Licenciement sans cause réelle et sérieuse

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Licenciement sans cause réelle et sérieuse
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Licenciement sans cause réelle et sérieuse

Sur le licenciement

Le salarié a été licencié pour non-respect des consignes données par un client, non-respect de la politique tarifaire et divulgation d’une information confidentielle. Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement doivent être suffisamment précis pour être jugés sérieux.

Sur le non-respect des consignes données par un client le 6 novembre 2015

La société n’a pas fourni d’éléments probants pour étayer ce grief, tandis que le salarié a fourni une attestation du client confirmant qu’il avait suivi les consignes.

Sur le non-respect de la politique tarifaire et le “forçage” de prix le 3 novembre 2015

L’employeur n’a pas fourni suffisamment d’éléments pour prouver ce grief, et le salarié a expliqué que cette pratique était courante et acceptée par l’entreprise.

Sur l’information donnée le 29 octobre 2015 concernant le résultat d’un appel d’offre

Encore une fois, l’employeur n’a pas fourni d’éléments pour étayer ce grief, qui n’est donc pas caractérisé.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Le salarié a droit à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Le montant de l’indemnité est fixé en fonction des salaires bruts perçus par le salarié.

Sur le remboursement des indemnités de chômage

La société est condamnée à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées au salarié depuis son licenciement.

Sur les demandes accessoires

La société est condamnée aux dépens d’appel et doit payer des frais à la partie adverse. Les dommages et intérêts alloués sont assortis d’intérêts au taux légal à compter de la décision.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2

ARRÊT AU FOND

DU 02 DECEMBRE 2022

N° 2022/280

Rôle N° RG 19/04650 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BD7PK

[C] [I]

C/

S.A.S. DMTP (DMTP)

Copie exécutoire délivrée

le : 02 décembre 2022

à :

Me Karima MEZIENE, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Jean-François JOURDAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 356)

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARTIGUES en date du 12 Février 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F17/00721.

APPELANT

Monsieur [C] [I], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté par Me Karima MEZIENE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

S.A.S. DMTP, pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au sis, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Jean-François JOURDAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Faïssel BEN OSMANE, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre

Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Décembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Décembre 2022

Signé par Madame Véronique SOULIER, pour la Présidente de chambre empêchée et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur [C] [I] a été embauché par contrat à durée indéterminée à compter du 1er février 1985 par la société POLYMAT.

Le 25 juillet 1995, la société COMASUD (groupe POINT P) a racheté la société POLYMAT.

En 2008, la société DISTRIBUTION DE MATERIAUX POUR LES TRAVAUX PUBLICS (DMTP) a repris le contrat de travail du salarié.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du négoce en matériaux de construction.

En dernier lieu, Monsieur [I] exerçait des fonctions de contremaître de cour à l’établissement POINT P à [Localité 4].

L’entreprise occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Par courrier avec accusé de réception du 27 mars 2015, la société DMTP a notifié un avertissement à Monsieur [I] qu’il a contesté par courrier du 20 avril 2015.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 novembre 2015, Monsieur [I] a été convoqué à un entretien préalable en vue d’une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement prévu le 24 novembre 2015.

Il a été placé en arrêt maladie à compter du’17 novembre 2015.

L’entretien préalable a été reporté au 15 décembre 2015.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 23 décembre 2015, Monsieur [I] a été licencié et dispensé d’exécution de son préavis.

Il a saisi, par requête réceptionnée au greffe le 20 septembre 2017, le conseil de prud’hommes de Martigues afin de solliciter l’annulation de la sanction du 27 mars 2015, contester son licenciement et solliciter diverses sommes à caractère indemnitaire.

Par jugement du 12 février 2019 notifié le 26 février 2019, le conseil de prud’hommes Martigues, section commerce, a’:

Vu l’article L. 1471-1 du code du travail,

– dit et jugé que l’action en annulation de l’avertissement du 27 mars 2015 est prescrite,

– dit et jugé que le licenciement notifié le 23 décembre 2015 est sans cause réelle et sérieuse,

– fixé le salaire de référence à la somme de 2’445,90 euros bruts,

– condamné la société DMTP à verser à Monsieur [I] la somme de 14’675,40 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– condamné la société DMTP à verser à Monsieur [I] la somme de 1’500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la société DMTP de toutes ses demandes et en particulier de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société DMTP aux entiers dépens.

Par déclaration du 21 mars 2019 notifiée par voie électronique, Monsieur [I] a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle a fixé le salaire de référence à la somme de 2 445,90 euros, limité le montant des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse octroyés à la somme de 14 675,40 euros.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions notifiées au greffe par voie électronique le 11 novembre 2021, Monsieur [C] [I], appelant, demande à la cour de :

– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé le salaire de référence à la somme de 2’445,90 euros bruts,

– statuant à nouveau, fixer le salaire de référence à la somme de 2’484,22 euros bruts,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société DMTP à lui verser la somme de 14’675,40 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– statuant à nouveau condamner la société DMTP à lui verser la somme de 60’000,00 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– ordonner que les condamnations à intervenir seront assorties des intérêts de droit à compter de la saisine du conseil,

– condamner la société DMTP à lui verser la somme de 2’000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’appelant soutient que’:

– le conseil de prud’hommes, statuant ultra-petita, sans motivation ni justification, a décidé de fixer le salaire de référence à la somme de 2’445,90 euros bruts’;

– en cas de réduction du salaire au cours de la période de référence de calcul notamment pour maladie, l’employeur doit retenir le salaire théorique qui aurait été perçu en l’absence de cessation d’activité et non le salaire réduit’;

– la société DMTP est totalement défaillante à prouver la matérialité des griefs invoqués dans la lettre de licenciement’;

– les faits à l’appui de l’avertissement n’étant pas établis, celui-ci ne peut être retenu comme un antécédent disciplinaire’;

– l’indemnisation réclamée, qui correspond à deux ans de salaires, est parfaitement justifiée au regard de son ancienneté de plus de 30 ans et du préjudice subi.

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 17 septembre 2019, la société DMTP, relevant appel incident, demande à la cour de’:

à titre principal,

– dire et juger que le licenciement de Monsieur [I] repose sur une cause réelle et sérieuse,

– infirmer en conséquence le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Martigues le 12 février 2019,

– débouter Monsieur [I] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

à titre subsidiaire,

– dire et juger que le salaire de référence de Monsieur [I] se monte à la somme de 2 445,90 euros bruts,

– confirmer en conséquence le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Martigues le 12 février 2019,

– limiter le montant des dommages et intérêts alloué à Monsieur [C] [I] à la somme de 14’675,40 euros,

en tout état de cause,

– débouter Monsieur [C] [I] du surplus de ses demandes,

– le condamner au paiement de la somme de 1’500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– le condamner aux dépens.

L’intimé expose en substance que’:

– eu égard à la gravité et au caractère répété des manquements qui sont reprochés à Monsieur [I], son licenciement pour cause réelle et sérieuse était parfaitement justifié’;

– à titre subsidiaire sur le quantum des dommages pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, Monsieur [I], qui a retrouvé un emploi dès 2016, ne justifie d’aucun préjudice.

Une ordonnance de clôture est intervenue le 3 octobre 2022, renvoyant la cause et les parties à l’audience des plaidoiries du 19 octobre 2022 suivant.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement’:

Aux termes de l’article L. 1232-6 alinéa 2 du code du travail dans sa version en vigueur jusqu’au 1er janvier 2018, la lettre de licenciement comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur.

Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement doivent être suffisamment précis pour permettre au juge d’en apprécier le caractère sérieux.

La lettre de licenciement de Monsieur [I] est ainsi motivée :

«’Monsieur,

Pour faire suite à l’entretien préalable du 15 décembre dernier qui s’est déroulé en présence de Monsieur [A] [O] votre responsable hiérarchique et de Monsieur [H] [K], représentant du personnel, nous vous informons de notre décision de procéder à votre licenciement pour le motif suivant : non-respect des procédures, manquement à vos obligations professionnelles et insubordination.

Les raisons qui motivent notre décision sont les suivantes :

– Le vendredi 6 novembre 2015 au matin, le 1er client de l’agence, la société CALVIN a demandé une livraison, dès le premier tour du lundi. Le client avait pris soin de préciser qu’il n’avait pas besoin de la totalité des produits car le chantier se trouvait sur une zone exiguë, où les risques de vol étaient importants. Il indiquait ainsi ne souhaiter qu”« un peu de chaque produit ».

Cette consigne a été donnée très clairement tant au TCA, à l’ATC qu’à vous-même, par le client.

Vous avez procédé au chargement du camion et avez terminé cette tâche à 16h30. En revenant dans les bureaux, vous avez annoncé que toute la commande avait été chargée sur le camion.

L’agence fermant à 17 heures, il n’était plus possible de modifier le chargement (deux heures de travail auraient été nécessaires) et le client qui a été contacté nous a bien indiqué que cette livraison ne correspondait pas à sa demande et qu’il ne pourrait pas prendre tous les produits.

C’est effectivement ce qui s’est passé le lundi matin suivant, puisque le chef de chantier de CALVIN a choisi la marchandise dont il avait besoin et le camion a dû repartir au dépôt avec 3 palettes.

À l’arrivée du camion à l’agence, les magasiniers ont dû décharger, déballer la marchandise, l’isoler, contrôler ce qui avait été pris par CALVIN, occasionnant ainsi une perte de temps importante, totalement inutile et contre-productive, alors que la journée du lundi est la plus chargée en nombre de livraison (6 livraisons en moyenne).

Lors de l’entretien préalable, vous avez reconnu avoir eu connaissance de la consigne limpide du client et avoir néanmoins, chargé la totalité des produits.

Cet exemple illustre votre comportement habituel: vous n’écoutez pas les directives qui vous sont données par les clients et par votre responsable hiérarchique.

Vous semblez estimer que vos 30 années d’ancienneté vous permettent d’agir à votre guise en dehors de toute considération pour les besoins du client et pour le travail supplémentaire que vous occasionnez à vos collègues.

Cette attitude est d’autant plus inadmissible que ce sujet de la gestion du transport a été évoqué en réunion d’agence à plusieurs reprises et notamment à celle du mois d’octobre au cours de laquelle vous étiez présent. Malgré cela, vous persistez dans vos habitudes et refusez de suivre les consignes.

– À de multiples occasions, en réunions mensuelles, votre chef d’agence a rappelé et expliqué que lorsqu’un client vient au comptoir pour prendre de la marchandise, le prix fixé par la machine ne doit pas être forcé. La société a en effet, adopté une politique tarifaire qui doit être respectée par tous, pour les ventes enlevées. Vous avez néanmoins décidé de votre propre initiative, sous prétexte à priori, que le client vous présentait un devis de la concurrence, de forcer les prix. Monsieur [A] [O] qui fréquemment fait des bons au comptoir s’est étonné de cette explication car aucun client ne lui a jamais soumis de devis avec un tarif plus bas. Vous aviez pourtant eu le 7 septembre, un entretien de 3 heures avec votre responsable hiérarchique dont 1 des sujets évoqués était justement votre habitude à forcer les prix. Depuis son arrivée au poste de chef d’agence à [Localité 4] en mars 2014, cette préoccupation permanente, fait l’objet d’échange et d’explication auprès de toute l’équipe. ;

Vous n’avez pourtant pas hésité, le 3 novembre dernier, pour un client qui demandait 5 sacs de Weber Mortier dont le prix en machine était de 10,30 Euros, à lui facturer ce produit à 6,10 Euros, soit un rabais de 40 %. Ce client ne bénéficie d’aucune condition tarifaire particulière. Aussi, lors d’une prochaine visite, un collègue appliquera le tarif de la machine et le client se retrouvera avec 2 prix différents pour un même produit !! Cette situation entrainera forcément de sa part une incompréhension, de l’agacement et surtout un manque de confiance dans notre facturation. Cet exemple parmi beaucoup d’autres, montre que vous n’avez toujours pas fait l’effort d’intégrer la politique tarifaire de l’entreprise malgré les nombreux rappels de votre chef d’agence, rappels dont vous ne tenez pas compte. Vous persistez dans vos automatismes, fussent-ils en violation des consignes qui vous sont données.

Lors de l’entretien, vous avez reconnu les faits et avez admis qu’il s’agissait d’un manquement de votre part.

Ce n’est pourtant pas la première fois que nous vous alertons sur votre non-respect des procédures, puisque déjà dans un précédent courrier du 4 avril 2013, nous vous rappelons la nécessité « de suivre les consignes données par vos responsables ».

– Le Jeudi 29 octobre 2015 à l’ouverture, 7h30, Monsieur [D], gérant de l’entreprise SBTP est venu récupérer de la marchandise. Constatant qu’il semblait contrarié, Monsieur [X] [E] (adjoint chef d’agence) a engagé une discussion avec lui, devant la machine à café, en présence d’un collègue Monsieur [T] [W].

[D] lui a expliqué qu’il pensait avoir perdu un marché public face à un confrère, et ceci malgré un effort de son entreprise. Il en était très affecté car ce marché devait lui permettre de finir l’année 2015.

Au cours de cette discussion entre [X] et [D], Il a été évoqué le nom d’un concurrent possible gagnant du marché.

À ce moment, vous avez cru bon devoir intervenir dans la discussion et avez annoncé savoir déjà depuis la veille au soir, que le concurrent dont le nom venait d’être cité avait effectivement obtenu le marché.

[D] n’a pas immédiatement relevé cette annonce et a poursuivi sa discussion avec [X], avant de quitter l’agence. Alors qu’il était en direction de son chantier, il a toutefois estimé utile de rappeler [X] pour lui demander comment vous aviez eu connaissance de cette information. [X] conscient de la faute que vous aviez commise a répondu de façon très vague.

Ne comprenant pas bien comment, les modalités d’attribution du marché pouvaient déjà être connues par Point P Travaux Publics, [D] se rend immédiatement à la mairie de [Localité 2] à l’origine de ce marché. Il a apostrophé le directeur technique en lui demandant comment l’agence Point P TP [Localité 4] pouvait avoir été informée des résultats d’un appel d’offre devant être dépouillé dans la deuxième quinzaine du mois de novembre”

Présent dans l’entreprise depuis 30 ans, vous connaissez bien les règles qui régissent les marchés publics. Vous savez donc que plusieurs clients de l’agence peuvent déposer, chacun, une offre pour un même marché. De plus, nous pouvons être le fournisseur de ces mêmes clients. Il est donc totalement impensable et même insensé que vous ayez divulgué une information confidentielle à l’un des candidats à ce marché.

Cette faute professionnelle est susceptible de constituer à elle seule, une faute grave.

Toutefois, en considération de votre ancienneté dans l’entreprise, nous avons décidé de vous licencier y pour cause réelle et sérieuse avec un préavis de 2 mois (‘).’»

Le salarié a donc été licencié pour ne pas avoir respecté les consignes données le 6 novembre 2015 par un client, la société CALVIN ainsi que la politique tarifaire et avoir pratiqué un «’forçage’» de prix le 3 novembre 2015 et enfin, pour avoir annoncé le 29 octobre 2015 avant le dépouillement d’un appel d’offre à un gérant d’entreprise que c’était son concurrent qui avait obtenu le marché.

Sur le non-respect des consignes données par un client le 6 novembre 2015′:

A l’appui de ce grief, la société DMTP ne produit aucun élément probant. Elle communique des photocopies de deux présentations «’Powerpoint’».

L’un des documents concerne une «’réunion Agence équipe [Localité 4] 23 mars 2015’» rappelant les règles en matière de sécurité à respecter et donnant quelques informations sur les résultats du premier trimestre, la facturation du transport de marchandises, la mise en place du système des bannettes pour les commandes clients, les règles en matière de stock et la vie de l’agence. La deuxième présentation concerne également une réunion de l’agence dont la date n’est pas précisée. Les points suivants ont été évoqués’: la sécurité, le commerce, le stock, le défi commercial et la vie de l’agence.

Monsieur [I] communique quant à lui une attestation du 9 janvier 2016 émanant de Monsieur [L] [S], se présentant comme chef de chantier auprès du client CALVIN (copie de la pièce d’identité jointe) qui indique’: «’le lundi 9 novembre, lors de la réception de la marchandises, nous avons réceptionné la majeure partie de la commande et avons comme cela a été convenue, fait le retour de deux palettes fautes de place sur le chantier. Pour ma part, Monsieur [I] s’est donc conformé a ma demande du 6 novembre 2015 et je n’ai aucun reproche a lui faire a ce sujet’».

Au regard de ces éléments, ce premier grief n’est pas établi.

Sur le non-respect de la politique tarifaire et le «’forçage’» de prix le 3 novembre 2015′:

L’employeur n’apporte pas plus d’éléments s’agissant du second grief reproché au salarié.

Monsieur [I] ne conteste pas toutefois ce forçage de prix mais précise qu’il s’agissait d’une pratique extrêmement courante pratiquée par tous les vendeurs.

Il résulte des explications des deux parties que le «’forçage’» de prix est un procédé qui consiste modifier le tarif d’une marchandise informatiquement.

L’employeur n’apporte aucun élément mettant en évidence que des remises à des clients par ce biais étaient strictement interdites.

Dans son attestation du 9 janvier 2016, Monsieur [S] (chef de chantier auprès du client CALVIN) indique’: «’en tant que client régulier de la société point P, j’atteste avoir fréquemment demandé un alignement des tarif par rapports à ceux proposés par leurs concurrents notamment sur certain produit ou Point P affiché un prix supérieur à celui des concurrents. Ce qui a toujours été accepté par les différents vendeurs. C’est une pratique courante dans l’entreprise’».

Le deuxième grief est également écarté.

Sur l’information donnée le 29 octobre 2015 concernant le résultat d’un appel d’offre’:

A nouveau, l’employeur n’apporte aucun élément à l’appui de ce grief qui n’est dès lors pas caractérisé.

Les griefs énoncés dans la lettre de licenciement ne sont pas matériellement établis et ne peuvent donc valablement fonder la rupture. Le jugement entrepris est confirmé en ce qu’il a déclaré le licenciement de Monsieur [I] dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’:

Aux termes de l’article L1235-3 du code du travail, dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 24 septembre 2017, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9.

Monsieur [I] demande à la cour de fixer le salaire de référence servant au calcul à l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 2’484,22 euros bruts en application de l’article R 1454-28 du code du travail. Il affirme qu’il n’a pas été pris en compte son arrêt maladie par le conseil de prud’hommes dans le calcul du salaire de référence.

Le montant de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse prévue par l’article L.’235-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure au 24 septembre 2017, «’ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois’». Il doit être tenu compte dans l’évaluation des salaires des six derniers mois des primes et avantages dont le salarié est bénéficiaire en sus de son salaire de base. En outre, en cas d’arrêt de travail avant la notification du licenciement, le salaire de référence à prendre en compte est celui précédant l’arrêt de travail.

En l’espèce, il résulte de l’attestation de paiement des indemnités journalière de la Caisse primaire d’assurance maladie produite par le salarié qu’il a été placé en arrêt maladie avant son licenciement à compter du 17 novembre 2015 ainsi que du 20 au 24 juillet 2015.

Dès lors, il est fait droit à la demande de fixation du salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 2’484,22 euros brut prenant en compte les arrêts de travail du salarié.

Au moment de son licenciement, Monsieur [I] avait plus de deux années d’ancienneté et la société DMTP employait habituellement au moins 11 salariés. Il peut donc prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts qu’il a perçu pendant les six derniers mois précédant son licenciement.

En considération de l’âge du salarié (59 ans), de son ancienneté (30 ans), de son aptitude à retrouver du travail et des éléments produits (arrêt maladie jusqu’au 22 janvier 2016, justification d’une indemnisation Pôle emploi du 25 au 30 avril 2016 et de juillet à fin septembre 2016, emploi retrouvé en décembre 2016, contrat de travail non produit), le préjudice subi par Monsieur [I] sera justement réparé par l’allocation d’une somme de 35’000,00 euros.

Sur le remboursement des indemnités de chômage :

Il convient d’ordonner d’office, en application des dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail, le remboursement par la société DMTP à Pôle emploi des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de six mois d’indemnités.

Sur les demandes accessoires :

En vertu de l’article 1231-7 du code civil, les dommages et intérêts alloués sont assorties d’intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a mis à la charge de la société DMTP les dépens de première instance et en ce qu’il a alloué à Monsieur [I] une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société DMTP qui succombe en ses demandes sera condamnée aux dépens d’appel et à payer à Monsieur [I] la somme de 1’000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés par en cause d’appel.

La société DMTP est déboutée de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu’il a fixé le salaire de référence à la somme de 2’445,90 euros bruts et condamné la société DMTP à verser à Monsieur [I] la somme de 14’675,40 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

STATUANT à nouveau sur ces chefs et y ajoutant,

FIXE le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 2’484,22 euros brut,

CONDAMNE la société DISTRIBUTION DE MATERIAUX POUR LES TRAVAUX PUBLICS (DMTP) à payer à Monsieur [C] [I] la somme de 35’000,00 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt,

ORDONNE d’office le remboursement par la société DISTRIBUTION DE MATERIAUX POUR LES TRAVAUX PUBLICS (DMTP) à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de six mois d’indemnités,

CONDAMNE la société DISTRIBUTION DE MATERIAUX POUR LES TRAVAUX PUBLICS (DMTP) aux dépens de l’instance d’appel,

CONDAMNE la société DISTRIBUTION DE MATERIAUX POUR LES TRAVAUX PUBLICS (DMTP) à payer à Monsieur [G] [P] la somme de 1’000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure pour les frais en cause d’appel,

DEBOUTE la société DISTRIBUTION DE MATERIAUX POUR LES TRAVAUX PUBLICS (DMTP) de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

 


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