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L’illiceité de la reproduction de clichés, même pris à l’insu de la personne y figurant, dépend intrinsèquement du contexte de leur publication.
S’il a été retenu que la reproduction des clichés en cause constitue une atteinte aux droits de la partie demanderesse, il ne peut être préjugé, en droit, du fait que ceux-ci ne pourront pas être utilisés afin d’illustrer, licitement, un article à paraître, dans les conditions préalablement énoncées, notamment en présence d’un fait d’actualité ou d’un débat d’intérêt général. D’autre part, la seule limite absolue et intangible à cette possibilité réside dans la protection de la dignité humaine, à laquelle le cliché en cause ne porte pas atteinte. Ainsi, la demande d’interdiction de toute nouvelle diffusion des photographies litigieuses apparaît disproportionnée, étant toutefois observé que la société défenderesse s’expose à de possibles nouvelles condamnations en cas d’atteintes réitérées aux droits de la personnalité de la partie demanderesse. |
Résumé de l’affaire :
Contexte de l’AffaireLe 15 avril 2024, [J] [H] a assigné en référé la société Public Publishing, éditrice de l’hebdomadaire Public, devant le tribunal judiciaire de Nanterre. Il réclame réparation pour atteintes à ses droits de la personnalité suite à la publication d’un article et de photographies le concernant dans le numéro 1078 du 8 mars 2024. Demandes de [J] [H]Dans son assignation, [J] [H] demande au juge des référés de condamner Public Publishing à lui verser 20 000 euros pour atteinte à sa vie privée et 20 000 euros pour atteinte à son droit à l’image. Il souhaite également la publication d’un texte sur la couverture du prochain numéro du magazine, interdire la diffusion des photographies en question, et obtenir 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Réponse de Public PublishingPublic Publishing a contesté les demandes de [J] [H], demandant son déboutement et, à titre subsidiaire, une évaluation du préjudice à un euro symbolique. La société a également demandé 3 000 euros pour ses frais et dépens. Contenu de l’Article ContestéL’article en question, intitulé « [J] [H] – Heureusement, il a sa famille », évoque la vie professionnelle de [J] [H] ainsi que sa relation avec son fils. Il est illustré par plusieurs photographies, dont certaines le montrent en train de porter son enfant. Atteintes à la Vie Privée et au Droit à l’ImageLes articles 8 et 9 de la Convention européenne des droits de l’homme garantissent le respect de la vie privée et de l’image. Le tribunal a constaté que les informations publiées dans l’article entraient dans le champ de la protection de la vie privée, notamment en ce qui concerne la relation de [J] [H] avec son fils. Évaluation du PréjudiceLe juge a déterminé que le préjudice moral causé à [J] [H] était significatif, en tenant compte de la nature des atteintes et de l’ampleur de la publication. Il a alloué 3 000 euros pour l’atteinte à la vie privée et 2 000 euros pour l’atteinte au droit à l’image. Demande d’Interdiction de DiffusionLa demande d’interdiction de toute nouvelle diffusion des photographies a été jugée disproportionnée. Le tribunal a noté que la reproduction des clichés pourrait être licite dans un contexte approprié. Demande de Publication JudiciaireLa demande de publication judiciaire a été rejetée, le tribunal estimant que le préjudice était suffisamment réparé par les sommes allouées. Décision FinaleLe tribunal a condamné Public Publishing à verser à [J] [H] 3 000 euros pour l’atteinte à sa vie privée et 2 000 euros pour l’atteinte à son droit à l’image. Les demandes de publication judiciaire et d’interdiction de réutilisation des clichés ont été rejetées, et la société a été condamnée aux dépens. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
RÉFÉRÉS
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ RENDUE LE 24 OCTOBRE 2024
N° RG 24/00946 – N° Portalis DB3R-W-B7I-ZNDF
N° :
Monsieur [J] [H]
c/
S.A.S. PUBLIC PUBLISHING
DEMANDEUR
Monsieur [J] [H]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Maître Roland PEREZ de la SELEURL GOZLAN PEREZ ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0310
DEFENDERESSE
S.A.S. PUBLIC PUBLISHING
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Maître Patrick SERGEANT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B1178
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Présidente : Alix FLEURIET, Vice-présidente, tenant l’audience des référés par délégation du Président du Tribunal,
Greffière : Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière,
Statuant publiquement en premier ressort par ordonnance réputée contradictoire mise à disposition au greffe du tribunal, conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
Nous, Président , après avoir entendu les parties présentes ou leurs conseils, à l’audience du 13 juin 2024, avons mis l’affaire en délibéré au 12 septembre 2024, prorogé à ce jour.
Par acte d’huissier de justice en date du 15 avril 2024, [J] [H] a fait assigner en référé la société Public Publishing, éditrice de l’hebdomadaire Public, devant le président du tribunal judiciaire de Nanterre, afin d’obtenir réparation d’atteintes aux droits de la personnalité qu’il estime avoir subies du fait de la publication d’un article et de photographies le concernant dans le numéro 1078, du 8 mars 2024, de ce magazine.
Aux termes de son assignation, développée oralement à l’audience, [J] [H] demande au juge des référés, au visa des articles 8 et 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et 9 du code civil, de :
– condamner la société Public Publishing à lui payer, à titre de dommages et intérêts provisionnels, la somme de 20 000 euros en réparation l’atteinte portée à son droit à a vie privée,
– condamner la société Public Publishing à lui payer, à titre de dommages et intérêts provisionnels, la somme de 20 000 euros en réparation l’atteinte portée à son droit à l’image,
– ordonner la publication, aux frais de la société Public Publishing, en page de couverture du numéro du magazine Public à paraître immédiatement après la signification du présent jugement, sous astreinte de 5 000 euros par numéro de retard, du texte suivant :
“ PUBLIC CONDAMNE A LA DEMANDE DE [J] [H]
Par jugement rendu le , le tribunal judiciaire de Nanterre a condamné la société CMI Publishing pour avoir violé les droits à l’intimité de sa vie privée et à l’image de [J] [H] par la publication d’un article le concernant et de 4 photographies volées le représentant dans le n° 1078 du magazine PUBLIC”
– interdire à la société Public Publishing sous astreinte de 2000 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification de la présente ordonnance, la diffusion, la reproduction ou la mise en ligne des clichés d’illustration de l’article en cause ;
– condamner la société Public Publishing à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société Public Publishing aux dépens.
Aux termes de ses conclusions notifiées par la voie électronique le 11 juin 2024 et développées oralement à l’audience, la société Public Publishing demande au juge des référés, au visa des articles 9 du code civil et 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, de :
– débouter [J] [H] de ses demandes,
– à titre subsidiaire, dire et juger que le préjudice subi par [J] [H] est évalué à la somme d’un euro symbolique ;
-le condamner à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’en tous frais et dépens.
L’ordonnance sera contradictoire.
La publication litigieuse
L’hebdomadaire Public n° 1078 du 8 mars 2024 consacre à [J] [H] un article de deux pages annoncé en page de couverture sous le titre « [J] [H] – Heureusement, il a sa famille» et le sous titre « Professionnellement, tout ne serait pas rose, mais le papa gâteau peut compter sur les siens ». Cette annonce est illustrée par une photographie, occupant la majeure partie de la une, le représentant en gros plan, portant son fils dans les bras. En surimpression de ce cliché, est apposé un encadré sur lequel figure les mentions « PARIS, le 02/03/2024 » et « PHOTOS EXCLU ».
L’article, développé en pages 8 et 9 a pour titre « Avec bébé, il oublie les contrariétés !», et pour sous-titre « Papa depuis le 28 juin 2022, le plus célèbre des chefs pâtissiers est littéralement comblé par son petit [U]. Et heureusement, car ce ne serait pas la joie côté pro…».
S’il évoque essentiellement la vie professionnelle de l’intéressé, en particulier ses difficultés à trouver un local pour installer sa deuxième pâtisserie à [Localité 8], il relate également, notamment, que :
– à son retour de l’Ile Maurice le 2 mars 2024, “il mourait d’envie de retrouver enfin [U], 20 mois”, et qu’il se trouvait d’ailleurs ce jour-là dans les rues de [Localité 7] avec lui,
– “l’amour inconditionnel qu’il lit dans ces jolis yeux d’enfant doit aider à le calmer”,
– il souhaiterait passer plus de temps à [Localité 8] “pour profiter au calme de sa petite famille”.
L’article est illustré par quatre photographies dont l’une est identique à la photographie figurant en page de couverture. Sur deux clichés, il est debout et porte son fils dans ses bras, et sur les deux autres photographies, il tient son téléphone portable dans ses mains ou le porte à son oreille.
Les atteintes à la vie privée et au droit à l’image
Les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 9 du code civil garantissent à toute personne, quelles que soient sa notoriété, sa fortune, ses fonctions présentes ou à venir, le respect de sa vie privée et de son image. L’article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales garantit l’exercice du droit à l’information des organes de presse dans le respect du droit des tiers.
La combinaison de ces deux principes conduit à limiter le droit à l’information du public d’une part, pour les personnes publiques, aux éléments relevant de la vie officielle, et d’autre part, aux informations et images volontairement livrées par les intéressés ou que justifie une actualité ou un débat d’intérêt général. Ainsi chacun peut s’opposer à la divulgation d’informations ou d’images ne relevant pas de sa vie professionnelle ou de ses activités officielles et fixer les limites de ce qui peut être publié ou non sur sa vie privée, ainsi que les circonstances et les conditions dans lesquelles ces publications peuvent intervenir.
Les informations ici diffusées entrent à l’évidence dans le champ de la protection de la vie privée instituée par les textes précités, pour concerner notamment la relation de [J] [H] avec son fils, sa vie familiale et la place qu’il leur accorde dans sa vie quotidienne, ainsi que pour faire état de ses sentiments.
La société défenderesse soutient que, dans le contexte de la médiatisation importante du couple qu’il forme avec [Z] [O], de la naissance de son enfant en juin 2022 et de sa vie professionnelle, l’article litigieux, qui se borne à évoquer l’affection que le demandeur porte à son fils et son souhait d’être le plus souvent possible à ses côtés, en contrepoint d’une activité professionnelle soutenue, est banal et convenu et ne saurait en conséquence être constitutif d’une atteinte portée à sa vie privée.
Cependant, le caractère prétendument anodin de ces informations ne saurait être retenu pour faire obstacle à la reconnaissance de l’atteinte alléguée, alors que l’article fait état du sentiment d’anxiété ressenti par [J] [H], ainsi que de sa joie de partager du temps avec sa famille et en particulier avec son fils, éléments qui, s’ils apparaissent insignifiants aux yeux des tiers, imprègnent en revanche toute sa vie quotidienne et à cet égard peuvent s’avérer pour lui significatifs et légitimes à être protégés.
En outre, il n’est pas démontré qu’il s’est exprimé avant la parution de l’article sur son état pshychologique, ainsi que sur sa vie sentimentale ou familiale, ni qu’il a autorisé la société défenderesse à le faire, pas plus qu’il n’est soutenu que les informations livrées relèveraient d’un débat d’intérêt général ou constitueraient un sujet d’actualité.
Par ailleurs, l’illustration de l’article litigieux par quatre photographies manifestement fixées à son insu, le représentant dans un lieu dont le caractère public n’autorisait pas pour autant la captation d’un moment de détente et de loisirs, prolonge l’atteinte portée à sa vie privée tout en violant le droit qu’il a sur son image, sans que cela soit rendu nécessaire là encore par un débat d’intérêt général ou un sujet d’actualité.
Les atteintes alléguées sont en conséquence constituées avec l’évidence requise en référé et commandent que le juge statue sur les demandes formées.
Les mesures de réparation
La provision
En application de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que dans les cas où l’obligation n’est pas sérieusement contestable ; faute de contestation sérieuse des atteintes alléguées, il appartient au juge des référés de fixer à quelle hauteur l’obligation de réparer n’est pas sérieusement contestable. La seule constatation de l’atteinte au droit à la vie privée et au droit à l’image par voie de presse ouvre droit à réparation, le préjudice étant inhérent à ces atteintes. Le demandeur doit toutefois justifier de l’étendue du dommage allégué, le préjudice étant apprécié concrètement, au jour où le juge statue, compte tenu de la nature des atteintes et des éléments versés aux débats.
L’atteinte au respect dû à la vie privée et l’atteinte au droit à l’image constituent des sources de préjudice distinctes, pouvant ouvrir droit à des réparations différenciées. L’allocation de dommages et intérêts ne se mesure pas à la gravité de la faute commise, ni au chiffre d’affaires réalisé par l’éditeur de l’organe de presse en cause. Cependant, l’étendue de la divulgation et l’importance du lectorat d’un magazine, sont de nature à accroître le préjudice.
Par ailleurs, dans le cas où le demandeur s’est largement exprimé sur sa vie privée, cette attitude ne le prive pas de toute protection de sa vie privée mais justifie une diminution de l’appréciation du préjudice.
En l’espèce, l’étendue du préjudice moral causé à [J] [H] doit être appréciée en considération de :
– l’objet même des atteintes relevées, qui portent sur sa vie familiale et sa relation à son fils et font état de ses sentiments présumés,
– l’ampleur donnée à leur exposition du fait de :
*l’annonce tapageuse de l’article en page de couverture du magazine, avec l’utilisation d’une police de grande taille et en couleurs criardes, d’une photographie le représentant en gros plan avec son enfant, et de la mention « PHOTOS EXCLU », éléments destinés à capter l’attention d’un large public, et à être vus, y compris des non lecteurs habituels du magazine,
*la surface éditoriale consacrée aux atteintes constatées (en couverture et deux pages intérieures) ;
*l’importance de la diffusion du magazine litigieux, qui jouit d’une large visibilité et touche un public nombreux, étant précisé à ce titre que si l’allocation de dommages et intérêts ne se mesure pas au chiffre d’affaires réalisé par l’éditeur de l’organe de presse en cause, l’étendue de la divulgation et l’importance du lectorat d’un magazine sont de nature à accroître le préjudice ;
– la captation de plusieurs clichés photographiques d’illustration représentant l’intéressé, dans un moment d’intimité, procédé en lui-même générateur d’un trouble par l’intrusion qu’il opère dans un moment de vie privée, le caractère public du lieu de fixation ne pouvant être regardé comme propre à annihiler le préjudice en résultant.
En outre, il est relevé que les termes de l’article, ainsi que ceux du titre et du sous-titre figurant en page de couverture, ne présentent pas un caractère bienveillant, dès lors qu’ils évoquent certes une vie familiale épanouie et un parcours personnel et professionnel marqué par la volonté inébranlable du demandeur, mais font état également d’une situation difficile dans ses affaires, le rendant anxieux et lui causant “des contrariétés”.
La société défenderesse soutient que [J] [H] fait preuve d’une franche complaisance à l’égard des médias.
Elle produit en premier lieu plusieurs articles de presse qui sont pour l’essentiel relativement anciens ou qui émanent de publications non autorisées. En outre, s’il est relevé qu’il s’est exprimé à plusieurs reprises dans le cadre d’interviews pour la presse écrite ou d’émissions de radio ou de télévision sur divers sujets relevant de sa vie privée, notamment s’agissant de son enfance, de sa vie familiale ou encore de son désir de paternité, ses propos ont toutefois été relativement généraux, peu détaillés, apportés dans un contexte appelant quelques confidences, réponses convenues dans ce type d’exercice de communication, de sorte qu’il n’est pas démontré, par la production de ces pièces, une complaisance marquée et habituelle de sa part à l’égard des médias.
Elle produit en deuxième lieu des extraits de son compte Instagram (pièce n° 5) qui sont insuffisants à remettre en cause ce constat. En effet, la consultation des photographies publiées par l’intéressé montre qu’il ne s’y représente qu’en de rares occasions dans des moments relevant de sa vie privée (notamment une photographie avec son père, une photographie sur laquelle il pose à cheval en compagnie d’un ami avec lequel il vient manifestement de jouer au polo) ou qu’il se contente de révéler ses lieux de villégiatures ([Localité 5], le [Localité 6], [Localité 8], l’Ile Maurice etc), sans qu’il ne précise la plupart du temps avec qui il s’y trouvait, en quelle occasion ou quel loisir il y a pratiqué.
Enfin, en troisième lieu, la société défenderesse fait état de la sortie en février 2024 d’un film documentaire intitulé Qu’est-ce qu’on va faire de toi ?, retraçant le parcours de [J] [H], et produit à cet égard un article paru sur le site Internet du Figaro le12 janvier 2024, qui révèle non seulement que le chef cuisinier a été suivi pour la réalisation de cette oeuvre audiovisuelle pendant trois ans dans les coulisses de sa vie professionnelle, mais aussi que le film documentaire s’est construit à partir de rencontres avec des proches de l’intéressé, notamment avec sa soeur. Cependant, force est de constater qu’il ne ressort pas de la lecture de cet article que [J] [H] s’est confié lors du tournage de ce documentaire sur sa relation sentimentale, sur la naissance de son fils, ainsi que de manière plus générale sur la vie de famille qu’il a construit avec sa compagne.
Aussi, l’ensemble des éléments qui précèdent ne démontrent que dans une faible mesure une moindre aptitude de [J] [H] à souffrir des effets de la publication de l’article litigieux.
Ainsi, en l’absence de production par ce dernier d’éléments extrinsèques à la publication en cause, permettant d’apprécier plus avant la gravité particulière du préjudice subi, il conviendra de lui allouer, à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice, la somme de 3 000 euros pour l’atteinte faite à sa vie privée et 2 000 euros pour l’atteinte faite à son droit à l’image, montants à concurrence desquels l’obligation de la société défenderesse n’apparaît pas sérieusement contestable.
La demande d’interdiction de toute nouvelle diffusion des photographies publiées dans le magazine Public n° 1078
Il convient de rappeler que la liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que constituent les réparations civiles que dans les cas où celles-ci, prévues par la loi et poursuivant un but légitime dans une société démocratique, constituent des mesures nécessaires au regard du paragraphe 2 de l’article 10 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et ne portent pas une atteinte disproportionnée à l’exercice de cette liberté.
En l’espèce, [J] [H] sollicite des dommages et intérêts pour réparer l’atteinte faite à sa vie privée et à son droit à l’image, sur lesquelles il a été statué, de sorte que la mesure sollicitée constitue une réparation complémentaire du préjudice subi.
Or et d’une part, l’illiceité de la reproduction de clichés, même pris à l’insu de la personne y figurant, dépend intrinsèquement du contexte de leur publication, et s’il a été retenu que la reproduction des clichés en cause dans l’article litigieux constitue une atteinte aux droits de la partie demanderesse, il ne peut être préjugé, en droit, du fait que ceux-ci ne pourront pas être utilisés afin d’illustrer, licitement, un article à paraître, dans les conditions préalablement énoncées, notamment en présence d’un fait d’actualité ou d’un débat d’intérêt général.
D’autre part, la seule limite absolue et intangible à cette possibilité réside dans la protection de la dignité humaine, à laquelle le cliché en cause ne porte pas atteinte.
Ainsi, cette demande d’interdiction de toute nouvelle diffusion des photographies litigieuses apparaît disproportionnée, étant toutefois observé que la société défenderesse s’expose à de possibles nouvelles condamnations en cas d’atteintes réitérées aux droits de la personnalité de la partie demanderesse.
La demande de publication judiciaire
Il convient de rappeler que la liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que constituent les réparations civiles que dans les cas où celles-ci, prévues par la loi et poursuivant un but légitime dans une société démocratique, constituent des mesures nécessaires au regard du paragraphe 2 de l’article 10 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et ne portent pas une atteinte disproportionnée à l’exercice de cette liberté.
En l’espèce, [J] [H] sollicite des dommages et intérêts pour réparer l’atteinte faite à sa vie privée et à son droit à l’image, sur lesquelles il a été statué, de sorte que la mesure sollicitée constitue une réparation complémentaire du préjudice subi.
Dès lors, et sans qu’il y ait lieu de procéder à l’analyse du caractère proportionné d’une telle mesure, il y a lieu de juger en l’espèce que le préjudice non sérieusement contestable est suffisamment réparé par les sommes octroyées et qu’en conséquence cette demande ne sera pas ordonnée, n’étant pas nécessaire.
Les autres demandes
L’article 696 du code de procédure civile énonce que la partie perdante est en principe condamnée aux dépens. Il y a en conséquence lieu de condamner la société Public Publishing, qui succombe, aux dépens.
L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il doit à ce titre tenir compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut écarter pour les mêmes considérations cette condamnation.
Il serait inéquitable de laisser à la partie demanderesse la charge des frais irrépétibles qu’elle a dû exposer pour la défense de ses intérêts et il y aura lieu en conséquence de condamner la société défenderesse à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, rendue en premier ressort par mise à disposition au greffe le jour du délibéré,
Condamnons la société Public Publishing à payer à M. [J] [H] une indemnité provisionnelle de trois mille euros (3 000 €) à valoir sur la réparation de son préjudice moral résultant de l’atteinte au respect dû à sa vie privée par la publication d’un article le concernant et de photographies le représentant dans le n° 1078 du magazine Public du 8 mars 2024,
Condamnons la société Public Publishing à payer à M. [J] [H] une indemnité provisionnelle de deux mille euros (2 000 €) à valoir sur la réparation de son préjudice moral résultant de l’atteinte au droit dont il dispose sur son image par la publication de photographies le représentant dans le n° 1078 du magazine Public du 8 mars 2024,
Rejetons les demandes de publication judiciaire et d’interdiction de réutilisation des clichés formées par M. [J] [H],
Condamnons la société Public Publishing à payer à M. [J] [H] la somme de deux mille euros (2 000 €) en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejetons toute demande plus ample ou contraire,
Condamnons la société Public Publishing aux dépens,
Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision.
FAIT À NANTERRE, le 24 octobre 2024.
LA GREFFIÈRE
Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière
LA PRÉSIDENTE
Alix FLEURIET, Vice-présidente