Licenciement disciplinaire : 16 février 2023 Cour d’appel d’Angers RG n° 20/00467

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Licenciement disciplinaire : 16 février 2023 Cour d’appel d’Angers RG n° 20/00467

COUR D’APPEL

d’ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N°

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/00467 – N° Portalis DBVP-V-B7E-EX2S.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ANGERS, décision attaquée en date du 03 Décembre 2020, enregistrée sous le n° F19/00198

ARRÊT DU 16 Février 2023

APPELANT :

Monsieur [E] [X]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par Me Stéphanie CHOUQUET-MAISONNEUVE de la SELARL VITAE AVOCAT, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 18114

INTIMEE :

S.A. SNGST La société SNGST, exerçant sous le nom commercial OCTOPUS SECURITE, Société Anonyme au capital de 164 644.94 Euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de BOBIGNY (93000) sous le numéro 327 917 118, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Maître Sophie DUFOURGBURG, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 21004 et par Maître MULS-BRUGNON, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Décembre 2022 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame TRIQUIGNEAUX-MAUGARS, conseiller chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Estelle GENET

Conseiller : Mme Marie-Christine DELAUBIER

Conseiller : Mme Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS

Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN

ARRÊT :

prononcé le 16 Février 2023, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame TRIQUIGNEAUX-MAUGARS, conseiller pour le président empêché, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE

La SA SNGST est spécialisée dans le secteur d’activité de la sécurité privée. Elle emploie plus de onze salariés et applique la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

Par contrat de travail à durée indéterminée du 18 juillet 2007, M. [E] [X] a été engagé par la société GIP Grand Ouest en qualité d’agent de sécurité, niveau III, échelon 1, coefficient 130 de la convention collective précitée.

Le 9 janvier 2017, M. [X] a été victime d’un accident de travail en chutant d’un escalier. Le lendemain, il a été placé en arrêt de travail pour accident du travail, renouvelé de manière continue jusqu’au 27 août 2017.

À la demande du médecin conseil du service médical, M. [X] a été reçu par le médecin du travail le 24 mai 2017, lequel a indiqué ‘est en arrêt de travail. Voir le spécialiste. Examens complémentaires en cours. Voir le poste de travail. À revoir à la reprise’.

Lors de la visite de reprise du 1er août 2017, M. [X] a été déclaré ‘inapte temporaire’ par le médecin du travail lequel a ajouté ‘doit voir son médecin traitant pour prolonger son arrêt’.

Suite à une nouvelle visite médicale du 22 août 2017 qualifiée à nouveau de visite de reprise, le médecin du travail a constaté que M. [X] était toujours en arrêt de travail et a envisagé une ‘reprise à temps partiel médical en évitant 2 nuits consécutives’ avec le ‘port de chaussures antidérapantes préconisé et siège adapté’.

Lors de la visite médicale du 31 août 2017, toujours qualifiée de visite de reprise, le médecin du travail a déclaré M. [X] ‘apte à la reprise à temps partiel médical (mi-temps thérapeutique). Travail préconisé : pas deux nuits consécutives. Port de chaussures antidérapantes préconisé et siège adapté’.

M. [X] a repris son poste d’agent de sécurité cynophile à mi-temps thérapeutique du 1er septembre 2017 au 25 septembre suivant.

Le 27 septembre 2017 à l’occasion d’une nouvelle visite de reprise, M. [X] a été déclaré ‘apte à la reprise à temps plein’. Il a alors repris son poste à temps plein.

Par jugement du 7 mars 2018, le tribunal de commerce d’Angers a placé la société GIP Grand Ouest en redressement judiciaire. Puis, par jugement du 25 avril 2018, il a ordonné la cession de la société GIP Grand Ouest à la société SNGST avec la reprise de l’intégralité des contrats de travail à compter du 1er mai 2018 en application de l’article L.1224-1 du code du travail.

Le 11 juin 2018, les agents de la société GIP Grand Ouest ont été informés de la reprise de leurs contrats de travail par la société SNGST. Un avenant au contrat de travail a été signé le 2 juillet 2018 avec effet rétroactif au 1er mai 2018, la classification conventionnelle de M. [X] étant désormais celle d’agent d’exploitation, niveau III, échelon 2, coefficient 140.

Le 30 avril 2018, M. [X] a fait l’objet d’une rechute de son accident de travail et a été placé en arrêt de travail de manière continue jusqu’au 4 novembre suivant, le dernier arrêt du 15 octobre 2018 mentionnant ‘reprise de travail à temps complet le 5 novembre 2018″.

Lors de la visite de reprise du 7 novembre 2018, M. [X] a été déclaré apte avec réserves en ces termes : ‘l’état de santé de M. [X] [E] est ce jour compatible avec la reprise à l’essai à son poste de travail en évitant les sollicitations forcées et répétées de l’épaule droite. Revoir le spécialiste – dans 8 jours’.

Par courrier du 9 novembre 2018, la société SNGST a convoqué M. [X] à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour faute grave fixé le 21 novembre suivant, et l’a mis à pied à titre conservatoire.

Le 14 novembre 2018, M. [X] a été déclaré inapte par le médecin du travail lequel précise que ‘l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi’.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 28 novembre 2018, la société SNGST a notifié à M. [X] son licenciement pour faute grave lui reprochant en substance d’avoir refusé de prendre ses fonctions le 5 novembre 2018 et de ne s’être présenté que le 8 novembre 2018, ainsi que le non-port de la tenue réglementaire et un comportement injurieux.

Contestant le bien fondé de son licenciement, M. [X] a saisi le conseil de prud’hommes d’Angers le 12 mars 2019 pour obtenir la condamnation de la société SNGST, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, au paiement de dommages et intérêts pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, d’une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, et d’une indemnité spéciale de licenciement ou subsidiairement d’une indemnité légale de licenciement, outre la remise des documents sociaux rectifiés sous astreinte et une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société SNGST s’est opposée aux prétentions de M. [X] et a sollicité sa condamnation au paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 3 décembre 2020, le conseil de prud’hommes d’Angers a :

– dit et jugé la faute grave de la lettre de licenciement fondée ;

– débouté M. [X] de ses demandes afférentes au licenciement pour faute grave ;

– débouté M. [X] de ses demandes en paiement de :

* 3 972,25 euros brut d’indemnité compensatrice de préavis et de 397, 22 euros brut de congés payés afférents ;

* 11 916,74 euros net d’indemnité spéciale de licenciement et de 5 958,37 euros net d’indemnité légale de licenciement ;

* 22 840,44 euros net de dommages et intérêts pour licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse ;

* 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

– condamné M. [X] aux entiers dépens.

Pour statuer en ce sens, le conseil de prud’hommes a considéré que l’avis du médecin du travail du 14 novembre 2018 ne pouvait être considéré comme un avis d’inaptitude. Il a relevé que la dernière étude de poste et des conditions de travail avait été effectuée le 6 juillet 2017 avant la reprise des contrats de travail par la société SNGST, qu’aucune actualisation de la fiche entreprise n’avait été faite par la société SNGST depuis celle réalisée le 7 juin 2017 par la société GIP Grand Ouest, et que le médecin du travail ne pouvait délivrer un avis d’inaptitude faute de respecter ces deux conditions préalables et obligatoires. Il a ensuite analysé les faits reprochés dans la lettre de licenciement et a estimé qu’ils justifiaient le licenciement pour faute grave du salarié.

M. [X] a interjeté appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique au greffe de la cour d’appel le 22 décembre 2020, son appel portant sur tous les chefs lui faisant grief ainsi que ceux qui en dépendent et qu’il énonce dans sa déclaration.

La société SNGST a constitué avocat en qualité de partie intimée le 18 janvier 2021.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 15 novembre 2022.

Le dossier a été fixé à l’audience du conseiller rapporteur de la chambre sociale de la cour d’appel d’Angers du 5 décembre 2022.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [X], dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 14 septembre 2021, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

– le déclarer recevable en son appel, le recevoir en ses demandes, les dire bien fondées et y faire droit ;

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :

– a dit et jugé la faute grave de la lettre de licenciement fondée ;

– l’a débouté des demandes afférentes ;

– l’a débouté de sa demande de voir dire et juger son licenciement pour faute grave comme étant nul ou à tout le moins dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

– l’a débouté :

* de ses demandes de 3 972,25 euros brut d’indemnité compensatrice de préavis et de 397,22 euros brut de congés payés y afférents ;

* de ses demandes d’indemnité spéciale de 11 916,74 euros net et légale de 5 958,37 euros net de licenciement ;

* de sa demande de 22 840,44 euros net de dommages et intérêts pour licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse ;

* de sa demande de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– l’a débouté de sa demande de voir ordonner la délivrance des bulletins de salaires correspondant au préavis et des documents de fin de contrat rectifiés (attestation Pôle emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte) sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 8ème jour suivant la notification du jugement, le conseil de prud’hommes se réservant la possibilité de liquider cette astreinte ;

– l’a débouté de sa demande de voir ordonner l’exécution provisoire du jugement;

– l’a débouté de sa demande de voir condamner la société SNGST aux entiers dépens ;

– l’a condamné aux entiers dépens.

Statuant à nouveau de :

– dire et juger que son licenciement pour faute grave est nul ou à tout le moins dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

– en conséquence, condamner la société SNGST à lui verser :

* une indemnité compensatrice de préavis de 3 972,25 euros brut ;

* les congés payés y afférents de 397,22 euros brut ;

* à titre principal, une indemnité spéciale de licenciement de 11 916,74 euros net;

* à titre subsidiaire, une indemnité légale de licenciement de 5 958,37 euros net;

* des dommages et intérêts pour licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse de 22 840,44 euros net ;

– ordonner la délivrance des bulletins de salaires correspondant au préavis et des documents de fin de contrat rectifiés (attestation Pôle emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte) ;

– condamner la société SNGST à lui verser la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel ;

– condamner la société SNGST aux entiers dépens ainsi que tous les frais éventuels d’exécution forcée par voie d’huissier y compris ceux visés par l’article A444-32 du code de commerce ;

– débouter la société SNGST de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Au soutien de son appel, M. [X] fait valoir que la régularité de l’avis d’inaptitude du 14 novembre 2018 n’a pas fait l’objet d’une contestation devant la formation des référés du conseil de prud’hommes dans les 15 jours de sa notification, qu’il est dès lors devenu définitif et s’impose aux parties comme au juge. À titre subsidiaire, il fait observer que l’irrégularité de cet avis n’entraînerait ni son inopposabilité ni sa nullité mais seulement l’illégitimité d’un licenciement prononcé en considération de cet avis. Elle serait donc sans incidence puisque le licenciement est fondé sur une faute grave.

Le salarié soutient ensuite qu’il ne pouvait pas être licencié pour motif disciplinaire le 28 novembre 2018 alors qu’il a été déclaré inapte par le médecin du travail le 14 novembre 2018. Il se réfère aux dispositions d’ordre public des articles L.1226-10 et L.1226-2 du code du travail qui énoncent de manière limitative les situations dans lesquelles le licenciement du salarié inapte peut être prononcé, et qui ne prévoient pas la possibilité de rompre le contrat de travail pour motif disciplinaire. Selon lui, il importe peu que la procédure disciplinaire ait été initiée avant le constat de l’inaptitude dès lors que son employeur en avait connaissance au moins dès l’entretien préalable du 21 novembre 2018 et qu’il en fait mention dans la lettre de licenciement pour toutefois ne pas en tenir compte. Il ajoute que la jurisprudence invoquée par la société SNGST ne lui est pas applicable puisqu’il n’a pas été licencié pour un double motif (inaptitude médicale et motif disciplinaire) mais uniquement pour un motif disciplinaire. Il en déduit que son licenciement est nul ou à tout le moins dépourvu de cause réelle et sérieuse.

À titre subsidiaire, M. [X] conteste les griefs qui lui sont reprochés. Il fait d’abord observer que la société SNGST n’a réalisé aucun aménagement de son poste pour respecter les recommandations du médecin du travail du 7 novembre 2018 et notamment l’absence de sollicitation de son épaule droite alors qu’il est droitier et agent cynophile. Il justifie son refus de prendre son poste le 5 novembre 2018 par l’absence de visite de reprise avant le 7 novembre alors qu’il revenait d’un arrêt de travail de six mois. Il reconnaît ensuite l’absence de port de tenue réglementaire, mais fait état d’une prise de poids et souligne que celle mise à sa disposition par son employeur était trop petite. Enfin, il indique avoir pu exprimer son mécontentement et élever la voix le 8 novembre 2018 quand il a constaté l’absence de mesure permettant une reprise de son poste dans le respect des préconisations médicales, mais il conteste les propos menaçants et injurieux invoqués par son employeur.

Enfin, M. [X] se prévaut de ce que son inaptitude est consécutive à l’accident du travail et à la rechute dont il a été victime pour solliciter l’indemnité spéciale de licenciement prévue à l’article L.1226-14 du code du travail ainsi que l’indemnité compensatrice de préavis.

*

La société SNGST, dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 16 juin 2021, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

– déclarer M. [X] mal fondé en son appel ;

– déclarer M. [X] mal fondé en ses demandes afférentes :

– à la nullité du licenciement ou à défaut à l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ;

– à l’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents ;

– à l’indemnité spéciale de licenciement ou à défaut à l’indemnité légale de licenciement ;

– aux dommages et intérêts pour licenciement nul ou à défaut pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– à la non conventionalité du barème Macron ;

– à la délivrance des documents sociaux conformes ;

– à l’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– aux entiers dépens ;

– l’en débouter ;

En conséquence :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– dit la faute grave de la lettre de licenciement fondée ;

– débouté M. [X] de ses demandes afférentes au licenciement pour faute grave ;

– débouté M. [X] de ses demandes en paiement des sommes de :

* 3 972,25 euros brut d’indemnité compensatrice de préavis ;

* 397, 22 euros brut de congés payés afférents ;

* 11 916,74 euros net d’indemnité spéciale de licenciement et de 5 958,37 euros net d’indemnité légale de licenciement ;

* 22 840,44 euros net de dommages et intérêts pour licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse ;

* 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté les parties du surplus de leurs demandes afférentes à la délivrance des documents sociaux et bulletins de salaire rectifiés ;

– condamné M. [X] aux entiers dépens ;

Y ajoutant :

– condamner M. [X] aux entiers dépens.

À titre liminaire, la société SNGST fait valoir qu’elle a mis en oeuvre un licenciement disciplinaire à l’encontre de M. [X] estimant qu’elle n’avait pas à suivre la procédure de licenciement pour inaptitude dès lors que l’avis du médecin du 14 novembre 2018 était irrégulier. Elle soutient à cet égard que l’étude de poste et l’étude des conditions de travail mentionnées dans cet avis ne pouvaient lui être opposables dès lors qu’elles ont été réalisées le 6 juillet 2017, soit avant le transfert du contrat de travail de M. [X]. En tout état de cause, elle assure qu’un salarié déclaré inapte par le médecin du travail au cours de la procédure mise en place sur le plan disciplinaire, peut être licencié pour pluralité de motifs tels que l’inaptitude médicale et la faute grave.

L’employeur soutient par ailleurs que le licenciement de M. [X] est justifié par son refus de porter la tenue réglementaire et par un comportement injurieux et menaçant à l’encontre de M. [K], responsable d’exploitation. Il précise que le comportement du salarié était de nature à nuire à l’image de la société SNGST et de son personnel auprès de ses clients et à remettre en cause l’autorité de M. [K] et de son adjoint, M. [D], vis-à-vis des agents de sécurité présents sur les lieux. Il assure alors que le maintien de M. [X] au sein de la société était impossible et ce d’autant plus qu’il avait déjà été sanctionné en novembre 2016 par une mise à pied disciplinaire de cinq jours pour non-respect des consignes.

MOTIVATION

Sur la régularité de l’avis du médecin du travail du 14 novembre 2018

L’article L.4624-4 du code du travail dans sa rédaction applicable à la cause, dispose qu”après avoir procédé ou fait procéder par un membre de l’équipe pluridisciplinaire à une étude de poste et après avoir échangé avec le salarié et l’employeur, le médecin du travail qui constate qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste déclare le travailleur inapte à son poste de travail. L’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail est éclairé par des conclusions écrites, assorties d’indications relatives au reclassement du travailleur’.

L’article R.4624-42 dans sa version applicable prévoit que:

‘le médecin du travail ne peut constater l’inaptitude médicale du travailleur à son poste de travail que :

1° S’il a réalisé au moins un examen médical de l’intéressé, accompagné, le cas échéant, des examens complémentaires, permettant un échange sur les mesures d’aménagement, d’adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste;

2° S’il a réalisé ou fait réaliser une étude de ce poste ;

3° S’il a réalisé ou fait réaliser une étude des conditions de travail dans l’établissement et indiqué la date à laquelle la fiche d’entreprise a été actualisée ;

4° S’il a procédé à un échange, par tout moyen, avec l’employeur.

Ces échanges avec l’employeur et le travailleur permettent à ceux-ci de faire valoir leurs observations sur les avis et les propositions que le médecin du travail entend adresser.

S’il estime un second examen nécessaire pour rassembler les éléments permettant de motiver sa décision, le médecin réalise ce second examen dans un délai qui n’excède pas quinze jours après le premier examen. La notification de l’avis médical d’inaptitude intervient au plus tard à cette date.

Le médecin du travail peut mentionner dans cet avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.’

Aux termes de l’article L.4624-6 du code du travail, « l’employeur est tenu de prendre en considération l’avis et les indications ou les propositions émis par le médecin du travail en application des articles L.4624-2 à L.4624-4. En cas de refus, l’employeur fait connaître par écrit au travailleur et au médecin du travail les motifs qui s’opposent à ce qu’il y soit donné suite ».

L’article L.4624-7 du code du travail dans sa rédaction applicable, prévoit que ‘le salarié ou l’employeur peut saisir le conseil de prud’hommes en la forme des référés d’une contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L.4624-2, L.4624-3 et L.4624-4. Le médecin du travail, informé de la contestation par l’employeur, n’est pas partie au litige’.

Enfin, aux termes de l’article R.4624-45 du code du travail dans sa version applicable, ‘en cas de contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications reposant sur des éléments de nature médicale émis par le médecin du travail mentionnés à l’article L.4624-7, le conseil de prud’hommes statuant en la forme des référés est saisi dans un délai de quinze jours à compter de leur notification. Les modalités de recours ainsi que ce délai sont mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail’.

La société SNGST soutient que ces dispositions permettent de contester les éléments de nature médicale de l’avis du médecin du travail, mais non de contester la régularité de cet avis. Or, le médecin du travail ne s’est pas prononcé sur l’étude de poste et des conditions de travail de M. [X] dans son établissement, les dates mentionnées à ce titre sur son avis concernant une période antérieure au transfert du contrat de travail de l’intéressé. Elle prétend que son recours, si elle l’avait exercé, aurait été déclaré irrecevable, sa contestation ne reposant pas sur des éléments de nature médicale.

M. [X] affirme que, faute d’avoir été contesté, cet avis s’impose à l’employeur et au juge.

Il résulte des dispositions précitées que l’avis émis par le médecin du travail, seul habilité à constater une inaptitude au travail, peut faire l’objet tant de la part de l’employeur que du salarié d’une contestation devant la formation de référé du conseil de prud’hommes qui peut examiner les éléments de toute nature ayant conduit au prononcé de l’avis. En l’absence d’un tel recours, cet avis s’impose aux parties.

En l’espèce, le 14 novembre 2018, le médecin du travail a émis un avis d’inaptitude de M. [X] précisant que ‘l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi’, que l’étude de poste et l’étude des conditions de travail ont été réalisées le 6 juillet 2017, que l’échange avec l’employeur est intervenu le 13 novembre 2018 et que la date de la dernière actualisation de la fiche d’entreprise date du 7 juin 2017. Il mentionne également en bas de page, les voies et délais de recours par le salarié ou l’employeur.

Cet avis n’a fait l’objet d’aucune contestation dans le délai de 15 jours tel que fixé par le texte susvisé.

Par conséquent, sa régularité ne peut plus être contestée, et cet avis s’impose aux parties comme au juge, que la contestation concerne les éléments purement médicaux, l’étude de poste, celle des conditions de travail de M. [X] ou l’actualisation de la fiche d’entreprise.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a dit que l’avis du médecin du travail du 14 novembre 2018 ne valait pas avis d’inaptitude.

Sur le licenciement de M. [X]

1. Sur le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement de M. [X] du 28 novembre 2018 qui fixe les limites du litige, est ainsi motivée :

‘Pour mémoire, vous avez été victime d’un accident du travail en date du 9 janvier 2017 (…)

En date du 27 septembre 2017, le médecin du travail vous a déclaré apte à le reprise à temps plein.

C’est dans ces conditions que vous avez repris votre poste et votre travail jusqu’au 24 avril 2018.

A l’issue de trois jours de congés payés du 26 au 28 avril 2018, vous avez fait une rechute de l’accident de travail précédent et ce jusqu’au 4 novembre 2018 (…)

(Le 8 novembre 2018) vous êtes arrivé et entré sur le parking de la société en roulant à une allure excessive. De plus, vous n’aviez pas emmené votre tenue, y compris vos chaussures.

Vous vous êtes énervé car nous avions chargé des cartons dans le véhicule de service.

Ces cartons étaient destinés à nos équipes en poste chez notre client « Parc des expositions d'[Localité 2] » chez lequel vous deviez vous rendre à l’issue de votre prise de service de 18 H 30.

Il était prévu que nos équipes déchargent votre véhicule de service afin de récupérer ce matériel.

Vous avez déclaré « vous me cassez les couilles avec vos cartons, dans tous les cas, je ne vais pas les porter pour les décharger.’

Rien de tel, ne vous était demandé. Il était prévu que nos équipes en place récupèrent ces cartons dans votre véhicule.

Vous avez ensuite dit que si vous alliez au Parc des expositions, vous alliez dégager tout le monde et tout fermer alors que vous saviez qu’un salon était en préparation et que nous avions des agents sur site.

Dans la continuité, vous avez dit à M. [K] que vous n’aviez pas de tenue SNGST, ce à quoi vous a répondu M. [K] en vous indiquant que les tenues GIP étaient toujours valides et pouvaient être portées.

Messieurs [D] et [K] vous ont remis des tenues mais vous les avez jetées au sol.

Vous avez été vu sur le parc des expositions en jogging et sans chaussures adaptées.

De même, alors que Messieurs [K] et [D] avaient quitté l’agence pour une réunion client et organisateur du salon du cheval, vous avez tenu des propos injurieux et menaçants à l’encontre de M. [K]. Ces propos nous ont été rapportés par deux témoins. Vous avez déclaré au premier témoin :

– Le nabot, je vais lui régler son compte un jour.

– Que notre Société perdrait le parc des expositions.

Vous avez également tenu des propos insultants à l’encontre du premier témoin en lui disant «qu’il léchait le cul des personnes des bureaux»

Vous avez déclaré au second témoin en parlant de M. [K] :

– Je vais l’enculer

– Je vais le planter

– Je vais le jeter par la fenêtre

– Je vais l’emplâtrer contre le mur.

À l’article 4 de notre Règlement intérieur, figure(nt) les actes ou comportements estimés fautifs. Sont indiqués au Règlement :

– Comportement discourtois envers le représentant d’un client, un supérieur hiérarchique et plus généralement envers tout salarié de la Société.

– Absences irrégulières

– Voies de fait, injures,

– Dénigrement de la Société ou de ses dirigeants.

Lors de l’entretien, vous nous avez confirmé avoir volontairement refusé de prendre votre service en date du 5 novembre 2018 à 18h30.

Selon vous, vous n’aviez aucune obligation de vous présenter à votre poste de travail car vous n’aviez pas effectué votre visite de reprise. Vous avez rajouté qu’une jurisprudence vous autorisait à agir ainsi.

Concernant le non port de la tenue, vous nous avez indiqué qu’une prise de poids importante était la cause de votre absence de port de votre tenue. Cette prise de poids ne peut expliquer le fait que vous ne portiez pas vos chaussures de travail.

De même, vous saviez obligatoirement que vos tenues n’étaient plus à votre taille et pourtant en amont, à aucun moment, vous ne nous avez sollicités pour une nouvelle tenue.

Dans l’urgence, nous avons pu vous donner des polos et parkas que vous avez refusé de porter.

À l’article 2 de notre Règlement est indiqué :

1-Port de l’uniforme :

En application de l’article L.613 du Code de la Sécurité intérieure, les agents exerçant une activité suivante mentionnée au 1° de l’article 611-1 :

– Surveillance humaine ou surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles, doivent porter, dans l’exercice de leurs fonctions, une tenue particulière. Celle-ci ne doit entraîner aucune confusion avec les tenues des agents des services publics, notamment de la police nationale, de la gendarmerie nationale, des douanes et des polices municipales.

Cette obligation du port de l’uniforme pour l’ensemble des salariés affectés aux missions de sécurité-sûreté s’applique sur les postes d’emploi fixes ou itinérants et pendant toute la durée du service.

Pour les salariés astreints au port de l’uniforme, celui-ci doit être porté complet avec des chaussures de couleur noire et parfaitement cirées. Selon le poste et les missions, elles peuvent être basses, montantes ou de sécurité .

Le port de la tenue peut être modifié suivant les saisons, les postes à tenir, les consignes. Aucune tenue civile ou fantaisiste ne peut être tolérée.

Les salariés doivent être conscients que le port d’un uniforme implique pour celui qui le revêt des obligations.

Pour rappel, ce document vous a été transmis à la signature de votre avenant au contrat de travail que vous avez signé en date du 2 juillet 2018.

Vous avez nié avoir tenu les propos rapportés ci-dessus’et pourtant des témoins affirment le contraire.

Vous nous avez déclaré que ce ne sont pas les propos que vous utilisez.

Vous avez rajouté que nous devions entamer une procédure de licenciement pour inaptitude car postérieurement à ces faits, le médecin du travail, en date du 14 novembre 2018 a décidé :

«L’état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi».

Cette inaptitude prononcée a posteriori ne peut se substituer à la procédure disciplinaire en cours pour laquelle, il vous a été signifié une mise à pied à titre conservatoire en date du 9 novembre 2018 à 14h47 par téléphone et confirmée par envoi de courrier ce même jour.

Pour rappel, nous avons eu déjà à déplorer un comportement fautif pour lequel vous avez été sanctionné, en novembre 2016, d’une mise à pied disciplinaire de cinq (5) jours. Les griefs étaient :

– Non-respect des consignes

– Main courante non renseignée totalement

– Pas de pointage de la ronde.

Vous avez contesté cette sanction (05/12/2016) mais celle-ci vous a été confirmée par courrier du 19 décembre 2016.

Votre comportement nuit gravement à l’image de notre entreprise et aucune circonstance ne saurait justifier que vous injuriez d’autres salariés de l’entreprise, ni que vous adoptiez un comportement opposant à votre hiérarchie, voire menaçant.

Nous ne pouvons que constater vos manquements à vos obligations professionnelles qui constituent des fautes professionnelles.»

M. [X] soutient qu’ayant été déclaré inapte le 14 novembre 2018, il ne pouvait être licencié pour un autre motif que son inaptitude. Il conteste subsidiairement les motifs invoqués.

Le société SNGST prétend qu’elle n’avait pas à tenir compte de l’avis d’inaptitude du 14 novembre 2018 du fait de son irrégularité, et qu’en tout état de cause, elle avait la possibilité d’invoquer à la fois, cette inaptitude et des motifs disciplinaires à l’encontre de M. [X]. Enfin, elle reprend les faits reprochés qu’elle considère comme fondés.

A titre liminaire, il sera observé que dans la lettre de licenciement, la société SNGST n’invoque que la faute grave et non l’inaptitude de M. [X] qu’elle exclut au contraire de la motivation du licenciement. Le salarié n’a donc pas été licencié pour une pluralité de motifs.

Il a en outre été jugé que l’avis d’inaptitude du 14 novembre 2018 s’impose aux parties comme au juge.

Enfin, il est établi et non contesté que l’inaptitude de M. [X] a une origine professionnelle comme étant consécutive à la rechute de son accident du travail du 30 avril 2018, et que la société SNGST en avait connaissance ainsi que cela résulte des arrêts de travail de l’intéressé, de ses bulletins de salaire postérieurs au transfert de son contrat de travail et du préambule de la lettre de licenciement.

Contrairement à l’article L.1226-9 prévoyant expressément la possibilité pour l’employeur de rompre le contrat de travail pour faute grave durant les périodes de suspension pour accident du travail ou maladie professionnelle, cette cause de rupture n’est pas prévue par les dispositions d’ordre public des articles L.1226-10 et L.1226-12 qui enserrent les possibilités de licenciement du salarié déclaré inapte dans les strictes limites et selon les modalités précises qu’ils déterminent.

Ainsi, l’article L.1226-10 applicable en matière d’accident du travail prévoit que:

‘Lorsque le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l’article L.4624-4, à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existant dans l’entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l’aptitude du salarié à bénéficier d’une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.’

L’article L.1226-12 du même code dispose que :

‘Lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent au reclassement.

L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi.

L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l’article L. 1226-10, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail.

S’il prononce le licenciement, l’employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III.’

Il ne peut dès lors, y avoir de place à d’autres modes de rupture du contrat de travail du salarié déclaré inapte, en particulier disciplinaire, que ceux limitativement énumérés par l’article L.1226-12. Il n’en va autrement que lorsque le comportement gravement fautif du salarié a mis l’employeur dans l’impossibilité d’appliquer les règles relatives au licenciement pour inaptitude et volontairement fait obstacle à la recherche d’un poste de reclassement.

La réalité et le sérieux du motif de la rupture s’apprécient à la date du licenciement.

M. [X] a été déclaré définitivement inapte à son emploi par avis du 14 novembre 2018. Il résulte de la lettre de licenciement que l’employeur en avait connaissance lors de l’entretien préalable du 21 novembre 2018. Le licenciement a été prononcé le 28 novembre 2018 pour motif disciplinaire sans lien avec son inaptitude.

Les dispositions susvisées excluent que le salarié déclaré inapte puisse faire l’objet d’un licenciement pour faute grave postérieurement à l’avis d’inaptitude.

Par conséquent, et sans qu’il soit nécessaire d’examiner les griefs invoqués par l’employeur, le licenciement de M. [X] est infondé.

2. Sur la qualification du licenciement

M. [X] soutient que son licenciement est nul au motif qu’il serait discriminatoire car fondé sur son état de santé.

La société SNGST conteste la nullité du licenciement en ce que celui-ci a été prononcé pour faute grave et non en raison de l’état de santé de M. [X].

Il résulte des dispositions des articles L.1132-1 et L.1132-4 du code du travail qu’aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé, et que tout licenciement trouvant sa cause dans l’état de santé d’un salarié est nul.

En application de l’article L.1134-1 du même code, lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions de l’article L.1132-1, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Il appartient au juge d’apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En l’espèce, M. [X] n’explicite pas ce moyen, se contentant d’affirmer que ‘compte tenu des développements précédents, force est de constater que (son) licenciement est nul’.

Il ne précise pas les éléments sur lesquels il se fonde, ni les raisons pour lesquels il estime que son licenciement est discriminatoire, la circonstance que celui-ci a été motivé par une faute grave plutôt que pour inaptitude ne pouvant à elle seule laisser supposer l’existence d’une discrimination fondée sur son état de santé.

La demande de nullité du licenciement doit donc être rejetée.

Il résulte dès lors de ce qui précède que le licenciement de M. [X] est sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur les conséquences financières du licenciement

1. Sur l’indemnité compensatrice de préavis

En application de l’article 9 de l’annexe IV de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité, le salarié de niveau III ayant plus de deux ans d’ancienneté a le droit à un préavis d’une durée de deux mois.

Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, M. [X] est bien fondé dans sa demande d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents.

Il ressort des bulletins de paie précédant la suspension de son contrat de travail qu’il a perçu un salaire de 2 185,06 euros brut en février 2018, de 1478,02 euros brut en mars 2018 et de 1 780,84 euros brut en avril 2018. Le cumul de ces trois mois s’élève à la somme de 5 443,92 euros, soit une moyenne de 1 814,64 euros brut par mois.

Dans ces conditions, la société SNGST est condamnée à verser à M. [X] la somme de 3 629,28 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 362,92 euros brut de congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

2. Sur l’indemnité spéciale de licenciement

M. [X] sollicite l’indemnité de licenciement doublée définie à l’article L.1226-14 du code du travail. Il soutient que son inaptitude est consécutive à l’accident du travail et à la rechute dont il a été victime.

La société SNGST conclut au débouté compte tenu de l’existence d’une faute grave.

Les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

Ainsi qu’il a été vu précédemment, il est établi et non contesté que l’inaptitude de M. [X] a pour origine la rechute de son accident du travail du 30 avril 2018, étant précisé que l’avis d’inaptitude du 14 novembre 2018 a été rendu à l’issue de l’arrêt de travail afférent.

La connaissance de cette origine par l’employeur se déduit des différentes prolongations d’arrêt de travail qui portent la mention ‘accident du travail’, des bulletins de salaire postérieurs au transfert du contrat de travail qui portent la même mention, et du préambule de la lettre de licenciement, étant précisé que la société SNGST ne soulève aucun moyen quant à l’origine professionnelle de l’inaptitude de M. [X].

En application de l’article L.1226-16, il convient de prendre en considération le salaire moyen des trois derniers mois précédant la suspension du contrat de travail, soit la somme susvisée de 1 814,64 euros brut.

Par conséquent, M. [X] a droit à une indemnité de licenciement doublée qu’il convient de fixer, compte tenu de son ancienneté et de son salaire de référence, à la somme de 11 187,84 euros au paiement de laquelle la société SNGST doit être condamnée.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

3. Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

A titre liminaire, il convient d’observer que la demande de nullité du licenciement ayant été rejetée, M. [X] n’est pas recevable à demander des dommages et intérêts pour licenciement nul.

Au soutien de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié se fonde d’abord sur les dispositions de l’article L.1226-15 du code du travail, et subsidiairement sur celles de l’article L.1235-3 dont il conteste la conventionalité. Il expose n’avoir jamais retrouvé d’emploi en CDI et n’avoir trouvé que quelques missions d’intérim. Il ajoute avoir subi une nouvelle rechute de son accident du travail en février 2019, avoir été opéré en mars 2019 ce qui a généré des frais d’honoraires non remboursés, et avoir suivi des séances de kinésithérapie pendant plusieurs mois. Il indique avoir deux enfants à charge et verser une pension alimentaire de 85 euros par mois pour un troisième enfant.

La société SNGST prétend que M. [X] ne justifie pas réellement de sa situation suite à la rupture de son contrat de travail en ce qu’il ne démontre pas avoir effectivement recherché un emploi et qu’il ne justifie pas des indemnités journalières perçues lors de ses arrêts de travail. Elle se prévaut en tout état de cause de la conventionalité du barème de l’article L.1235-3 du code du travail.

L’article L.1226-15 du code du travail ne s’applique pas au présent litige en ce qu’il prévoit l’indemnité octroyée au salarié en cas de refus par l’une ou l’autre des parties de la proposition de réintégration dans l’entreprise faite par le tribunal saisi.

En effet, en l’espèce, la réintégration du salarié n’a pas été proposée par le conseil de prud’hommes, elle ne l’est pas davantage par la cour, et par conséquent le refus de l’une ou l’autre des parties n’est pas formalisé.

Il est acquis que les dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail sont de nature à permettre le versement d’une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l’article 10 de la convention n°158 de l’ OIT, et qu’elles sont dès lors compatibles avec les stipulations de cette convention. Il convient donc de les appliquer au cas présent.

M. [X] avait onze ans d’ancienneté et il était âgé de 37 ans au moment de son licenciement. Il n’a pas retrouvé d’emploi stable. Il justifie du montant de ses allocations chômage, de celui de ses indemnités journalières et de ses charges de famille. La cour dispose ainsi des éléments nécessaires pour fixer à la somme de 11 000 euros le montant de l’indemnité propre à réparer son préjudice.

Par conséquent, la société SNGST sera condamnée à payer à M. [X] la somme de 11 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

4. Sur les documents de fin de contrat

Compte tenu de ce qui précède, la société SNGST sera condamnée à remettre à M. [X] une attestation Pôle emploi, un bulletin de salaire, un solde de tout compte et un certificat de travail conformes à la présente décision.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le remboursement des indemnités de chômage

Selon l’article L.1235-4 du code du travail, dans les cas prévus aux articles qu’il énonce, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés, de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage. Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Les conditions d’application de cet article étant réunies, il y a lieu d’ordonner le remboursement par la société SNGST à Pôle emploi des indemnités de chômage effectivement versées à M. [X] par suite de son licenciement et ce dans la limite de trois mois d’indemnités.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les dispositions relatives à l’application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens seront infirmées.

Il est justifié de faire partiellement droit à la demande présentée par M. [X] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. La société SNGST sera condamnée à lui payer la somme de 3 000 euros qui vaudra pour ses frais irrépétibles de première instance et d’appel.

La société SNGST, partie qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe,

– INFIRME le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Angers le 3 décembre 2020 en toutes ses dispositions ;

Statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant :

– DIT que l’avis d’inaptitude du 14 novembre 2018 est devenu définitif et s’impose aux parties ;

– DIT que le licenciement de M. [E] [X] ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse ;

– CONDAMNE la société anonyme SNGST à verser à M. [E] [X] les sommes suivantes :

* 3 629,28 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

* 362,92 euros brut à titre de congés payés afférents ;

* 11 187,84 euros à titre d’indemnité spéciale de licenciement ;

* 11 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– ORDONNE à la société anonyme SNGST de remettre à M. [E] [X] une attestation Pôle emploi, un bulletin de salaire, un solde de tout compte et un certificat de travail conformes ;

– ORDONNE à la société anonyme SNGST de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage effectivement versées à M. [E] [X] par suite de son licenciement dans la limite de trois mois ;

– CONDAMNE la société anonyme SNGST à payer à M. [E] [X] la somme de 3 000 euros qui vaudra pour ses frais irrépétibles de première instance et d’appel ;

– CONDAMNE la société anonyme SNGST au paiement des dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER, P/ LE PRÉSIDENT empêché,

Viviane BODIN C. TRIQUIGNEAUX-MAUGARS

 


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