L’obligation de comparer les signatures de son client

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L’obligation de comparer les signatures de son client

Il appartient au professionnel (de la banque) de vérifier la concordance des signatures de son client au regard des documents qui lui ont déjà été produits, le cas opposé le client ne se trouve pas engagé contractuellement.

En la cause, il ressort de la comparaison des signatures et paraphes avec ceux du contrat de prêt qu’à l’évidence, la cliente n’est l’auteur ni des signatures ni des paraphes portés sur le contrat de prêt.

L’article 1373 du code civil énonce que  » La partie à laquelle on l’oppose peut désavouer son écriture ou sa signature… Dans ces cas il y a lieu à vérification d’écriture. »

En vertu de l’article 287 du code de procédure civile,  » Si l’une des parties dénie l’écriture qui lui est attribuée…, le juge vérifie l’écrit contesté à moins qu’il ne puisse statuer sans en tenir compte. »

L’article 288 du même code précise que  » Il appartient au juge de procéder à la vérification d’écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s’il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d’écriture.

Dans la détermination des pièces de comparaison, le juge peut retenir tous documents utiles provenant de l’une des parties, qu’ils aient été émis ou non à l’occasion de l’acte litigieux. »

Résumé de l’affaire :

Procédure

La première évocation de l’affaire a eu lieu le 20 juin 2023, suivie des débats le 3 septembre 2024. La mise à disposition du jugement est prévue pour le 5 novembre 2024.

Exposé du litige

La SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS (CGL) a accordé un prêt à Monsieur [J] [M] et Madame [K] [M] pour l’achat d’un véhicule PEUGEOT 208, d’un montant de 11.678,76 euros, remboursable en 60 mensualités. Une ordonnance d’injonction de payer a été rendue le 5 décembre 2022, condamnant les emprunteurs au paiement de 10.253,65 euros. Madame [M] a formé opposition à cette ordonnance le 16 février 2023.

Demande de la SA CGL

Lors de l’audience, la SA CGL a demandé la condamnation solidaire de Monsieur et Madame [M] au paiement de 11.518,97 euros, ainsi qu’une indemnité de 1.000 euros au titre de l’article 700 du CPC.

Réponse de Madame [M]

Madame [M] a demandé le déboutement de la SA CGL, une expertise graphologique, et une indemnité de 2.000 euros au titre de l’article 700 du CPC. Monsieur [M] n’a pas comparu à l’audience.

Motifs de la décision

L’opposition de Madame [M] a été jugée recevable, permettant de statuer à nouveau sur les demandes de la SA CGL. La régularité de l’offre de prêt a été examinée, et la demande de la SA CGL a été jugée recevable.

Engagement contractuel de Madame [K] [M]

Madame [M] a contesté la validité de sa signature sur l’acte de prêt. La SA CGL a produit des documents attestant de l’identité de Madame [M], mais la comparaison des signatures a révélé qu’elle n’était pas l’auteur des signatures sur le contrat. La SA CGL a été déboutée de ses demandes à son encontre.

Exigibilité de la créance contre Monsieur [M]

Monsieur [M] a cessé de payer les échéances du prêt, ce qui a permis à la SA CGL de demander le remboursement immédiat des sommes dues. La déchéance du terme a été validée, et la SA CGL a été fondée à exiger le remboursement.

Déchéance du droit aux intérêts

La SA CGL n’a pas justifié de la consultation du FICP avant l’octroi du crédit, entraînant la déchéance de son droit aux intérêts.

Sommes dues

Monsieur [M] a été condamné à rembourser le capital restant dû de 9.160,99 euros, sans intérêts majorés, à compter du 17 janvier 2023.

Demandes accessoires

Monsieur [M] a été condamné aux dépens, tandis que la SA CGL a été condamnée à verser 1.200 euros à Madame [M] au titre de l’article 700 du CPC.

Conclusion

Le jugement a été rendu avec exécution provisoire, déclarant l’opposition de Madame [K] [M] recevable et déboutant la SA CGL de ses demandes à son encontre.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

5 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Caen
RG
23/00782
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CAEN
3ème chambre civile
11 rue Dumont d’Urville
CS 45257 –
14052 CAEN CEDEX 4
☎ :0250101300

N° RG 23/00782 – N° Portalis DBW5-W-B7H-IKCL

Minute : 2024/
Cabinet C

JUGEMENT

DU : 05 Novembre 2024

S.A. COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS

C/

[K] [M]
[J] [M]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Alicia BALOCHE – 28
Me Renan DROUET – 53

Copie certifiée conforme délivrée le :

à :

M. [J] [M]

Me Alicia BALOCHE – 28
Me Renan DROUET – 53

JUGEMENT

DEMANDEUR :

S.A. COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS- (CGL) RCS Lille Metropole 303.236.156, dont le siège social est sis 69 avenue de Flandre – 59700 MARCQ EN BAROEUL
représentée par Me Amaury PAT, avocat au barreau de LILLE, Me Alicia BALOCHE, avocat au barreau de CAEN, vestiaire : 28, avocat postulant, substituée par Maître Camille GRUNEWALD, avocat au Barreau de CAEN, vestiaire : 28

ET :

DÉFENDEURS :

Madame [K] [M], demeurant 12 Rue Porte MILLET – 14000 CAEN
représentée par Me Renan DROUET, avocat au barreau de CAEN, vestiaire : 53, substitué par Maître Valentin DURAND, avocat au Barreau de CAEN

Monsieur [J] [M]
né le 11 Septembre 1998 à CAEN (14000), demeurant 37 rue de Bretagne – 14123 IFS
non comparant, ni représenté

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Marie-Ange LE GALLO, Première vice-présidente, Juge des Contentieux de la Protection
Greffier : Olivier POIX, présent à l’audience et lors de la mise à disposition

PROCÉDURE :

Date de la première évocation : 20 Juin 2023
Date des débats : 03 Septembre 2024
Date de la mise à disposition : 05 Novembre 2024
EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 22 janvier 2021, la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS (CGL) a consenti à Monsieur [J] [M] et Madame [K] [M] un prêt accessoire à une vente d’un montant en capital de 11.678,76 euros, avec intérêts au taux débiteur de 3,748 %, remboursable en 60 mensualités s’élevant à 220,13 euros, hors assurance.

Le véhicule financé, de marque PEUGEOT modèle 208 immatriculé ED-417-NX a été livré le 26 janvier 2021.

Par ordonnance d’injonction de payer du 5 décembre 2022, Monsieur [M] et Madame [M] ont été condamnés solidairement au paiement de la somme de 10 253,65 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 avril 2022.

L’ordonnance a été signifiée par acte de commissaire de justice en date du 17 janvier 2023 à Madame [M].

Madame [M] a formé opposition à l’ordonnance du 5 décembre 2022, le 16 février 2023.

A l’audience du 3 septembre 2024, la SA CGL, représentée, maintient ses demandes et sollicite de :
– Condamner Madame [M] et Monsieur [M] solidairement à lui payer la somme de 11.518,97 euros assortie des intérêts au taux contractuel de 3,75 % l’an courus et à courir à compter du 25 mars 2023, et jusqu’au jour du plus complet paiement
– Condamner les mêmes solidairement au paiement de la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du CPC et aux dépens.

Madame [M], représentée, sollicite de :
– A titre principal, débouter la SA CGL de l’intégralité de ses demandes
– A titre subsidiaire, ordonner une expertise graphologique
– A titre très subsidiaire, condamner Monsieur [M] à la garantir de toutes sommes mises à sa charge
– Condamner la SA CGL à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’artiocle 700 du CPC

Monsieur [M], bien qu’ayant réceptionné la convocation du greffe le 2 mars 2023, n’a pas comparu.

L’affaire a été mise en délibéré au 5 novembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Conformément à l’article 472 du code de procédure civile, si l’un des défendeurs ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait alors droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la recevabilité de l’opposition

Aux termes de l’article 1416 du code de procédure civile, l’opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l’ordonnance. Si la signification n’a pas été faite à personne, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant le premier acte signifié à personne, ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.

En l’espèce, l’ordonnance du 5 décembre 2022 a été signifiée le 17 janvier 2023.

Dès lors, l’opposition du 16 février 2023 a été formée dans le délai réglementaire et doit donc être déclarée recevable.

Il convient en conséquence de statuer à nouveau sur les demandes de la SA CGL, le présent jugement se substituant à l’ordonnance d’injonction de payer en application de l’article 1420 du code de procédure civile.

Sur la demande principale

Sur l’office du juge

En application de l’article R.632-1 du code de la consommation, le juge peut soulever d’office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application.

L’article L.314-26 du code de la consommation précise que les dispositions des chapitres II et III et des sections II à VII du chapitre IV du code de la consommation sont d’ordre public.

En l’espèce, la SA CGL a évoqué la régularité de l’offre de prêt et a pu formuler ses observations quant au respect des dispositions d’ordre public des articles L.312-1 et suivants du code de la consommation.

Sur la recevabilité de la demande

Compte tenu de la date de conclusion du contrat et de la date de la signification de l’ordonnance d’injonction de payer, la demande de la SA CGL a été formée avant l’expiration du délai biennal de forclusion de l’article R.312-35 du code de la consommation. Elle est donc recevable.

Sur l’engagement contractuel de Madame [K] [M]

Madame [M] dénie que la signature portée sur l’acte de prêt soit la sienne, et donc de s’être engagée aux côtés de son frère Monsieur [M]. Elle soutient que la SA CGL n’a pas vérifié la validité de sa signature et sa conformité.

La SA CGL indique avoir reçu les documents nécessaires à identifier Madame [M] et à valider sa signature, et soutient que Madame [M] ne rapporte pas la preuve de ce que la signature et les paraphes portés sur l’acte ne soient pas de sa main.

L’article 1373 du code civil énonce que  » La partie à laquelle on l’oppose peut désavouer son écriture ou sa signature… Dans ces cas il y a lieu à vérification d’écriture. »

En vertu de l’article 287 du code de procédure civile,  » Si l’une des parties dénie l’écriture qui lui est attribuée…, le juge vérifie l’écrit contesté à moins qu’il ne puisse statuer sans en tenir compte. »

L’article 288 du même code précise que  » Il appartient au juge de procéder à la vérification d’écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s’il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d’écriture. Dans la détermination des pièces de comparaison, le juge peut retenir tous documents utiles provenant de l’une des parties, qu’ils aient été émis ou non à l’occasion de l’acte litigieux. »

En l’espèce, la SA CGL a produit le contrat de prêt portant deux signatures de Madame [M] et ses paraphes sur toutes les pages.

Madame [M] a produit en copies sa pièce d’identité en date du 26 septembre 2017, le contrat de location de son logement en date du 15 septembre 2018 son contrat d’assurance en date du 5 mai 2021, un récépissé de lettre recommandée en date du 15 avril 2022, une convention d’honoraires en date du 19 février 2023, une page de signatures et paraphes en date du 11 novembre 2023, documents tous porteurs de sa signature.

Il ressort de la comparaison de ces dernières signatures et paraphes avec ceux du contrat de prêt qu’à l’évidence, Madame [M] n’est l’auteur ni des signatures ni des paraphes portés sur le contrat de prêt.

Il appartenait à la SA CGL de vérifier cette concordance au regard des documents qui lui étaient produits par Monsieur [M], ce qu’elle n’a pas fait.

La SA CGL sera déboutée de toutes ses demandes à l’encontre de Madame [M].

Sur l’exigibilité de la créance à l’encontre de Monsieur [M]

Aux termes de l’article L.312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés.

En application des articles 1224 et 1225 du code civil, la résolution peut résulter de l’application d’une clause résolutoire, qui précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat. En ce cas, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution, qui ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire.

Ainsi, si le contrat de prêt peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque être déclarée acquise au créancier sans délivrance d’une mise en demeure restée sans effet précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l’espèce, le prêt stipule qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés.

Il ressort des pièces communiquées que Monsieur [M] a cessé de régler les échéances du prêt.

La SA CGL, qui a fait parvenir à celui-ci une demande de règlement des échéances impayées le 10 mars 2022, restée sans réponse, était dès lors bien fondée à se prévaloir de la déchéance du terme et de la résiliation de plein droit du contrat et à demander le remboursement immédiat des sommes exigibles selon les termes du contrat.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Sur la consultation du FICP

Selon l’article L.312-16 du code de la consommation, avant de conclure un contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations ; notamment le prêteur doit consulter le fichier national des incidents de paiement caractérisé (FICP), dans les conditions prescrites par l’arrêté du 26 octobre 2010, qui prévoit une consultation obligatoire par l’organisme de crédit avant toute décision effective d’octroyer un crédit à la consommation.

Le prêteur doit pouvoir justifier de la consultation du fichier, selon les modalités de l’article 13 du même arrêté.

Il résulte de l’article L.341-2 du même code, que le prêteur qui n’a pas respecté les obligations des articles L.312-14 et L.312-16 dudit code est déchu du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

En l’espèce, la SA CGL ne justifie pas de la consultation du FICP préalablement à l’octroi du crédit, et ne démontre pas avoir respecté son obligation de vérification préalable.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à compter de la date de conclusion du contrat.

Sur les sommes dues

En application de l’article L.341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu , et les sommes perçues au titre des intérêts sont restituées à l’emprunteur ou imputées sur le capital restant dû.

En outre, la déchéance du droit aux intérêts exclut la possibilité pour le prêteur d’obtenir le paiement de l’indemnité prévue par les articles L.312-39 et D.312-16 du code de la consommation.

Conformément à l’article L.341-8 précité, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital et la déchéance s’étend également aux primes ou cotisations d’assurances.

En l’espèce, il ressort des pièces produites par la demanderesse, notamment de l’historique , que la créance de celle-ci est établie.

Elle se calcule donc comme suit :
– capital emprunté : 11.678,76 euros
– moins les versements réalisés : 2.517,77 euros
soit un total restant dû de 9.160,99 euros, sous réserve des versements postérieurs et/ou non pris en compte dans le décompte arrêté au 7 septembre 2022.

En conséquence, il convient de condamner Monsieur [M] au paiement de cette somme.

Sur les intérêts

En application de l’article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Selon l’article L.313-3 du code monétaire et financier, en cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l’intérêt légal est majoré de cinq points à l’expiration d’un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire. Le juge de l’exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant.

Par ailleurs, le Juge doit assurer l’effectivité de la sanction prévue par le droit communautaire (Cour de Justice de l’Union Européenne, 27 mars 2014, C-565/12).

Sur ce point, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) statuant sur une demande de décision préjudicielle du tribunal d’instance d’Orléans relève qu’il appartient à la juridiction nationale de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté ses obligations avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de ces mêmes obligations , et que dès lors que les montants dont il est déchu sont inférieurs à ceux résultant de l’application des intérêts au taux légal majoré ou si les montants susceptibles d’être perçus par lui ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations, le régime de sanctions en cause au principal n’assure pas un effet réellement dissuasif à la sanction encourue.

La CJUE rappelle qu’une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, est tenue, lorsqu’elle applique les dispositions du droit interne, de prendre en considération l’ensemble des règles du droit national et de les interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive applicable en la matière pour aboutir à une solution conforme à l’objectif poursuivi par celle-ci.

Elle estime que l’article 23 de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’application d’un régime national de sanctions en vertu duquel, en cas de violation par le prêteur de ses obligations, le prêteur est déchu de son droit aux intérêts conventionnels, mais bénéficie de plein droit des intérêts au taux légal, exigibles à compter du prononcé d’une décision de justice condamnant l’ emprunteur, lesquels sont en outre majorés de cinq points si, à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit ce prononcé, celui-ci ne s’est pas acquitté de sa dette.

En l’espèce, compte tenu du taux contractuel, il apparaît que les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal, pour les créanciers professionnels, majoré de plein droit de cinq points deux mois après la signification du jugement, en application de l’article L.313-3 du code monétaire et financier, ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont il aurait pu bénéficier s’il avait respecté ses obligations.

Si le débiteur peut solliciter, après condamnation, l’exonération de la majoration, une telle mesure ne reste que facultative, subordonnée à la mise en œuvre d’un recours au stade de l’exécution. Or le prononcé d’une condamnation impliquant la majoration automatique du taux d’intérêt contrevient aux objectifs du droit communautaire, puisque la possible exonération par le juge de l’exécution demeure aléatoire, ce qui laisse subsister dans l’ordonnancement juridique des décisions portant une sanction non effective.

Il convient dès lors également d’écarter la majoration des intérêts afin d’assurer le caractère effectif et dissuasif de la sanction de déchéance du droit aux intérêts.

En conséquence, il convient de condamner Monsieur [M] à payer à la SA CGL la somme de 9.160,99 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 17 janvier 2023, date de signification de l’ordonnance d’injonction de payer.

Sur les demandes accessoires

En application des dispositions des articles 696 et suivants du code de procédure civile, il convient de condamner Monsieur [M] aux dépens de l’instance.

La SA CGL sera condamnée à payer à Madame [M] la somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SA CGL les frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés dans le cadre de la présente instance. Il convient donc de rejeter la demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément à l’article 514 du code de procédure civile, le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire, de droit.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant en audience publique, par jugement réputé contradictoire, en premier ressort, rendu par mise à disposition au greffe le jour de son délibéré,

DÉCLARE l’opposition de Madame [K] [M] recevable ;

MET à néant l’ordonnance d’injonction de payer du 5 décembre 2022 rendue par le juge des contentieux de la protection de CAEN et enregistrée sous le numéro 21-22-001653 ;

Statuant à nouveau,

DÉCLARE recevable la demande en paiement ;

DÉBOUTE la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS de toutes ses demandes à l’encontre de Madame [K] [M] ;

CONDAMNE Monsieur [J] [M] à payer à la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS la somme de 9.160,99 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 17 janvier 2023 ;

CONDAMNE la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS à payer à Madame [K] [M] la somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [J] [M] aux dépens ;

DÉBOUTE la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS de ses autres demandes et prétentions ;

RAPPELLE que le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire de droit.

Ainsi jugé et prononcé publiquement par mise à disposition de la décision au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l’alinéa 2 de l’article 450 du code de procédure civile et, après lecture, la minute a été signée par la juge et le greffier présent lors de la mise à disposition.

LE GREFFIER LA JUGE DES CONTENTIEUX
DE LA PROTECTION


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