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13 février 2018
Cour d’appel de Versailles
RG n°
15/02224
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53F
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 13 FEVRIER 2018
N° RG 15/02224
AFFAIRE :
SA CABINET [L]
C/
SA BNP PARIBAS LEASE GROUP
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Mars 2015 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre : 02
N° Section :
N° RG : 2006F04483
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 13.02.18
à :
Me Bertrand ROL
Me Christophe DEBRAY,
Me Olivier AMANN,
Me Katell FERCHAUX-
LALLEMENT
Me Margaret BENITAH,
Me Martine DUPUIS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TREIZE FEVRIER DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
SA CABINET [L], représentée par son Président, domicilié en cette qualité audit siège – N° SIRET : 314 812 835
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Représenté(e) par Me Bertrand ROL de l’AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat Postulant, au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20161236 et par Me V. FRENKIAN-SAMPIC, avocat plaidant au barreau de PARIS
APPELANTE
****************
SA BNP PARIBAS LEASE GROUP, immatriculée au RCS DE NANTERRE N° 632 017 513, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 4]
Représenté(e) par Me Christophe DEBRAY, avocat Postulant, au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 15177 et par la SELARL ROULOT & associés, avocat plaidant au barreau de PARIS
SAS SOCIETE D’EXPERTISE COMPTABLE DE RAMBOUILLET ET DE L’HUREPOIX, anciennement dénommée Cabinet [X],
N° SIRET : 332 470 319 au RCS de VERSAILLES,
[Adresse 5]
[Adresse 6]
Représenté(e) par Me Olivier AMANN, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 116 – N° du dossier 864 et par la SELARL DE MONJOUR, avocat plaidant au barreau de PARIS
SAS GLOBALEASE, prise en la personne de ses représentants légaux – N° SIRET : 438 71 0 7 17
[Adresse 7]
[Adresse 8]
Représenté(e) par Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS, avocat Postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629 – N° du dossier 20150181 et par Me S. GOGUEL-NYEGAARD, avocat plaidant au barreau de PARIS
SA LE CREDIT LYONNAIS et le siège central [Adresse 9]
N° SIRET : 954 509 741 au RCS de LYON,
[Adresse 10]
[Adresse 11]
Représenté(e) par Me Margaret BENITAH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.409
Société AM PARIS agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 387 74 9 9 14 au RCS de NANTERRE
[Adresse 12]
[Adresse 13]
Représenté(e) par Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat Postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 1554450 et par Me J. VAROCLIER, avocat plaidant au barreau de PARIS
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 19 Décembre 2017 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Sophie VALAY-BRIERE, présidente chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,
Monsieur François LEPLAT, Conseiller,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,
FAITS ET PROCEDURE,
La société cabinet [L] (le cabinet [L]) a souscrit cinq contrats de location financière portant sur du matériel acquis auprès de la société ST Concept, par l’intermédiaire de la société AM Paris dont elle était l’agent commercial et financé par la société Globalease, laquelle a cédé les contrats à la BNP Paribas Lease Groupe (la BNP LG). Ces contrats portaient sur l’acquisition d’imprimantes et de photocopieurs. La société ST Concept, désormais en liquidation, était dirigée par M. [D] [D].
Alertée par son nouvel expert comptable qui avait constaté l’absence de certains contrats et factures d’achat et de location de matériel, le cabinet [L], estimant avoir été victime d’agissements délictueux a déposé une plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance de Versailles et cessé de payer les loyers.
Après l’avoir mis en demeure de régulariser les loyers impayés, la BNP LG a procédé le 21 juin 2006 à la résiliation des contrats puis l’a assigné le 19 septembre 2006 pour obtenir le paiement de ses créances, soit 298 589,94 € en principal, et la restitution des matériels.
Par actes des 23 novembre 2006, 31 juillet 2007 et 1er août 2007 le cabinet [L] a appelé en intervention forcée la société AM Paris, M. [D], le cabinet [X], et le Crédit lyonnais. Le 10 avril 2008, la BNP Paribas a assigné la société Globalease en intervention forcée.
Par jugement du 12 mars 2015 le tribunal de commerce de Versailles a notamment :
– dit n’y avoir lieu à surseoir à statuer dans l’attente de la décision du tribunal correctionnel de Versailles sur la plainte déposée par le cabinet [L] à l’encontre du Crédit lyonnais le 8 novembre 2006,
– condamné le cabinet [L] à payer à la BNP LG Ia somme de 44 112,48 euros TTC outre intérêts conventionnels au taux légal majoré de 5 points à compter du 6 juillet 2006,
– condamné le cabinet [L] à payer à la BNP LG la somme de 130 000 euros,
– débouté la BNP LG de sa demande de restitution des matériels,
– débouté le cabinet [L] de ses demandes à l’encontre du Crédit lyonnais, de la BNP LG, de la société Globalease, de la société AM Paris, visant à lui rembourser les sommes prélevées sur son compte bancaire, soit la somme de 179 102,51 euros outre intérêts,
– débouté le cabinet [L] de ses demandes à l’encontre de la société AM Paris, du Crédit lyonnais, du cabinet [X] visant à lui rembourser le montant de chèques détournés, soit la somme de 189 699 euros outre intérêts,
– condamné le cabinet [L] à payer au Crédit lyonnais la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– condamné le cabinet [L] à payer à la société AM Paris la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– condamné le cabinet [L] à payer à chacune des sociétés BNP LG, AM Paris, Crédit lyonnais, le cabinet [X], Globalease la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire sauf en ce qui concerne la condamnation au paiement de la somme de 44 112,48 euros TTC outre intérêts conventionnels au taux légal majoré de 5 points à compter du 6 juillet 2006,
– condamné le cabinet [L] aux dépens.
Le cabinet [L] a interjeté appel de cette décision le 24 mars 2015.
Saisi par le cabinet [L], le conseiller de la mise en état a selon ordonnance rendue le 18 novembre 2015 rejeté la demande d’expertise, rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la société Globalease et condamné le cabinet [L] à payer à chacun des quatre intimés la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 7 novembre 2017, le cabinet [L] demande à la cour, au visa des articles 1719, 1116, 1117, 1131 et 1184 anciens du code civil, de :
1- Sur les contrats de location
‘ infirmer le jugement entrepris, et statuant à nouveau,
‘ prononcer la nullité des contrats de location L 0400146, L0400153, L 0400162, L0400174, L0400195 et subsidiairement leur résolution,
en conséquence,
‘ débouter in solidum la société BNP LG, la société Globalease, la société AM Paris, la société LCL, la société SCERH de l’intégralité de leurs demandes dirigées à son encontre,
‘ condamner in solidum la société BNP LG, la société Globalease, la société AM Paris, la société LCL, la société SCERH à lui payer les sommes suivantes :
* 179’102,51 € au titre du remboursement des loyers indus
* 111’213,66 € au titre des intérêts sur la somme de 179 102,51 € au taux légal majoré de cinq points arrêtés au 31 décembre 2014 et à parfaire jusqu’à l’arrêt à intervenir
*56’800 € au titre des frais et honoraires de gestion engagés pour la défense de ce dossier
* 30’000 € au titre du préjudice moral subi
le tout assorti des intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2007, date des conclusions en réponse numéro un et avec capitalisation ;
‘ condamner la société BNP LG à lui rembourser la somme de 44’112,48 € avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2015 date du jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre et capitalisation,
subsidiairement sur le fondement de l’article 1384 alinéa 5 du code civil,
‘ condamner la société AM Paris à la relever et à la garantir de l’intégralité des demandes de la société BNP LG,
‘ condamner la société AM Paris à lui payer :
* 179’102,51 € au titre du remboursement des loyers indus
* 111’213,66 € au titre des intérêts sur la somme de 179 102,51 € au taux légal majoré de cinq points arrêtés au 31 décembre 2014 et à parfaire jusqu’à l’arrêt à intervenir
*56’800 € au titre des frais et honoraires de gestion engagés pour la défense de ce dossier
* 30’000 € au titre du préjudice moral subi
le tout assorti des intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2007, date des conclusions en réponse numéro un et avec capitalisation ;
2- Sur le détournement des chèques
‘ condamner la société AM Paris à lui payer le montant des chèques détournés par Monsieur [D] soit la somme de 189’699 € outre le montant des intérêts sur ces sommes au taux légal majoré de cinq points, soit 129’752 € suivant décompte arrêté au 31 décembre 2014 et à parfaire jusqu’à la date de l’arrêt à intervenir,
le tout assorti des intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2007, date de ses conclusions en réponse numéro un et avec capitalisation,
en tout état de cause, et à titre subsidiaire,
‘ condamner la société SECRH cabinet [X] expert-comptable au titre de la perte de chance pour le cabinet [L] d’avoir interrompu les prélèvements indus opérés sur ses comptes et dénoncé les contrats litigieux, à supporter les conséquences financières qui pourraient être liées à la tardiveté de la découverte des prélèvements,
‘ condamner in solidum les sociétés BNP LG, Globalease, AM Paris, LCL, SCERH cabinet [X] à lui payer une somme de 30’000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile de première instance et d’appel outre les entiers dépens.
Il conclut à la recevabilité de ses prétentions en l’absence de demandes nouvelles et fait valoir que les cinq contrats de location sont nuls d’une part pour vice du consentement dès lors que Monsieur [D], représentant de la société AM Paris et mandataire de la société Globalease, a lui-même reconnu avoir usé de man’uvres frauduleuses pour obtenir la signature de ces contrats par Madame [R] en surprenant son consentement et d’autre part pour défaut de cause en ce qu’aucun des matériels objets des contrats de location revendiqués ne lui a été effectivement livré. Il soutient qu’il a immédiatement réagi et entrepris diverses démarches dès qu’il a eu connaissance de l’escroquerie dont il était victime et que les prélèvements automatiques auquel sa propre banque le Crédit Lyonnais a procédé sans lui avoir demandé son avis et obtenir son autorisation ne valent pas reconnaissance de la réception des matériels objets des contrats de location litigieux.
Il précise que les effets de la nullité emportant l’anéantissement rétroactif de l’acte la société BNP et toutes les autres parties doivent être déboutées de l’intégralité de leurs demandes et qu’au contraire il y a lieu de condamner la société BNP LG à lui rembourser la somme indûment prélevée sur ses comptes correspondant aux contrats litigieux et ce avec intérêts outre une indemnisation pour les préjudices subis.
À titre subsidiaire il sollicite la résolution des contrats en raison des manquements de la société Globalease qui a agi avec légèreté en réglant à la société ST concept, dont la situation financière était manifestement fébrile, une somme de plus de 134’839 € en six mois sans s’inquiéter des anomalies figurant dans les dossiers.
Il ajoute que la responsabilité de la banque LCL est également engagée en ce qu’elle a procédé sans la moindre réserve et sans opérer la moindre vérification à des règlements sans justifier détenir les autorisations de prélèvement émanant du cabinet [L] et qu’elle ne lui a pas communiqué l’identité des endos des chèques émis par sa cliente lui occasionnant une perte de chance de s’organiser pour tenter la mise en place d’une sûreté afin de préserver ses droits.
Il considère également que la responsabilité de la société AM Paris est engagée du fait des agissements fautifs commis par Monsieur [D] à son préjudice en ce qu’elle l’a introduit dans leurs relations sans surveillance justifiant tout à la fois la condamnation à la relever et à la garantir de l’ensemble des condamnations qui pourraient être allouées à la société BNP mais également au titre des chèques émis et encaissés par Monsieur [D] pour un montant de 189’699 € outre intérêts.
Il précise enfin que l’appel en garantie formé contre la société SECRH-cabinet [X] est fondé en ce que celle-ci a manqué à son obligation de conseil en ce qu’elle aurait dû attirer son attention sur la dérive extrêmement forte des prélèvements relatifs au matériel de reprographie qui n’aurait pas dû lui échapper.
Par conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 31 octobre 2017, la société BNP LG demande à la cour de :
A titre liminaire, vu les articles 564 et 908 du code de procédure civile,
– déclarer irrecevables les demandes nouvelles formulées par le cabinet [L] dans ses conclusions en date du 31 mars 2017 et ultérieures, sollicitant : l’annulation des contrats de location financière pour dol, la résolution des contrats de location financière, la condamnation de la société BNP LG au paiement d’intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2007 avec capitalisation, le tout sur la somme de 377 116,17 €,
Pour le surplus, à titre principal,
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté le cabinet [L] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions tant principales, que subsidiaires et très subsidiaires à son encontre,
– plus généralement, débouter toutes parties de prétentions contraires,
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné le cabinet [L] à paiement à son profit,
– infirmer le jugement entrepris sur le quantum des condamnations prononcées à l’encontre du cabinet [L] à son profit,
– condamner le cabinet [L] à lui payer la somme globale de 298 589,94 € outre intérêts conventionnels à compter du 6 juillet 2006 (taux légal majoré de 5 points, cf. article 3 des conditions générales des contrats de location financière) et ce, jusqu’à complet paiement,
Vu l’article 12 des contrats de location financière,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de restitution des matériels objets des cinq contrats de location financière,
En conséquence, condamner le cabinet [L] à procéder à la restitution des matériels objets des cinq contrats de location financière décrits ci-dessus,
A titre subsidiaire, vu notamment les articles 1147 et 1382 et suivants du code civil en vigueur à l’époque des faits, pour le cas où, par extraordinaire, la cour de céans devrait exonérer, même partiellement, le cabinet [L] du paiement des loyers qui lui étaient et lui sont incontestablement dus,
– dire et juger que le cabinet [L] doit répondre, en raison de sa faute ou à tout le moins de sa négligence, du préjudice subi,
En conséquence,
– condamner le cabinet [L] à lui payer la somme de 298 589,94 € outre intérêts conventionnels à compter du 6 juillet 2006 jusqu’à complet paiement et ce, à titre de dommages et intérêts,
Pour le cas où, par plus qu’extraordinaire, la cour devrait au surplus ordonner la restitution au cabinet [L] de loyers d’ores et déjà payés à la société BNP LG, soit la somme de 179.102,51 €,
– condamner le cabinet [L] à lui payer à titre de dommages et intérêts, une somme de 179.102,51 € équivalente au montant desdits loyers et ordonner la compensation entre les deux sommes,
– débouter toutes parties de prétentions contraires,
A titre infiniment subsidiaire, pour le cas où, par très extraordinaire, la cour prononcerait la résiliation ou la résolution, voire la nullité des contrats de location des matériels,
– dire que les sommes à compenser seront, le cas échéant, augmentées des accessoires alloués au cabinet [L],
– dire et juger sans objet ni cause les contrats de cession et de vente des matériels intervenus entre les sociétés Globalease et BNP LG et ordonner dès lors la nullité subséquente des contrats de cession et de vente intervenus entre les sociétés Globalease et BNP LG,
– condamner la société Globalease à lui payer la somme de 440.684,38 € en principal, outre intérêts au taux légal à compter de la date des règlements effectués par la société BNP LG et ce, jusqu’à complet paiement,
– pour le surplus, condamner la société Globalease à la relever et garantir de toutes condamnations qui seraient par très extraordinaire prononcées à son encontre en ce qu’elles porteraient sur des sommes venant en dépassement de la somme de 440 684,38 € précitée,
En tout état de cause,
– dire qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles qu’elle a été contrainte d’engager afin de faire valoir ses droits en justice,
En conséquence,
– condamner tous succombants au paiement de la somme de 20 000 €, outre tous dépens de première instance et d’appel, avec faculté de recouvrement au profit de Maître Christophe Debray, Avocat au barreau de Versailles, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Elle fait valoir à titre liminaire que les nouvelles demandes formulées par le cabinet [L] dans ses conclusions récapitulatives en date du 31 mars 2017 relatives à la nullité des contrats de location financière pour dol, la résolution des contrats de location financière et l’application des intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2007 avec capitalisation sur la somme de 377’116,17 € sont irrecevables sur le fondement combiné des articles 908,954 et 564 du code de procédure civile pour être nouvelles et ne pas avoir été soulevées dans le cadre des conclusions régularisées le 19 mai 2015.
Elle conteste avoir fait preuve de légèreté et prétend que les documents contractuels engagent le cabinet [L] en ce que les contrats et les procès-verbaux de livraison sont bien revêtus d’une signature originale apposée par Madame [R] cofondatrice du cabinet [L], responsable administrative et associée à l’époque des faits et désormais présidente du conseil de surveillance, apposée sous l’indication Monsieur [L] [I] PDG et du cachet du cabinet [L] et qu’elle ne pouvait pas douter vu le nombre de contrats souscrits et leur exécution durant 22 mois que le signataire ne disposait prétendument pas des pouvoirs pour les signer. Elle précise que même si les contrats ne sont pas signés par Monsieur [L] lui-même le cabinet [L] serait également engagé sur le fondement du mandat tacite ou apparent. Elle considère que le cabinet [L] ne peut se prévaloir ni d’une erreur au sens de l’article 1110 du code civil alors qu’elle disposait de toutes les informations relatives au contrat souscrit et des moyens de vérifier l’existence des matériels objets desdits contrats ni d’un dol à l’encontre du vendeur de matériel puisque celui-ci n’entraîne pas l’annulation du contrat de financement, étant précisé au demeurant que Monsieur [D] n’a pas reconnu avoir usé de man’uvres frauduleuses pour obtenir la signature des contrats de location financière par Madame [R], ni enfin d’une absence de cause alors que la livraison, l’installation et le bon fonctionnements des matériels lui ont été confirmés par la signature et le cachet apposés sur les procès-verbaux de livraison. Elle conclut également au rejet de la demande de résolution des contrats de location financière dès lors qu’elle a respecté ses obligations contractuelles de nature exclusivement financière. Elle ajoute que les contestations relatives à la réception et à la valeur des matériels sont inopérantes et qu’elle ne peut être condamnée à rembourser les sommes prélevées automatiquement sur le compte courant du cabinet [L] ouvert dans ses livres qui lui étaient bien dues au titre des loyers. Elle précise enfin que le préjudice dont se prévaut le cabinet [L] ne peut résulter que de sa propre négligence.
A titre reconventionnel elle sollicite le paiement des loyers échus impayés, des loyers à échoir à la date de résiliation des contrats et de l’indemnité forfaitaire de 10%, l’indemnité de résiliation n’étant pas manifestement excessive, et subsidiairement des mêmes sommes à titre de dommages et intérêts.
Dans l’hypothèse où la cour prononcerait la résiliation ou la résolution voire la nullité des contrats de location des matériels elle solliciterait en conséquence la nullité des contrats de cession et de vente intervenus entre elle-même et la société Globalease et demanderait la condamnation de cette dernière à lui restituer les sommes qu’elle lui a versées à savoir la somme globale de 440’684,38 € et à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre et qui porterait sur un montant supérieur à la somme dont la restitution est sollicitée.
Par conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 21 avril 2017, le Crédit Lyonnais sollicite de la cour qu’elle :
– confirme la décision entreprise en ce qu’elle a débouté le cabinet [L] de ses demandes à son encontre,
– confirme la décision entreprise en ce qu’elle a jugé abusive la procédure du cabinet [L] à son encontre,
subsidiairement, sur le quantum des dommages et intérêts alloués,
– condamne le cabinet [L] à lui payer la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre celle de 30 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamne le cabinet [L] en tous les dépens, dont distraction au profit de Maître Margaret Benitah, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Il soutient que le fondement juridique de la demande formée à son encontre n’est pas précisé et que la preuve d’une violation de ses obligations n’est pas rapportée par le cabinet [L] pas plus que celle d’un préjudice et d’un lien de causalité entre ces deux derniers.
Il rappelle qu’il n’a fait qu’exécuter les ordres de prélèvement signés par une personne habilitée à engager le cabinet [L], qu’il n’avait aucune raison ni même aucun droit de s’immiscer dans les affaires de sa cliente et de s’interroger sur l’opportunité pour celle-ci de contracter les locations financières litigieuses et que le cabinet [L] était le seul à même de connaître le matériel situé dans ses locaux. Il prétend qu’à le supposer établi le préjudice subi par le cabinet [L] ne pourrait résulter que de sa propre négligence. S’agissant des chèques qui auraient été prétendument détournés le cabinet [L] n’invoque aucun argument de nature à justifier qu’elle n’ait pas pu déceler ces détournements alors que le premier chèque a été émis le 30 septembre 2003 et le dernier le 30 novembre 2005. Il considère enfin que le cabinet [L] ne peut lui réclamer le remboursement de sommes qu’il n’a jamais perçues et témoigne à son encontre d’un acharnement procédural qui justifie d’augmenter la condamnation en paiement de dommages et intérêts.
Dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 18 octobre 2017 la société Globalease demande à titre principal la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, le rejet des demandes formées par le cabinet [L] et la BNP à son encontre, à titre subsidiaire si la cour réformait le jugement entrepris et prononçait la nullité des contrats de location, de constater la faute délictuelle du cabinet [L] et de le condamner à lui payer à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice une somme de 440’684,38 € augmentée de toutes sommes supplémentaires qu’elle serait condamnée à payer à la société BNP, en tout état de cause la condamnation du cabinet [L] à lui verser la somme de 20’000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL LM avocats en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient que le cabinet [L] est incapable de démontrer que les contrats de location conclus avec la société Globalease auraient porté en tout ou partie sur du matériel fictif et/ou qui ne lui aurait jamais été livré et rappelle qu’il est désormais établi que c’est bien lui, par l’intermédiaire de Madame [R], qui a signé l’ensemble des contrats de location financière ainsi que l’intégralité des procès-verbaux de livraison du matériel ce qui fait obstacle à ses demandes de nullité et/ou résolution des contrats qu’elles reposent sur de prétendus ‘dols’ ou ‘défaut de cause’ pour absence de délivrance. Elle ajoute d’une part qu’au regard de l’incroyable négligence commise par le cabinet [L] ses prétentions sont vouées à l’échec même si un défaut de livraison du matériel était démontré et d’autre part que même si la cour prononçait la nullité des contrats de location le cabinet [L] qui a attesté avoir bien reçu le matériel loué serait de toute façon tenu de la garantir de toutes les conséquences qu’elle aurait à en subir. Elle considère que c’est au locataire qui a signé les procès-verbaux de livraison qu’il appartient d’apporter la preuve pour chaque contrat concerné, matériel par matériel, de l’absence de délivrance effective ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Elle précise qu’elle n’avait aucune raison de vérifier la solvabilité du fournisseur, le consentement du cabinet Cerruti et l’exactitude des numéros de série figurant sur les procès-verbaux de livraison remplis par le locataire lui-même.
Elle fait valoir par ailleurs que le cabinet Cerruti ne peut lui reprocher un quelconque défaut de délivrance alors que conformément aux conditions générales du contrat de location financière elle est subrogée dans les droits de son bailleur pour agir contre le fournisseur et n’aurait donc pu engager une action que contre ce dernier et qu’elle ne peut se prévaloir de son erreur ou de sa négligence à l’encontre du crédit bailleur qui a exécuté son obligation.
À titre infiniment subsidiaire elle demande à la cour de considérer qu’en cas d’annulation des contrats la responsabilité délictuelle du locataire serait engagée au regard de l’incurie si grossière qu’elle s’assimile à une faute intentionnelle commise par celui-ci.
Dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 10 juillet 2015, la société AM Paris conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il a débouté le cabinet [L] des demandes formées à son encontre et à la condamnation de ce dernier à lui payer la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre celle de 30 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Lexavoue Paris-Versailles, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Elle constate s’agissant des demandes au titre des prélèvements automatiques que le cabinet Cerruti ne formule aucun grief à son encontre se contentant de critiquer le manque de vigilance des organismes financiers ce qui suffit à exclure sa responsabilité dans le préjudice revendiqué. Elle précise en effet que la simple mise en relation avec Monsieur [D] ne peut constituer une faute alors au demeurant qu’elle n’est pas partie aux contrats litigieux et n’a perçu aucune somme à ce titre. S’agissant des chèques détournés elle conteste être responsable des indélicatesses de la société ST concept en liquidation judiciaire depuis le 30 mars 2005 qui n’était que son agent commercial et non pas son préposé et invoque la légèreté dont Madame [R] s’est rendue coupable en remettant des chèques à Monsieur [D] en blanc ou à l’ordre de la société ST concept ou encore à son nom personnel. Elle critique également les différents postes de préjudice allégués et considère que l’acharnement procédural dont le cabinet Cerruti a fait preuve à son endroit justifie une augmentation du montant des dommages et intérêts accordés en première instance.
Par conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 18 juillet 2015 la société d’expertise comptable de Rambouillet et du Hurepoux ( SECRH), anciennement dénommée cabinet [X], a sollicité la confirmation du jugement en ce qu’il a débouté le cabinet Cerruti de toutes ses demandes à son encontre et y ajoutant la condamnation de toute partie succombante à lui payer la somme de 5 000 € en application l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Elle expose que par lettre de mission en date du 4 juin 1998 le cabinet Cerruti a confié à Monsieur [X], aux droits duquel elle vient aujourd’hui, une mission de présentation de ses comptes annuels laquelle ne comprenait pas de contrôle de la comptabilité analytique puisqu’il était par ailleurs soumis au contrôle d’un commissaire aux comptes qui a certifié les comptes en 2002, 2003 et 2004 sans émettre la moindre réserve et qu’il avait en outre mis en place un système de contrôle interne au cours de l’année 2003. Elle prétend qu’elle n’a manqué à aucune de ses obligations dès lors que les opérations qu’il lui appartenait de réaliser ne lui permettaient pas d’avoir une analyse critique du matériel de son client, de ses dépenses en matière de reprographie, opération qui relève de la gestion de l’entreprise dans laquelle elle n’avait pas à s’immiscer et alors que lors de l’établissement des comptes annuels au 31 décembre 2004 elle avait sollicité la production de certains contrats et factures d’achat et de location de photocopieurs qui ne lui ont pas été présentés et invité Mme [R] à faire procéder à un inventaire détaillé du matériel de bureau et informatique de la société ; que même à supposer qu’il ait démontré l’existence d’une faute de sa part le cabinet Cerruti ne peut que se prévaloir contre son expert-comptable d’une perte de chance de ne pas avoir permis de découvrir l’escroquerie plus tôt ; que les sommes réclamées ne correspondent pas à un préjudice né, certain et actuel ; enfin que la preuve d’un lien de causalité n’est pas plus rapportée.
SUR CE
1- Sur la recevabilité des demandes nouvelles du cabinet [L]
En première instance le Cabinet [L] a notamment formé des demandes de nullité-résiliation des contrats, le paiement in solidum par la BNP LG, LCL, Globalease et AM Paris des sommes de 179 102,51 € avec intérêts correspondants (soit 61 070,18 €), de 65 400 € correspondant aux frais et honoraires de gestion du dossier, de 57 294,88 € en réparation du préjudice moral subi et s’agissant du détournement de chèques, le paiement in solidum par LCL et AM Paris de 189 699 € avec les intérêts correspondants (soit 76 614,29€).
Dans ses premières conclusions signifiées le 19 mai 2015 en cause d’appel le cabinet [L] a sollicité pour l’essentiel la ‘nullité-résiliation’ des contrats de location, le paiement par la BNP LG de la somme de 44 112,48 € outre intérêts conventionnels au taux légal majoré de cinq points à compter de 2006, le paiement in solidum par la BNP LG, LCL, Globalease et AM Paris des sommes de 179 102,51 € avec intérêts correspondants (soit 111 213,66 €), de 65 400 € correspondant aux frais et honoraires de gestion du dossier, de 33 500 € en réparation du préjudice moral subi, et s’agissant du détournement de chèques, le paiement in solidum par LCL et AM Paris de 189 699 € avec les intérêts correspondants (soit 129 752 €).
Contrairement à ce qui est soutenu par la BNP LG, les demandes en nullité des contrats pour dol, et non plus pour erreur comme en première instance, de résolution des contrats et l’application des intérêts avec capitalisation formulées dans les dernières conclusions signifiées rappelées ci-dessus, lesquelles ont été complétées par des moyens nouveaux et actualisées, ne sont pas nouvelles mais tendent aux mêmes fins.
Elles sont donc recevables par application des articles 563 et 565 du code de procédure civile.
2- Sur la nullité des contrats de location pour défaut de cause
Sont produits en original,
– le contrat de location n°L0400153 régularisé le 27 mai 2004 entre la société Globalease, bailleur, le cabinet [L], locataire, et BNP LG, cessionnaire, prévoyant 48 loyers de 4 031,67 €, lequel précise annuler et remplacer les contrats L020043, L020043-1, L030060, L030066 et L030080, ainsi que le procès-verbal de livraison du matériel y afférent, relatif à des photocopieurs de marque Ricoh et leurs accessoires,
– le contrat de location n°L0400162 régularisé le 30 juin 2004 entre la société Globalease, bailleur, le cabinet [L], locataire, et BNP LG, cessionnaire, prévoyant 36 loyers de 1 012,37 € et le procès-verbal de livraison du matériel y afférent, relatif à du matériel de marque Ricoh et leurs accessoires,
– le contrat de location n°L0400174 régularisé le 22 septembre 2004 entre la société Globalease, bailleur, le cabinet [L], locataire, et BNP LG, cessionnaire, prévoyant 36 loyers de 1 115 € et le procès-verbal de livraison du matériel y afférent, relatif à un photocopieur de marque Ricoh et leurs accessoires,
– le contrat de location n°L0400146 régularisé le 28 avril 2004 entre la société Globalease, bailleur, le cabinet [L], locataire, et BNP LG, cessionnaire, prévoyant 36 loyers de 472 € et le procès-verbal de livraison du matériel y afférent, relatif à des imprimantes de marque Canon et leurs accessoires,
– le contrat de location n°L0400195 régularisé le 6 décembre 2004 entre la société Globalease, bailleur, le cabinet [L], locataire, et BNP LG, cessionnaire, prévoyant 48 loyers de 2 548 €, lequel précise annuler et remplacer les contrats L0400136 et L030097, ainsi que le procès-verbal de livraison du matériel y afférent, relatif à du matériel de marque Ricoh et Canon.
Tous ces documents sont revêtus de la mention ‘lu et approuvé’ suivie du tampon du cabinet [L] et d’une signature.
Le cabinet [L] ne conteste plus désormais que ces signatures sont celles de Mme [R], sa responsable administrative, mais soutient qu’elles ont été obtenues par des manoeuvres frauduleuses, notamment des captures de signature de cette dernière par M. [D], dirigeant de la société ST Concept puis représentant commercial de la société AM Paris, mandataire de la société Globalease et qu’aucun matériel n’a été livré en exécution de ces contrats.
Il résulte du réquisitoire définitif du 4 juillet 2012 que le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Versailles a requis du juge d’instruction de ce tribunal le renvoi de M. [D] devant le tribunal correctionnel pour avoir ’employé des manoeuvres frauduleuses, en l’espèce en établissant des factures sur lesquelles figuraient du matériel de reprographie fictif à partir desquelles les sociétés de location qu’il sollicitait établissaient des contrats de location financement au nom du cabinet [L], trompé les sociétés Globalease, Locam ou GE Equipement pour les déterminer à lui remettre des fonds, valeurs ou biens quelconques, en l’espèce à lui régler le montant du matériel et ce au préjudice des sociétés Globalease, Locam, GE Equipement, BNP Lease et du cabinet [L]’ et détourné au préjudice de ce cabinet des chèques qui lui avaient été remis pour financer du matériel de reprographie et/ou solder des contrats de location de matériel informatique auprès de sociétés de location.
L’extinction de l’action publique a été constatée par décision du 18 septembre 2012 en suite du décès de M. [D] survenu le [Date décès 1] 2012.
Il ressort des auditions réalisées par le juge d’instruction que Mme [R] avait été informée par M. [D] de ce qu’il envisageait de transférer les contrats de location de la société AM Paris vers la société ST Concept, qu’elle a reconnu avoir signé des documents vierges et en 2004 les contrats de location n°L0400153 et n°L0400195 portant sur des matériels Canon et Ricoh transférés même si elle a précisé ne pas se rappeler avoir signé les bons de livraison y afférents pas plus que les contrats n°L0400146, n°L0400162 et n°L0400174 portant sur de nouveaux matériels de mêmes marques et que M. [D] a reconnu ne pas avoir livré l’intégralité des machines figurant sur ces contrats.
Aucun élément ne permet d’affirmer comme le fait le cabinet [L] que la signature de Mme [R] ne serait pas originale mais pourrait relever d’un montage alors au demeurant que M. [D] a affirmé n’avoir jamais imité la signature de celle-ci.
En revanche, il résulte :
– du procès-verbal établi le 1er juillet 2006 par la DRPJ de Versailles, faisant suite à la réquisition transmise à la société Ricoh France aux fins d’identification de toutes les machines de marque Ricoh recensée sur les différents contrats de location en rapport avec le cabinet [L], que ‘seules les machines apparaissant sur les contrats GE Equipements sont identifiées et que toutes les autres machines ont des numéros erronés ou inexistants’,
– de la lettre du 23 décembre 2009 adressée par la société Canon au Cabinet [L] que ‘Les numéros de série que vous nous indiquez ne correspondent pas à des imprimantes importées en France par Canon’,
– des mails des 11 et 14 janvier 2010 envoyés par la société Ricoh à M. [L] que les numéros des matériels transmis sont des matricules incomplets ou ne correspondant pas à des numéros de série Ricoh,
– de la déclaration de sinistre faite par la société AMParis le 9 mai 2006 à son assureur que son client le cabinet [L] a été victime d’une escroquerie à savoir ‘ signature et mise en place de dossiers de financement sans livraison de machines’,
– de l’audition de M. [T], gérant de la société AM Paris, réalisée le 5 octobre 2009 par le juge d’instruction du tribunal de grande instance de Versailles que ‘On peut remarquer que les matricules des machines ne sont pas inscrits sur les contrats de location…Il y a de nombreuses incohérences sur les contrats, notamment la référence d’une marque sur une autre marque : un RICOH avec une marque CANON. Je vous fais remarquer que sur le contrat coté D 264 [L0400153] sur lequel figure un procès-verbal de livraison, tous les matricules semblent être faux et ne correspondent pas à des références de ce type de matériels…Je voudrais ajouter que le photocopieur couleur loué par la société Locam a les mêmes références que celui loué par la société Globalease’,
– du procès-verbal de constat dressé le 9 mars 2006 par Me [Y] [G], huissier de justice, que le matériel présent ce jour là dans les locaux du cabinet [L] ne correspond à aucun des contrats de location litigieux,
– des auditions de M. [D] que les matériels n’ont pas été livrés.
En outre, il ressort de la lecture des documents contractuels que les bons de livraison ont la même date que les contrats de location ce qui révèle une incohérence.
L’ensemble de ces éléments démontre que les contrats de location litigieux, financés par Globalease et cédés à BNP LG, n’ont entraîné aucune livraison de matériel et que le cabinet [L] a été victime d’une escroquerie.
Il ne peut pas être reproché à Mme [R] d’avoir signé des bons de livraison alors qu’il n’est pas contesté que le cabinet [L] entretenait des relations contractuelles avec la société AM Paris depuis 2002, et qu’il était en droit d’attendre de son cocontractant et de l’agent commercial de ce dernier un comportement loyal dans le cadre de l’exécution des contrats en cours.
Il ne peut pas plus être fait grief au cabinet [L] de ne pas avoir eu connaissance de l’inexistence du matériel ou d’avoir exécuté les contrats durant vingt-deux mois, dès lors que deux des contrats avaient vocation à remplacer sept précédents contrats et qu’il a réagi, tout d’abord par l’envoi de correspondances, dès qu’il a eu connaissance d’une possible inexistence des matériels loués.
En l’absence de prestation délivrée en contrepartie du paiement, les contrats sont nuls pour défaut de cause et doivent par conséquent être annulés.
Il y a lieu, par suite, d’infirmer partiellement le jugement et de débouter BNP LG de ses demandes en paiement au titre des contrats et en dommages et intérêts en l’absence de faute de la part du Cabinet [L] et, les matériels n’ayant jamais été livrés, en restitution de ceux-ci.
Les contrats annulés étant censés n’avoir jamais existé, les prestations exécutées donnent lieu à restitution.
Il convient, par conséquent, de condamner BNP LG à restituer la somme non contestée de 179 102,51 € au titre des loyers perçus avec intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2007, date de la première demande.
Les conditions de la capitalisation étant réunies, il conviendra de l’ordonner.
En revanche, le cabinet [L] sera débouté de sa demande de condamnation solidaire à ce titre à l’égard des sociétés Globalease, LCL, SCERH et AM Paris qui n’ont pas perçu ces fonds, et qui pour les trois dernières ne sont pas parties aux contrats.
En outre, il ne peut ni reprocher au bailleur d’avoir exécuté les contrats au vu des bons de livraison des matériels ni d’avoir exercé puis maintenu une action en justice pour obtenir paiement de sommes dues au titre de contrats non encore annulés.
En l’absence de démonstration d’une faute de la part de BNP LG, le cabinet [L] sera débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts formée à l’encontre de celle-ci au titre d’un préjudice moral et des frais et honoraires engagés pour la gestion de cette affaire, ces derniers faisant en outre double emploi avec l’indemnité procédurale sollicitée.
Il n’y a pas lieu enfin de condamner BNP LG à payer au Cabinet [L] la somme de 44 112,48 € dès lors que le jugement qui a prononcé la condamnation de ce dernier au paiement de cette somme est infirmé.
3- Sur la demande de BNP LG formée à l’encontre de Globalease
L’annulation des contrats de location entraîne l’annulation de leur cession par la société Globalease à la société BNP LG. Il est justifié par les factures produites, et au demeurant non contesté, que BNP LG a versé au titre des cinq contrats une somme globale de 368 465,20 € HT soit 440 684,38 € TTC.
Compte tenu du caractère récupérable de la TVA, il convient de condamner la société Globalease à restituer cette première somme à BNP LG avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
4- Sur la demande de Globalease à l’encontre du Cabinet [L]
Dès lors qu’il résulte des éléments ci-dessus que le cabinet [L], qui a été abusé par M. [D], n’a commis aucune faute, la demande en paiement de dommages et intérêts formée par la société Globalease à son encontre sera rejetée.
5- Sur la responsabilité du LCL
Le cabinet [L] reproche au LCL d’avoir procédé à des règlements sans avoir opéré la moindre vérification et sans détenir d’autorisations de prélèvement.
Il est justifié par les pièces produites, et au demeurant non contesté, que Mme [R] était titulaire depuis le 15 février 1993 d’un pouvoir consenti par M. [L] pour effectuer toutes sortes d’opérations sur le compte ouvert dans les livres du LCL et notamment ordonner des virements.
Dans ces conditions il ne peut être reproché au LCL, qui n’avait pas à s’ingérer dans les affaires de son client, d’avoir honoré des demandes de prélèvements apparemment régulières.
Même à supposer que la banque ait commis une faute en ne vérifiant pas les documents qui lui étaient soumis, cette faute est sans lien avec le préjudice du Cabinet [L] lequel ne relève pas tant du paiement des loyers que de l’absence de matériel livré en contrepartie.
La demande en paiement de dommages et intérêts sera donc rejetée.
De même le LCL sera débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts dès lors qu’il ne peut être fait grief au Cabinet [L] d’avoir agi puis maintenu ses demandes à l’encontre de la banque qui a refusé préalablement à toute action en justice de communiquer les justificatifs qui lui étaient demandés par son client.
6- Sur le détournement des chèques
Le cabinet [L] recherche la responsabilité de la société AM Paris au titre des chèques détournés par M. [D] sur le fondement de l’article 1384 alinéa 5 du code civil lui reprochant d’avoir introduit M. [D] auprès de lui sans aucune surveillance.
Il est établi par les pièces produites, notamment les factures de commissions sur les affaires apportées versées aux débats pour l’année 2004, que la société ST Concept, dirigée par M. [D], était non le préposé mais l’agent commercial de la société AM Paris jusqu’au 30 mars 2005, date de sa liquidation judiciaire, ce que celle-ci reconnaît.
Le fait pour une société de présenter son agent commercial à ses clients n’est pas en soi fautif et aucun élément ne permet de supposer que la société AM Paris a présenté M. [D] en connaissance des fautes que celui-ci allait commettre.
Il ressort clairement des auditions de M. [D] réalisées lors de l’instruction pénale que celui-ci a reconnu avoir encaissé sur son compte personnel au lieu de les reverser aux sociétés de financement des chèques émis par le Cabinet Cerrutti entre 2003 et 2005 et destinés à solder des contrats de location financière.
Cependant, le cabinet [L] qui n’ignorait pas les liens qui unissaient M. [D] et la société AM Paris aurait dû à tout le moins s’étonner que M. [D] lui réclame des chèques à son ordre ou à l’ordre de la société ST Concept, voire sans ordre, et refuser de les libeller ainsi.
Ce faisant elle a commis une faute qui a seule concouru à la réalisation de son dommage.
La demande en paiement de dommages et intérêts formée par le cabinet [L] à l’encontre de la société AM Paris à ce titre sera donc rejetée.
L’engagement d’une action en justice et l’exercice des voies de recours ouvertes par la loi constituent des droits qui ne dégénèrent en abus de nature à justifier l’octroi de dommages et intérêts que dans le cas d’une attitude fautive génératrice d’un préjudice. La société AM Paris qui ne démontre pas un tel comportement imputable au cabinet [L] ne peut prétendre au versement de dommages et intérêts pour procédures abusives.
7- Sur la responsabilité de la société SECRH
Le cabinet [L] fait grief à la société SCRH d’avoir manqué à ses devoirs de vigilance, d’information et de conseil en ne l’ayant pas alerté sur la dérive extrêmement forte des prélèvements relatifs au matériel de reprographie qui, selon lui, n’aurait pas dû lui échapper.
La lettre de mission définit le cadre et l’étendue de la mission que doit remplir l’expert-comptable avec toute la compétence et le soin que son client est en droit d’attendre d’un professionnel normalement compétent et diligent. Le devoir de conseil accompagne
toutes les missions de l’expert-comptable. Il dépasse le cadre strict des obligations contractuelles convenues en les prolongeant et en constitue ainsi l’accessoire naturel.
En l’espèce, la société SECRH, venant aux droits du cabinet [X], était tenue d’une mission de présentation des comptes annuels selon lettre de mission du 4 juin 1998, la tenue de la comptabilité étant réalisée en interne par une comptable salariée du Cabinet [L]. Ces comptes étaient par ailleurs soumis au contrôle d’un commissaire aux comptes. La lettre de mission précise que ‘la mission s’appuie sur une prise de connaissance générale de votre entreprise, le contrôle de la régularité formelle de la comptabilité, des contrôles par épreuve des pièces justificatives, un examen critique de cohérence et de vraisemblance des comptes annuels. Cette mission n’est pas un audit. En effet, elle ne comprend pas la vérification des existants en espèces ou en valeurs que vous détenez, la vérification matérielle des produits en cours, la confirmation directe d’informations auprès des tiers…’.
L’expert-comptable a établi les comptes annuels du cabinet [L] conformément à sa mission et contrairement à ce qu’il allègue le cabinet [L] ne démontre pas que son interlocuteur, à savoir Mme [X], était une personne insuffisamment qualifiée pour déceler l’augmentation irrégulière du poste locations financières alors au demeurant qu’il disposait d’une comptable interne, en charge de la passation des écritures, qui n’a pas plus découvert l’irrégularité.
Même à supposer que l’expert-comptable ait manqué à son obligation de vigilance, le cabinet [L] ne subit pas de préjudice en résultant dès lors que les contrats de locations financières ont été annulés et les loyers prélevés remboursés.
Il est constant en revanche qu’aucune faute ne peut être reprochée à l’expert comptable au titre des chèques détournés puisqu’il n’avait pas les moyens de déceler le détournement de chèques régulièrement signés par Mme [R].
Le cabinet [L] sera donc débouté de sa demande tendant à condamner la société SECRH- cabinet [X] au titre d’une perte de chance.
PAR CES MOTIFS,
la Cour statuant contradictoirement,
Déclare recevables les demandes formées par le cabinet [L] ;
Infirme le jugement sauf en ce qu’il a débouté le cabinet [L] de ses demandes à l’encontre des sociétés AM Paris, LCL et SECRH et débouté la société BNP LG de sa demande de restitution des matériels ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Déboute la société BNP LG de ses demandes à l’encontre du cabinet [L] ;
Condamne la BNP LG à payer au cabinet [L] la somme de 179 102,51 € avec intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2007 et capitalisation ;
Déboute le cabinet [L] de sa demande de condamnation solidaire au paiement de cette somme ;
Déboute le cabinet [L] de ses autres demandes à l’égard de la société BNP LG et de ses demandes à l’encontre de la société Globalease ;
Condamne la société Globalease à payer à la société BNP LG la somme de 368 465,20 € HT, soit 440 684,38 €, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Déboute la société Globalease de ses demandes en paiement de dommages et intérêts et d’indemnité procédurale à l’encontre du cabinet [L] ;
Déboute le LCL et la société AM Paris de leur demande en paiement de dommages et intérêts formées à l’encontre du Cabinet [L] ;
Condamne la société BNP LG à payer au cabinet [L] la somme de 15 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne le cabinet [L] à payer au LCL la somme de 8 000 € et aux sociétés SECRH et AM Paris la somme de 3 000 € chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société BNP LG aux dépens de première instance et d’appel avec droit de recouvrement au profit des avocats qui peuvent y prétendre conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,La présidente,