Licenciement disciplinaire : 15 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 18/10388

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Licenciement disciplinaire : 15 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 18/10388

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 9

ARRÊT DU 15 FÉVRIER 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/10388 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6LUU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Juillet 2018 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – Section Commerce chambre 8 – RG n°F 17/05888

APPELANTE

MUTUELLE GÉNÉRALE DE L’ÉDUCATION NATIONALE (MGEN)

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Nathalie FONVIEILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0027

INTIMÉ

Monsieur [E] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Olivier GADY, avocat au barreau de PARIS, toque : C1531

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Novembre 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe MICHEL, président, chargé du rapport, et M. Fabrice MORILLO, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Philippe MICHEL, président de chambre

Mme Valérie BLANCHET, conseillère

M. Fabrice MORILLO, conseiller

Greffier : Mme Pauline BOULIN, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

– signé par Monsieur Philippe MICHEL, président et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [E] [Z] a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée par la Mutuelle Générale Environnement Territoires (par abréviation la MGET) le 11 avril 1994 en qualité d’employé au service courrier.

Il exerçait en dernier lieu les fonctions de technicien moyens généraux, en application d’un avenant à son contrat de travail du 27 mars 2009 à effet au 1er février 2009.

En dernier lieu, sa rémunération mensuelle brute s’élevait à la somme de 2 670,58 euros.

M. [Z] a été élu délégué du personnel, membre suppléant au CE et a été désigné par le Syndicat CGT en qualité de délégué syndical.

Dans le cadre d’une opération de fusion absorption de la MGET par la Mutuelle Générale de l’Éducation Nationale (par abréviation la MGEN), cette dernière a proposé, les 12 et 19 novembre 2015, à M. [Z] une modification de son contrat de travail pour motif économique à laquelle le salarié n’a pas donné suite.

La fusion absorption ayant été effective au 1er janvier 2016, le contrat de travail de M. [Z] a été transféré à la MGEN à cette date, en application de l’article L.1224-1 du code du travail.

La MGEN emploie habituellement plus de 10 salariés et ses relations contractuelles de travail sont régies par la convention collective de la mutualité.

Le 13 janvier 2016, la MGEN a adressé à M. [Z] un avenant à son contrat de travail prévoyant une affectation sur un poste de ‘assistant technique logistique, catégorie employé classe E4 ‘ moyennant une rémunération brute annuelle de 31 111,44 euros avec maintien du statut collectif MGET pendant 15 mois et reprise de son ancienneté et a placé le salarié en dispense d’activité jusqu’à l’expiration d’un délai de réflexion d’un mois.

L’avenant au contrat de travail était accompagné des explications suivantes :

‘Cette fusion absorption intervenant entre MGEN et MGET a pour conséquence, afin de prendre en compte les modalités de fonctionnement et d’organisation de l’UES MGEN composée de plusieurs entités juridiques (notamment pour le périmètre concerné par la fusion absorption ci- dessus évoquée : MGEN, MGEN Union et MGEN Technologies) et ses besoins en termes d’activités et d’exploitation, d’entraîner des modifications de votre contrat de travail. Par courrier adressé par lettre recommandée avec accusé de réception le 19 novembre 2015, auquel nous nous référons expressément, vous ont été précisées les modalités générales de reprise de votre contrat de travail par MGEN et les modifications s’y rapportant notamment en termes de fonction, classification et catégorie professionnelle, structure de rémunération et dispositions conventionnelles de référence. En complément et déclinaison de ces modalités, vous a été proposé un avenant à votre contrat de travail. Vous n’avez pas souhaité répondre en tant que telle à cette proposition. Ce courrier vous a permis d’avoir, par anticipation, une visibilité concernant votre situation contractuelle à venir, situation que nous vous confirmons aujourd’hui par un nouvel envoi d’une proposition de modification de votre contrat de travail. Vous trouverez, à cet effet, un avenant à votre contrat de travail, pour signature’.

M. [Z], comme 38 de ses autres collègues, a refusé la modification de son contrat de travail.

La MGEN a alors mis en ‘uvre un plan de sauvegarde de l’emploi ayant abouti à un accord collectif signé le 19 avril 2016 déterminant le contenu du plan, les modalités de consultation du comité d’entreprise et les conditions de mise en ‘uvre des licenciements.

L’accord collectif a été validé par la DIRECCTE le 9 mai 2016.

N’ayant adhéré à aucune mesure prévue par ce plan, M. [Z] a été convoqué, par courrier du 14 septembre 2016 à un entretien préalable à licenciement qui s’est tenu le 29 septembre 2016.

En raison de ses mandats détenus au sein de la MGET (délégué syndical CGT, délégué du personnel, élu au Comité d’Établissement et représentant syndical CHSCT), M. [Z] bénéficiait du statut de salarié protégé pour une durée de 12 mois à compter du transfert de son contrat de travail.

La MGEN a alors sollicité l’autorisation de licencier M. [Z] auprès de l’inspection du travail par courrier du 3 octobre 2016.

Par décision du 1er décembre 2016, l’inspecteur du travail a refusé l’autorisation de licenciement de M. [Z].

Relevant que la période de protection du salarié avait expiré le 31 décembre 2016, la MGEN a notifié à M. [Z] son licenciement pour motif économique le 6 janvier 2017.

M. [Z] a adhéré au congé de reclassement de 12 mois débutant le 17 janvier 2017 et a reçu les documents de fin de contrat, son solde de tout compte et son indemnité de licenciement.

Invoquant la nullité, à titre subsidiaire, l’absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, M. [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 21 juillet 2017 afin d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, la condamnation de la MGEN à lui verser les sommes suivantes assorties des intérêts au taux légal avec capitalisation de ceux-ci :

° 80 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

° 16 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation du statut protecteur,

subsidiairement,

° 80 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

en tout état de cause,

° 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de formation,

° 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 19 juillet 2018, le conseil de prud’hommes de Paris a condamné la MGEN à verser à M. [Z] la somme de 32 046,96 euros, avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement, à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et a débouté le salarié du surplus de ses demandes.

Le 23 août 2018, la MGEN a interjeté appel du jugement qui lui avait été notifié le 27 juillet 2018.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 février 2019, la MGEN demande à la cour de :

– Infirmer le jugement entrepris,

– Débouter M. [Z] de l’ensemble de ses demandes, y compris en son appel incident,

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 septembre 2019, M. [Z] demande à la cour de :

à titre principal :

– Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a débouté de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement nul et violation du statut protecteur,

En conséquence,

– Condamner la MGEN au paiement des sommes suivantes :

° Dommages et intérêts pour licenciement nul : 80 000 euros,

° Dommages et intérêts pour violation du Statut protecteur : 16 000 euros,

à titre subsidiaire :

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– Infirmer le jugement entrepris sur le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu’il l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation,

Statuant à nouveau, et, y ajoutant

– Condamner la MGEN au paiement des sommes suivantes :

° Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 80 000 euros,

° Dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation : 10 000 euros,

° 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’instruction a été clôturée le 18 octobre 2022 et l’affaire fixée à l’audience du 16 novembre 2022.

MOTIFS

Sur le licenciement

Aux termes de l’article L.1233-1 du code du travail dans sa version applicable au présent litige, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente, au moins égale à :

a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;

b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;

c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;

d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;

2° A des mutations technologiques ;

3° A une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

4° A la cessation d’activité de l’entreprise.

La matérialité de la suppression, de la transformation d’emploi ou de la modification d’un élément essentiel du contrat de travail s’apprécie au niveau de l’entreprise.

Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l’exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants, résultant de l’une des causes énoncées au présent article.

En l’espèce, la lettre de licenciement est ainsi rédigée.

‘Monsieur,

Je vous informe que nous sommes contraints de procéder à votre égard à une mesure de licenciement pour motif économique.

En effet, dans le cadre des Assemblées générales de la MGEN et de la MGET, qui se sont tenues en juin, juillet et octobre 2015, a été actée l’opération de fusion absorption de la MGET par MGEN avec transfert de la totalité du portefeuille MGET, confirmant en cela la volonté de s’engager dans un rapprochement des deux mutuelles, leur permettant d”uvrer ensemble dans le champ individuel et collectif.

Comme mentionné dans la note d’information consultation du Comité Central d’entreprise de l’UES MGEN du 5 juin 2015 et du Comité d’entreprise de la MGET du 10 juin 2015, cette fusion absorption permettra : « pour la MGET, de garantir la protection des adhérents, des salariés et des militants de la MGET, sur un secteur concurrentiel qui est en pleine mutation, alors que la mutuelle est confrontée à l’érosion du nombre de ses adhérents et aux risques liés aux renouvellements des référencements.

En effet, dans un environnement défavorable, et malgré les mesures d’adaptation prises, la pérennité économique de la MGET n’est pas assurée sur le moyen terme. »

Dans ce cadre, à compter du 1er janvier 2016, votre contrat de travail a été transféré à MGEN conformément aux dispositions de l’article L.1224-1 du Code du travail.

Cette fusion absorption intervenant entre MGEN et MGET a eu pour conséquence, afin de prendre en compte les modalités de fonctionnement et d’organisation de l’EUES MGEN composée de plusieurs entités juridiques (notamment pour le périmètre concerné par la fusion absorption ci-dessus évoquée : MGEN, MGEN Union et MGEN Technologies) et ses besoins en termes d’activités et d’exploitation, d’entraîner des modifications de votre contrat de travail.

Par courrier adressé par lettre recommandée avec accusé de réception le 19 novembre 2015, auquel nous nous référons expressément, vous ont été précisées les modalités générales de reprise de votre contrat de travail par MGEN et les modifications s’y rapportant notamment en termes de fonction, classification et catégorie professionnelle, structure de rémunération et dispositions conventionnelles de référence.

En complément et déclinaison de ces modalités, vous a été proposé un avenant à votre contrat de travail.

Malgré les engagements pris et mis en ‘uvre en matière sociale par la MGEN (maintien de l’ancienneté, de la rémunération, absence de mobilité géographique contrainte, période d’immersion), des salariés de la MGET transférés à la MGEN, dont vous faites partie, ont refusé les modifications de leur contrat de travail.

Les modifications des contrats de travail intervenant dans ce cadre sont fondées sur une cause économique et les refus de modifications de contrat de travail en résultant répondent à la définition donnée par le code du travail (article L.1233-3 ) : « Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. »

Une procédure de licenciement collectif pour motif économique a été, en conséquence, mise en ‘uvre par la MGEN par rapport aux salariés ayant refusé les propositions de modification du contrat de travail.

Ces salariés, dont vous faites partie, ont été positionnés en dispense d’activité indemnisée pendant la durée de la procédure de licenciement collectif pour motif économique.

Les motifs économiques de cette réorganisation se traduisant par des ruptures de contrat de travail suite à refus de modification des contrats de travail ont été présentés à l’information consultation du Comité Central d’Entreprise de l’UES MGEN et du Comité d’Établissement de MGEN, dont les avis ont été recueillis dans leurs séances respectives des 15 et 19 avril 2016.

En application de l’article L.1233-24-1 du code du travail, une négociation s’est engagée avec les Organisations Syndicales Représentatives de l’UES MGEN pour conclure un accord collectif majoritaire déterminant les mesures du Plan de Sauvegarde de l’Emploi. Au cours de deux réunions de la Commission Paritaire de Négociation de l’UES MGEN en dates des 1 er et 3 mars 2016, ces mesures ont été négociées et l’accord collectif incluant les mesures du Plan de Sauvegarde de l’Emploi a été signé, de manière unanime, le 19 avril 2016.

Ce Plan de Sauvegarde de l’Emploi, dont les mesures ont été arrêtées afin de limiter le plus possible les licenciements pouvant résulter de ce dispositif de réorganisation, a fait l’objet d’une information consultation du Comité Central d’Entreprise de l’UES MGEN et du Comité d’Établissement de MGEN, dont les avis ont été recueillis dans leurs séances respectives des 15 et 19 avril 2016.

Ce Plan de Sauvegarde de l’Emploi, porté à la connaissance de l’ensemble des salariés de MGEN concernés, prévoit notamment une phase de recours à des mesures de volontariat permettant à terme des mobilités internes et des départs de salariés volontaires dans le cadre de projets professionnels et une phase de reclassement interne sur des postes disponibles au niveau de l’UES MGEN.

Après mise en ‘uvre de ces dispositifs d’appel au volontariat puis de reclassement interne, il s’avère que vous faites partie des salariés relevant de MGEN menacés de licenciement pour motif économique par refus de la modification de votre contrat de travail.

Dans ce cadre :

vous avez donc eu accès au dispositif de départ et de mobilité interne volontaires, entre le 17 mai 2016 et le 17 juin 2016 ;

vous ont été également proposées des mesures de reclassement interne se concrétisant par la possibilité d’accéder à un poste d’assistant technique logistique au sein de la MGEN union sous contrat à durée indéterminée :

Vous disposiez pour accepter ou refuser ces propositions d’un délai de réflexion (du 11 juillet 2016 au 31 août 2016), mais vous n’avez pas donné suite, de manière positive, à ces courriers.

Compte tenu de la protection afférente à votre ancien mandat de délégué syndical, vous avez convoqué à entretien préalable le 29 septembre 2016 et une demande d’autorisation de licenciement a été sollicitée auprès de l’Inspection du Travail en date du 3 octobre 2016.

Par courrier du 1er décembre 2016, l’Inspection du Travail nous a informé du refus qu’elle a porté à cette demande.

Il est cependant à constater au 31 décembre 2016 le terme de la protection afférente à votre ancien mandat de délégué syndical.

A défaut de repositionnement interne ou externe intervenue dans ce cadre, je vous notifie votre licenciement pour motif économique par refus de modification de votre contrat de travail transféré à la MGEN, en qualité d’assistant technique logistique.

En application du Plan de Sauvegarde de l’Emploi et conformément à l’information donnée aux salariés, vous pouvez accéder à un Congé de reclassement d’une durée de douze mois (quinze mois pour les salariés de 50 ans ou plus OU présentant un handicap reconnu par la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées), au cours duquel des actions de formations et des prestations du Relais Mobilité Emploi animé par le Cabinet ALTEDIA vous seront proposées (voir fiche annexe présentant le dispositif du Congé de reclassement).

Vous disposez d’un délai de 8 jours calendaires à compter de la première présentation de cette lettre pour accepter cette mesure (par coupon réponse figurant en annexe).

A défaut de réponse dans ce délai, vous serez présumé refuser ce dispositif.

Votre préavis, d’une durée de 2 mois, dont je vous dispense d’exécution, débutera à la date de présentation de cette lettre recommandée à votre domicile, conformément à l’article L. 1234-3 du Code du Travail.

Si vous adhérez au Congé de reclassement, ce congé débutera à l’expiration du délai de réflexion de 8 jours et se déroulera pendant votre préavis. Le terme de votre préavis correspondra au terme du Congé de reclassement.

Vous pourrez prendre contact avec la Section départementale MGEN des Hauts de Seine afin que vous soient remis votre solde de tout compte, votre certificat de travail ainsi que votre attestation Pôle Emploi.

Durant l’année qui suivra la fin du préavis, vous bénéficierez d’une priorité de réembauchage à MGEN, à condition de nous avoir informés dans l’année suivant la fin du préavis de votre souhait de faire valoir cette priorité.

Celle-ci concerne les postes compatibles avec votre qualification et également ceux qui correspondraient à une nouvelle qualification acquise après le licenciement (sous réserve cependant que vous nous la fassiez connaître).

Vous disposez d’un délai de douze mois à compter de la notification de la présente lettre pour contester la régularité ou la validité de ce licenciement.

Je vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes sentiments distingués’.

M. [Z] soulève la nullité de son licenciement au motif que l’inspecteur du travail a refusé l’autorisation de le licencier par décision du 1er décembre 2016 et que, dès lors, la MGEN ne pouvait pas lui notifier son licenciement moins d’une semaine après la fin de sa protection pour des motifs identiques à ceux présentés à l’inspection du travail, ainsi que l’a jugé la section encadrement du conseil de prud’hommes de Paris, dans sa décision parfaitement motivée du 20 septembre 2018, qui a prononcé la nullité du licenciement d’un autre salarié protégé dont l’autorisation de licenciement avait été refusée par l’inspection du travail dans les mêmes termes que pour lui-même, après avoir relevé que : ‘La mutuelle ne fait état d’aucun fait postérieur à la décision de l’autorité administrative qui justifierait la mise en ‘uvre d’une nouvelle procédure de licenciement pour motif économique ; Considérant d’ailleurs que la mutuelle n’a pas jugé utile de re-convoquer le salarié à un entretien préalable en vue d’un licenciement après le refus de l’inspection du travail, démontrant qu’elle se plaçait bien dans le cadre de la procédure initiée le 14 septembre 2016, dans des circonstances strictement identiques ; considérant donc que le licenciement a été prononcé par la mutuelle en violation du statut protecteur de Monsieur M.’.

La MGEN rappelle que les différents mandats de M. [Z] ont pris fin au jour de la fusion, soit le 1er janvier 2016, que ce n’est qu’à l’issue de la durée de sa protection que le licenciement du salarié est intervenu, soit le 6 janvier 2017.

Elle soutient que le moyen invoqué par M. [Z] reviendrait à appliquer au licenciement économique une jurisprudence intervenue en matière de licenciement disciplinaire selon laquelle un salarié protégé ne peut être licencié au terme de son mandat en raison de faits commis pendant la période de protection et à faire ainsi un amalgame inacceptable entre faits personnels disciplinaires reprochés à un salarié et un motif économique objectif.

Cela étant, selon l’article L.2411-3 du code du travail, le licenciement d’un délégué syndical ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail. Cette autorisation est également requise pour le licenciement de l’ancien délégué syndical, durant les douze mois suivant la date de cessation de ses fonctions, s’il a exercé ces dernières pendant au moins un an.

Un licenciement prononcé en méconnaissance de ce texte est nul.

La date à laquelle s’apprécie la nécessité d’une autorisation administrative de licenciement est celle de la convocation à l’entretien préalable. Ainsi, lorsque le salarié bénéficie du statut protecteur à la date de l’envoi de la convocation à l’entretien préalable au licenciement, le fait que le courrier de notification du licenciement soit envoyé postérieurement à l’expiration de la période de protection n’a aucune influence sur ce statut.

Il en résulte que le licenciement d’un salarié protégé prononcé après la période de protection est irrégulier s’il porte sur les mêmes circonstances que celles portées à la connaissance de l’inspecteur du travail qui a refusé l’autorisation de licenciement.

Ces principes, qui reposent sur des dispositions d’ordre public de protection, s’appliquent à toute cause de licenciement, que celle-ci soit fondée sur des faits imputables au salarié ou sur un motif économique.

Un employeur ne saurait, dès lors, passer outre le refus de l’administration en attendant l’expiration de la période de protection pour notifier au salarié protégé son licenciement pour un motif économique tel qu’exposé à l’inspecteur du travail et ayant servi de fondement à la décision de ce dernier. Seule l’existence de nouvelles circonstances apparues après la période de protection autoriserait l’employeur à reprendre une procédure de licenciement.

En l’espèce, M. [Z] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 14 septembre 2016 alors que son statut protecteur expirait le 31 décembre 2016.

Le motif économique énoncé dans la lettre de licenciement – tant en ce qui concerne les conséquences de la fusion absorption de la MGET par la MGEN sur l’emploi des salariés de la mutuelle absorbée, que celles liées au refus par le salarié protégé des offres de reclassement qui lui ont été présentées dans ce cadre – a été soumis à l’appréciation de l’inspecteur du travail et a servi de fondement à son refus d’autorisation. Il s’est maintenu en des termes et des conditions absolument identiques jusqu’au licenciement puisque l’employeur n’invoque aucune circonstance nouvelle dans la lettre de licenciement autre que l’expiration de la période de protection du salarié.

Ainsi, le licenciement pour motif économique de M. [Z] par la MGEN a été prononcé pour un motif identique à celui porté à la connaissance de l’inspecteur du travail ayant refusé l’autorisation et, de ce fait, est intervenu en violation du statut protecteur du salarié.

Conformément aux dispositions rappelées ci-dessus, ce licenciement sera déclaré nul.

Toutefois, il ne ressort pas de la lecture des motifs du jugement que le conseil de prud’hommes ait statué sur cette demande mais qu’il n’a examiné que le bien-fondé du licenciement pour motif économique.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu’il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et la cour doit statuer sur les conséquences de la nullité du licenciement.

La nullité du licenciement ouvre droit pour le salarié à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice causé par le caractère illicite du licenciement qui ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire.

Compte tenu de l’ancienneté (plus de 22 ans), de l’âge (53 ans) et de la rémunération (2 670,58 euros) du salarié à la date de la rupture et compte-tenu également du fait que M. [Z] justifie qu’il n’a toujours pas retrouvé d’emploi depuis le licenciement en ce qu’il perçoit l’allocation spécifique de solidarité à la date du 12 septembre 2022, il convient de fixer le montant des dommages et intérêts lui revenant pour licenciement nul à la somme de 45 000 euros.

Par ailleurs, le salarié licencié en violation de son statut protecteur et qui ne demande pas sa réintégration peut prétendre, en plus des dommages et intérêts réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, à la réparation du préjudice subi par l’atteinte à son statut protecteur sous la forme, soit d’une indemnité forfaitaire égale au montant des salaires qu’il aurait dû percevoir jusqu’à la fin de sa période de protection s’il présente sa demande d’indemnisation avant cette date, soit d’une indemnité dont le montant est fixé par le juge en fonction du préjudice subi lorsqu’il introduit sa demande après l’expiration de sa période de protection pour des motifs qui ne lui soient pas imputables.

En l’espèce, compte-tenu des conséquences de l’atteinte au statut protecteur de M. [Z] telles qu’établies par les éléments du dossier, il sera fait droit à la demande de dommages-intérêts de 16’000 euros présentée à ce titre par le salarié.

Sur les dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de formation

Il n’apparaît pas de la lecture des motifs du jugement que les premiers juges aient régulièrement statué sur la demande en dommages-intérêts du salarié pour manquement de l’employeur à son obligation de formation.

Aux termes de l’article L.6321-1 du code du travail, l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme, notamment des actions d’évaluation et de formation permettant l’accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret. Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de formation mentionné au 1° de l’article L. 6312-1. Elles peuvent permettre d’obtenir une partie identifiée de certification professionnelle, classée au sein du répertoire national des certifications professionnelles et visant à l’acquisition d’un bloc de compétences.

M. [Z] fait valoir que la MGEN, reprenant les droits et obligations de la MGET, n’a jamais respecté son obligation de formation à son égard alors que rien ne justifie un tel manquement à ses obligations légales les plus élémentaires et qu’au surplus, l’employeur ne verse aucune pièce au débat venant tenter d’expliquer un tel manquement.

La MGEN réplique le salarié a bénéficié de mesures d’accompagnement de la MGET mises en oeuvre à partir du dernier trimestre 2015 et qui se sont poursuivies après la fusion absorption, que les salariés qui avaient les motivations et les aptitudes pour évoluer vers les fonctions de conseiller accueil développement service ou de conseiller mutualiste, ont pu s’engager dans les parcours de formation qualifiante de la MGEN, et ce sous le contrôle d’une commission de suivi du PSE dans le cadre d’un accompagnement par un cabinet extérieur, que ces mesures ont permis l’obtention d’un certificat de qualification professionnelle de la branche Mutualité et l’accès aux fonctions de conseiller accueil développement service ou conseiller mutualiste.

Cela étant, aux termes de l’article L. 1224-2 du code du travail, le nouvel employeur est tenu, à l’égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l’ancien employeur à la date de la modification.

En l’espèce, les actions d’accompagnement engagées par les employeurs successifs pour préparer une opération de fusion absorption et réduire les conséquences de celle-ci sur le contrat de travail des salariés ne peuvent se substituer à la formation continue dont doivent bénéficier ces salariés tout au long de l’exécution du contrat de travail.

Or, la MGEN ne démontre pas que la MGET a dispensé des actions de formation à M. [Z] durant les 22 ans de l’exécution du contrat de travail.

Cette carence a porté atteinte à l’employabilité du salarié et ses possibilités d’évolution professionnelle et lui a donc causé un préjudice qui sera réparé par l’octroi de la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les frais non compris dans les dépens

Selon l’article 700 du code de procédure civile, la MGEN, qui succombe en son appel, sera condamnée à verser à M. [Z] la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l’intimé qui ne sont pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement entrepris,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT que le licenciement de M. [E] [Z] par la Mutuelle générale de l’Éduction nationale dite la MGEN est nul,

CONDAMNE la MGEN à verser à M. [E] [Z] les sommes suivantes :

° 45 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

° 16 000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte au statut protecteur,

° 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur dans son obligation de formation,

CONDAMNE la MGEN à verser à M. [E] [Z] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la MGEN aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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