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28 juin 2022
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/18402
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Chambre commerciale internationale
PÔLE 5 – CHAMBRE 16
ARRET DU 28 JUIN 2022
(n° 68 /2022 , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/18402 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CC2CS
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Novembre 2020 -Tribunal de Commerce d’EVRY RG n° 2019F00203
APPELANTE
S.A.S.U. ISOSUD
immatriculée au RCS d’AVIGNON sous le numéro 794 432 542
ayant son siège social : [Adresse 1]
prise en la personne de son Président
Représentée par Me Stéphanie GARNIER de la SELARL CIRRAC, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0212 et assistée par Me Stéphanie KOLMER-IENNY de la SELARL MELKOR, avocat plaidant du barreau de REIMS, toque : 117
INTIMÉE
Société ITALPANNELLI DEUTSCHLAND GMBH
immatriculée au AMTSGERICHT WITTLICH sous le numéro HRB 43988
ayant son siège social : [Adresse 4] (ALLEMAGNE)
prise en la personne de son représentant légal
Représentée par Me Aurélie VOISIN, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : C2004 et ayant pour avocat plaidant : Me Jean Baptiste ROYER, avocat au barreau de MONTPELLIER
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. François ANCEL, Président
Mme Fabienne SCHALLER, Conseillère
Mme Laure ALDEBERT, Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme Laure ALDEBERT dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Najma EL FARISSI
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par François ANCEL, Président et par Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
I/ FAITS ET PROCÉDURE
1- La société Isosud est une société de droit français spécialisée dans l’optimisation énergétique notamment dans l’isolation, les énergies renouvelables et la rénovation.
2- La société Italpannelli Deutschland GMBH (ci-après désignée « la société Italpannelli ») est une société de droit allemand située en Allemagne exerçant une activité de commercialisation de panneaux isolants.
3- Le 9 mai 2017, la société Isosud a passé commande pour un chantier situé à [Localité 3] de panneaux isothermes à la société Italpannelli Deutschland pour un montant de 74.453,11 euros. Elle avait précédemment commandé des panneaux pour un chantier situé à [Localité 2].
4-Estimant que la société Italpannelli n’avait pas respecté le délai de livraison prévu pour les panneaux sur les chantiers, la société Isosud a facturé des indemnités de retard pour un montant de 18 300 euros HT soit 21 960 euros suivant facture du 22 novembre 2017 n° 17.11/003 augmentée de frais pour un montant de 3 024 euros TTC facture n° 17.11/002 dont le montant est resté impayé en dépit d’une mise en demeure du 28 février 2018 distribuée le 12 mars 2018.
5- C’est dans ce contexte que la société Isosud a, par exploit en date du 14 mars 2019, fait assigner la société Italpannelli en paiement de la somme de 24 984 euros TTC devant le tribunal de commerce d’Evry.
6- La société Italpannelli a contesté le caractère impératif du délai de livraison et opposé à la société Isoud un retard dans le paiement de ses factures dont elle a sollicité réparation.
7- Par jugement en date du 3 novembre 2020, le tribunal de commerce d’Evry a :
– débouté la société Isosud de toutes ses demandes
– débouté la société Italpannelli de toutes ses demandes de paiement de dommages et intérêts
– condamné la société Isosud à régler à la société Italpannelli 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société Isosud aux dépens, en ce compris les frais de greffe liquidés à la somme de 73.22 euros TTC.
8- Le 16 décembre 2020, la société Isosud a interjeté appel de ce jugement.
9- La clôture a été prononcée le 12 avril 2022.
10- A l’issue des plaidoiries les parties ont été invitées à donner leur avis par note en délibéré sur l’application au litige de la convention de Vienne du 11 avril 1980, instituant un droit uniforme de la vente internationale de marchandises dite CVIM.
11- Le 31 mai 2002, par note en délibéré, la société Isosud dans l’hypothèse où la Cour ferait application de cette Convention, a maintenu sa demande au visa des dispositions de ladite Convention commandant selon elle la même solution.
12- En réponse par une note en date du 3 juin 2022, la société Italpanneli a répondu que les parties ayant volontairement décidé de se placer sous le régime du droit français de la vente, il n’y a pas lieu d’appliquer la CVIM.
13- Elle a demandé à titre subsidiaire de juger nulle l’assignation qui n’a visé aucun moyen de droit et tous les actes subséquents sur le fondement de l’article 56 du code de procédure civile.
14- A titre extrêmement subsidiaire elle a ajouté que les demandes au regard de la Convention de Vienne demeuraient mal fondées.
15- La société Isosud par une note en date du 7 juin 2022 a rétorqué que la société Italpanneli était allée au-delà du périmètre de la note en délibéré et ne pouvait former de demande nouvelle ni ajouter de moyens ou d’arguments.
II/ PRÉTENTIONS DES PARTIES
16- Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 5 avril 2022, la société Isosud demande à la cour de bien vouloir :
– la Déclarer recevable et bien fondée en son appel.
L’y recevant,
– Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de toutes ses demandes et l’a condamnée à régler la somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux dépens.
Statuant à nouveau,
– Condamner la société ITALPANNELLI DEUTSCHLAND à lui payer la somme en principal de 21290 € TTC, en règlement des factures n°17.11/003 et n°17.11/002 du 22 novembre 2017 et déduction faite de l’avoir sur facture n°17.11/003 du 29 novembre 2019, majorée de 15 % au titre de la remise du dossier au contentieux, soit 3 193,50 € TTC, majorée de 1,5 % par mois à compter du lendemain de la date d’échéance des factures, outre 40 € au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement, le tout assorti des intérêts au taux contractuel de 18 % l’an avec capitalisation des intérêts et subsidiairement au taux légal avec capitalisation des intérêts.
– Débouter la société ITALPANNELLI DEUTSCHLAND de toutes ses demandes plus amples ou contraires.
– Condamner la société ITALPANNELLI DEUTSCHLAND à régler la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– Condamner la société ITALPANNELLI DEUTSCHLAND en tous les dépens de la procédure de première instance et d’appel, dont distraction est requise, pour ceux d’appel, au bénéfice de la SELARL CIRRAC, avocat aux offres de droit, sur le fondement de l’article 699 du Code de procédure civile.
17- Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 26 novembre 2021, la société Italpannelli demande à la cour, au visa des 1101, 1219 et suivants du code civil de bien vouloir :
– CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Commerce d’Evry en date du 3 novembre 2020 en ce qu’il a débuté la société ISOSUD de l’ensemble de ses fins, demandes et prétentions.
– LE REFORMER concernant ses demandes reconventionnelles reprises en cause d’appel par les présentes conclusions portant appel incident.
– CONSTATER que la société ISOSUD ne justifie nullement d’un délai impératif de livraison accepté par la société ITALPANNELLI DEUSTCHLAND.
– CONSTATER que la société ISOSUD s’est constitué elle-même des factures dont elle sollicite paiement, sans accord préalable tant sur le principe même desdites factures que sur les conditions, retards et majorations de ces dernières.
– CONSTATER que la société ISOSUD a connu de retards de paiement sur les marchés antérieurs, ayant entraîné pour la société ITALPANNELLI la possibilité de lui opposer tant les conditions générales de vente applicables en matière de retard que le principe de l’exception de l’inexécution.
Par conséquent,
– REJETER purement et simplement l’ensemble des demandes, fins et prétentions de la société ISOSUD comme étant totalement irrecevables, injustifiées et en tout état de cause infondées.
A titre reconventionnel,
– CONDAMNER par application des conditions générales de vente de la société ITALPANNELLI relativement au paiement tardif la société ISOSUD à lui payer la somme forfaitaire à titre de dommages et intérêts et de clause pénale de 7 445,31 € relativement au retard de paiement de la facture du 8 mai 2017 portant sur un montant total de 74 453,11 €.
– CONDAMNER la société ISOSUD à lui payer une somme de 4 000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive.
– CONDAMNER la société ISOSUD à lui payer une somme de 5 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– CONDAMNER la société ISOSUD à supporter les entiers frais et dépens de l’instance, dont ceux d’appel.
III/ MOYENS DES PARTIES
18- La société Isosud reproche à la société Italpannelli un retard de livraison des panneaux isothermes de deux semaines sur le chantier d'[Localité 3] et de trois jours sur celui d'[Localité 2] et réclame à ce titre la somme en principal de 21290 € en règlement de deux factures n°17.11/003 et n°17.11/002 du 22 novembre 2017 et déduction faite d’ un avoir sur facture n°17.11/003 du 29 novembre 2019, majorée de 15 % au titre de la remise du dossier au contentieux.
19- Elle prétend en substance que cette facture correspond au temps d’attente que son sous-traitant lui a facturé et de location de nacelles et de chariot prévus pour leur installation.
20- En réponse la société Italpannelli conteste avoir donné son accord ferme sur la date de livraison des panneaux sur le chantier d'[Localité 3] faute de preuve d’une acceptation expresse de sa part, au sens de l’article 1er de ses propres conditions générales et fait valoir qu’en tout état de cause le délai était trop bref.
21- Elle lui oppose en outre au visa du principe de l’exception d’inexécution et de ses conditions générales de vente un retard de paiement qui l’autorisait à retarder ses livraisons tant qu’elle n’était pas totalement payée ce qui a été le cas.
22-A ce titre elle forme une demande reconventionnelle en dommages et intérêts calculés selon ses conditions générales de vente sur le prix de la facturation des panneaux isothermes livrés sur le chantier d'[Localité 3].
IV/ MOTIFS DE LA DÉCISION
23- Selon l’article 445 du code de procédure civile, après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l’appui de leurs observations, si ce n’est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444.
24- Selon l’article 442 dudit code le président et les juges peuvent inviter les parties à fournir les explications de droit ou de fait qu’ils estiment nécessaires ou à préciser ce qui paraît obscur.
25- En l’occurrence la cour a demandé aux parties après la date des plaidoiries de donner leur avis sur l’application de la Convention de Vienne au litige.
26- Les éléments autres que ceux concernant la question de la loi applicable figurant dans les notes et notamment dans celle adressée par la société Italpannelli le 3 juin 2022 ne peuvent qu’être écartés des débats clôturés.
Sur le droit applicable
27 – Selon l’article 12 du code de procédure civile, « le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.
28- Toutefois, il ne peut changer la dénomination ou le fondement juridique lorsque les parties, en vertu d’un accord exprès et pour les droits dont elles ont la libre disposition, l’ont lié par les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat ».
29- En l’espèce aucune des parties n’a sollicité l’application de la règle de conflit de lois de droit commun.
30- Il ressort en revanche de la procédure que les parties ont entendu placer la résolution du différend sous le régime du droit français de telle sorte qu’il sera fait application de ce droit pour trancher ce litige.
31- A cet égard il convient de rappeler que la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11 avril 1980 (CVIM), qui institue un droit uniforme sur les ventes internationales de marchandises, et qui a vocation à s’appliquer s’agissant d’une vente internationale de marchandises entre deux parties contractantes établies en Allemagne et en France, constitue le droit substantiel français en matière de ventes internationales de marchandises et qu’à ce titre, elle s’impose au juge français, qui doit en faire application sous réserve de son exclusion selon l’article 6 permettant aux parties de l’éluder même tacitement.
32- La société Italpannelli s’est opposée à l’application de la CVIM en invoquant l’existence d’un accord tacite d’écarter la CVIM qu’elles se sont abstenues d’invoquer et leur intention de se placer volontairement sous le régime du droit interne français de la vente.
33-Toutefois il résulte de la procédure que la société Isosud demanderesse n’a pas visé de droit applicable et que seule la société Italpanelli a invoqué pour discuter la demande les dispositions des articles 1101 et suivants du code civil sur le Contrat de sorte qu’aucune volonté commune, même tacite, d’exclure la loi française telle qu’elle résulte de la Convention de Vienne ne peut en être déduite.
34- Le litige sera en conséquence jugé selon la CVIM pour les matières qu’elle régit.
35- La cour observe également qu’elle est saisie d’une action en responsabilité contractuelle fondée sur la défaillance dans l’exécution de contrats dont le préjudice, s’il y a lieu, sera évalué selon les règles prévues par la CVIM et non à partir des factures émises unilatéralement par la société Isosud à ce titre.
Sur le non-respect des délais de livraison
36- La Convention de Vienne énonce au chapitre II relatif aux Obligations du vendeur sous l’article 30 que « Le vendeur s’oblige, dans les conditions prévues au contrat et par la présente Convention, à livrer les marchandises, à en transférer la propriété et, s’il y a lieu, à remettre les documents s’y rapportant ».
37- Selon l’article 33 de ladite Convention qui fixe les conditions relatives aux délais de livraison :
« Le vendeur doit livrer les marchandises:
a) si une date est fixée par le contrat ou déterminable par référence au contrat, à cette date;
b) si une période de temps est fixée par le contrat ou déterminable par référence au contrat, à un moment quelconque au cours de cette période, à moins qu’il ne résulte des circonstances que c’est à l’acheteur de choisir une date;
ou c) dans tous les autres cas, dans un délai raisonnable à partir de la conclusion du contrat. ».
38- Sont en outre prévues les dispositions qui suivent :
Article 45 :
1) Si le vendeur n’a ”s exécuté l’une quelconque des obligations résultant pour lui du contrat de vente ou de la présente Convention, l’acheteur est fondé à:
a) exercer les droits prévus aux articles 46 à 52;
b) demander les dommages-intérêts prévus aux articles 74 à 77.
Article 47 :
1) L’acheteur peut impartir au vendeur un délai supplémentaire de durée raisonnable pour l’exécution de ses obligations.
2) À moins qu’il n’ait reçu du vendeur une notification l’informant que celui-ci n’exécuterait pas ses obligations dans le délai ainsi imparti, l’acheteur ne peut, avant l’expiration de ce délai, se prévaloir d’aucun des moyens dont il dispose en ”s de contravention au contrat. Toutefois, l’acheteur ne perd pas, de ce fait, le droit de demander des dommages-intérêts pour retard dans l’exécution.
Article 61 :
1) Si l’acheteur n’a pas exécuté l’une quelconque des obligations résultant pour lui du contrat de vente ou de la présente Convention, le vendeur est fondé à:
a) Exercer les droits prévus aux articles 62 à 65;
b) Demander les dommages-intérêts prévus aux articles 74 à 77.
2) Le vendeur ne perd pas le droit de demander des dommages- intérêts lorsqu’il exerce son droit de recourir à un autre moyen.
3) Aucun délai de grâce ne peut être accordé à l’acheteur par un juge ou par un arbitre lorsque le vendeur se prévaut d’un des moyens dont il dispose en cas de contravention au contrat.
Section II. Dommages-intérêts
Article 74 :
Les dommages-intérêts pour une contravention au contrat commise par une partie sont égaux à la perte subie et au gain manqué par l’autre partie par suite de la contravention. Ces dommages-intérêts ne peuvent être supérieurs à la perte subie et au gain manqué que la partie en défaut avait prévus ou aurait dû prévoir au moment de la conclusion du contrat, en considérant les faits dont elle avait connaissance ou aurait dû avoir connaissance, comme étant des conséquences possibles de la contravention au contrat.
Section III. Intérêts
Article 78 :
Si une partie ne paie pas le prix ou toute autre somme due, l’autre partie a droit à des intérêts sur cette somme, sans préjudice des dommages-intérêts qu’elle serait fondée à demander en vertu de l’article 74.
Section IV. Exonération
Article 79 :
1) Une partie n’est pas responsable de l’inexécution de l’une quelconque de ses obligations si elle prouve que cette inexécution est due à un empêchement indépendant de sa volonté et que l’on ne pouvait raisonnablement attendre d’elle qu’elle le prenne en considération au moment de la conclusion du contrat, qu’elle le prévienne ou le surmonte ou qu’elle en prévienne ou surmonte les conséquences.
Article 80
« Une partie ne peut pas se prévaloir d’une inexécution par l’autre partie dans la mesure où cette inexécution est due à un acte ou à une omission de sa part. »
39- En l’espèce concernant le chantier d'[Localité 3] la société Isosud justifie, en application de l’article 33 de la CVIM, par les pièces produites, que la société Italpannelli avait accepté la date de livraison fixée au 22 mai 2017, expressément mentionnée dans le bon de commande ainsi que dans leurs échanges de mail du 16 mai 2017.
40- La société Italpannelli conteste son accord en se prévalant de l’absence d’une acceptation expresse telle que prévue par ses propres conditions générales de vente qui prévoient sous l’article 1er dénommé « Conditions de livraison » que « l’acheteur ne saurait se prévaloir de retard de livraison, sauf si les délais de livraison ont été confirmés sans aucune réserve écrite par le vendeur dans un document spécial ».
41- Elle ajoute qu’en raison des retards de paiement de l’appelante, elle a pu en outre légitimement suspendre la livraison en application de l’article 5 de ses conditions générales précitées, intitulé « FACTURATION-PAIEMENT-PAIEMENT TARDIF » prévoyant que « le vendeur peut, à sa libre discrétion, suspendre toutes les livraisons ultérieures jusqu’à ce que le paiement intégral ait été reçu et que, le cas échéant, des garanties suffisantes soient produites. ».
42- Toutefois la société Italpannelli ne peut à l’appui d’un seul exemplaire non daté et sans rapport avec la commande ni avec leurs relations commerciales passées opposer à l’appelante ses conditions générales de vente dont elle n’établit pas qu’elles ont été portées à sa connaissance.
43- L’exception d’inexécution au motif d’un retard de paiement sur un chantier précédent à [Localité 2] sur lequel aucun élément probant n’est produit ne peut justifier le retard de la livraison concernant en outre la paiement d’une autre commande.
44- Il ressort en effet des pièces produites et notamment de sa réponse à la mise en demeure du 19 mars 2018 que la société Italpannelli explique en réalité son retard par des difficultés de fabrication rencontrées suite à un sinistre survenu dans l’usine du fabricant, sans faire état au demeurant d’une cause exonératoire.
45-Il ressort de ces énonciations et constatations que la preuve d’une date de livraison est suffisamment établie au 22 mai 2017 sur le chantier d'[Localité 3]. La livraison est intervenue les 9 et 10 juin 2017, soit avec un retard de 2 semaines. En conséquence, la société Isosud est bien fondée à demander réparation du préjudice subi en relation avec ce manquement en application des articles 45 et 74 de la CVIM qu’il appartient à la cour d’évaluer.
46- La société Isosud justifie avoir tenu compte de la date de livraison pour la planification du chantier et supporté des frais de personnel et de location de matériels.
47- Elle produit les factures de mise à disposition du personnel de la société Maitriso et de locations de matériels proratisés sur le temps d’attente à hauteur de la somme de 15 222 euros.
48- Il convient de faire droit à sa demande à hauteur de cette somme qui correspond à son juste préjudice.
49- Il convient en conséquence d’infirmer la décision des premiers juges sur ce chef et de condamner la société Italpannelli à régler à la société Isosud la somme de 15222 euros en réparation de son préjudice.
50- Concernant le chantier d'[Localité 2], il ressort des pièces produites et non contestées que sur ce chantier la société Isosud a subi un retard de livraison de 3 jours.
51- La société Italpannelli ne peut davantage se prévaloir pour les motifs rappelés plus haut d’un retard de paiement de la société Isosud dont les circonstances ne sont pas établies pour justifier de son retard de livraison.
52- Il convient pour les mêmes motifs de faire droit à la demande en réparation à hauteur du préjudice subi dont le montant est justifié par les factures de location de matériel pour 3 jours soit la somme de 540 euros. Le surplus demandé pour le personnel n’étant pas justifié, sera rejeté.
53- La décision sera en conséquence infirmée de ce chef et la société Italpannelli sera condamnée à payer à la société Isosud à payer la somme de 540 euros et celle de 15 222 euros soit un total de 15762 euros sans qu’il y ait lieu à l’assortir des intérêts contractuels qui ne sont pas justifiés.
54- La société Italpannelli qui échoue et succombe dans l’établissement de la preuve des retards de paiements sera déboutée de sa demande reconventionnelle et de sa demande pour procédure abusive.
Sur les frais et dépens
55- Il y a lieu de condamner la société Italpannelli, partie perdante, aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
56- En outre, elle doit être condamnée à verser à la société Isosud qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 5.000 euros.
V/ DISPOSITIF
Par ces motifs, la Cour:
1- Ecarte tous les éléments autres que ceux concernant la question de la loi applicable figurant dans les notes en délibéré après la clôture des débats,
2- Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau
3- Condamne la société ITALPANNELLI DEUTSCHLAND GMBH à payer à la société ISOSUD la somme de 15 762 euros au titre du préjudice subi ;
4- Déboute la société ISOSUD du surplus de ses demandes ;
5- Déboute la société ITALPANNELLI DEUTSCHLAND GMBH de ses demandes reconventionnelles ;
6- Condamne la société ITALPANNELLI DEUTSCHLAND GMBH à payer à la société ISOSUD la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
7- Condamne la société ITALPANNELLI DEUTSCHLAND GMBH aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont ceux d’appel pourront être recouvrés par la Selarl CIRRAC conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La greffière Le président
Najma EL FARISSI François ANCEL