Licenciement pour faute grave : les conséquences des absences injustifiées

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Licenciement pour faute grave : les conséquences des absences injustifiées

Engagement de M. [U] par Protectim Security Services

La société Protectim Security Services, spécialisée dans l’activité de sécurité, a engagé M. [F] [U] en tant qu’agent de sécurité / SSIAP 1 par un contrat à durée indéterminée le 27 février 2017, avec une rémunération brute mensuelle de 1546,99 euros, sous la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité.

Absences de M. [U] et licenciement

À partir de janvier 2020, M. [U] a cessé de se présenter à son travail. L’employeur a tenté de le joindre à plusieurs reprises pour justifier ses absences, mais sans succès. Après un entretien préalable, M. [U] a été licencié pour faute grave le 3 juillet 2020.

Action en justice de M. [U]

M. [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 5 février 2021, contestant la légitimité de son licenciement et demandant des indemnités. Le jugement du 8 février 2022 a débouté M. [U] de toutes ses demandes et a également rejeté les demandes reconventionnelles de Protectim Security Services.

Appel de M. [U] et demandes en appel

M. [U] a interjeté appel le 16 mars 2022, demandant l’infirmation du jugement et la reconnaissance de son licenciement comme sans cause réelle et sérieuse, ainsi que le versement de diverses indemnités. Protectim Security Services a demandé la confirmation du jugement initial et a formulé des demandes reconventionnelles.

Motifs du licenciement pour faute grave

La cour a examiné les motifs du licenciement, soulignant que M. [U] n’avait pas justifié ses absences malgré plusieurs mises en demeure. La cour a conclu que son comportement constituait une violation grave de ses obligations professionnelles, justifiant ainsi le licenciement.

Confirmation des décisions judiciaires

La cour a confirmé le jugement initial concernant le licenciement pour faute grave, le rejet des demandes d’indemnités de M. [U], ainsi que la demande de remboursement d’acomptes par Protectim Security Services. Les demandes des deux parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile ont également été déboutées.

Conclusion de la cour

La cour a confirmé l’ensemble des décisions du jugement déféré, condamnant M. [U] aux dépens d’appel et ne faisant pas application de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de l’une ou l’autre des parties.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 novembre 2024
Cour d’appel de Paris
RG
22/03964
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 4

ARRET DU 06 NOVEMBRE 2024

(n° /2024, 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/03964 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFPK4

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Février 2022 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F21/01075

APPELANT

Monsieur [F] [U]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Aurélie BOUSQUET, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 214

INTIMEE

S.A.S. PROTECTIM SECURITY SERVICES

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Anna SALABI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0713

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Florence MARQUES, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme MEUNIER Guillemette, présidente de chambre

Mme NORVAL-GRIVET Sonia, conseillère

Mme MARQUES Florence, conseillère rédactrice

Greffier, lors des débats : Madame Clara MICHEL

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, et par Clara MICHEL, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société Protectim security services est spécialisée dans l’activité de sécurité.

Elle a engagé M. [F] [U] suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 27 février 2017, en qualité de d’agent de sécurité / SSIAP 1, niveau 3 échelon 2 , coefficient 140, moyennant une rémunération brute mensuelle de 1546,99 euros.

La convention collective applicable est celle des entreprises de prévention et de sécurité.

A partir du mois de janvier 2020, M. [U], a cessé de se présenter sur son lieu de travail.

L’employeur a mis en demeure son salarié de justifier de ses absences les 21 février, 3 mars et 30 avril 2020, en vain.

M. [U] a fait l’objet, après convocation du 27 mai 2020 et entretien préalable fixé au 5 juin 2020, d’un licenciement le 3 juillet 2020 pour faute grave.

M. [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris, le 5 février 2021 aux fins de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la S.A.S. Protectim security services à lui verser diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement en date du 8 février 2022, le conseil de prud’hommes de Paris a :

– débouté M. [U] [F] de l’ensemble de ses demandes ;

– débouté la S.A.S. Protectim security services de ses demandes reconventionnelles ;

– laissé les dépens à la charge de M. [U] [F].

Par déclaration au greffe en date du 16 mars 2022, M. [U] a régulièrement interjeté appel de la décision.

Aux termes de ses uniques conclusions remises via le réseau virtuel des avocats le 13 juin 2022, M. [U] demande à la cour de :

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris en date du 8 février 2022 en ce qu’il a débouté M. [U] de l’ensemble de ses demandes ;

Et, statuant à nouveau,

– dire que le licenciement de M. [U] est sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

– condamner la société Protectim security services à payer à M. [U] les sommes suivantes:

* indemnité pour licenciement abusif : 6 266,20 euros,

* indemnité compensatrice de congés payés : 2 689,24 euros,

* congés payés y afférents : 268,92 euros,

* indemnité compensatrice de préavis : 3 133,10 euros,

* congés payés y afférents : 313,31 euros,

* indemnité légale de licenciement : 1 338,06 euros,

* rappel de salaire du 1er janvier 2020 au 3 juillet 2020 : 9 561,12 euros,

* congés payés y afférents : 956,11 euros,

– condamner la société Protectim security services à payer à M. [U] au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile la somme de 2.0000 euros ;

– dire que ces sommes seront augmentées des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes ;

– condamner la société Protectim security services à lui remettre une attestation Pôle Emploi et des bulletins de salaires conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document, 8 jours après la notification de la décision à intervenir ;

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Protectim security services de ses demandes reconventionnelles ;

– la condamner en tous les dépens.

Aux termes de ses uniques conclusions remises via le réseau virtuel des avocats le 15 juin 2022, la S.A.S. Protectim security services demande à la cour de :

– confirmer en tous points le jugement querellé,

En conséquence,

– débouter M. [U] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

A titre reconventionnel :

– condamner M. [U] au paiement d’une somme de 2 190 euros brut au titre des salaires versés indûment et par erreur par l’entreprise Protectim security services aux mois de décembre 2019 et janvier 2020 ;

– condamner M. [U] au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Protectim security services.

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et, en application de l’article 455 du code de procédure civile, aux dernières conclusions échangées en appel.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 11 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

1-Sur le licenciement pour faute grave

L’article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l’initiative de l’employeur ou du salarié. Aux termes de l’article L.1232-1 du même code, le licenciement par l’employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d’un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d’une part d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise.

La lettre de licenciement en date du 3 juillet 2020 est ainsi rédigée :

« Monsieur,

Vous avez été engagé le 27/02/2017 par la société PROTECTIM SECURITY SERVICES SAS, sous contrat à durée indéterminée, en qualité d’Agent de Sécurité, niveau 3, échelon 2, coefficient 140.

Vous avez été convoqué par lettre recommandée avec accusé réception, en date du 27/05/2020, pour un entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu’au licenciement le 05/06/2020 à 14 heures 30, au cours duquel vous ne vous êtes pas présenté, ce qui ne nous a pas permis de vous exposer les motifs pour lesquels nous étions amenés à envisager à votre encontre une mesure de licenciement.

En effet, vous ne vous êtes pas présenté à votre poste de travail depuis le 08/02/2020.

A ce jour, et malgré l’envoi d’une mise en demeure de justification d’absence, envoyé par lettre recommandée avec AR, en date du 21/02/2020, ainsi que d’une seconde mise en demeure, envoyée par lettre recommandée avec AR, en date du 03/03/2020, ainsi que d’une troisième mise en demeure, envoyée par lettre recommandée avec AR, en date du 30/04/2020, vos absences répétées restent injustifiées puisque vous ne nous avez toujours pas transmis de justificatif.

Malgré votre absence prolongée, nous vous avons transmis un exemplaire de votre planning mensuel du mois de février 2020, envoyé par courrier recommandé le 30/01/2020, celui de mars 2020, envoyé courrier recommandé le 25/02/2020, copie de celui d’avril 2020, envoyé courrier recommandé le 10/04/2020, celui de mai 2020, envoyé courrier électronique le 24/04/2020 à 15H11 ainsi que celui de juin 2020 envoyé par courrier électronique le 22/05/2020 à 15H25 afin que vous puissiez reprendre vos vacations. Or, vous ne vous êtes à aucun moment présenté pour assurer vos vacations.

Etant dans la plus totale expectative de votre éventuel retour, nous avons été contraints, au pied levé, de vous suppléer dans votre fonction et de modifier par voie de conséquence les plannings du personnel.

Vous n’êtes pas sans savoir que la forte désorganisation que vous avez provoquée, a nui à la dynamique de notre équipe de travail.

En vous absentant de manière prolongée et injustifiée, vous êtes gravement contrevenu à vos obligations professionnelles.

Nous vous rappelons que conformément aux dispositions de l’article 5-2 du règlement intérieur en vigueur :

« Toute absence prévisible doit être préalablement autorisée par la Direction. Si l’absence est prévisible et notamment si elle est due à un cas fortuit ou de force majeur, le salarié doit informer ou faire informer au plus tôt, dans un délai maximum de 48 heures, le manager et fournir au Service paye et Service RH une justification écrite de cette absence mentionnant les motifs et la durée probable de son absence, sauf impossibilité justifiée.

Si l’absence résulte d’une maladie ou d’un accident, la justification prévue ci-dessus résulte de l’envoi d’un certificat médical indiquant la durée du repos. L’envoi devra être effectué dans un délai de 48 heures. [‘]

A défaut de justification dans le délai prévu ci-dessus comme en cas de justification non valable, l’absence est considérée alors comme une absence injustifiée. Les retards de justification et les absences sont susceptibles d’entraîner des sanctions disciplinaires. »

Votre absence est inacceptable et incompatible avec vos fonctions d’Agent de sécurité.

Vous ne pouvez pourtant ignorer que pour la sécurité de nos clients, et pour assurer sa continuité du service proposé, il est indispensable que chacun des agents soit présent à son poste.

En effet, en cas d’absence de l’un d’entre eux, lorsque ce dernier n’en informe pas la Direction, l’organisation du travail et du service devient particulièrement difficile à gérer.

Dans ces conditions, face à un tel comportement intolérable et à votre manquement grave au respect des règles les plus élémentaires dans le cadre de vos obligations professionnelles, nous vous notifions par la présente, votre licenciement pour faute grave sans préavis, ni indemnité de rupture.

Vous sortirez de nos effectifs à compter de la date d’envoi du présent courrier. »

Il est ainsi reproché au salarié de ne plus s’être présenté à son poste de travail depuis le 8 février 2020, sans avoir justifié de son absence et ce malgré trois mises en demeure.

Le salarié soutient qu’il a reçu, à compter de janvier 2020 des plannings d’agent de sécurité arrière-caisse alors que sa qualification est agent de sécurité SSIAP 1.Il admet qu’il ne s’est plus rendu sur son lieu de travail mais le justifie en soutenant qu’il ne lui a pas été fourni de travail correspondant à sa fonction.

M. [U] indique qu’en apparence, il existe dans son contrat de travail une mention ambigüe sur le poste qu’il occupe puisqu’il est indiqué ‘ poste d’agent de sécurité / SSIAP 1″. Il soutient que la description de son poste comporte des missions relevant de l’emploi d’agent de sécurité et des missions relevant de l’emploi d’agent des services de sécurité incendie alors que la convention collective rend impossible ce cumul, dans la mesure ou elle interdit que les agents SSIAP soient distraits de leurs fonctions spécifiques. Il soutient que son poste était ainsi soit ADS soit SSIAP1. Il précise qu’ayant travaillé jusqu’en janvier 2020 en qualité de SSIAP 1, cette fonction était la sienne et que dans la mesure ou il a été programmé en qualité d’ADS à compter de février 2020, soit sur un poste moins qualifié, il a subi une déqualification à laquelle il pouvait s’opposer. Il rappelle que le poste occupé étant un élément essentiel du contrat de travail, il ne peut être modifié sans l’autorisation du salarié. Dans ces conditions, ayant refusé la modification de son poste, il n’a commis aucune faute.

L’employeur soutient pour sa part que le salarié a été affecté sur le poste d’ADS comme le permet son contrat de travail et non sur le poste d’agent de sécurité arrière-caisse et qu’à compter de janvier 2020, il n’a plus honoré la moindre affectation et ne s’est plus présenté sur son lieu de travail.

La cour constate que le contrat de travail de M. [U] mentionne que le salarié est embauché en qualité d’agent de sécurité / SSIAP 1.

Les plannings versés aux débats de part et d’autre démontrent que le salarié n’a pas été prévu sur un poste d’ADS arrière-caisse à compter de janvier 2020 mais sur un poste d’ADS, en conformité avec son contrat de travail et les missions décrites. Il ne lui a pas été demandé d’effectuer les deux missions en même temps.

A partir de février 2020, M. [U] s’est abstenu de se rendre sur son lieu de travail. Il justifie simplement avoir envoyé un mail, le 28 février 2020 à son employeur pour lui dire ‘je suis planifié en tant que arrière-caisse (…) donc je conteste, je n’irai pas’. Il ne s’est plus rendu sur son lieu de travail et ne s’est plus manifesté auprès de son employeur malgré trois mises en demeure de justifier de son absence.

M. [U] a ainsi abandonné son poste. Il était impossible de maintenir le salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis . Son licenciement pour faute grave est justifié.

Le jugement est confirmé de ce chef et en ce qu’il a débouté M. [U] de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sa demande au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l’indemnité légale de licenciement et de sa demande de rappel de salaire du 1er janvier au 3 juillet 2020.

2-Sur la demande d’indemnité compensatrice de congés payés

Le salarié qui ne fait valoir aucun moyen, ne justifie pas sa demande de ce chef. Le jugement est confirmé de ce chef.

3-Sur la demande de la société Protectim Security Services en remboursement d’acomptes sur salaire

La société soutient qu’en décembre 2019 pour 1200 euros et en janvier 2020 pour 900 euros, des ‘ acomptes exceptionnels ‘ ont été payés par erreur à M. [U].

Le salarié indique que la société ne justifie pas que ces sommes lui ont effectivement été payées.

La mention, sur les bulletins de paie, du versement d’acomptes exceptionnels est insuffisante à démontrer le versement effectif des sommes en question.

Dès lors la société est déboutée de sa demande de remboursement de ce chef.

Le jugement est confirmé.

4-Sur les autres demandes

Il n’y a pas lieu d’ordonner la remise des documents de fin de contrat modifiés. Le jugement est confirmé.

Le jugement est confirmé sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile.

M. [F] [U] est condamné aux dépens d’appel

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel au profit de l’une ou l’autre des parties.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE M. [F] [U] et la SAS Protectim Security Services de leur demande respective au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel;

CONDAMNE M. [F] [U] aux dépens d’appel.

Le greffier La présidente de chambre


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