et, éventuellement, pour le cas d’empêchement, d’un bénéficiaire subsidiaire, ainsi que l’habitation ou éventuellement les habitations que devront occuper après la reprise le ou les bénéficiaires du bien repris ;
– reproduire les termes de l’alinéa premier de l’article L. 411-54.
La nullité ne sera toutefois pas prononcée si l’omission ou l’inexactitude constatée ne sont pas de nature à induire le preneur en erreur”.

Le congé indique qu’il est délivré à la demande de “Monsieur [H] [K], [Z] [S], de nationalité française, né le 2 juillet 1979 à [Localité 3] exploitant agricole, demeurant [Adresse 1]”. Plus loin, le congé précise qu’ “il (M. [H] [S]) prend l’engagement d’occuper les immeubles bâtis de l’exploitation s’il en existe et dans la négative d’occuper une habitation située à proximité du bien repris en permettant l’exploitation directe, en l’espèce, [Adresse 1]”.

M. [H] [S] qui produit lui-même une attestation émanant du maire de la commune de [Localité 4] reconnaît qu’il n’habite plus depuis le 1er avril 2018, [Adresse 1] mais toujours dans la commune de [Adresse 8].

Le domicile occupé par M. [H] [S] depuis le 1er avril 2018 étant situé dans la même commune rurale que celui qui était mentionné au congé et qui est aussi la commune du siège de son exploitation dont l’adresse était précisée au congé, il n’apparaît pas que ce déménagement ait eu un quelconque impact négatif sur les conditions d’exploitation du bien repris, M. [D] [B] n’avançant d’ailleurs aucun élément en ce sens. Comme l’ont justement retenu les premiers juges, le fait d’avoir déménagé quelques mois après la délivrance du congé ne suffit pas à montrer que le preneur ait été induit en erreur sur les conditions d’exploitation du bien repris, étant en l’occurrence relevé que M.[D] [B] qui habite à proximité des domiciles successifs de M. [H] [S] a eu connaissance de son déménagement.

En conséquence, à défaut de justifier de l’existence d’un préjudice résultant de ce déménagement au sein de la même commune pour les motifs qui précèdent qui s’ajoutent à ceux retenus par les premiers juges, la nullité de congé ne saurait être prononcée pour un motif tiré de l’indication d’une adresse devenue obsolète sans que le déménagement intervenu en cours de congé n’ait affecté les conditions d’exploitation du bien dont la reprise est poursuivie.

Aucun texte n’oblige le bailleur à faire mention au congé des parcelles qu’il exploite : les développements de M. [D] [B] sur une distorsion entre le relevé MSA et ses déclarations PAC sont par conséquent dépourvus de tout intérêt pour apprécier la régularité formelle du congé » ;

Et aux motifs réputés adoptés du jugement entrepris que « Sur les conditions posées par l’article L. 411-47 du code rural et de la pêche maritime :

L’article L. 411-47 du Code rural et de la pêche énonce que :

“Le propriétaire qui entend s’opposer au renouvellement doit notifier congé au preneur, dix-huit mois au moins avant l’expiration du bail, par acte extrajudiciaire. A peine de nullité, le congé doit :
– mentionner expressément les motifs allégués par le bailleur ;
– indiquer, en cas de congé pour reprise, les nom, prénom, âge, domicile et profession du bénéficiaire ou des bénéficiaires devant exploiter conjointement le bien loué et, éventuellement, pour le cas d’empêchement, d’un bénéficiaire subsidiaire, ainsi que l’habitation ou éventuellement les habitations que devront occuper après la reprise le ou les bénéficiaires du bien repris ;
– reproduire les termes de l’alinéa premier de l’article L. 411-54.
La nullité ne sera toutefois pas prononcée si l’omission ou l’inexactitude constatée ne sont pas de nature à induire le preneur en erreur”.

Il s’agit donc d’une nullité de forme qui doit s’apprécier à la date de la délivrance du congé/

En l’espèce, Monsieur [H] [S], bénéficiaire de la reprise, ne conteste pas s’être engagé à occuper une habitation à proximité du bien repris qui se situe à [Localité 4] afin de permettre une exploitation directe, ni avoir déménagé depuis la dénonciation de l’acte de congé le 29 décembre 2017. Cependant, il justifie par des certificats établis les 11 décembre 2018 et 15 janvier 2019 par le maire de la commune de [Localité 4] être domicilié dans cette commune d’abord au [Adresse 1], et jusqu’au 1er avril 2018, puis ruelle Magister, sentier du tour de haies.

Monsieur [H] [S] avait donc une habitation sur la commune de [Localité 4] lors de la dénonciation du congé de reprise à Monsieur [D] [B].

De plus, le fait d’avoir déménagé quelques mois après cette dénonciation ne suffit pas à caractériser une volonté d’induire en erreur le preneur à bail d’autant plus que le déménagement s’est effectué dans la même commune. C’est pourquoi il n’y a pas lieu de prononcer la nullité du congé de reprise de ce chef » ;

1°) Alors que la régularité d’un congé s’appréciant à la date de sa délivrance, c’est à cette date que les juges du fond doivent se placer pour vérifier si l’omission ou l’inexactitude d’une mention obligatoire était ou non de nature à provoquer l’erreur du preneur ; qu’il est donc indifférent que celui-ci, postérieurement à cette date, ait été en mesure de connaître la situation exacte du bénéficiaire de la reprise ; d’où il suit qu’en retenant, pour écarter la nullité du congé, que M. [D] [B], parce qu’il habite à proximité des domiciles successifs de M. [H] [S], a eu nécessairement connaissance de son déménagement, survenu trois mois après la délivrance du congé, la Cour d’appel a violé l’article L. 411-47 du Code rural et de la pêche maritime ;

2°) Alors que l’omission ou l’inexactitude d’une mention obligatoire du congé entraîne la nullité de celui-ci, indépendamment de toute volonté dolosive de la part du bailleur ; que, dès lors, la Cour d’appel qui, écarter la nullité du congé délivré par M. [S] à M. [B], a retenu, par motif réputé adopté des premiers juges, que le fait, par le premier, d’avoir déménagé quelques mois après la délivrance du congé ne suffit pas à caractériser sa volonté d’induire en erreur le second, a statué par un motif inopérant, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l’article L. 411-47 du Code rural et de la pêche maritime ;

3°) Alors que l’omission ou l’inexactitude d’une mention obligatoire du congé entraîne la nullité de celui-ci, sauf si le bailleur ou le bénéficiaire de la reprise démontre que cette omission ou inexactitude n’était pas, au moment de la délivrance dudit congé, de nature à induire le preneur en erreur ; qu’en écartant néanmoins la nullité du congé aux motifs que le fait, par M. [S], d’avoir déménagé quelques mois après la délivrance du congé ne suffit pas à montrer que M. [B] ait été induit en erreur sur les conditions d’exploitation du bien repris et que M. [B] ne justifie pas de l’existence d’un préjudice résultant de ce déménagement au sein de la même commune, la Cour d’appel a inversé la charge de la preuve et, par suite, violé l’article 1315 ancien du Code civil, devenu l’article 1353 nouveau de ce Code ;

4°) Et alors que, en tout état de cause, l’omission ou l’inexactitude d’une mention obligatoire du congé entraîne la nullité de celui-ci, indépendamment de tout préjudice démontré par le preneur ; et que la Cour d’appel, en écartant la nullité du congé aux motifs que M. [B] ne justifie pas de l’existence d’un préjudice résultant de ce déménagement au sein de la même commune, a ajouté aux exigences légales et ainsi derechef violé l’article L. 411-47 du Code rural et de la pêche maritime.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté M. [D] [B] de l’intégralité de ses demandes, validé le congé délivré le 29 décembre 2017 par Monsieur [H] [S] à Monsieur [D] [B] aux fins de reprise de la parcelle sise à [Localité 4] lieudit “[Adresse 6]”, cadastrée section [Cadastre 9] d’une contenance de 96 ares, dit que Monsieur [D] [B] devrait libérer les terres au plus tard le 30 septembre 2019 et autorisé Monsieur [H] [S] à procéder à l’expulsion de Monsieur [D] [B] à compter du 1er octobre 2019, au besoin avec le concours de la force publique ;

Aux motifs propres que « Sur l’obstacle opposé par M. [D] [B] à la reprise :

En application de l’article L. 411-58 du code rural, le bailleur a le droit de refuser le renouvellement du bail s’il veut reprendre le bien loué pour l’exploiter lui-même ou par l’un des bénéficiaires autorisés par ce texte.

Pour s’opposer à la reprise par M. [H] [S] du bien loué en vue de l’exploiter par lui-même, M. [D] [B] se fondant sur l’article L. 411-64 du code rural soutient que le bien qui lui est loué est exploité dans le cadre de ses dispositions spécifiques relatives aux parcelles de subsistance.

Cet article dispose que “le droit de reprise tel qu’il est prévu aux articles L. 411-58 à L. 411-63, L. 411-66 et L. 411-67 ne peut être exercé au profit d’une personne ayant atteint, à la date prévue pour la reprise, l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles, sauf s’il s’agit, pour le bénéficiaire du droit de reprise, de constituer une exploitation ayant une superficie au plus égale à la surface fixée en application de l’article L. 732-39. Si la superficie de l’exploitation ou des exploitations mises en valeur par le preneur est supérieure à cette limite, le bailleur peut, par dérogation aux articles L. 411-5 et L. 411-46 :
– soit refuser le renouvellement du bail au preneur ayant atteint l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles ; – soit limiter le renouvellement à l’expiration de la période triennale au cours de laquelle le preneur atteindra cet âge.
(…)”.

Il s’évince de cet article que l’atteinte de l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles peut faire obstacle soit au droit de reprise du bailleur, soit au droit de renouvellement du preneur.

D’une part, est posée la règle selon laquelle la reprise ne peut pas être exercée au profit d’une personne ayant atteint cet âge sans qu’il n’y ait lieu dans le cadre du présent arrêt de faire état des tempéraments prévus par la loi à cette règle et qui sont étrangers à la solution du litige. Ce motif de l’atteinte de l’âge de la retrait pèse en conséquence sur la personne du bénéficiaire de la reprise, à savoir en l’occurrence M. [H] [S] ; ce dernier étant né en 1979 il est loin d’avoir atteint l’âge de la retraite à la date d’effet du congé ; ce cas ne concerne donc pas la présente espèce, M. [D] [B] ne l’ayant d’ailleurs jamais prétendu.

D’autre part, cet article prévoit en cas d’atteinte par le preneur de l’âge de la retraite une dérogation à l’article L. 411-5 du code rural qui fixe la durée du bail rural à neuf années minimum et à l’article L. 411-46 du même code qui pose le principe du droit au renouvellement du preneur c’est donc l’atteinte de l’âge de la retraite du chef du preneur qui peut faire obstacle à son droit au renouvellement si l’exploitation qu’il met en valeur est supérieure à la limite prévue par l’article L. 732-39.

Il se déduit a contrario de cet article que si la taille de l’exploitation du preneur qui a atteint l’âge légal de la retraite est inférieure à cette limite, celui-ci peut s’opposer au congé aux fins de reprise pour exploiter.

Pour les raisons qui précèdent qui s’ajoutent à celles retenues par les premiers juges, les dispositions de l’article L. 411-64 s’appliquent au congé aux fins de reprise pour exploiter.

En l’occurrence, M. [D] [B] qui né le 18 avril 1951 a eu 68 ans à la date d’effet du congé et a donc atteint et même dépassé l’âge légal de la retraite. Ce dernier justifie par ailleurs avoir demandé à percevoir sa pension de retraite des exploitants agricoles (pièce 3 de M. [D] [B]) (et) ne conteste pas qu’elle lui est effectivement versée.

S’agissant de la taille de l’exploitation de M. [D] [B], elle ne fait pas en elle-même l’objet de réelle discussion de la part de M. [H] [S] qui, admettant que sur le plan formel, elle est inférieure au cinquième de la surface minimum d’assujettissement pour le département de la Somme en application du critère légal complété par ses dispositions réglementaires, fait porter sa discussion en amont en dénonçant l’effectivité d’une exploitation mise en valeur personnellement par M. [D] [B].

En effet la conservation autorisée par la loi pour un agriculteur ayant atteint l’âge de la retraite et qui perçoit une pension de retraite des exploitants agricoles, d’une exploitation à la superficie limitée ne saurait être utilisée pour contourner les règles du statut du fermage.

Le preneur qui a atteint l’âge de la retraite s’il peut s’opposer à la faculté conférée par l’article L. 411-64 au bailleur de lui refuser le renouvellement du bail ou de le limiter, c’est à la condition qu’il mette effectivement en valeur une exploitation d’une superficie limitée, cette notion de mise en valeur supposant à son tour que le preneur ait conservé la maîtrise de son exploitation.

Il convient au vu des objections de M. [H] [S] sur l’effectivité de cette mise en valeur par M. [D] [B] de la vérifier.

Le registre parcellaire graphique au titre de la campagne 2019 télédéclaré le 26 avril 2019 à la PAC par M. [D] [B] concernant les parcelles qu’il exploite sur le terroir de la commune de [Localité 4] à la rubrique “culture” mentionne “BTN”. M. [D] [B] ne conteste pas que ces lettres renvoient à la culture de betteraves sucrières (pièce 12 de M. [D] [B]). Or, il résulte du bordereau des mouvements du compte de M. [D] [B] à la coopérative Noriap, qu’ont été apportée le 30 juillet 2019 à cette coopérative 9,460 tonnes de blé et non pas des betteraves.

La contradiction manifeste entre les cultures déclarées par M. [D] [B] à la PAC et celles ayant servi à alimenter son compte de coopérateur ne permet pas de retenir qu’il a conservé la maîtrise de son exploitation.

Il n’est pas contesté que M. [D] [B] a cédé son exploitation ; il ne prétend pas avoir conservé du matériel d’exploitation ; certes, il ne peut être exigé de ce dernier au vu de la taille réduite de l’exploitation qu’il prétend mettre en valeur qu’il possède la totalité du matériel d’exploitation et (il) prétend en disposer dans le cadre de relations d’entraide agricole.

Il ressort de l’article L. 325-1 du code rural que l’entraide qui implique des échanges de services en travail ou moyens d’exploitation qu’il s’agit d’un contrat qui implique réciprocité (sic). En l’occurrence, M. [D] [B] ne précise pas quels sont les agriculteurs avec lesquels il serait en relation d’entraide et les services qu’il leur rend ou les moyens matériels qu’il leur fournit en contrepartie. L’affirmation de M. [D] [B] du recours à l’entraide lui permettant de disposer des moyens matériels d’exploitation, qui n’est étayée par aucun élément probant, ne peut donc être retenue.

Les deux attestations (pièces 6 et 7) versées aux débats par l’appelant ne sont pas conformes aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile, à défaut de préciser qu’elles ont été établies en vue de leur production en justice ; elles ne sont de surcroît pas accompagnées d’une copie d’une pièce d’identité de leur auteur ; celle émanant de Mme [U] rédigée en termes confus ne fait ressortir aucun fait utile à la solution du litige ; M. [Y] déclare que M. [D] [B] exploite les parcelles [Cadastre 9] et [Cadastre 10] ; il indique l’avoir vu conduire le tracteur à la moisson et effectuer divers travaux durant la compagne sans préciser de quelle campagne agricole il s’agit.

Du fait de leur irrégularité et de leur confusions ou imprécisions, ces attestations sont impuissantes à rapporter la preuve que M. [D] [B] mette en valeur lui-même les parcelles qui lui sont louées.

M. [D] [B] ne fournit pas davantage de justificatif d’achat des semences relatives aux parcelles qu’il prétend mettre en valeur ; de même, il ne justifie pas de l’achat de carburant nécessaire au fonctionnement des tracteurs qu’il affirme pourtant utiliser dans le cadre de l’entraide.

Il résulte de ce qui précède qu’il n’apparaît pas que M. [D] [B] ait conservé la maîtrise de l’exploitation des parcelles qu’il prétend avoir conservées à titre de parcelles de subsistance dont notamment celle appartenant à M. [H] [S] qui fait l’objet du congé aux fins de reprise » ;

Et aux motifs éventuellement réputés adoptés du jugement entrepris que « Sur l’existence d’une parcelle de subsistance pour Monsieur [D] [B] :

Les dispositions de l’article L. 411-58 du Code rural et de la pêche maritime prévoient que le bailleur a le droit de refuser le renouvellement du bail s’il veut reprendre le bien loué pour lui-même ou au profit de son conjoint, du partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité ou d’un descendant majeur ou mineur émancipé.

Toutefois, le preneur peut s’opposer à la reprise lorsque lui-même ou, en cas de copreneurs, l’un d’entre eux se trouve soit à moins de cinq ans de l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles, soit à moins de cinq ans de l’âge lui permettant de bénéficier de la retraite à taux plein. Dans chacun de ces cas, le bail est prorogé de plein droit pour une durée égale à celle qui doit permettre au preneur ou à l’un des copreneurs d’atteindre l’âge correspondant. Un même bail ne peut être prorogé qu’une seule fois. Pendant cette période aucune cession du bail n’est possible. Le preneur doit, dans les quatre mois du congé qu’il a reçu, notifier au propriétaire, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, sa décision de s’opposer à la reprise ou saisir directement le tribunal paritaire en contestation de congé.

Si le bailleur entend reprendre le bien loué à la fin de la période de prorogation, il doit donner de nouveau congé dans les conditions prévues à l’article L. 411-47.

Si la reprise est subordonnée à une autorisation en application des dispositions du titre III du livre III relatives au contrôle des structures des exploitations agricoles, le tribunal paritaire peut, à la demande d’une des parties ou d’office, surseoir à statuer dans l’attente de l’obtention d’une autorisation définitive.

Toutefois, le sursis à statuer est de droit si l’autorisation a été suspendue dans le cadre d’une procédure de référé.

Lorsque le sursis à statuer a été ordonné, le bail en cours est prorogé de plein droit jusqu’à la fin de l’année culturale pendant laquelle l’autorisation devient définitive. Si celle-ci intervient dans les deux derniers mois de l’année culturale en cours, le bail est prorogé de plein droit jusqu’à la fin de l’année culturale suivante.

Lorsque les terres sont destinées à être exploitées dès leur reprise dans le cadre d’une société et si l’opération est soumise à autorisation, celle-ci doit être obtenue par la société.

Lorsque le bien loué a été aliéné moyennant le versement d’une rente viagère servie pour totalité ou pour l’essentiel sous forme de prestations de services personnels, le droit de reprise ne peut être exercé sur le bien dans les neuf premières années suivant la date d’acquisition.

Selon l’article L. 411-64 du code rural et de la pêche maritime :

“Le droit de reprise tel qu’il est prévu aux articles L. 411-58 à L. 411-63, L. 411-66 et L. 411-67 ne peut être exercé au profit d’une personne ayant atteint, à la date prévue pour la reprise, l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles, sauf s’il s’agit, pour le bénéficiaire du droit de reprise, de constituer une exploitation ayant une superficie au plus égale à la surface fixée en application de l’article L. 732-39. Si la superficie de l’exploitation ou des exploitations mises en valeur par le preneur est supérieure à cette limite, le bailleur peut, par dérogation aux articles L. 411-5 et L. 411-46 :

– soit refuser le renouvellement du bail au preneur ayant atteint l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles ;

– soit limiter le renouvellement à l’expiration de la période triennale au cours de laquelle le preneur atteindra cet âge

Le preneur peut demander au bailleur le report de plein droit de la date d’effet du congé à la fin de l’année culturale où il aura atteint l’âge lui permettant de bénéficier d’une retraite à taux plein.

Dans les cas mentionnés aux deuxième et troisième alinéas, le bailleur doit prévenir le preneur de son intention de refuser le renouvellement du bail ou d’y mettre fin par acte extrajudiciaire signifié au moins dix-huit mois à l’avance.

Les dispositions du présent article sont applicables que le propriétaire entende aliéner ou donner à bail à un preneur dont l’âge est inférieur à l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles ou exploiter en faire-valoir direct. Dans ce dernier cas, sauf s’il s’agit pour le bailleur de constituer une exploitation dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article, il ne doit pas avoir atteint l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles.

Le preneur évincé en raison de son âge peut céder son bail à son conjoint, ou au partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, participant à l’exploitation ou à l’un de ses descendants ayant atteint l’âge de la majorité ou ayant été émancipé, dans les conditions prévues à l’article L. 411-35. Le bénéficiaire de la cession a droit au renouvellement de son bail.

A peine de nullité, le congé donné en vertu du présent article doit reproduire les termes de l’alinéa précédent”.

Ainsi l’article L. 411-64 du code rural et de la pêche maritime vient préciser l’article L. 411-58 du même code en exposant notamment les conditions de la reprise au profit d’un bénéficiaire ayant atteint l’âge de la retraite.

Il énonce également les conditions de refus de renouvellement du bail par le bailleur au preneur ayant atteint l’âge de la retraite et que le droit de reprise du bailleur ne peut s’exercer que si le preneur exploite une surface supérieure à celle de l’exploitation de subsistance.

Avant de vérifier si la parcelle objet du litige constitue une parcelle de subsistance, il convient tout d’abord de vérifier qu’elle est exploitée par Monsieur [D] [B].

En l’espèce, il ressort des pièces produites aux débats que Monsieur [D] [B] a formé une demande de retraite personnelle auprès de la MSA à compter du 1er janvier 2016 en précisant avoir cessé son activité au régime des non salariés agricoles à partir du 31 décembre 2015.

La production d’une liste de parcelles datée du 2 novembre 2018 faisant apparaître la parcelle objet du litige à son nom, ne peut pas suffire à vérifier que Monsieur [D] [B] est toujours exploitant agricole, s’agissant d’un document édité d’un site internet, ne comportant aucune signature ou authentification. De plus, le relevé de compte établi par la coopérative agricole NORIAP au nom de Monsieur [D] [B] révèle simplement l’existence d’un solde créditeur antérieur au 31 octobre 2018, sans autre précision, et l’accusé de réception du dossier PAC pour l’année 2017 par la DDTM de la SOMME, fait état de l’absence de pièces justificatives et n’apporte aucun élément sur une éventuelle surface agricole exploitée par Monsieur [D] [B]. Enfin, Monsieur [D] [B] ne produit aucun bilan ou facture attestant de sa poursuite d’activité.

Il n’est donc pas rapporté la preuve que Monsieur [D] [B] continue de mettre en valeur la parcelle depuis qu’il a fait valoir ses droits à la retraite à partir du début de l’année 2016.

Par conséquent cette parcelle ne peut constituer une parcelle de subsistance et il convient de valider le congé de reprise avec effet au 30 septembre 2019 délivré par Monsieur [H] [S] » ;

1°) Alors que les dispositions de l’article 202 du Code de procédure civile relatives aux attestations ne sont pas prescrites à peine de nullité ; et qu’en refusant toute force probante aux attestations produites par M. [B] faute pour elles de respecter le formalisme de l’article 202 précité, la Cour d’appel a violé ce texte ;

2°) Alors que, en outre, dans son attestation du 22 août 2019 (production d’appel n° 6 de M. [B]), M. [A] [Y] écrivait : « que M. [B] [D] exploite les parcelles [Cadastre 9] et [Cadastre 10] territoire de [Localité 4]. Je le vois conduire le tracteur à la moisson et effectuant divers travaux durant la campagne » ; qu’il résulte sans la moindre ambiguïté de l’emploi du présent par M. [Y] qu’il a vu M. [B] exploiter la parcelle litigieuse, conduire le tracteur à la moisson et effectuer divers travaux jusqu’à la campagne de 2019 comprise ; qu’en retenant néanmoins que « M. [Y] déclare que M. [D] [B] exploite les parcelles [Cadastre 9] et [Cadastre 10] ; il indique l’avoir vu conduire le tracteur à la moisson et effectuer divers travaux durant la compagne sans préciser de quelle campagne agricole il s’agit », la Cour d’appel a dénaturé cette attestation, violant ainsi le principe en vertu duquel que les juges du fond ne doivent pas dénaturer les écrits produits aux débats ;

3°) Alors que, de plus, l’entraide est réalisée entre agriculteurs par des échanges de services en travail et en moyens d’exploitation, y compris ceux entrant dans le prolongement de l’acte de production ; qu’elle peut être occasionnelle, temporaire ou intervenir d’une manière régulière ; que l’entraide est un contrat à titre gratuit, même lorsque le bénéficiaire rembourse au prestataire tout ou partie des frais engagés par ce dernier ; que M. [S] lui-même jugeait parfaitement plausible l’aide apportée par M. [B] à ses fils, puisqu’il écrivait dans ses conclusions d’appel (p. 14, dernier al.) que « probablement Monsieur [D] [B] conduit encore un tracteur qui ne lui appartient plus pour aider ses enfants à la moisson » ; que cette observation, à elle seule, quoique injustement réductrice, laissait présumer que M. [B], dans la mesure où il apporte une aide à ses fils agriculteurs en activité, est en droit d’attendre un retour de la part de ceux-ci ; que, par suite et faute d’avoir recherché si le fait que M. [S] lui-même ait jugé probable l’aide apportée par M. [B] à ses enfants agriculteurs, ne permettait pas de présumer l’existence d’un contrat d’entraide entre le premier et les seconds, au bénéfice réciproque de l’un et des autres, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 325-1 du Code rural ;

4°) Alors que, encore, l’entraide est réalisée entre agriculteurs par des échanges de services en travail et en moyens d’exploitation, y compris ceux entrant dans le prolongement de l’acte de production ; qu’elle peut être occasionnelle, temporaire ou intervenir d’une manière régulière ; que l’entraide est un contrat à titre gratuit, même lorsque le bénéficiaire rembourse au prestataire tout ou partie des frais engagés par ce dernier ; que le fait que M. [S] lui-même ait jugé probable l’aide apportée par M. [B], agriculteur retraité n’exploitant que des parcelles de subsistance d’une superficie dérisoire, à ses enfants, agriculteurs en activité, laissait présumer que l’aide en services apportée par le premier aux seconds avait pour contrepartie des prestations en moyens d’exploitation – matériels et produits destinés à être utilisés dans l’exploitation agricole elle-même : semences, produits phytosanitaires, carburant, etc -, ainsi que des versements en nature – produits de l’exploitation de ses fils – ; d’où il suit qu’en retenant, pour dire « qu’il n’apparaît pas que M. [D] [B] ait conservé la maîtrise de l’exploitation des parcelles qu’il prétend avoir conservées à titre de parcelles de subsistance dont notamment celle appartenant à M. [H] [S] qui fait l’objet du congé aux fins de reprise », que « La contradiction manifeste entre les cultures déclarées par M. [D] [B] à la PAC et celles ayant servi à alimenter son compte de coopérateur ne permet pas de retenir qu’il a conservé la maîtrise de son exploitation », que « M. [D] [B] ne précise pas (…) les services qu’il (…) rend (aux agriculteurs avec lesquels il serait en relation d’entraide) ou les moyens matériels qu’il leur fournit en contrepartie » et que « M. [D] [B] ne fournit pas davantage de justificatif d’achat des semences relatives aux parcelles qu’il prétend mettre en valeur ; de même, il ne justifie pas de l’achat de carburant nécessaire au fonctionnement des tracteurs qu’il affirme pourtant utiliser dans le cadre de l’entraide », la Cour d’appel a statué par des motifs inopérants et, par suite, derechef privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 325-1 du Code rural ;

5°) Et alors que, enfin et en tout état de cause, M. [S], s’il écrivait dans ses conclusions d’appel qu’il « serait intéressant que Monsieur [D] [B] verse aux débats la liste des immobilisations de son exploitation ou les factures de prestation de service ou plus exactement de location de matériel puisque c’est lui qui selon les pièces versées aux débats effectuerait les travaux », ne faisait pas porter le débat sur l’origine des semences ou du carburant employés par lui pour son exploitation ; que, dès lors, la Cour d’appel, en reprochant à « M. [D] [B] (de ne pas fournir) de justificatif d’achat des semences relatives aux parcelles qu’il prétend mettre en valeur (et de ne pas justifier) de l’achat de carburant nécessaire au fonctionnement des tracteurs qu’il affirme pourtant utiliser dans le cadre de l’entraide », a soulevé d’office ce moyen ; et que, faute d’avoir mis au préalable les parties en mesure de débattre de ce moyen relevé d’office et, spécialement, d’avoir mis au préalable M. [B] en mesure d’expliquer que l’aide en services qu’il apporte à ses enfants, agriculteurs en activité quand lui-même, agriculteur retraité, exploite seulement des parcelles de subsistance d’une superficie dérisoire, a pour contrepartie des prestations en moyens d’exploitation et notamment des semences et du carburant, la Cour a violé l’article 16 du Code de procédure civile, ensemble le principe de la contradiction.

 


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