Licenciement disciplinaire : 19 janvier 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/16001

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Licenciement disciplinaire : 19 janvier 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/16001

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 19 JANVIER 2023

N° 2023/

NL/FP-D

Rôle N° RG 19/16001 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFAZT

[P] [J]

C/

SARL AMBULANCES AZUR

Copie exécutoire délivrée

le :

19 JANVIER 2023

à :

Me Brigitte MINDEGUIA, avocat au barreau de NICE

Me Olivier ROMANI, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NICE en date du 17 Septembre 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/00585.

APPELANT

Monsieur [P] [J], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Brigitte MINDEGUIA, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SARL AMBULANCES AZUR prise en la personne de son représentant légal, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Olivier ROMANI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2023

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société Ambulances Azur (la société) exerce une activité de transport en ambulance. Elle applique la convention collective nationale des transports routiers.

Suivant contrat à durée indéterminée (aucun écrit n’est versé aux débats), elle a engagé M. [J] (le salarié) à compter du 31 août 1988.

En dernier lieu, et selon les bulletins de paie produits, le salarié a occupé un emploi de responsable logistique, qualification agent de maîtrise GR8, coefficient 140, et il a perçu un salaire de base de 4 054.20 euros.

La société l’a convoqué le 20 septembre 2017 en vue d’un entretien préalable à licenciement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 octobre 2017, la société lui a notifié son licenciement pour faute grave dans les termes suivants:

‘Monsieur,

Nous faisons suite à l’entretien préalable au licenciement pour lequel vous étiez convoqué le 20 septembre 2017 et auquel vous vous êtes présenté assisté de Monsieur [B] [T], conseiller extérieur.

Lors de cet entretien, nous vous avons fait part de divers faits fautifs et nous avons souhaité entendre vos explications sur ceux-ci avant de prendre une décision sur la sanction à adopter,

Nous vous rappelons donc ces faits avant de vous faire part de notre décision.

Vous travaillez pour notre entreprise au poste de responsable logistique depuis le 31 août 1988.

Compte tenu de vos fonctions vous avez notamment pour tâches .

D’assurer l’entretien des véhicules roulants

De vous assurer de la bonne exécution du planning journalier

De développer de bonnes relations commerciales avec la clientèle particulière ainsi que les structures d’accueil avec lesquelles nous sommes en contrat (Hôpital de [Localité 6], CRCR de [Localité 3]…) De vous assurer du bon suivi des déclarations obligatoires auprès des organismes de tutelle

D’organiser le temps de travail des salariés et la préparation de pate

Plus généralement, de vous assurer de la bonne organisation du travail au sein de l’entreprise

Le 18 juillet 2017, une cliente, Madame [H] [W] s’est plainte d’un comportement irrespectueux au téléphone de votre part, cette date vous auriez mal parlé à cette dernière avant de lui raccrocher au nez. Selon les dires de cette cliente il ne s’agit pas d’un comportement isolé puisque vous avez pris vraisemblablement l’habitude d’être irrespectueux avec Madame [H].

Lors de l’entretien, vous nous avez indiqué que vous ne vous rappeliez pas de cette conversation et que vous n’étiez pas en charge de répondre au téléphone puisque Monsieur [X] avalt récupéré les lignes et contrôlait les lignes téléphoniques. Je Vous ai alors précisé que Monsieur [N] [X] contrôlait seulement (es plannings et que vous deviez continuer d’assurer la prise en charge des appels téléphoniques durant votre présence sur site, en dehors de vos heures de transport,

Le 8 septembre 2017 vers 15h50, vous avez agressé sur le lieu de travail et pendant les heures de travail Madame [C] [E], votre ancienne concubine et également salariée de notre structure.

Vous lui avez secoué la tête en la tenant par (es cheveux et vous l’auriez poussé. Cette dernière souffrait à la suite de cette agression de douteurs cervicales, d’ une raideur du cou, et d’ une ecchymose de 4 centimètres au niveau de (‘omoplate gauche.

Madame [C] [E] a eu une incapacité totale de travail de 3 jours et a été arrêtée en accident de travail du 08 septembre au 30 septembre 2017, Madame [E] a été porté plainte contre vous le lendemain des faits.

Lors de l’entretien préalable du 20 septembre 2017, vous avez nié les faits et indiqué que vous étiez passé à 15h50 sur le local administratif. Vous ne deviez pas y rester longtemps et vous vous êtes garé devant la porte.

Vous nous ayez Indiqué qu’il ne s’était rien passé, et que vous n’av!ez pas porté de coups et qu’elle avait déjà porté plainte par le passé.

Lors de t’entretien je vous al alors indiqué que les témoignages des salariés présents au moment des faits ne corroboraient pas avec votre version des faits.

En effet, Monsieur [U] [I], l’ambulancier qui vous accompagnait a vu Madame [E] sortir en pleurant des bureaux. II s’est précipité vers elle et cette dernière lui a répondu qu’elle venait de se faire violenter par vous.

C’est alors que vous ayez demandé à Monsieur [U] [I] de remonter dans te véhicule de transport sanitaire, une fois dans le véhicule vous a demandé ce qu’il s’était passé, vous lui avez indiqué que Madame [E] vous avait agressé.

Ce dernier vous a répondu qu’elle avait plutôt essayé de se défendre puisque votre teeshirt était déchiré.

Vous ne pouvez donc aujourd’hui nous affirmer qu’il ne s’est rien passé ce jour-là.

Votre comportement violent et impulsif n’est pas compatible avec notre activité d’ambulancier qui nécessite d’être à l’écoute des clients, et de savoir garder son sang-froid afin de pouvoir gérer tout type de situation.

Nous sommes responsables de la sécurité de nos salariés et nous ne pouvons tolérer cette attitude qui nuit à (‘image de notre société, et met danger la réputation de notre structure ainsi que ta sécurité de notre personnel.

A cela s’ajoute le fait que nous avons constaté une baisse significative du chiffre d’affaires sur ces derniers mois de :

De janvier à juillet 2016, la société a encaissé 329 214,31 euros ; de janvier à juillet 2017, le total encatssé se porte seulement å 283 240,49 Euros, soit une baisse de 1696

De janvier à juillet 2016, la facturation ISIS se portait 145 213,34 Euros ; pour ta période de janvier à juillet 2017, la facturation atteint 129 636,77 Euros, soit une baisse de 1196

Nous avons par ailleurs constaté que depuis que vous ne vous occupez plus de la régulation, l’activité repartait à la hausse..

Lors de l’entretien vous nous avez indiqué que certains véhicules n’étaient plus adaptés et nécessitaient des réparations, De ce fait vous vous contentiez de ne pas les faire router alors que nous disposons d’un garage sur [Localité 5] destiné à réparer nos véhicules.

Lors de l’entretien je vous ai demandé comment vous procédiez pour répondre à la clientèle avec des véhicules hors d’usage, vous m’avez alors indiqué que vous faisiez fonctionner tes autres ambulances du groupe, mais également que vous faisiez appel å des taxis ou å des ambulances d’entreprises concurrentes (ambulance ATHENA notamment) pour assurer les courses.

Je vous ai alors demandé si vous trouviez normal de faire travailler la concurrence plutôt que de prendre l’Initiative de faire réparer nos véhicutes. Yous m’avez alors simplement répondu que ces derniers travaillaient avec des véhicules adaptés et pouvaient répondre à la demande,

Aujourd’hui, après réflexion, nous ne pouvons que sanctionner lourdement votre comportement non seulement au regard de la gravité des faits incriminés et des conséquences préjudiciables sur le fonctionnement de notre structure mais également à l’aune de votre absence totale de remise en question.

Vous comprendrez aisément que votre ancienneté au sein de ta structure n’excuse pas tout, et que votre conduite fautive et irrespectueuse perturbe lourdement la bonne marche du service, Votre attitude a mis en évidence le profond désintérêt que vous portez à votre engagement auprès de notre société,

Ne pouvant donc compter sur votre collaboration ni espérer de votre part le respect de vos obligations professionnelles, nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour fautes graves.

Compte tenu de la gravité de celles-ci, votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible. Le licenciement prend donc effet immédiatement à la date d’envol de cette lettre, sans indemnité de préavis ni de licenciement.

(…)’.

Le 04 juillet 2018, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Nice en lui demandant:

– de déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse;

– de condamner la société à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, une indemnité de licenciement, un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et les congés payés afférents, une indemnité au titre des repos compensateurs, des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, des dommages et intérêts pour défaut d’information sur le droit au repos compensateurs, outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– d’ordonner la remise des documents de rupture rectifiés sous astreinte.

Par jugement rendu le 17 septembre 2019, le conseil de prud’hommes a:

– jugé que le licenciement repose sur une faute grave;

– débouté le salarié de l’intégralité de ses demandes;

– condamné le salarié à payer à la société la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné le salarié aux dépens.

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La cour est saisie de l’appel formé le 16 octobre 2019 par le salarié.

La déclaration d’appel est rédigée comme suit:

Objet/Portée de l’appel : Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués MOTIVATION DE L’APPEL Formé par Monsieur [P] [J] à l’encontre du jugement prononcé par le CPH de [Localité 5] en date du 17 septembre 2019 et faisant corps avec l’acte auquel il est annexé. Appel partiel tendant à la réformation du jugement : – En ce qu’il a confirmé la faute grave ; – En ce qu’il a débouté Monsieur [P] [J] de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné à payer à la SARL UNIPERSONNELLE AMBULANCES AZUR la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC – En ce qu’il a mis les dépens à sa charge ; – En ce qu’il n’a pas : ‘ Dit et Jugé que le licenciement de Monsieur [J] ne repose sur aucune faute, ‘ Requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ‘ Constaté l’exécution déloyale du contrat de travail par la Société AMBULANCES AZUR, ‘ Condamné l’employeur à verser au salarié les sommes suivantes : – 39.435,81 €uros bruts au titre de l’indemnité de licenciement – 3.943,58 €uros bruts au titre des congés payés y afférents – 89.288,60 €uros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ‘ Condamné la Société AMBULANCE AZUR à verser à Monsieur [J], au titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires effectuées mais non rémunérées : – Pour l’année 2014, la somme de 19.218,50 €uros bruts + 1.921,9 €uros bruts au titre des congés payés y afférents – Pour l’année 2015, la somme de 17.902, 75 €uros bruts + 1.790,27 €uros bruts au titre des congés payés y afférents – Pour l’année 2016, la somme de 23.541 €uros bruts + 2.354,10 €uros bruts au titre des congés payés y afférents – Pour l’année 2017, la somme de 9.007,19 bruts+ 900,70 €uros bruts au titre des congés payés y afférents ‘ Condamné la Société AMBULANCES AZUR à verser à Monsieur [J] la somme de 23.104 €uros bruts à titre d’indemnité de repos compensateur, outre la somme de 2.310,40 €uros au titre des congés payés y afférents, ‘ Condamné la Société AMBULANCES AZUR à verser à Monsieur [J] la somme de 4.464,43 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d’information sur le droit au repos compensateur, ‘ Condamné la Société ABULANCES AZUR à verser à Monsieur [J] la somme de 20.000 €uros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, ‘ Condamné ladite Société à verser à Monsieur [J] la somme de 3.000 €uros sur le fondement de l’article 700 du CPC, ‘ Condamné la Société aux entiers dépens. Et y ajoutant, condamner la SARL UNIPERSONNELLE AMBULANCES AZUR à la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC afférent à la présente procédure et aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions régulièrement remises au greffe le 14 janvier 2020 et auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile, le salarié demande à la cour de:

INFIRMER le Jugement entrepris

ET STATUANT A NOUVEAU,

DIRE ET JUGER que le licenciement de Monsieur [J] ne repose sur aucune faute,

REQUALIFIER le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONSTATER l’exécution déloyale du contrat de travail par la Société AMBULANCES AZUR,

En conséquence,

CONDAMNER l’employeur à verser au salarié les sommes suivantes :

39.435,81 €uros bruts au titre de l’indemnité de licenciement

3.943,58 €uros bruts au titre des congés payés y afférents

8.928,86 euros bruts au titre d’indemnité de préavis,

892,89 euros au titre des congés payés y afférents,

89.288,60 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause,

CONDAMNER la Société AMBULANCES AZUR à verser à Monsieur [J], au titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires effectuées mais non rémunérées :

Pour l’année 2014, la somme de 19.218,50 euros bruts + 1.921,9 euros bruts au titre des congés payés y afférents Pour l’année 2015, la somme de 17.902, 75 euros bruts + 1.790,27 euros bruts au titre des congés payés y afférents

Pour l’année 2016, la somme de 23.541 euros bruts + 2.354,10 euros bruts au titre des congés payés y afférents

Pour l’année 2017, la somme de 9.007,19 bruts+ 900,70 Curos bruts au titre des congés payés y afférents

CONDMANER la Société AMBULANCES AZUR à verser à Monsieur [J] la somme de 23.104 euros bruts à titre d’indemnité de repos compensateur, outre la somme de 2.310,40 euros au titre des congés payés y afférents,

CONDAMNER la Société AMBULANCES AZUR à verser à Monsieur [J] la somme de 4.464,43 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d’information sur le droit au repos compensateur,

CONDAMNER la Société ABULANCES AZUR à verser à Monsieur [J] la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

CONDAMNER ladite Société à verser à Monsieur [J] la somme de 3.000 €uros sur le fondement de l’article 700 du CPC,

LA CONDAMNER aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions régulièrement remises au greffe le 16 mars 2020 et auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société demande à la cour de:

DIRE ET JUGER irrecevables les demandes formulées par Monsieur [P] [J] au titre du préavis et des congés payés y afférents.

CONFIRMER le Jugement du le Conseil de Prud’hommes de Nice du 17 septembre 2019,

Ce faisant,

-DEBOUTER Monsieur [P] [J] de l’intégralité de ses demandes.

-CONDAMNER Monsieur [P] [J] au paiement de la somme de 3.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du C.P.C et à supporter les entiers dépens.

L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 07 novembre 2022.

MOTIFS

1 – Sur l’irrecevabilité de la demande au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

L’article 562 du code de procédure civile dans sa rédaction issue de l’article 10 du décret n°2017-891 du 6 mai 2017 dispose:

‘L’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.’

Seul l’acte d’appel opère la dévolution, les conclusions étant à cet égard inopérantes pour n’être susceptibles que de saisir la cour des moyens des parties.

Il s’ensuit que la cour n’est saisie que des chefs du jugement visés dans la déclaration d’appel.

En l’espèce, le salarié a présenté dans ses conclusions une demande au titre de l’indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés afférents.

Cependant, dans sa déclaration d’appel dont les termes ont été reproduits ci-dessus, il n’a pas énoncé le chef de jugement critiqué qui a rejeté sa demande au titre d’une indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés afférents.

Il s’ensuit que la société est bien fondée en sa fin de non-recevoir de la demande, fin de non-recevoir à laquelle d’ailleurs le salarié n’a pas répondu.

En conséquence, la cour déclare le salarié irrecevable en sa demande au titre d’une indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés afférents.

2 – Sur la rupture du contrat de travail

Aux termes de l’article L.1232-1 du code du travail, le licenciement par l’employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte des dispositions combinées des articles L.1232-1, L.1232-6, L.1234-1 et L.1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d’un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d’une part d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise pendant la durée limitée du préavis.

Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail.

Il découle du contrat de travail que le salarié est tenu de respecter ses collègues de travail.

En l’espèce, il ressort de la lettre de licenciement pour faute grave dont les termes ont été restitués ci-dessus que la société reproche au salarié notamment d’avoir le 08 septembre 2017 agressé sa collègue Mme [E] en lui secouant la tête par les cheveux et en la repoussant, ces faits ayant occasionné à la victime des douleurs cervicales, une raideur au cou, et une ecchymose de 4 centimètres au niveau de l’omoplate gauche.

La société verse à l’appui du grief:

– l’arrêt maladie de Mme [E] délivré le 08 septembre 2017 par le service d’urgence de l’hôpital de [Localité 4] au moyen d’un formulaire CERFA dédié à l’accident du travail;

– la plainte déposée par Mme [E] le 09 septembre 2017 au commissariat de police de [Localité 4] à l’encontre du salarié pour les faits de violence décrits à l’identique de ceux évoqués dans la lettre de licenciement.

Pour dire le grief non fondé, le salarié soutient que Mme [E] est son ex-compagne; que les faits relèvent de la sphère privée; que c’est Mme [E] qui l’a agressé; que les blessures sont survenues lorsque le salarié l’a repoussée pour se défendre; que le salarié ne présente aucun antécédent disciplinaire; que son ancienneté de 29 ans plaide en sa faveur; qu’il a été condamné à la suite de la plainte de Mme [E] à un rappel à la loi par le tribunal judiciaire de Nice le 18 janvier 2018.

La cour constate que la défense du salarié est empreinte d’une contradiction certaine dès lors qu’il soutient qu’il n’a pas agressé Mme [E] mais aussi qu’il a été condamné pour des faits de violence au préjudice de cette dernière suivant une décision dont aucun élément ne permet de dire que le salarié l’a contestée et qu’il a fait appel, ce dont il résulte que cette décision pénale, qui a reconnu la culpabilité du salarié pour les faits commis à l’encontre de Mme [E], est aujourd’hui devenue définitive.

Il s’ensuit que les faits reposant sur l’agression de Mme [E] sont établis.

Dès lors, la cour dit, et sans qu’il soit nécessaire d’examiner le surplus des griefs visés dans la lettre de licenciement, que la société rapporte la preuve de faits qui constituent une violation par le salarié des obligations découlant de son contrat de travail et qui rendent impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise pendant la durée limitée du préavis.

En conséquence, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a dit que le licenciement repose sur une faute grave et en ce qu’il a rejeté les demandes au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

3 – Sur les heures supplémentaires

La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à 35 heures par semaine soit 151.67 heures par mois.

Les heures effectuées au-delà sont des heures supplémentaires qui donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des 8 premières heures (de la 36ème à la 43ème incluse) et de 50% à partir de la 44ème heure.

La durée du travail hebdomadaire s’entend des heures de travail effectif et des temps assimilés.

Aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l’accord au moins implicite de l’employeur, soit s’il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

En l’espèce, la société oppose à la demande d’abord une fin de non-recevoir qui n’a toutefois pas à être examinée par la cour, conformément à l’article 954 du code de procédure civile, dès lors que la société ne l’a pas énoncée au dispositif de ses écritures.

Sur le fond, le salarié fait valoir à l’appui de sa demande de rappel d’heures supplémentaires qu’il a accompli des heures supplémentaires pour la somme totale de 69 669.44 euros du 1er janvier 2014 au 30 septembre 2017; qu’il a constamment travaillé chaque jour de 08 heures 00 à 20 heures 00 du lundi au vendredi sans pause; qu’il a assumé de nouvelles fonctions à compter du mois de juin 2013; que son travail a consisté pendant douze heures par jour à assurer la permanence téléphonique.

Il verse aux débats pour chacune des années de 2014 à 2017 le décompte de ses heures de travail pour chaque jour de chaque semaine selon des tableaux Excel, outre le décompte des heures supplémentaires accomplies.

La cour relève, s’agissant de la détermination de la nature des fonctions exercées par le salarié, qu’après analyse des pièces du dossier, aucun contrat de travail écrit n’a été produit.

Pour autant, il convient de relever que:

– les bulletins de salaire énoncent que le salarié a exercé les fonction de responsable logistique;

– la lettre de licenciement énonce que les missions confiées au salarié à ce titre sont d’assurer l’entretien des véhicules roulants, de s’assurer de la bonne exécution du planning journalier, de développer de bonnes relations commerciales avec la clientèle particulière et les structures d’accueil, de s’assurer du bon suivi des déclarations obligatoires auprès des organismes de tutelle, d’organiser le temps de travail des salariés et la préparation de pale, et plus généralement de s’assurer de la bonne organisation du travail au sein de l’entreprise.

Or, force est de constater que le salarié ne verse aux débats aucun élément laissant présumer que ses fonctions avaient été modifiées en 2013 pour consister uniquement à assurer la permanence téléphonique douze heures par jour sans pause comme il le soutient à l’appui de sa demande de rappel d’heures supplémentaires.

Il doit être ainsi relevé que le salarié se prévaut de trois correspondances qu’il a adressées à son employeur les 26 juin 2013, mais qui ne sont en réalité corroborées par aucun élément objectif.

Il n’est donc pas établi que la réalisation des heures alléguées a été rendue nécessaire par les tâches confiées au salarié.

Dans ces conditions, la cour dit que le salarié ne produit pas d’éléments suffisamment précis quant aux horaires qu’il a effectivement réalisés permettant à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

En conséquence, la cour dit que la demande n’est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il l’a rejetée.

4 – Sur la contrepartie obligatoire en repos

La société oppose à la demande d’abord une fin de non-recevoir qui n’a toutefois pas à être examinée par la cour, conformément à l’article 954 du code de procédure civile, dès lors que la société ne l’a pas énoncée au dispositif de ses écritures.

Sur le fond, compte tenu du rejet de la demande de rappel d’heures supplémentaires alléguées, la cour dit par voie de conséquence que la demande au titre d’une indemnité compensatrice de la contrepartie obligatoire en repos n’est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il l’a rejetée.

5 – Sur l’information du droit à repos compensateurs

La réparation d’un préjudice résultant d’un manquement de l’employeur suppose que le salarié qui s’en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir d’une part la réalité du manquement et d’autre part l’existence et l’étendue du préjudice en résultant.

En l’espèce, le salarié sollicite des dommages et intérêts au motif que la société ne l’a pas informé qu’il avait droit à des repos compensateurs lorsqu’il a accompli les heures supplémentaires pour la somme totale de 69 669.44 euros du 1er janvier 2014 au 30 septembre 2017.

Comme il a été précédemment dit, il n’est pas établi que le salarié a accompli les heures supplémentaires qu’il allègue.

En conséquence, la cour dit que la demande à titre de dommages et intérêts pour absence d’information du droit à repos compensateurs pour les heures supplémentaires alléguées n’est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il l’a rejetée.

6 – Sur l’exécution déloyale du contrat de travail

Tout contrat de travail comporte une obligation de loyauté qui impose à l’employeur d’exécuter le contrat de bonne foi.

En l’espèce, le salarié fait valoir à l’appui de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail que la société a fait preuve d’une particulière mauvaise foi.

A défaut de toute précision sur la nature des faits qui selon le salarié caractérise une exécution déloyale du contrat de travail, la cour dit que celui-ci ne rapporte pas la preuve d’un manquement de ce chef.

En conséquence, la cour dit que la demande n’est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il l’a rejetée.

7 – Sur les demandes accessoires

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a mis à la charge du salarié les dépens de première instance et en ce qu’il a alloué à la société une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le salarié est condamné aux dépens d’appel.

L’équité et les situations économiques respectives des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d’appel dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

DECLARE M. [J] irrecevable en sa demande au titre d’une indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés afférents,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf sur l’indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés afférents,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE M. [J] à payer à la société Ambulances Azur la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais d’appel,

CONDAMNE M. [J] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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