Licenciement disciplinaire : 7 février 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/01207

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Licenciement disciplinaire : 7 février 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/01207

C4

N° RG 21/01207

N° Portalis DBVM-V-B7F-KZAU

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Pascale HAYS

Me Anaïs FAURE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 07 FEVRIER 2023

Appel d’une décision (N° RG 20/00090)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de VALENCE

en date du 11 février 2021

suivant déclaration d’appel du 08 mars 2021

APPELANTE :

S.A. CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE LOIRE DROME ARDECHE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 4],

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Pascale HAYS, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Véronique POUQUET, avocat plaidant inscrit au barreau de SAINT-ETIENNE,

INTIMEE :

Madame [J] [N]

née le 04 Octobre 1974 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Anaïs FAURE, avocat au barreau de VALENCE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,

Madame Isabelle DEFARGE, Conseillère,

DÉBATS :

A l’audience publique du 28 novembre 2022,

Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, chargée du rapport, assistée de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 07 février 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 07 février 2023.

Exposé du litige :

Mme [N] [U] a été engagée à compter du 1er mars 2011 par la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE en qualité d’agent administratif dans le cadre de contrats à durée déterminée successifs puis en contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2012 en qualité de conseillère de clientèle.

Par avenant à son contrat de travail du 5 avril 2012, elle a été affectée auprès de l’agence Le Cheylard en qualité de conseiller de clientèle particulier.

Mme [N] [U] s’est vue confier le 23 décembre 2013 et à compter du 1er janvier 2014 une mission en qualité de gestionnaire de clientèle particulier jusqu’au retour du titulaire du portefeuille en absence pour maladie et maternité. Elle a ensuite bénéficié d’une promotion suite à la réussite de son examen dit « passerelle » du 26 février 2014, et a été promue responsable de bureau le 14 octobre 2014.

Elle a également bénéficié de plusieurs délégations de crédits avant d’être nommée à compter du 5 juin 2018 gestionnaire de clientèle professionnelle.

Mme [N] [U] a été convoquée le 19 septembre 2019 par lettre remise en mains propres à un entretien préalable fixé au 27 septembre 2019 et a été mise à pied à titre conservatoire.

Mme [N] [U] a été licenciée pour cause réelle et sérieuse par courrier du 21 novembre 2019.

Mme [N] [U] a saisi le Conseil de prud’hommes de Valence en date du 11 mai 2020 aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et obtenir les indemnités afférentes.

Par jugement du 11 février 2021, le Conseil de prud’hommes de Valence, a :

Jugé que le licenciement de Mme [N] [U] était dépourvu de cause réelle et sérieuse

Condamné la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE à lui verser les sommes suivantes :

18 276 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

100 € de remboursement de chèques KDO en denier ou quittance

318,20 € de remboursement de frais kilométriques en denier ou quittance

1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Débouté Mme [N] [U] du surplus de ses demandes

Débouté la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamné la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE aux dépens de l’instance.

La décision a été notifiée aux parties et la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE en a interjeté appel le 8 mars 2021 et Mme [N] [U] appel incident par voie de conclusions.

Par conclusions N°2 du 18 octobre 2021, la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE demande à la cour d’appel de :

Juger que le licenciement disciplinaire pour cause réelle et sérieuse de Mme [N] [U] est bien-fondé et la déboutée de l’intégralité de ses demandes de ce chef

Confirmant le jugement entrepris, la déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre du caractère vexatoire et brutal de son licenciement

La condamner à verser la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens

Par conclusions en réponse du 28 juillet 2021, Mme [N] [U] demande à la cour d’appel de :

Dire recevable et bien fondé son appel incident

Confirmer le jugement rendu le 11 février 2021 par le conseil des prud’hommes de valence en ce qu’il a

Condamné la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE au paiement des sommes suivantes :

100 € de remboursement de chèques KDO en denier ou quittance

318,20 € de remboursement de frais kilométriques en denier ou quittance

Débouté la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamné la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE aux dépens de l’instance

L’infirmer partiellement et statuant à nouveau :

Condamner la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE lui verser les sommes suivantes :

24 932 € nets de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

15 000 € de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire

4000 € : indemnité sur le fond demande l’article 700

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 octobre 2022

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI :

Sur le bien-fondé du licenciement :

Il ressort du courrier de notification de licenciement pour cause réelle et sérieuse du 21 novembre 2019, que la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE a été alertée par courrier de M. [P] [U] du 10 mai 2019, de doutes quant à la consultation par sa salariée Mme [N] [U], de ses comptes personnels dans le cadre de ses fonctions professionnelles et qu’il lui est reproché d’avoir, sur la période d’août 2016 à mai 2019, consulté la synthèse de M. [P] [U] via son outil de travail, à 64 reprises et sans autorisation ni aucun motif légitime et professionnel pour ce faire. Il est précisé dans ce courrier, qu’alors qu’elle n’avait pas en charge les comptes de M. [P] [U] et que leur consultation n’était en rien motivée par un besoin professionnel puisque comme elle l’a reconnu, elle a réalisé ses consultations dans un but purement personnel lié à sa séparation (procédure de divorce en cours), sachant qu’elle ne devait pas réaliser ses consultations et n’avait pas le droit de le faire.

Moyens des parties :

Mme [N] [U] conteste l’existence d’une faute à l’origine de son licenciement. Elle explique qu’une procuration avait été mise en place en sa faveur par son mari en 2014 en raison du fait qu’il ne gérait absolument pas ses dépenses au moment de leur vie commune, et que d’un accord mutuel, ils se sont entendus pour qu’elle puisse alimenter le compte bancaire de son époux et avoir un droit de regard sur ses dépenses en raison du principe de solidarité des dettes dans la vie maritale et afin de pallier sa gestion quelque peu hasardeuse des comptes bancaires. Elle fait valoir qu’elle a été régulièrement contrainte d’alimenter ce compte par des virements afin qu’il puisse faire face aux dépenses qui concernaient leurs enfants, ainsi qu’aux dettes communes du couple.

Elle soutient qu’à aucun moment elle n’a été informée d’une quelconque manière que son mari souhaitait révoquer la procuration ni par la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE ni par son mari lui-même et qu’elle a décidé seule de supprimer cette procuration le 3 août 2016, signifiant qu’elle avait décidé de ne pas effectuer d’opérations bancaires sur le compte de son mari au moment de la séparation du couple.

Mme [N] [U] soutient par ailleurs que l’usage privé des ressources professionnelles informatiques est toléré par l’employeur et qu’elle pouvait donc recourir à la consultation des comptes surtout lorsqu’on sait que la Caisse d’épargne n’a pas fait le choix d’en bloquer l’accès à ses salariés à la différence d’autres banques. La consultation des comptes bancaires à des fins privées étant un usage admis dans l’entreprise qui n’a jamais été sanctionné, son mari faisant partie de sa famille.

À titre subsidiaire, Mme [N] [U] soutient que le licenciement est une sanction disciplinaire disproportionnée compte tenu de son ancienneté dans l’entreprise et de l’absence de reproches antérieurs. Elle n’a remis aucun document à son conseil dans le cadre de la procédure de divorce et elle n’a pas découvert le montant du salaire de son mari en se connectant sur ses comptes, mais en discutant avec sa belle-famille. Elle ne s’est pas servie de son accès sur les comptes pour espionner le salaire de son conjoint. Elle allègue enfin que la commission de discipline n’a pas validé son licenciement.

La SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE estime que le licenciement est bien-fondé et soutient après avoir reçu un courrier de Monsieur [U] [P], le 10 mai 2019, qui évoquait certaines craintes quant à la consultation de ses comptes personnels dans le cadre de ses fonctions par Mme [N] [U], la Direction des risques, de la conformité des contrôles permanents a mené des investigations, dont il est résulté que sur la période d’août 2016 à mai 2019, la salariée avait consulté la synthèse bancaire de M. [U] à 64 reprises via son outil de travail, alors qu’étant gestionnaire clientèle professionnelle, elle n’avait aucune raison professionnelle légitime de consulter lesdits comptes, M. [U] ne faisant pas partie de son portefeuille clients. Interrogée sur les raisons de la consultation desdits comptes, Mme [N] [U] a répondu qu’elle était en instance de divorce depuis 5 ans, que son mari était enfin passé devant le juge le 7 mai et que jusqu’à maintenant elle avait toujours dû assumer les charges communes’, qu’elle savait qu’elle ne devait pas réaliser ces consultations et qu’elle n’avait pas le droit de le faire, reconnaissant ainsi les faits.

La SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE soutient par ailleurs que Mme [N] [U] dénature la Charte d’utilisation des ressources du système d’information et services Internet, intranet et messagerie, et qu’il ne peut être considéré que tout salarié peut aller consulter son propre compte ou les comptes de tiers, pour simple convenance personnelle avec son outil professionnel, et se renseigner ainsi sur les données privées d’un tiers. Justement, pour bien distinguer la consultation personnelle par un salarié, également client de la banque, de ses comptes, de la consultation de compte à des fins professionnelles, la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE a mis en place deux outils distincts, ‘clients’ et ‘professionnels’, dont le premier est accessible avec les identifiants personnels du salarié. De plus, Mme [N] [U] ne s’est pas connectée sur sa synthèse, ce qui lui aurait permis d’avoir accès aux comptes sur lesquels elle avait une procuration, mais directement sur la synthèse d’un tiers. M. [U] ayant révoqué sa procuration, si elle avait respecté les procédures internes en utilisant l’outil client pour procéder à des consultations sur les comptes personnels ou autorisés du fait de l’existence de la procuration, elle aurait immédiatement constaté qu’elle n’avait plus accès au compte de M. [U] du fait de la révocation de la procuration depuis 3 ans. C’est justement pour déjouer cette interdiction qu’elle a décidé, en toute connaissance de cause d’utiliser les outils mis à sa disposition dans le cadre professionnel pour continuer de consulter les comptes de son conjoint à 64 reprises et non de manière isolée. La délégation employeur du CDN ayant considéré que la relation de travail ne pouvait perdurer.

Sur ce,

Aux termes des dispositions de l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Il est constant que suite au courrier de M. [P] [U] en date du 2 mai 2019, intitulé « suspicion d’abus de confiance, il a été fait part à la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE de doutes sur l’accès à ses comptes par son ex femme Mme [N] [U], alors que la procuration avait été supprimée par ses soins, Celle-ci connaissant son salaire lors de la convocation de 2019 devant le juge aux affaires familiales.

La SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE a procédé à des investigations et a établi, sans que Mme [N] [U] ne le conteste, que la salariée avait, via son outil de travail, à 64 reprises entre août 2016 et mai 2019, consulté le compte bancaire personnel de [P] [U], son ex-mari, alors que la procuration avait été supprimée le 3 août 2016.

Mme [N] [U] a reconnu lors de l’entretien du 14 août 2019 du Conseil de discipline national, qu’elle devait effectuer ses consultations, qu’elle était en instance de divorce depuis 5 ans et enfin passé devant le juge le 7 mai que ‘jusqu’à maintenant elle avait dû toujours assumer les charges communes’ depuis le 20 mai, il doit verser 2 fois 100 € pour ses enfants et un huissier lui a remis ces derniers jours un commandement. Elle n’avait tiré aucun profit de ses consultations ni passé aucune opération, aucune écriture sur ses comptes’. Elle a précisé, à la question du but recherché par la consultation des comptes que « je sais que je n’avais pas le faire mais j’avais peur qu’il fasse des bêtises ,qu’il utilise mon RIB(j’ai mis une liste blanche pour me protéger de cela), qu’il ponctionne l’épargne de mes enfants. J’ai pu voir qu’il avait fait un crédit pour s’acheter une nouvelle voiture alors qu’il ne participait pas aux charges communes. Je lui ai sans doute donné de mauvaises habitudes, j’ai toujours alimenté le compte. Je n’ai pas utilisé les informations, j’avais peur qu’il me mette dans une situation encore plus difficile alors que mon fils est dans une école forestière et que le moindre équipement est très cher et il m’a dit plusieurs fois qu’il voulait m’en faire baver. Je sais que ce n’est pas bien, je sais que je n’avais pas le droit de le faire. Je regrette qu’il n’ait pas quitté la Caisse d’épargne comme je lui avais demandé et que l’agence du Cheylard ne lui ait pas demandé de le faire ».

Mme [N] [U] qui conclut également qu’elle a décidé elle-même de supprimer la procuration dont elle était bénéficiaire le 3 août 2016, sans savoir que son mari y avait déjà mis un terme, admet que les consultations des comptes de son mari dont elle était en instance de divorce, opérées postérieurement à cette date, l’ont été en l’absence de procuration sur ses comptes et en sachant qu’elle n’était pas autorisée à le faire.

S’il ressort de la Charte informatique et libertés de la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE, annexée (3) au règlement intérieur que l’utilisation du matériel professionnel pendant le temps de travail à titre personnel, est autorisé pour un usage raisonnable, cela ne signifie pas qu’il est possible de détourner l’usage du matériel professionnel à des fins privées.

En outre il ressort du paragraphe 3 de la même charte « que l’accès par l’utilisateur aux informations et documents conservés sur les systèmes d’exploitation doivent être limités à ceux dont les droits d’accès lui ont été accordés par l’entreprise pour l’exercice de son métier et il est interdit de prendre connaissance d’informations détenues par d’autres utilisateurs quand bien même ceux-ci ne les auraient pas explicitement protégés’ », ce qui n’est pas le cas en l’espèce, Mme [N] [U] ayant accédé au compte de son ex-conjoint à des fins purement privées, peu important le moyen conclu que la banque ait fait le choix de ne pas bloquer la consultation des comptes par les salariés à la différence des autres banques, ni que les postes informatiques permettaient l’accès libre à tous les comptes comme attesté par M. [K], collègue de Mme [N] [U]. Le seul fait que les salariés utilisaient cette possibilité pour accéder aux comptes de leur famille étant inopérant, Mme [N] [U] ayant consulté les comptes de M. [U] après avoir clôturé elle-même sa procuration alors que des différends financiers les opposaient dans le cadre de la procédure de divorce en cours, en toute connaissance de cause.

Le fait que Mme [N] [U] ait cessé ses consultations fautives des comptes bancaires de son ex-mari à compter de 2019, n’enlève pas le caractère fautif des nombreuses consultations opérées entre août 2016 et mai 2019, pendant la procédure de divorce.

Au surplus, il ressort des avis de la délégation salariale et de la délégation employeur du Conseil de discipline national du 7 novembre 2019, qu’au vu des éléments présentés par les deux parties, les faits reprochés sont de nature à être sanctionnés, et de l’avis de la délégation employeur que la relation de travail ne peut perdurer dans ces conditions. Il en ressort que contrairement à ce qui est conclu la délégation employeur est favorable à un licenciement, et que la délégation salariale n’émet pas un avis favorable à la demande de licenciement, la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE n’étant par ailleurs pas liée par cet avis.

Eu égard à la gravité des faits fautifs, la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE devant assurer la probité de ses salariés compte tenu du caractère confidentiel des données financières auxquelles ils ont accès, il convient, par voie d’infirmation du jugement déféré, de juger que le licenciement de Mme [N] [U] est fondé sur une cause réelle et sérieuse et proportionné aux faits fautifs et de la débouter des demandes à ce titre.

Sur le caractère vexatoire du licenciement :

Moyens des parties :

Mme [N] [U] fait valoir qu’elle a subi un préjudice en raison du risque financier lié à la crainte d’une demande de remboursement anticipé de ses prêts et des fausses rumeurs ayant circulé sur son compte.

Elle soutient ainsi avoir subi des difficultés financières générées par sa mise à pied de 2 mois, ayant passé 4 mois sans aucun revenu alors qu’elle est mère de deux enfants qui font des études. Elle a fait une demande de découvert négocié à laquelle elle n’a jamais eu de réponse. De plus elle avait contracté plusieurs prêts auprès de la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE dont elle a peur de devoir rembourser la totalité des échéances restant à payer, ce qui la mettrait dans une précarité irrémédiable. En plus de ses difficultés financières, elle allègue avoir fait face à et fausses informations circulant à son égard concernant son départ de l’entreprise, devant expliquer publiquement dans un mail à l’ensemble des collaborateurs les raisons de son départ le 28 novembre 2019.

La SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE conteste cette demande et soutient que Mme [N] [U] ne justifie d’aucun préjudice de ce chef. L’employeur explique que la période de mise à pied conservatoire a été rémunérée à hauteur de 50 %, ne privant par la salariée de toute ressource. Elle soutient que le licenciement pour faute grave était au départ envisagé et que Mme [N] [U] n’a finalement été licenciée que pour cause réelle et sérieuse malgré la gravité des faits, non privatif des indemnités de rupture, et que la salariée a été payée des compléments de salaire correspondants à la mise à pied conservatoire. Le seul fait d’être privée de ressources suite au licenciement est la conséquence de la rupture justifiée du contrat de travail et la crainte hypothétique d’une demande de remboursement anticipé de ses prêts ne saurait caractériser un caractère vexatoire ni un préjudice. Mme [N] [U] ne justifiant pas de l’existence des rumeurs qu’elle allègue ni de l’intention de nuire de la part de la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE à son encontre.

Sur ce,

Il est de principe que le salarié licencié peut prétendre à des dommages-intérêts en réparation d’un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi à la condition de justifier d’une faute de l’employeur dans les circonstances entourant le licenciement de nature brutale ou vexatoire et de justifier de l’existence de ce préjudice et que le licenciement soit ou non fondé sur une cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE justifie que pendant la période de mise à pied conservatoire, Mme [N] [U] a été rémunérée à 50 % et que le complément de salaire lui a été restitué après le licenciement pour cause réelle et sérieuse, la seule perte temporaire d’une partie du salaire étant inhérente à la procédure de mise à pied conservatoire.

La seule crainte hypothétique d’une demande de remboursement anticipé des prêts contractés auprès de son employeur ne constitue pas un fait établi, et Mme [N] [U] ne caractérise pas l’existence d’un préjudice à ce titre.

Enfin, Mme [N] [U] ne verse aucun élément aux débats permettant de démontrer l’existence de rumeurs ou de fausses informations sur son compte à la suite de la procédure de licenciement engagée par son employeur et le seul mail du 28 novembre 2019 rédigé par ses soins, et non corroboré par des éléments extérieurs, ne démontre pas qu’elle a été l’objet de « fausses informations relevant de la calomnie » comme elle l’évoque de manière générale et vague dans son mail.

Il convient par conséquent de rejeter la demande de Mme [N] [U] à ce titre par voie de confirmation du jugement déféré.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

DECLARE la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE recevable en son appel principal et Mme [N] [U] en son appel incident,

INFIRME le jugement déféré excepté en ce qu’il a :

Condamné la SA CAISSE D’EPARGNE LOIRE DROME ARDECHE à lui verser les sommes suivantes :

100 € de remboursement de chèques KDO en denier ou quittance,

318,20 € de remboursement de frais kilométriques en denier ou quittance.

Débouté Mme [N] [U] du surplus de ses demandes.

STATUANT à nouveau sur les chefs d’infirmation,

Y ajoutant,

DIT que le licenciement de Mme [N] [U] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

DEBOUTE Mme [N] [U] de l’ensemble des demandes à ce titre,

CONDAMNE Mme [N] [U] aux dépens de première instance et d’appel,

DIT que chaque partie supportera la charge des frais irrépétibles qu’elles ont engagés en première instance et en appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry Charbonnier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,

 


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