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Choisir sa dénomination sociale n’est pas anodin, l’atteinte à une marque existante peut se révéler lourd de conséquences financières.
La société Bloom trade (Bebloom) a obtenu l’interdiction faite à la société Blooms de modifier sa dénomination sociale et commerciale pour atteinte à sa marque.
La société Blooms s’est rendue auteur d’actes de contrefaçon de la marque semi-figurative française Bebloom (75 000 € en indemnisation des préjudices matériel et moral nés des actes de contrefaçon).
Il a également été fait interdiction à la société d’employer les signes «Blooms» et «Bloom’s» pour les besoins de son activité commerciale sous astreinte de 5 000 € par mois.
La Demande d’arrêt de l’exécution provisoire de la condamnation a été rejetée par la juridiction.
L’exécution provisoire ordonnée dans le jugement rendu le 5 mai 2022 ne peut être arrêtée, conformément aux dispositions de l’article 524 alinéa 1 du Code de procédure civile, dans sa version antérieure au 1er janvier 2020, que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.
La société condamnée a invoqué des conséquences manifestement excessives.
Il n’appartient pas au premier président de la juridiction d’apprécier le bien fondé de l’appel pour déterminer si ces risques sont démontrés par la demanderesse qui a la charge de la preuve.
Les arguments relevés concernant les conditions dans lesquelles la procédure de première instance s’est déroulée sont ainsi inopérants.
S’agissant de l’existence de conséquences manifestement excessives, il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue en fonction des facultés de remboursement de l’intimé si la décision était infirmée, mais également de la situation personnelle et financière du débiteur.
En outre, le caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d’une condamnation au paiement d’une somme d’argent ou d’une décision enjoignant à faire ou à ne pas faire, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible pour la partie contrainte par l’exécution provisoire.
N° R.G. Cour : N° RG 22/00181 – N° Portalis DBVX-V-B7G-OOOG
COUR D’APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DE REFERE
DU 17 Octobre 2022
DEMANDERESSE :
S.A.S. BLOOM’S Société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 802 614 362 prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 2]
[Localité 4]
avocat postulant : la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON (toque 475)
avocat plaidant : Maître Pauline CASANOVA, avocat au barreau de PARIS
DEFENDERESSE :
S.A.S.U. BLOOM TRADE
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Olivier MOUSSA de la SELARL SHIFT AVOCATS, avocat au barreau de LYON (toque 194)
Audience de plaidoiries du 03 Octobre 2022
DEBATS : audience publique du 03 Octobre 2022 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 1er septembre 2022, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée publiquement le 17 Octobre 2022 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;
signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
La S.A.S.U. Bloom trade, créée en 2000, exerce une activité de vente de fleurs à distance et exploite le site internet www.bebloom.com. La S.A.S. Bloom’s (Blooms), créée en 2014 exerce également une activité de vente de fleurs à distance et exploite le site internet www.blooms.fr.
La société Bloom trade a mis en demeure la société Blooms de modifier sa dénomination sociale et commerciale. En l’absence de réponse et par acte du 6 juillet 2018, elle l’a assignée devant le tribunal de grande instance de Lyon et cette juridiction devenue tribunal judiciaire a notamment par jugement réputé contradictoire du 5 mai 2022 :
— jugé que la société Blooms s’est rendue auteur d’actes de contrefaçon de la marque semi-figurative française Bebloom,
— condamné la société Blooms à payer à la société Bloom trade la somme de 75 000 € en indemnisation des préjudices matériel et moral nés des actes de contrefaçon,
— fait interdiction à la société défenderesse d’employer les signes «Blooms» et «Bloom’s» pour les besoins de son activité commerciale sous astreinte de 5 000 € par mois, passé le délai de deux mois à compter de la signification,
— ordonné à la société Blooms de transférer gratuitement le nom de domaine blooms.fr à la société Bloom trade et de supporter les frais éventuels de ce transfert, sous astreinte de 2 000 € par mois, passé le délai de deux mois à compter de la signification,
— déclaré nulle la marque semi-figurative française «Bloom’s fleurs de saison»,
— ordonné l’exécution provisoire sauf en ce qui concerne l’annulation partielle de la marque «Bloom’s fleurs de saison»,
— condamné la société Blooms à payer à la société Bloom trade la somme de 4 000 € en indemnisation des frais irrépétibles du procès.
La société Bloom’s a interjeté appel de ce jugement le 14 juin 2022.
Par assignation délivrée le 19 juillet 2022 à la société Bloom trade, elle a saisi le premier président afin de :
— à titre principal, arrêter l’exécution provisoire du jugement rendu le 5 mai 2022 par le tribunal judiciaire de Lyon,
— à titre subsidiaire, autoriser dans un délai raisonnable la société Bloom’s à consigner partiellement à hauteur de 10 000 € le montant des condamnations allouées à la société Bloom trade par le tribunal judiciaire de Lyon entre les mains du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon jusqu’au terme de la procédure d’appel, et par conséquent, arrêter l’exécution provisoire pour le surplus du montant des condamnations allouées à la société Bloom trade sur justification de la consignation de la somme de 10 000 € dans un délai raisonnable,
— à titre infiniment subsidiaire, fixer la date d’audience de l’affaire au fond par priorité,
— en toute hypothèse, dire que les sociétés conserveront chacune la charge des frais irrépétibles afférents à l’instance en référé et que les dépens de cette instance devront suivre ceux de l’instance d’appel.
A l’audience du 3 octobre 2022 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s’en sont remises à leurs écritures, qu’elles ont soutenues oralement.
Dans son assignation, la société Blooms invoque les dispositions de l’article 524 ancien du Code de procédure civile et prétend que l’interdiction de poursuivre l’usage des signes ‘Bloom’s’ et ‘Blooms’ reviendrait à l’empêcher d’être reconnue par sa clientèle et aurait d’importantes répercussions sur son activité économique.
Elle assure que cela entraînerait des démarches coûteuses et complexes inutilement.
Elle estime que le transfert du nom de domaine blooms.fr emporterait la perte de sa visibilité et permettrait à la société Bloom trade d’en disposer avant même que la cour se soit prononcée sur le fond.
Elle considère que la restitution de ce nom de domaine se révélerait impossible en cas d’infirmation du jugement.
Elle soutient le caractère exorbitant de la condamnation à hauteur de 79 000 €.
A titre subsidiaire, elle se prévaut de l’article 521 du Code de procédure civile au soutien de sa demande de consignation partielle de ses condamnations en mettant en avant ses éléments comptables.
Elle vise enfin l’article 917 du même code pour solliciter à titre infiniment subsidiaire la fixation prioritaire de l’affaire devant la cour estimant que ses droits sont indiscutablement en péril.
Dans ses conclusions déposées au greffe par RPVA le 23 août 2022, la société Blooms maintient les demandes contenues dans son assignation et s’oppose à celles présentées par son adversaire.
Elle conteste pouvoir se limiter aux modifications triviales de son site internet et Instagram pour respecter les injonctions prononcées par le tribunal judiciaire de Lyon, qui nécessitent un «rebranding» entraînant un coût significatif et une perte consécutive du nombre d’abonnés aux comptes de ses réseaux sociaux comme de son crédit auprès de sa clientèle.
Elle souligne que la société Bloom trade a arrêté son site marchand bebloom.com le 30 avril 2021, et qu’elle n’est pas titulaire du nom de domaine «blooms.fr». Elle conteste, en vertu du principe d’autonomie comptable et financière des sociétés d’un même groupe, l’affirmation adverse supposant que le groupe Emova dont elle fait partie a la capacité de financer la condamnation pécuniaire prononcée dans le jugement dont appel.
Elle prétend justifier par les éléments comptables qu’elle produit qu’elle ne dispose pas des fonds nécessaires pour la supporter.
Elle estime que le pouvoir discrétionnaire laissé au premier président pour ordonner la consignation lui permet de cantonner l’arrêt de l’exécution provisoire à un montant déterminé.
Elle soutient être dans les conditions pour solliciter à titre infiniment subsidiaire la fixation prioritaire de l’affaire devant la cour en application de l’article 917 du Code de procédure civile, les articles suivants de ce code ne s’appliquant pas à une telle demande faite dans le cadre d’un référé destiné à obtenir un arrêt ou un aménagement de l’exécution provisoire.
Elle précise lors de l’audience avoir tout dernièrement déposé devant la cour des conclusions au soutien de son appel.
Dans ses dernières conclusions déposées lors de l’audience, la société Bloom trade sollicite le rejet des demandes de la société Bloom’s et la condamnation de cette dernière à hauteur de 6 000 € au titre des frais non compris dans les dépens.
Elle considère que le tribunal judiciaire a prononcé avec justesse et de manière limitée l’exécution provisoire de son jugement. Elle estime que l’interdiction qui a été prononcée ne conduit pas à l’engagement des frais mis en avant par la société Blooms, car il lui suffit de modifier ses noms de domaine et de compte Instagram, sans avoir besoin de modifier ses chartes graphiques.
Elle estime que la société Blooms n’est pas fondée à invoquer des conséquences manifestement excessives, car elle demeure libre d’exercer son activité mais simplement sous son propre nom. Elle relève que les coûts d’un tel changement sont inhérents au rétablissement de l’ordre public économique.
Elle s’oppose à l’argument opposé par la demanderesse portant sur la vente de son nom de domaine blooms.fr et fait valoir que cette dernière fait partie d’un groupe coté en bourse qui lui permettra de supporter sa condamnation pécuniaire.
Elle souligne que la société Blooms ne satisfait pas aux conditions des articles 917 et 918 du Code de procédure civile en ce qu’elle n’établit pas que ses droits soient en péril et alors qu’elle n’a pas encore conclu au soutien de son appel. Elle précise que l’article 948 du même code est inapplicable en l’espèce.
Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l’exposé des moyens à l’énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.
MOTIFS
Attendu que l’article 55 du décret du 11 décembre 2019 prévoit que les dispositions nouvelles régissant l’exécution provisoire n’entrent en vigueur que pour les instances introduites à compter du 1er janvier 2020, l’acte introductif d’instance ayant en l’espèce été délivré devant le tribunal judiciaire de Lyon le 6 juillet 2018 ;
Attendu qu’au regard de cette date d’assignation, il n’est pas discuté par les parties que les dispositions alors en vigueur du code de procédure civile sont seules applicables aux prétentions visant à l’arrêt ou à l’aménagement de l’exécution provisoire ;
Sur la demande d’arrêt total de l’exécution provisoire
Attendu que l’exécution provisoire ordonnée dans le jugement rendu le 5 mai 2022 ne peut être arrêtée, conformément aux dispositions de l’article 524 alinéa 1 du Code de procédure civile, dans sa version antérieure au 1er janvier 2020, que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives ;
Attendu que la société Blooms ne soutient pas que l’exécution provisoire serait interdite par la loi, mais invoque dans son assignation et dans ses conclusions des risques de conséquences manifestement excessives ;
Attendu qu’il n’appartient pas au premier président d’apprécier le bien fondé de l’appel pour déterminer si ces risques sont démontrés par la demanderesse qui a la charge de la preuve ;
Que les arguments relevés concernant les conditions dans lesquelles la procédure de première instance s’est déroulée sont ainsi inopérants ;
Attendu que s’agissant de l’existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu’il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue en fonction des facultés de remboursement de l’intimé si la décision était infirmée, mais également de la situation personnelle et financière du débiteur ;
Qu’en outre, le caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d’une condamnation au paiement d’une somme d’argent ou d’une décision enjoignant à faire ou à ne pas faire, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible pour la partie contrainte par l’exécution provisoire ;
Attendu que la société Blooms fait tout d’abord valoir concernant l’interdiction qui lui est faite d’utiliser les signes ‘Blooms’ et ‘Bloom’s’ qu’elle va conduire à lui retirer tous les moyens par lesquels elle est reconnue par sa clientèle et ses partenaires commerciaux ;
Qu’il convient à ce stade de relever que le tribunal judiciaire de Lyon n’a pas ordonné l’exécution provisoire de l’annulation partielle de la marque ‘ Bloom’s fleurs de saison’, ce qui ne permet pas de retenir la certitude de l’interdiction actuelle pour la société Blooms d’utiliser cette marque ;
Attendu que les motifs de sa décision conforte cette absence de certitude en ce que l’interdiction d’utiliser les signes ‘Blooms’ et ‘Bloom’s’ est motivée ainsi :
«La cessation de cette contrefaçon implique de faire interdiction à la société défenderesse d’employer les signes ‘Blooms’ et ‘Bloom’s’ pour les besoins de son activité commerciale, notamment en tant que dénomination sociale, nom commercial, élément d’adresse internet ou de marque déposée…» ;
Attendu que les parties sont radicalement contraires sur les démarches et coûts à engager par la société Blooms pour respecter cette injonction, cette dernière invoquant un changement de charte graphique pour un coût de 20 000 € HT, une refonte majeure de son site internet chiffrée à 130 525 € HT et l’acquisition pour 60 000 € HT de 50 000 followers Instagram dits correspondant à ceux de ses abonnés actuels au sein de ce réseau social (49 200 figurant sur l’extrait produit) ;
Que la société Bloom trade estime pour sa part qu’il n’est pas nécessaire de refaire un site, ni de créer un nouveau compte Instagram, ni de changer de charte graphique et affirme que les injonctions du tribunal judiciaire ne supposent que des manipulations triviales ;
Attendu que la société Blooms verse aux débats :
— un extrait de son site internet «www.blooms.fr» remontant au 28 décembre 2014 comportant trois pages imprimées, extrait dit incomplet par la société Bloom trade,
— une page Whois faisant état de ce site internet, non datée,
— un extrait sur 11 feuilles de ses pages Instagram «blooms-france» publiées pour chacune à des dates différentes échelonnées entre le 28 avril 2014 et le 28 juin 2022,
— un extrait de son compte Facebook «@blooms.fleursdesaison» sur 3 pages comportant une dernière publication le 29 octobre 2021 ;
Que la société Blooms semble confondre un follower, défini comme une personne qui vous suit et qui s’est abonnée à votre compte, avec ce qui constitue une clientèle et n’est pas fondée à invoquer la nécessité de financer l’acquisition fort onéreuse des followers d’un compte Instagram «Au nom de la rose» dont il n’est pas contesté qu’il corresponde au nom d’une des sociétés soeurs de son groupe ; que la société Blooms ne précise pas que cette acquisition est le seul moyen de conserver ces «abonnés» ;
Attendu que le changement de nom de domaine comme de noms d’abonné sur les réseaux sociaux susvisés ne constituent pas des obstacles insurmontables et délicats techniquement, et surtout aucun élément technique ne vient confirmer que les abonnés ou followers de la société Blooms seront maintenus ou supprimés lors de ce changement concernant les réseaux Instagram et Facebook ; que la société Bloom trade a pourtant fait valoir que ce changement ne fait pas perdre l’intégralité de ces abonnés ;
Que surtout les devis produits ne sont pas précis en ce que celui établi par [T] [D] au profit de la société holding de la société Blooms ne donne pas de moyens d’identification du site ou du réseau social concerné, alors que celui établi par la S.A.S. Antadis fait référence à un audit non fourni et certains de ses postes ne semblent pas correspondre à une refonte du site blooms.fr en ce qu’est prévu notamment le poste «Accompagnement serveur» ;
Attendu que l’ancienneté des copies d’écran de ce site «blooms.fr» telles que susvisées, composées en apparence d’une seule page sans certitude d’exhaustivité, est insusceptible d’expliquer un coût total de 130 525 € HT pour mentionner un autre nom à la place de «Bloom’s» sur deux endroits de la page telle que visible sur la pièce produite et pour modifier les renvois vers les réseauxsociaux susvisés dont les noms auront été changés ;
Attendu que la société Blooms défaille ainsi à établir le véritable coût de telles démarches et modifications de sa communication et de son site internet et en particulier celles strictement nécessaires pour respecter les injonctions du juge de première instance ;
Attendu que s’agissant de son site internet, aucun élément de notoriété et de référencement n’a été fourni concernant le nom de domaine «blooms.fr» et il ne peut être présumé que l’utilisation d’un nouveau nom pour l’activité de vente en ligne est de nature à hypothéquer de manière disproportionnée l’accès des clients et prospects à son site enregistré sous un autre nom de domaine ;
Que le caractère irréversible d’un tel changement de nom de domaine correspondrait d’ailleurs en fait à l’impact même de ce changement en exécution du jugement, impact dont il vient d’être relevé qu’aucune donnée concrète n’est fournie pour en discerner les contours ; que la perte de l’usage d’un tel nom de domaine est inhérente à une décision statuant en matière de contrefaçon et ne peut ainsi être érigée par principe comme constituant un risque de conséquences disproportionnées ou irréversibles pour l’activité commerciale de la société Blooms ;
Attendu que s’agissant ensuite du transfert de ce nom de domaine, dont il est maintenant établi qu’il est la propriété de sa société holding Emova group, il convient de rappeler que l’impossibilité d’exécuter une décision ne caractérise pas nécessairement une conséquence manifestement excessive, alors que l’astreinte ordonnée reste soumise à l’examen du juge de l’exécution chargé de prendre en compte notamment cette impossibilité ;
Que cette difficulté ne permet pas à la demanderesse d’invoquer des craintes sur la faculté de la société Bloom trade d’en faire usage ; que l’allégation d’un arrêt pérenne et toujours actuel du site bebloom.com mis en ligne par la société Bloom trade, discutée par cette dernière, est indifférente pour l’appréciation de l’existence de conséquences manifestement excessives susceptibles de résulter de l’exécution provisoire pour la société Blooms ;
Attendu que s’agissant enfin des condamnations financières prononcées par le tribunal judiciaire de Lyon, s’élevant à 75 000 € en dehors des dépens qui ne sont pas vérifiables en l’état des pièces produites, la société Blooms affirme qu’elles mettraient inévitablement en péril l’entreprise et ne verse aux débats à ce sujet qu’un document intitulé «comptes annuels» comportant une mention manuscrite et une signature non identifiées et dits comme reflétant les comptes et le bilan de la société arrêté au 30 septembre 2021 ;
Qu’en dehors du fait que rien n’établit que les chiffres que ce document contient soient certifiés par un expert-comptable, il n’en ressort pas d’éléments susceptibles d’éclairer sur la capacité actuelle, alors que l’exercice suivant vient de prendre fin, de la société Blooms à supporter le paiement des condamnations concernées ;
Que particulièrement, ce document déjà ancien est taisant sur sa trésorerie et n’objective en rien une évolution défavorable par rapport à l’exercice 2020, qui avait connu un déficit de 6 706 € alors qu’un bénéfice de 29 931 € a été enregistré l’année suivante ;
Attendu qu’en l’état de la discussion opposée par la société Bloom trade sur la pertinence de ce seul document comptable pour étayer un risque de conséquences manifestement excessives, il convient de retenir la carence de la société demanderesse à fournir les éléments financiers nécessaires à cette fin ;
Que l’existence d’un groupe autour de la société Blooms, dont il n’est pas discuté de l’ampleur et de la santé financière, pour ne pas permettre de supposer qu’il soit en capacité ou obligé d’honorer le paiement à la place d’une société fille ou soeur, permet néanmoins de considérer en l’état de l’existence d’une directrice financière unique (cf l’attestation dressée par cette dernière le 1er juillet 2022) qu’il appartiendra aux dirigeants concernés de déterminer l’opportunité d’aider une filiale qui est affirmée comme en situation difficile ;
Attendu que la société Blooms est retenue comme défaillante à démontrer les risques de conséquences manifestement excessives nécessaires pour qu’il soit droit à sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire, qui doit être rejetée ;
Sur la demande subsidiaire et mixte de consignation et d’arrêt de l’exécution provisoire pour le surplus
Attendu que la société Blooms sollicite, au seul visa de l’article 521 ancien du Code de procédure civile et à titre subsidiaire, l’autorisation de consigner une somme de 10 000 €, qualifiant sa prétention comme une demande de consignation partielle de ses condamnations, supposant selon elle qu’un arrêt de l’exécution provisoire pour le surplus de ces condamnations soit prononcée ;
Attendu qu’aux termes de cet article 521 du code de procédure civile, la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation ;
Que le pouvoir prévu par ce texte est laissé à la discrétion du premier président, le demandeur n’ayant comme charge que d’invoquer un motif légitime pour être autorisé à procéder à cette consignation qui n’a pas pour effet d’arrêter l’exécution provisoire mais d’empêcher sa poursuite ;
Attendu que la société Bloom trade soutient à bon droit qu’il s’agit d’une demande de cantonnement de l’exécution provisoire qui suppose nécessairement que l’offre de consignation soit suffisante à garantir le montant des condamnations ;
Qu’en proposant une somme limitée à 10 000 €, bien faible part de condamnations pécuniaires dites s’élevant au total selon elle à 79 000 €, la société Blooms après avoir sollicité en vain un arrêt de l’exécution provisoire, opère un détournement de l’objet même de la consignation qui est destinée à permettre aux parties d’attendre sereinement le résultat de l’appel et dans une sécurité financière assurant l’exécution du jugement déféré s’il était confirmé ;
Attendu que cette société demanderesse n’est pas sérieuse en offrant un tel montant pour considérer qu’il suffit à sécuriser les parties dans l’attente de la décision de la cour ;
Que cette demande de consignation doit être rejetée ;
Sur la demande infiniment subsidiaire de fixer de l’affaire en application de l’article 917 du Code de procédure civile
Attendu qu’à titre liminaire, les termes de l’article 948 du Code de procédure civile sont inapplicables en ce que ce texte régit les procédures sans représentation obligatoire, alors qu’il n’est pas discuté que la procédure d’appel en cours soit soumise à la représentation obligatoire ;
Attendu que l’article 917 de ce code dispose que «si les droits d’une partie sont en péril, le premier président peut, sur requête, fixer le jour auquel l’affaire sera appelée par priorité. Il désigne la chambre à laquelle l’affaire est distribuée.
Les dispositions de l’alinéa qui précède peuvent également être mises en oeuvre par le premier président de la cour d’appel ou par le conseiller de la mise en état à l’occasion de l’exercice des pouvoirs qui leur sont conférés en matière de référé ou d’exécution provisoire.» ;
Attendu que la société Bloom trade soutient au visa des articles 918 et 919 du même code le rejet de la demande de fixation prioritaire alors que ces textes édictent les conditions de la recevabilité temporelle et matérielle d’une requête pouvant être présentée au premier président avant même que l’appel ne soit interjeté ; que la société Bloom trade n’a pas fait figurer au dispositif de ses écritures une telle prétention tendant à l’irrecevabilité de la demande de fixation prioritaire ;
Attendu que l’article 917, en contenant un alinéa dédié aux cas où l’appel a d’ores et déjà été interjeté, condition même de la saisine du premier président et de la désignation d’un conseiller de la mise en état, est venu distinguer cette faculté de celle consacrée initialement à la période antérieure à la saisine de la cour ;
Qu’il est d’ailleurs difficile d’envisager que le conseiller de la mise en état chargé notamment de statuer sur le prononcé ou le rétablissement de l’exécution provisoire puisse être saisi dans le délai de huit jours de la déclaration d’appel comme il est prévu dans l’alinéa 2 de l’article 919, l’absence de certitude de sa désignation dans un délai aussi bref privant alors de toute portée cette partie de l’article 917 lui conférant un tel pouvoir ;
Attendu que le moyen injustement qualifié comme tendant au rejet de la demande de fixation prioritaire et non à son irrecevabilité doit être rejeté comme inopérant ;
Attendu qu’il appartient à la société Blooms de caractériser que ses droits sont en péril, péril qui est contesté par la société Bloom trade qui relève que son adversaire a attendu trois mois pour conclure au soutien de son appel, ces écritures ayant été déposées devant la cour le 13 septembre 2022 ;
Que la société défenderesse souligne avec à propos que son adversaire n’a pas tenté de saisir, plus rapidement et dans le délai de l’article 919, le premier président ou son délégataire d’une demande initiale de fixation prioritaire, alors que la décision du tribunal judiciaire de Lyon a été signifiée le 23 mai 2022 et a fait courir les astreintes ordonnées dès le 24 juillet 2022 ;
Attendu que son appel a été formé le 14 juin 2022 et l’assignation contenant cette demande infiniment subsidiaire de fixation prioritaire a été délivrée le 19 juillet 2022 soit dans un temps très proche du début de la course de ces astreintes ; qu’il n’est pas plus indiqué que le président de chambre a depuis lors été saisi d’une demande de fixation rapide de l’appel dans le cadre de la procédure des articles 905 et suivants du code de procédure civile ;
Attendu qu’il vient d’être motivé d’une part que la société Blooms avait échoué à caractériser l’existence de conséquences irréversibles ou disproportionnées et d’autre part qu’elle s’était focalisée sur sa contestation de la décision critiquée en appel dont elle sait qu’elle ne peut être examinée par le premier président dans le cadre de ce référé, dépourvu en l’espèce de tout pouvoir juridictionnel pour apprécier le bien fondé du recours ;
Attendu que cette carence probatoire concerne également les éventuelles conséquences sur son activité économique de la mise en oeuvre des injonctions et condamnations prononcées par le tribunal judiciaire de Lyon, en l’absence de véritables données objectivant les effets d’un changement de dénomination ou de nom de domaine, en particulier sur l’importance du chiffre d’affaires susceptible d’être réalisé dans ce nouveau cadre ; que l’allégation d’un préjudice d’image dit comme étant «de nature à être engendré» sans autre élément ne peut convaincre dans l’ignorance des effets réels du respect des injonctions portant sur l’utilisation des signes «Blooms» et «Bloom’s» dans les site et réseaux sociauxconcernés ;
Que cette demande de fixation prioritaire est dès lors rejetée ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Attendu que la société Blooms succombe et doit supporter les dépens de ce référé, comme indemniser son adversaire des frais irrépétibles engagés pour assurer sa défense ;
Que cette instance en référé étant distincte de celle d’appel, ses dépens doivent être liquidés, à charge éventuelle pour la cour, dépourvue de pouvoir pour les liquider, de décider de les inclure dans ceux d’appel ;
PAR CES MOTIFS
Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,
Vu la déclaration d’appel du 14 juin 2022,
Rejetons les demandes d’arrêt et d’aménagement de l’exécution provisoire comme de fixation prioritaire de l’affaire devant la cour présentées par la S.A.S. Bloom’s,
Condamnons la S.A.S. Bloom’s aux dépens de ce référé et à verser à la S.A.S.U. Bloom trade une indemnité de 1 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE