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L’artiste musicien qui ne permet pas, par son inertie, à sa société de production de remplir ses missions de promotions et de marketing, engage sa responsabilité.
Si le contrat contient la réserve “dans la mesure de ses possibilités”, l’artiste, qui a fait preuve de carence, voire d’inertie, durant de très longs mois ne justifie pas avoir été empêché de répondre favorablement aux demandes réitérées qui lui étaient adressées, engage sa responsabilité contractuelle. |
→ Résumé de l’affaireLa SARL Sphere France a conclu un contrat avec les membres du groupe Holy Jack pour l’enregistrement d’un album, mais a ensuite signifié l’interruption rétroactive du contrat en raison du manque de diligence d’un des membres. Après un jugement du tribunal de Libourne déboutant la SARL de ses demandes, elle a interjeté appel et demande des dommages-intérêts pour le préjudice subi. De son côté, le membre du groupe conteste les demandes de la SARL et demande le paiement de 2 500 euros. Le litige est en attente de jugement suite à l’ordonnance de clôture rendue en janvier 2024.
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→ Les points essentielsSur la responsabilité contractuelle de M. [X]A titre liminaire et au regard de la date de conclusion des deux contrats, ce sont les textes du Code civil antérieurs à ceux issus de l’ordonnance numéro 2016-131 du 10 février 2016 qui ont vocation à s’appliquer. Aux termes des dispositions de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance numéro 2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part. Pour ce qui concerne le premier contratIl est acquis que le groupe Holy Jack a enregistré 11 titres au sein des locaux de la S.A.R.L. Sphere France après avoir préalablement signé avec celle-ci le 04 novembre 2012 un contrat de production d’artiste. Certes, seul M. [X] a émargé ce document en qualité de “chef” du groupe mais tous les membres ont paraphé chaque page de ce document. La S.A.R.L. Sphere France ne peut prétendre subir un préjudice liée à l’inexécution par M. [X] de ses obligations dans la mesure où, seulement quelques mois après avoir adressé la lettre recommandée signifiant la fin des relations contractuelles, elle a proposé et signé un nouveau contrat avec cet artiste contenant des clauses parfaitement identiques. Pour ce qui concerne le second contratUn second contrat, conclu exclusivement entre l’appelante et M. [X], a été véritablement conclu le 17 août 2015. Cet accord est intervenu alors que le disque intitulé “deep down inside” avait été enregistré, mixé et masterisé. 1010 exemplaires ont été produits. Il appartient à la S.A.R.L. Sphere France de démontrer les manquements contractuels de M. [X]. S’agissant du défaut de communication des éléments indispensables aux opérations de promotion et de publicitéLe contrat stipule que la promotion ainsi que la publicité des enregistrements de l’artiste sera assurée par SPHERE selon les usages de la profession. M. [X] n’a pas respecté ses engagements en ne fournissant pas les éléments nécessaires pour la promotion. S’agissant du défaut de participation aux opérations de promotion et de publicitéM. [X] n’a pas participé aux opérations de promotion et de publicité comme convenu dans le contrat, causant ainsi un préjudice à la S.A.R.L. Sphere France. S’agissant du manquement à l’obligation d’exclusivitéM. [X] a enfreint l’obligation d’exclusivité en enregistrant des vidéos avec d’autres musiciens, ce qui va à l’encontre du contrat. Sur le préjudice de la S.A.R.L. Sphere FranceLa société de production a subi une perte de profits en raison des manquements de M. [X], qui ont empêché la réalisation d’opérations promotionnelles et la vente des disques. Sur l’article 700 du code de procédure civileM. [X] est condamné à verser une indemnité à la S.A.R.L. Sphere France en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens de première instance et d’appel. Les montants alloués dans cette affaire: – Mme [W] [Z] et M. [T] [Z] sont condamnés aux entiers dépens.
– Mme [W] [Z] et M. [T] [Z] doivent payer à l’association Jeunesse Etudes Voyage la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. |
→ Réglementation applicableAux termes des dispositions de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance numéro 2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
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→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me David LARRAT de la SELARL H.L. CONSEILS & CONTENTIEUX, avocat au barreau de BERGERAC
– Me Jean-baptiste BORDAS, avocat au barreau de BORDEAUX |
→ Mots clefs associés & définitions– Motifs de la décision
– Responsabilité contractuelle – Code civil – Contrat de production d’artiste – Groupe Holy Jack – SARL Sphere France – Dommages et intérêts – Inexécution des obligations – Retard dans l’exécution – Cause étrangère – Premier contrat – Deuxième contrat – Manquements contractuels – Promotion et publicité – Photographies – Graphistes – Participation aux opérations de promotion – Obligation d’exclusivité – Changements d’adresse – Préjudice financier – Perte de profits – Vente des disques – Inertie – Retards dans la transmission de documents – Préjudice moral – Article 700 du code de procédure civile – Indemnité – Dépens – Motifs de la décision : Raisons et justifications légales sur lesquelles un juge se base pour rendre son verdict.
– Responsabilité contractuelle : Obligation de réparer le préjudice causé par la non-exécution ou la mauvaise exécution d’un contrat. – Code civil : Recueil organisé de règles juridiques régissant les droits et les obligations des personnes, des biens et des relations privées. – Contrat de production d’artiste : Accord légal entre un artiste et une société de production qui définit les droits et obligations relatifs à la production et à la distribution des œuvres de l’artiste. – Groupe Holy Jack : Hypothétique groupe de musique ou entité concernée par un contexte juridique spécifique. – SARL Sphere France : Société à responsabilité limitée opérant en France, possiblement impliquée dans des affaires juridiques ou commerciales. – Dommages et intérêts : Compensation financière accordée à une partie lésée pour réparer le préjudice subi. – Inexécution des obligations : Défaut de réalisation d’une ou plusieurs obligations contractuelles. – Retard dans l’exécution : Manquement à réaliser une obligation dans les délais fixés par le contrat. – Cause étrangère : Événement imprévisible, irrésistible et extérieur qui exonère une partie de sa responsabilité contractuelle. – Premier contrat : Référence au premier accord établi entre des parties dans un cadre juridique donné. – Deuxième contrat : Référence au second accord établi entre des parties, suivant ou modifiant le premier contrat. – Manquements contractuels : Violations des termes d’un contrat, qu’ils soient explicites ou implicites. – Promotion et publicité : Ensemble des activités destinées à promouvoir un produit, un service ou une marque. – Photographies : Images créées par un photographe, souvent protégées par des droits d’auteur et utilisées dans divers contextes commerciaux ou artistiques. – Graphistes : Professionnels qui créent des visuels pour divers supports de communication. – Participation aux opérations de promotion : Engagement d’une partie (souvent un artiste ou un produit) dans des activités promotionnelles. – Obligation d’exclusivité : Clause contractuelle limitant les parties à ne pas engager des relations commerciales ou contractuelles similaires avec d’autres entités. – Changements d’adresse : Modifications des adresses officielles de résidence ou d’affaires, pouvant affecter la communication contractuelle. – Préjudice financier : Dommage économique subi par une partie due à la non-exécution ou à la mauvaise exécution d’un contrat. – Perte de profits : Manque à gagner résultant directement d’une inexécution contractuelle. – Vente des disques : Commercialisation de supports musicaux, souvent sujet à des accords spécifiques entre artistes et producteurs. – Inertie : Manque d’action ou de réaction face à des obligations contractuelles, pouvant être considéré comme une forme de non-exécution. – Retards dans la transmission de documents : Manquement à fournir des documents nécessaires dans les délais prévus, pouvant affecter l’exécution contractuelle. – Préjudice moral : Dommage non financier, tel que souffrance ou atteinte à la réputation, résultant d’une action ou d’une inaction. – Article 700 du code de procédure civile : Disposition légale permettant à une partie de demander le remboursement des frais de justice non couverts par les dépens. – Indemnité : Compensation financière pour un préjudice ou une perte. – Dépens : Frais de justice qui doivent être payés par la partie perdante d’un procès. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
2ème CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 07 MARS 2024
N° RG 20/04624 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LZRA
S.A.R.L. SPHERE FRANCE
c/
[S] [X]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 29 octobre 2020 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LIBOURNE (RG : 19/00405) suivant déclaration d’appel du 25 novembre 2020
APPELANTE :
S.A.R.L. SPHERE FRANCE
SARL immatriculée sous le numéro 439 777 574 au Registre Du Commerce et des Sociétés de BERGERAC, ayant son siège social [Adresse 3], agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
Représentée par Me David LARRAT de la SELARL H.L. CONSEILS & CONTENTIEUX, avocat au barreau de BERGERAC
INTIMÉ :
Valentin SOULARD
né le 12 Décembre 1992 à
de nationalité Française,
demeurant[Adresse 1]e -[Localité 2]E
Représenté par Me Jean-baptiste BORDAS, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été examinée le 23 janvier 2024 en audience publique, devant la cour composée de :
Monsieur Jacques BOUDY, Président
Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller
Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Audrey COLLIN
Le rapport oral de l’affaire a été fait à l’audience avant les plaidoiries.
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
La Société à responsabilité limitée Sphere France (la S.A.R.L. Sphere France), spécialisée dans la production et diffusion de spectacles vivants ainsi que dans les productions phonographiques d’artistes, a conclu le 4 novembre 2012 un contrat avec les membres du groupe Holy Jack portant sur l’enregistrement d’un album.
Suivant un courrier recommandé distribué le 18 février 2015 et adressé au seul [S] [X], membre du groupe Holy Jack, la S.A.R.L. Sphère France a signifié l’interruption rétroactive du contrat au 14 février 2014 en raison du manque de diligence et d’investissement dont ce dernier aurait fait preuve depuis plus d’une année.
Le 16 juin 2015, la S.A.R.L. Sphere France a signé un second contrat au contenu identique que M. [S] [X], agissant en qualité de représentant du groupe Holy Jack, a régularisé le 17 août 2015.
Considérant avoir subi un grave préjudice en raison de l’inexécution par M. [S] [X] des principales obligations contractuelles lui incombant, la S.A.R.L. Sphere France a, suivant un acte d’huissier du 11 octobre 2018, saisi le tribunal de grande instance de Périgueux afin d’obtenir l’indemnisation de divers préjudices.
Par ordonnance du 7 mars 2019 le juge de la mise en état de Périgueux a déclaré le tribunal de grande instance de Périgueux territorialement incompétent au profit de la juridiction libournaise et ordonné la transmission du dossier au greffe de cette dernière.
Le jugement rendu le 29 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Libourne a :
– débouté la S.A.R.L. Sphere France de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
– condamné la S.A.R.L. Sphere France à verser à M. [S] [X] la somme de 2 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la S.A.R.L. Sphere France à supporter les entiers dépens de l’instance ;
– ordonné l’exécution provisoire.
Suivant une déclaration électronique du 25 novembre 2020, la S.A.R.L. Sphere France a interjeté appel de la décision.
Dans ses dernières conclusions du 22 février 2021, la S.A.R.L. Sphere France demande à la cour de :
A titre principal :
– constater qu’elle a produit l’album conformément à ses obligations contractuelles,
– constater que M. [X] n’a pas respecté ses obligations contractuelles, dont l’obligation de participer aux opérations de promotion et de publicité,
– constater qu’aucune vente de l’album n’a eu lieu malgré la commercialisation de l’album,
– en conséquence, juger que M. [X] a commis une faute contractuelle engageant sa responsabilité contractuelle,
– constater qu’elle a investi la somme totale de 27.577,07 euros HT dans la production de l’album de M. [X],
– en conséquence, condamner M. [X] à lui verser les sommes de :
– 27.577,07 euros au titre des dommages-intérêts,
– 30.000 euros pour dommages-intérêts au titre du gain dont elle a été privée,
– 10.000 euros au titre du préjudice moral subi,
A titre subsidiaire :
– constater qu’elle a produit l’album conformément à ses obligations contractuelles,
– constater que M. [X] n’a pas respecté ses obligations contractuelles, dont l’obligation de participer aux opérations de promotion et de publicité,
– constater que l’équité conduit à ce que chacun des cocontractants ait des engagements et les respecte,
– constater qu’il est d’usage dans la profession que l’artiste participe aux opérations de promotion et de publicité,
– constater qu’aucune vente de l’album n’a eu lieu malgré la commercialisation initiée par ses soins,
– juger que M. [X] a commis une faute au sens de l’équité et des usages engageant sa responsabilité à son égard,
– constater qu’elle a investi la somme totale de 27.577,07 euros HT dans la production de l’album de M. [X],
– en conséquence, condamner M. [X] à lui verser les sommes de :
– 27.577,07 euros au titre des dommages-intérêts,
– 30.000€ pour dommages-intérêts au titre du gain dont elle a été privée,
– 10.000€ au titre du préjudice moral subi,
En tout état de cause :
– condamner M. [X] au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et des entiers dépens, dont le constat d’huissier, sur le fondement de l’article 696 du Code de procédure civile et, au surplus, à tous les frais d’exécution, en ce compris le droit proportionnel dû à l’huissier de justice sur le fondement de l’article A444- 32 du Code de commerce.
Aux termes de ses dernières conclusions du 16 avril 2021, M. [S] [X] demande à la cour de :
– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
Y ajoutant :
– condamner la S.A.R.L. Sphère France à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la S.A.R.L. Sphère France aux entiers dépens, dont distraction, pour ceux d’appel, au profit de Me Jean-Baptiste Bordas.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2024.
Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.
Sur la responsabilité contractuelle de M. [X]
A titre liminaire et au regard de la date de conclusion des deux contrats, ce sont les textes du Code civil antérieurs à ceux issus de l’ordonnance numéro 2016-131 du 10 février 2016 qui ont vocation à s’appliquer.
Aux termes des dispositions de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance numéro 2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Pour ce qui concerne le premier contrat
Il est acquis que le groupe Holy Jack a enregistré 11 titres au sein des locaux de la S.A.R.L. Sphere France après avoir préalablement signé avec celle-ci le 04 novembre 2012 un contrat de production d’artiste. Certes, seul M. [X] a émargé ce document en qualité de “chef” du groupe mais tous les membres ont paraphé chaque page de ce document.
La S.A.R.L. Sphere France ne peut prétendre subir un préjudice liée à l’inexécution par M. [X] de ses obligations dans la mesure où, seulement quelques mois après avoir adressé la lettre recommandée signifiant la fin des relations contractuelles, elle a proposé et signé un nouveau contrat avec cet artiste contenant des clauses parfaitement identiques. En page de 5 ses dernières conclusions, elle admet finalement que les manquements contractuels concernent exclusivement le second contrat, validant ainsi la solution retenue par le premier juge. En conséquence, elle ne peut se fonder sur les courriels échangés entre les parties et autres événements survenus entre 2012 et la date d’entrée en vigueur du second contrat pour faire valoir l’existence d’un préjudice (cf courriels, problème du paiement de factures).
Pour ce qui concerne le second contrat
Un second contrat, conclu exclusivement entre l’appelante et M. [X], a été véritablement conclu le 17 août 2015. Cet accord est intervenu alors que le disque intitulé “deep down inside” avait été enregistré, mixé et masterisé. 1010 exemplaires ont été produits.
Il appartient à la S.A.R.L. Sphere France de démontrer les manquements contractuels de M. [X].
Quatre reproches sont adressés à l’artiste.
S’agissant du défaut de communication des éléments indispensables aux opérations de promotion et de publicité
Le contrat stipule : “La promotion ainsi que la publicité des enregistrements de l’artiste, objet des présentes, sera assurée par SPHERE selon les usages de la profession. [‘] Dans le cadre des opérations de promotion et de publicité et pendant la durée d’exploitation du phonogramme du commerce, SPHERE pourra librement utiliser le nom de l’artiste ainsi que les photographies et images le représentant. Le choix de ces documents sera effectué d’un commun accord entre l’artiste et SPHERE. [‘] L’artiste s’engage à transmettre tous les éléments propres à permettre l’exécution des travaux, les développements et réalisations par SPHERE. Par éléments, on entend toute information nécessaire et suffisante à permettre la production telle que définie au sein du présent contrat et au sein du document de référence. Ces éléments incluent : photos, textes, traductions, images, animations, fichier audio ou vidéo et traductions. Cette liste n’est pas limitative et est liée au contenu de la production”.
Dans le but de réaliser des photographies du groupe (cf le shooting évoqué dans les différents courriels) afin de faire figurer certaines d’entre-elles sur la pochette du disque ou sur tout support promotionnel, M. [X] a proposé le nom d’un photographe. Le devis y afférent a été accepté par la S.A.R.L. Sphere France qui a versé un acompte à ce professionnel.
Alors qu’il s’y était engagé, le “chef “du groupe Holy Jack n’a jamais repris contact avec le photographe pour réaliser l’intégralité de la prestation prévue, nonobstant une relance de celui-ci et de la société de production d’artistes (attestation M. [P] et courriel de celui-ci du 12 novembre 2015).
De même, il n’a jamais donné suite aux contacts pris avec trois graphistes qu’il avait pourtant sollicités.
Toutefois, en page 9 de ses dernières conclusions, l’appelante reconnaît que les éléments de design du CD physique et de sa pochette ont été tardivement retournés par le responsable du groupe sans expliquer en quoi le retard dans la transmission serait à l’origine d’un préjudice financier résultant de l’impossibilité de commercialiser l’album.
Ce grief n’est ainsi par suffisamment établi.
S’agissant du défaut de participation aux opérations de promotion et de publicité
Le contrat stipule que l’artiste s’engage à participer, dans la mesure de ses disponibilités, à toute émission de radio, de télévision, séances de photos et interviews destinés à assurer la promotion du phonogramme du commerce. Il s’engage également à participer à la réalisation de films ou vidéogrammes promotionnels ainsi qu’à toute intervention qui serait jugée bonne par SPHERE pour la promotion des phonogrammes reproduisant ses interprétations.
L’appelante produit une attestation émanant de Mme [B], gérante de la société Mistiroux Productions, qui avait été chargée par celle-ci d’assurer la promotion et les relations média “de la future sortie d’un CD que le label venait de produire”.
L’auteur de cet écrit formule un certain nombre de griefs à l’encontre de M. [X] portant sur la période du début de l’année 2016. Ainsi, après avoir tenté d’obtenir des informations, photographies, dates de concert du groupe Holy Jack, elle indique s’être heurtée au silence, à l’inertie, voire au désintérêt de M. [X], ajoutant que cette attitude apparaissait totalement inhabituelle dans le domaine artistique.
En raison des multiples carences de l’artiste qui n’a jamais répondu favorablement aux sollicitations de la société Mistiroux Productions, sa responsable, qui a toujours informé l’appelante des difficultés rencontrées, a été contrainte de mettre fin à sa mission.
Si le premier juge relève qu’aucun calendrier précis n’a été effectivement versé aux débats, la société de production d’artistes n’a incontestablement pu le mettre en place du fait de l’absence de fourniture par le responsable du groupe des éléments et renseignements essentiels pour parvenir à son élaboration. Elle a ainsi rencontré des difficultés pour organiser des événements promotionnels, voire des concerts au retour de ceux réalisés à la Réunion.
Si le contrat contient la réserve “dans la mesure de ses possibilités”, M. [X], qui a fait preuve de carence, voire d’inertie, durant de très longs mois ne justifie pas avoir été empêché de répondre favorablement aux demandes réitérées qui lui étaient adressées.
S’agissant du manquement à l’obligation d’exclusivité
Il était contractuellement prévu que : “pendant toute la durée du contrat, l’artiste s’engage à enregistrer en exclusivité pour SPHERE les ‘uvres qu’il interprétera et/ou auxquelles il participera sous son nom, sous un pseudonyme ou de manière quelconque. En conséquence, il s’interdit :
– d’enregistrer, produire, distribuer ou vendre ses interprétations pour son propre compte ou pour le compte d’un tiers ;
– de rendre licite la fixation et l’exploitation auxquelles pourraient se livrer des tiers de ses prestations (enregistrements de concerts publics ou privés, de concerts télévisés ou radiodiffusés, etc) qu’il s’agisse ou non d”uvres figurant au catalogue de SPHERE. En ce qui concerne les ‘uvres figurant au catalogue de SPHERE, l’engagement de l’artiste subsistera même après l’expiration des présentes” (p5).
Les quatre vidéos dans lesquelles M. [X] joue d’un instrument, parfois en compagnie d’un autre musicien mais sans pour autant interpréter des titres du groupe Holy Jack, ont été mises en ligne sur divers sites internet les 26 mars, 19 avril, 13 août et 20 décembre 2016. Elles ont été visionnées par des centaines d’internautes comme l’indique le procès-verbal de constat dressé le 20 décembre 2017.
Cependant, en raison d’une certaine ambiguité dans la rédaction de la clause portant sur le fait de déterminer si l’interdiction concerne exclusivement ou non les morceaux du groupe Holy Jack, il convient d’écarter le manquement reproché.
Sur le défaut d’information relatif aux changements d’adresse
Dans un courriel signé le jour de la signature du second contrat, M. [X] informe son cocontractant d’une modification de son adresse personnelle.
Il n’est pas établi que celui-ci a changé d’adresse par la suite, étant observé que les échanges entre les deux parties étaient quasi-exclusivement effectués par mail ou téléphone.
Ce grief est donc insuffisamment établi.
Sur le préjudice de la S.A.R.L. Sphere France
L’album a été enregistré par le groupe Holy Jack et produit par la S.A.R.L. Sphere France avant la signature du second contrat qui seul est pris en considération pour apprécier la réalité des manquements contractuels de l’un de ses membres. Dès lors, la somme totale de 27 577, 07 euros correspondant au coût de sa fabrication ne saurait constituer un préjudice indemnisable au titre de la responsabilité contractuelle de M. [X].
En revanche, la société de production d’artistes a incontestablement subi une perte de profits qu’elle escomptait retirer de la vente des disques.
En effet, il est établi que le groupe Holy Jack était sur une pente ascendante lors de la signature des deux contrats précités, comme l’atteste la pièce n°4 produite par l’appelante.
En effet, les CD enregistrés et entièrement finalisés étaient prêts à la vente.
L’appelante ne précise pas à quel montant chaque disque devait être vendu et le profit qu’elle escomptait en retirer. Aucun élément de nature comptable, même de référence, n’est versé aux débats.
Si M. [X] ne peut être responsable d’une partie des raisons qui ont finalement conduit le groupe à cesser de se produire, voire d’exister en tant que tel, son inertie initiale et les importants retards dans la transmission de documents utiles alors que les musiciens ne s’étaient pas encore séparés ont empêché la S.A.R.L. Sphere France de réaliser des opérations promotionnelles une fois la pression de l’album terminée et d’envisager avec les artistes la programmation d’émissions médiatiques locales, voire de concerts futurs.
Ainsi, alors qu’il a été contractuellement informé de l’éventuel engagement de sa responsabilité en cas de manquements, le “chef” n’a cependant pas respecté une parties des obligations qui lui incombaient.
S’il n’est évidemment pas possible de considérer que l’ensemble des disques aurait été écoulé, il apparaît que le préjudice de l’appelante peut être chiffré, au regard du nombre d’albums produits et de la renommée du groupe en 2016 pouvant faire espérer des retombées commerciales, à la somme de 6. 000 euros.
Enfin, la demande présentée au titre d’un préjudice moral sera rejetée en raison de l’absence de tout atteinte à l’honneur ou la considération de la société de production d’artistes.
Sur l’article 700 du code de procédure civile
La décision de première instance doit être infirmée, aucune somme n’étant dès lors mise à la charge de l’une ou l’autre des parties.
En cause d’appel, il y a lieu de condamner M. [X] à verser à la S.A.R.L. Sphere France d’une indemnité de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de rejeter les autres demandes présentées sur ce fondement.
M. [X] sera condamné au paiement des dépens de première instance et d’appel. Ils ne comprendront pas “les frais de constat d’huissier” en l’absence de précision par l’appelante sur celui dont le paiement est réclamé.
– Confirme le jugement rendu le 29 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Libourne en ce qu’il a rejeté les demandes présentées par la société à responsabilité limitée Sphere France au titre de l’indemnisation :
– du coût de production de l’album évalué à la somme de 27 577,07 euros ;
– d’un préjudice moral ;
– L’infirme pour le surplus et, statuant à nouveau :
– Condamne M. [S] [X] à payer à la société à responsabilité limitée Sphere France la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
– Rejette les autres demandes de dommages et intérêts présentées par la société à responsabilité limitée Sphere France à l’encontre de M. [S] [X] ;
– Rejette les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamne M. [S] [X] au paiement des dépens de première instance ;
Y ajoutant ;
– Condamne M. [S] [X] à verser à la société à responsabilité limitée Sphere France la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamne M. [S] [X] au paiement des dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,