Licenciement d’un technicien audiovisuel pour agressivité
Licenciement d’un technicien audiovisuel pour agressivité

Un technicien audiovisuel peut être licencié pour son agressivité verbale et ses retards à répétition. En application de l’article L.1232’6 du code du travail, la lettre de licenciement fixe les limites du litige « en ce qui concerne les motifs de licenciement » et lie les parties et le juge, qui ne peut rechercher d’autres faits pour justifier le licenciement. L’article L. 1232’1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Les faits invoqués comme constitutifs d’une cause réelle et sérieuse de licenciement doivent non seulement être objectivement établis mais encore imputables au salarié, à titre personnel et à raison des fonctions qui lui sont confiées par son contrat individuel de travail.

Il résulte de l’article L. 1235’1 du code du travail que la charge de la preuve de la cause réelle et sérieuse du licenciement n’incombe pas spécialement à aucune des parties mais que le doute doit profiter au salarié. Pour satisfaire à l’exigence de motivation imposée par l’article L.1232’6 du code du travail, la lettre de licenciement doit comporter l’énoncé de faits précis et contrôlables, à défaut de quoi le licenciement doit être jugé sans cause réelle et sérieuse.

En outre, en application de l’article L. 1332-4 du code du travail aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de 2 mois et courant à compter du jour où l’employeur a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés, à moins que ces faits aient donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales. Par ailleurs, en application de la règle non bis in idem, l’employeur ne peut sanctionner deux fois les mêmes faits.

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COUR D’APPEL DE VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT DU 02 JUIN 2021

N° RG 18/04786

N° Portalis DBV3-V-B7C-SY7I

AFFAIRE :

A X

C/

SASU ATLANTIS TOURNAGE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 octobre 2018 par le Conseil de Prud’hommes Formation paritaire de BOULOGNE-

BILLANCOURT

Section : AD

N° RG : F 17/01189

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Frédéric CHHUM

Me Nicolas POTTIER

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur A X

né le […] à VILLENEUVE-SAINT-GEORGES (94190)

de nationalité française

1, rue des Châtres-Sacs

[…]

Représentant : Me Frédéric CHHUM de la SELEURL FREDERIC CHHUM AVOCATS, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0929

APPELANT


SASU ATLANTIS TOURNAGE

N° SIRET : 790 167 738

[…]

[…]

Représentant : Me Nicolas POTTIER de l’AARPI VERSANT AVOCATS, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire: P0461 substitué par Me Aude DUMAS,

INTIMÉE


Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique le 9 avril 2021, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent BABY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Madame Isabelle VENDRYES, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Claudine AUBERT

Par jugement du 23 octobre 2018, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt (section activités diverses) a’:

— débouté M. A X de l’intégralité de ses demandes,

— dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné M. X aux entiers dépens.

Par déclaration adressée au greffe le 19 novembre 2018, M. X a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 2 février 2021.

Par dernières conclusions remises au greffe le 20 novembre 2020, M. X demande à la cour de’:

— le dire recevable et bien fondé,

— infirmer dans son intégralité le jugement du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 23 octobre 2018,

statuant à nouveau,

— dire que son licenciement pour motif disciplinaire du 21 juillet 2017 doit s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— condamner la société Atlantis Tournage à lui payer la somme de 22 500 euros nets à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— ordonner les intérêts légaux à compter de la notification du présent arrêt,

— ordonner le remboursement des indemnités-chômage qu’il a perçues à Pôle Emploi dans la limite de 6 mois,

— condamner la société Atlantis Tournage à lui payer la somme de 4 000 euros nets en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

— condamner la société Atlantis Tournage au paiement des dépens éventuels.

Par dernières conclusions remises au greffe le 9 mai 2019, la société Atlantis Tournage demande à la cour de’:

à titre principal,

— confirmer le jugement du 23 octobre 2018 en ce qu’il a’:

. débouté M. X de l’intégralité de ses demandes,

. condamné M. X aux dépens éventuels,

— infirmer le jugement du 23 octobre 2018 en ce qu’il l’a débouté de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

statuant de nouveau sur ce point,

— condamner M. X à lui verser 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et en appel,

à titre subsidiaire,

si la cour considérait que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

— limiter les dommages intérêts alloués à ce titre à 15 000 euros.

LA COUR,

La société Atlantis Tournage a pour activité la location de matériel de tournage (caméras, objectifs, micros, éclairages’) aux professionnels du secteur de l’audiovisuel.

M. A X a été engagé par la société Atlantis Télévision, en qualité de technicien audiovisuel (préparateur technique), par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 12 novembre 2008.

Le contrat de travail de M. X a ensuite été transféré à la société Atlantis Tournage à compter du 1er septembre 2013.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective des entreprises techniques au service de la création et de l’événement.

M. X percevait une rémunération brute mensuelle de 2 500 euros.

A l’été 2015, M. X et la société Atlantis Tournage ont discuté d’une rupture conventionnelle. M. X a sollicité à cette occasion une indemnité de rupture d’un montant de 24 000 euros nets outre le paiement de son préavis et des congés payés afférents.

Il n’a pas été donné suite à la rupture conventionnelle.

Par lettre du 16 octobre 2015, M. X a été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire motivée par son « attitude depuis plusieurs mois’», fixé le 23 octobre 2015.

L’entretien préalable n’a abouti à aucune sanction.

Par lettre du 4 octobre 2016, M. X a fait l’objet d’un avertissement en raison de fréquents retards et a été invité «’à l’avenir a plus de professionnalisme’».

Par lettre du 27 juin 2017, M. X a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 10 juillet 2017.

M. X a été licencié par lettre du 19 juillet 2017 pour faute dans les termes suivants’:

«’Vous êtes entré au service de la société ATLANTIS TELEVISION à compter du 12 novembre 2008.

À la suite d’un transfert partiel d’actif de la société ATLANTIS TELEVISION au profit de la société ATLANTIS TOURNAGE, votre contrat de travail a été transféré à cette dernière à compter du mois de septembre 2013 en application de l’article L. 1224-1 du Code du travail.

Au dernier état, vous exercez, pour la société ATLANTIS TOURNAGE, les fonctions de Préparateur Technique.

Ces fonctions consistent notamment à préparer les commandes de matériel de tournage (caméras, micros, lumières, trépieds, objectifs, batteries) que nos clients viennent récupérer avant de partir en tournage, à remettre ces commandes en fournissant les explications techniques nécessaires, à récupérer ce matériel auprès des équipes de tournage à leur retour, et à vérifier le bon état du matériel restitué.

Ces fonctions impliquent une grande rigueur notamment car les commandes doivent strictement correspondre aux demandes des clients, qui partent parfois pour de longues périodes de tournage.

Ces fonctions impliquent également de respecter rigoureusement les délais de mise à disposition du matériel car les équipes de tournage partent généralement en tournage immédiatement après avoir récupéré le matériel, et parfois très loin.

Ces fonctions exigent enfin, comme toutes les fonctions mettant en contact direct avec la clientèle, une grande courtoisie.

Or, depuis plusieurs années, nous avons été amenés, à de nombreuses reprises, à vous reprocher des retards dans votre prise de poste, une désinvolture dans l’accomplissement de vos fonctions et des écarts de comportement inadmissibles.

Votre responsable hiérarchique, H Z, a plusieurs fois eu l’occasion de vous rappeler à l’ordre verbalement à la suite d’arrivées tardives. Au-delà de vos retards, et quelles que soient les raisons que vous invoquez pour les expliquer (problème de voiture, problème de transport, problème de plomberie, problème personnel’), il vous a plusieurs fois été reproché de ne pas en prévenir vos responsables, ou de ne le faire que tardivement et de manière inappropriée.

Votre manque d’implication vous a également été reproché. Concrètement, votre responsable a plusieurs fois été amené à vous rappeler à l’ordre car vous passiez un temps considérable à utiliser votre téléphone portable et votre ordinateur à des fins personnelles, plutôt que de vous consacrer à vos activités professionnelles, ou parce que vous mettiez une mauvaise volonté manifeste à accomplir vos fonctions, notamment à utiliser de nouveaux logiciels.

Il vous a encore été reproché, à plusieurs reprises, de vous adresser sur un ton très désagréable à nos clients et fournisseurs.

Ainsi, votre attitude a fini par créer des tensions au sein de l’équipe, vos collègues s’exaspérant de vous voir faire preuve d’une telle désinvolture, préjudiciable à leur travail et donc à la réputation de l’entreprise.

C’est dans ce contexte qu’en août 2015, nous nous sommes rencontrés pour envisager la rupture de nos relations dans le cas d’une rupture conventionnelle. Nos discussions n’ayant pas abouti, nos relations de travail se sont poursuivies.

Malheureusement, votre comportement ne s’est pas amélioré et nous avons de nouveau eu à déplorer de votre part retards, attitude désinvolte et comportement désagréable à l’égard des clients.

Nous avons alors été amenés, au-delà des rappels à l’ordre informels dont vous avez continué de faire l’objet, à engager à votre encontre une procédure disciplinaire. Vous avez ainsi été convoqué, par lettre du 16 octobre 2015, à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire.

Lors de cet entretien, nous vous avons rappelé les reproches mentionnés ci-dessus. Vous avez alors admis les difficultés et pris l’engagement de vous ressaisir. Dans ces conditions, nous avons accepté de retenir le courrier d’avertissement qui avait été préparé et donc de ne pas prononcer à votre égard une sanction disciplinaire.

Malheureusement, la situation ne s’est pas améliorée. Vous avez continué à prendre votre poste avec retard et de nous en avertir qu’au dernier moment voire à ne pas nous en prévenir du tout et à manquer de sérieux dans l’accomplissement de vos fonctions. Vous avez par ailleurs continué de vous adresser à nos clients ou fournisseurs sur un ton particulièrement discourtois au point de créer un incident le 18 août 2016. J’ai dû intervenir en personne pour rattraper la situation en présentant des excuses au client.

Dans ce contexte, nous avons été amenés à vous notifier un avertissement par lettre du 4 octobre 2016. Cet avertissement était explicitement motivé par vos nombreux retards et par le comportement que vous aviez eu à l’égard du client le 18 août 2016. Nous avons alors particulièrement insisté sur les conséquences préjudiciables de votre attitude pour le bon fonctionnement de votre équipe et de l’entreprise, et vous avons formellement mis en garde sur le fait qu’une sanction plus sévère devrait être prise en l’absence d’amélioration de votre part.

Par courrier du 19 octobre 2016, vous avez cru devoir contester cet avertissement, en expliquant que vous n’aviez pas eu l’intention d’être désagréable avec notre client et en tentant d’apporter des explications à vos divers retards. Ces explications n’étant pas recevables, nous avons maintenu notre avertissement.

Malgré cela, la situation ne s’est toujours pas améliorée nous avons été amenés, dernièrement encore, à vous reprocher votre désinvolture et votre attitude à l’égard des clients ou fournisseurs et d’autres retards encore.

En particulier, le 15 juin 2017, un membre de l’équipe de tournage de l’émission TF1 «’Auto-Moto’» venu restituer le matériel qu’il nous avait loué nous a indiqué qu’il avait manqué à sa commande un micro HF. Votre Responsable technique, J Y, qui avait lui-même préparé la commande, s’en est étonné dans la mesure où il avait inclus un tel micro dans la commande ‘ le micro apparaissant d’ailleurs sur le carnet ATA.

Après vérification, il est apparu que vous vous étiez purement et simplement servi dans la commande préparée par J Y pour réaliser une autre commande pour un autre client’!

Lorsque J Y s’en est aperçu, il vous a signalé la difficulté. Plutôt que de reconnaître votre erreur, qui aurait pu avoir des conséquences très préjudiciables pour l’équipe de tournage et la réputation de l’entreprise auprès d’un de ses principaux clients, vous avez pris la situation à la légère. Pris en faute, vous vous êtes braqué et avez cessé de travailler le reste de la journée, regardant vos collègues travailler sans leur prêter main forte. En particulier, vous n’êtes pas intervenu pour aider votre collègue Théo Enjalbert qui, vers 17 heures, se démenait pour préparer, seul les commandes que des équipes de tournage devaient venir récupérer le soir-même ou le lendemain matin.

Quand le Chargé d’affaires d’Atlantis Tournage, K B s’en est aperçu, il vous a demandé si vous n’étiez pas gêné de laisser ainsi votre collègue travailler seul sans venir l’aider. Vous lui avez alors répondu : «’Ta gueule!’»

Une telle désinvolture et un tel irrespect, de votre responsable, de vos collègues et, plus généralement, de toute l’entreprise, ne sont évidemment pas tolérables. Ils créent des tensions entre les membres de l’équipe et sont susceptibles de porter préjudice à nos clients et donc à l’entreprise.

Malgré de nombreux rappels à l’ordre, entretiens formels et avertissements disciplinaire dont vous avez fait l’objet, vous vous refusez à en revenir à une exécution conforme de vos fonctions et à adopter un comportement convenable.

Lors de l’entretien préalable puis par courrier recommandé électronique non daté mais indiqué comme ayant été déposé le «’12 juillet 2017’» vous avez reconnu les faits qui vous sont reprochés’; vous avez simplement tenté d’en rejeter la responsabilité sur d’autres collaborateurs, ce qui ne nous a pas amené à reconsidérer notre appréciation de la situation.

Par la présente, nous sommes donc contraints de vous notifier votre licenciement pour motif disciplinaire. Votre préavis de 2 mois, que nous vous dispensons d’effectuer, vous sera rémunéré aux échéances habituelles de paye. (‘)’»

M. X a été dispensé d’effectuer son préavis d’une durée de 2 mois.

Par lettre du 30 août 2017, M. X a contesté les motifs de son licenciement.

Le 21 septembre 2017, M. X a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin de voir juger son licenciement pour motif disciplinaire sans cause réelle et sérieuse et sollicite le paiement de diverses sommes.

SUR CE,

Sur la rupture’:

M. X soutient que les griefs qui lui sont imputés sont prescrits, se heurtent au principe non bis in idem, ou ne sont pas établis.

Au contraire, la SASU Atlantis Tournage tient pour établis et non prescrits les griefs.

En application de l’article L.1232’6 du code du travail, dans sa version en vigueur lors des faits, la lettre de licenciement fixe les limites du litige « en ce qui concerne les motifs de licenciement » et lie les parties et le juge, qui ne peut rechercher d’autres faits pour justifier le licenciement.

L’article L. 1232’1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Les faits invoqués comme constitutifs d’une cause réelle et sérieuse de licenciement doivent non seulement être objectivement établis mais encore imputables au salarié, à titre personnel et à raison des fonctions qui lui sont confiées par son contrat individuel de travail.

Il résulte de l’article L. 1235’1 du code du travail que la charge de la preuve de la cause réelle et sérieuse du licenciement n’incombe pas spécialement à aucune des parties mais que le doute doit profiter au salarié.

Pour satisfaire à l’exigence de motivation imposée par l’article L.1232’6 du code du travail, la lettre de licenciement doit comporter l’énoncé de faits précis et contrôlables, à défaut de quoi le licenciement doit être jugé sans cause réelle et sérieuse.

En outre, en application de l’article L. 1332-4 du code du travail aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de 2 mois et courant à compter du jour où l’employeur a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés, à moins que ces faits aient donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.

Par ailleurs, en application de la règle non bis in idem, l’employeur ne peut sanctionner deux fois les mêmes faits.

En l’espèce, la lettre de licenciement est datée du 19 juillet 2017. M. X a été averti le 4 octobre 2016 pour des retards les 9 et 22 septembre 2016. Ces deux retards et plus généralement ceux antérieurs au 4 octobre 2016 ne peuvent plus être sanctionnés. Pour pouvoir être sanctionnés, les retards reprochés au salarié doivent être postérieurs au 4 octobre 2016 et, pour ne pas être couverts par la prescription, ils ne doivent pas avoir été connus de l’employeur antérieurement au 19 mai 2017.

La question des retards de M. X est évoquée dans l’attestation très circonstanciée de

M. Z (supérieur hiérarchique de M. X ‘ pièce 18 E). A cet égard, M. Z témoigne de ce que «’à partir de septembre 2013 (‘) l’organisation de planning des techniciens avait été changée (‘). Il ne voulait alors plus s’occuper des départs en matinée tôt et restait cantonné à une tranche horaire de 14 à 22h. Cependant, malgré mes multiples remarques, il arrivait tous les jours (sans exception) entre 14h05 et 14h20, et ce, sans avoir déjeuné. Il est donc rare que A soit opérationnel à travailler avant 14h30 ou 14h45 (‘)’»

Dès lors qu’il ressort de cette attestation que M. X était tous les jours «’sans exception’» en retard, la réalité de départs postérieurs au 4 octobre 2016 est établie. De même est établie la réalité de retards postérieurs au 19 mai 2017, période non prescrite.

Il ressort par ailleurs du courriel que M. B a adressé à sa hiérarchie le 15 juin 2017 que la veille ‘ 14 juin 2017 ‘ il s’est plaint du comportement de M. X dans les termes suivants’:

«’La journée d’hier a été (‘) mouvementée. Je m’explique’: Suite au retour d’une équipe de tournage mercredi matin (TF1 Prod Auto Moto) le journaliste nous a annoncé qu’il n’avait pas de micro main HF. Mika qui avait lui fait la prépa du matériel jeudi soir à son grand étonnement lui a dit qu’il ne comprenait pas comment cela avait pu arriver puisqu’il était sur la table avec tous les autres éléments et figurait en plus sur le carnet ATA. Après une petite enquête nous avons conclu que le micro main HF s’est retrouvé sur une autre prépa faite celle-ci par A et partie un peu plus tôt dans l’après midi. Il s’avère que A ne s’est pas embarrassé et a pris le micro HF de la prépa de Mika pour l’intégrer dans la sienne. A la suite de ça nous lui avons signalé l’incident dès son arrivée. Lorsque Mika lui a dit qu’il avait fait une erreur, il a pris cela à la légère sans en assumer les conséquences qui auraient pu être préjudiciables pour notre service. Au contraire il s’est braqué et a décidé de ne pas travailler de toute la journée. Après 17h00 Théo s’est retrouvé seul puisque l’équipe du matin (Mika et Tristan) avait terminé leurs travail. Vers 18h30 voyant que Theo se démenait pour sortir les prépa des départs prévus dans la soirée et ceux du lendemain matin j’ai interpelé A en lui demandant’: «’ça va A »’ pas trop fatigué »’» «’non’» il me répond. A cela je lui rétorque, «’ça ne te fait rien de voir ton camarade Théo bosser et toi ne rien faire pour l’aider »’»

Sa réponse a été «’TA GUEULE’». Outre l’insulte qu’il m’a adressée, j’ai exprimé mon mécontentement en lui rappelant son attitude envers ses camarades, j’ai trouvé son comportement irrespectueux. A a quitté son poste de travail à 20h00, Théo qui lui s’est débrouillé pour finir le travail de tous les deux a fini à 21h30. Nous avons toujours essayer de régler nos problèmes entre nous lorsque cela a été le cas, sauf que la, personne de l’équipe ne cautionne sa conduite (‘)’» (pièce 10 E).

Il ressort du compte rendu de l’entretien préalable au licenciement de M. X établi par M. C, conseiller du salarié que M. X a reconnu les faits mais n’a pas estimé qu’il y avait un problème’: «’M. X répond que ce jour là,ils étaient en effectif réduit et que c’est plus un problème d’organisation, il a fait au mieux dans l’urgence pour satisfaire un client. D’un autre côté, M. X n’a pas volé ce micro, il a essayé de répondre le mieux possible à la demande qui lui était faite ce jour-là. Il est vrai qu’il aurait pu aller à la réserve pour en remettre un autre. Cependant le micro manquant n’a pas été réclamé pendant le tournage mais après, donc où est le problème’» (pièce 9 S).

Ce n’est pas tant l’erreur elle-même qui est reprochée à M. X que le comportement qu’il a adopté par la suite, lorsqu’il lui a été fait observer ladite erreur. Aussi, l’échange de sms entre M. X et M. D en novembre 2017 (pièce 28 S) n’est-il pas pertinent. Il l’aurait été si, comme il ressort de ce texto, M. X n’avait été licencié que pour le micro absent. Or, ce n’est manifestement pas la raison du licenciement, cette mesure ayant été prise ‘ notamment ‘ parce que M. X avait cessé de travailler après qu’on lui avait fait remarquer son erreur de sorte qu’un collègue avait continué seul le travail et parce que M. X s’était montré insultant à l’endroit de M. B.

Certes, M. X expose en substance qu’il existait un différend entre lui et M. B et qu’il n’avait, à son égard, que répondu à une énième provocation de sa part’; que M. B l’avait même menacé. Toutefois, M. X n’apporte pas la démonstration desdites provocations, les pièces qu’il produit (photographies de selfies plus humoristiques que provocants) n’étant pas de nature à révéler une tension entre les deux salariés.

Par ailleurs, les attestations communiquées par le salarié ‘ le décrivant comme un bon professionnel, courtois et attentionné ‘ ne permettent pas de remettre en cause les faits précis qui lui sont reprochés. Ce d’autant que M. Z témoigne d’un comportement régulier de

M. X. En effet, il ressort de l’attestation de M. Z (pièce 18 déjà citée) que ce dernier «’dénombre au moins 5 personnes avec qui A a eu des accrochages verbaux (l’un des derniers avec L E, un cadreur de la société 17 juin Média, avec lequel M. X a failli en finir aux mains’» et il ajoute’: «’Enfin, la dernière fois m’a particulièrement choqué. A était alors avec son téléphone (personnel) en pleine heure de travail et hurlait sur son interlocuteur (problème de surfacturation de réparation). Tristan, qui est assistant chez nous, lui a demandé de baisser d’un ton ou du moins de sortir des locaux. A, passablement énervé, lui a répondu d’un ton menaçant, «’d’abord je finis avec lui et ensuite je m’occupe de toi’».’». Si certains de ces faits sont anciens, puisque M. X explique, sans être démenti sur ce point, que l’incident avec M. E a eu lieu en 2013, il demeure qu’un fait fautif dont l’employeur a eu connaissance plus de deux mois avant l’engagement des poursuites peut être pris en considération lorsque le même comportement fautif du salarié s’est poursuivi ou répété dans ce délai ce qui est le cas en l’espèce.

Les griefs ci-dessus examinés sont donc établis comme l’a retenu le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt. Ils sont à mettre en perspective avec l’avertissement dont M. X avait fait l’objet, le 4 octobre 2016, précisément pour ses retards et le comportement qu’il avait adopté à l’endroit d’une cliente ‘ Mme F ‘ en août 2016 (cf. pièces 5 et 17 de l’employeur – respectivement l’avertissement du salarié et le courrier de Mme F du 25 août 2016 adressé à la SASU Atlantis Tournage pour se plaindre du comportement de M. X). Sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres griefs, le jugement sera confirmé en ce qu’il a dit réelle et sérieuse la cause du licenciement de M. X.

Sur les dépens et les frais irrépétibles’:

Succombant, M. X sera condamné aux dépens.

Il conviendra de condamner M. X à payer à la SASU Atlantis Tournage une indemnité de 300 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, la cour’:

CONFIRME le jugement,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,

CONDAMNE M. X à payer à la SASU Atlantis Tournage la somme de 300 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et en cause d’appel,

CONDAMNE M. X aux dépens.

. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente et par Madame Dorothée MARCINEK, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


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