Licenciement disciplinaire : 1 février 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/04703

·

·

Licenciement disciplinaire : 1 février 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/04703

AFFAIRE PRUD’HOMALE

COLLÉGIALE

N° RG 19/04703 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MO2H

[M]

C/

Société ORANGE

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de LYON

du 25 Juin 2019

RG : 16/03473

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 01 FÉVRIER 2023

APPELANT :

[R] [M]

né le 15 Mars 1977 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Alban POUSSET-BOUGERE de la SELARL CVS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Delphine MONNIER, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société ORANGE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Olivier LACROIX de la SELARL CEFIDES, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

– Joëlle DOAT, présidente

– Nathalie ROCCI, conseiller

– Anne BRUNNER, conseiller

Assistés pandant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 01 Février 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée indéterminée en date du 6 novembre 2006, M. [R] [M] a été embauché par la société France Télécom (devenue la société Orange), en qualité d’ingénieur expertise services, au statut cadre, coefficient E, de la convention collective nationale des télécommunications.

Le salarié a été élu délégué du personnel suppléant le 20 novembre 2014, inscrit sur la liste des défenseurs syndicaux d’Auvergne Rhône Alpes le 23 décembre 2016, puis le 20 décembre 2019, réélu délégué du personnel suppléant le 9 novembre 2017 et désigné délégué syndical de l’établissement secondaire le 12 novembre 2017.

Le 6 janvier 2016, l’employeur a informé les ingénieurs commerciaux spécialisés de son service d’un changement d’organisation.

Le 10 juin 2016, M. [M] a saisi le conseil des prud’hommes de LYON en sa formation de référé en lui demandant d’ordonner son rétablissement dans ses conditions de travail antérieures.

Par ordonnance du 5 octobre 2016, la formation de référé du conseil des prud’hommes s’est déclarée incompétente en raison de l’existence de contestations sérieuses.

Par requête du 10 novembre 2016, M. [M] a saisi le conseil de prud’hommes de LYON statuant au fond de la même demande.

Il a sollicité en outre :

– la nullité de sa convention de forfait et la condamnation de la société à lui payer un rappel d’heures supplémentaires

– la condamnation de la société à lui payer des dommages et intérêts et un rappel de salaire au motif de la discrimination et de l’inégalité de traitement dont il a été victime.

Le 29 décembre 2016, la société a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif disciplinaire et lui a notifié une mise à pied conservatoire.

Lors de la réunion extraordinaire du 16 janvier 2017, le comité d’établissement s’est prononcé contre la mesure de licenciement.

Le salarié a formé une nouvelle requête devant le conseil de prud’hommes le 17 février 2017 en lui demandant de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et de condamner la société à lui verser des dommages et intérêts et indemnités pour licenciement abusif et violation du statut protecteur.

Un procès-verbal de partage de voix a été dressé le 15 mars 2018.

L’inspection du travail a refusé d’autoriser le licenciement du salarié pour faute grave, par décision du 20 mars 2017.

L’employeur a mis fin à la mise à pied conservatoire, le 21 mars 2017.

Le recours hiérarchique introduit auprès de la Ministre du travail contre cette décision de refus a été rejeté par décision du 26 octobre 2017.

Le tribunal administratif de Lyon a rejeté le recours contentieux formé par la société, par jugement du 2 avril 2019.

Par arrêt en date du 3 décembre 2020, la cour administrative d’appel a confirmé le jugement.

La société a formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat.

Par jugement du 25 juin 2019, le conseil de prud’hommes en sa formation de départage a :

– ordonné la jonction des procédures enrôlées sous les numéros RG 16/03473 et 17/00416 et dit que l’instance sera poursuivie sous le seul numéro RG 16/03473 

– déclaré inopposable à Monsieur [R] [M] la convention de forfait à compter du 1er janvier 2015 

– débouté M. [M] de ses demandes formées au titre de l’exécution du contrat (rappels de salaire sur partie variable et pour heures supplémentaires, dommages et intérêts pour dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires, travail dissimulé, harcèlement moral, discrimination syndicale et inégalité de traitement)

– débouté M. [M] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail 

– débouté la société ORANGE SA de sa demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné Monsieur [R] [M] aux entiers dépens de l’instance.

M. [M] a interjeté appel de ce jugement, le 5 juillet 2019.

Il demande à la cour :

– d’infirmer le jugement, sauf en ce qu’il a déclaré inopposable la convention de forfait

statuant à nouveau,

– de condamner la société ORANGE à lui payer les sommes suivantes assorties des intérêts au taux légal à compter de la saisine de la formation de référé ou de la saisine au fond du Conseil de Prud’hommes :

– année 2016 :

– 29 928,15 euros bruts à titre de rappels de rémunération variable,

– 2 992,81 euros bruts à titre de congés payés afférents,

– du 1er janvier 2017 au 31 septembre 2017 :

– 39 818,09 euros bruts à titre de rappels de rémunération variable,

– 3 981,80 euros bruts à titre de congés payés afférents

– à partir du 1er octobre 2017 et jusqu’au jour du prononcé de l’arrêt à intervenir :

– à parfaire sur la base de 3 703,84 euros bruts mensuels

– 10% de congés payés afférents ;

– de condamner la société ORANGE SA à lui payer les sommes suivantes :

– 24 476,86 euros bruts à titre de rappels de salaires pour heures supplémentaires non payées,

– 2 447,69 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– 11 431,90 euros nets à titre de dommages et intérêts réparant le préjudice subi du fait du dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires, absence de consultation des IRP et absence d’information et de notification du droit à repos compensateur obligatoire,

– 59 972,52 euros nets à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du travail dissimulé,

subsidiairement, dans l’hypothèse où il serait débouté de sa demande de rappels de salaire au titre de sa rémunération variable, de condamner la société ORANGE SA à lui payer la somme de 41 605,98 euros nets au titre de l’indemnisation du travail dissimulé 

– de condamner la société ORANGE SA à lui payer la somme de 30 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi en raison de la discrimination syndicale, subsidiairement en raison de l’inégalité de traitement

– de condamner la société ORANGE SA à lui payer la somme de 30 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi 

– de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société ORANGE

– de dire que la rupture du contrat s’analyse en un licenciement nul en violation de son statut protecteur et subsidiairement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse 

– de condamner la société ORANGE à lui payer les sommes suivantes :

– à titre principal : dans l’hypothèse de la condamnation de la société ORANGE SA à lui payer les rappels de salaire sur rémunération variable :

* de fixer la moyenne du salaire mensuel brut à la somme de 9 995,42 euros bruts,

* 159 926,82 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et

subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 25 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral distinct,

* indemnités compensant les salaires qui devraient être perçus jusqu’à l’expiration du mandat de défenseur syndical au 23 décembre 2021 dans la limite de 30 mois : à parfaire au jour du prononcé de la rupture sur la base de 9 995,42 euros bruts mensuels

* 29 986,26 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis

* 2 998,62 euros bruts au titre des congés payés afférents

* montant à parfaire au jour du prononcé de l’arrêt à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement sur la base d’un salaire annuel brut de 159 926,827 euros

– à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où il serait débouté de sa demande de rappels de salaire au titre de la rémunération variable :

* de fixer la moyenne du salaire mensuel brut à la somme de 6 934,33 euros bruts 

* 110 949,98 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 25 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral distinct

* indemnités compensant les salaires qui devraient être perçus jusqu’à l’expiration du mandat de défenseur syndical au 23 décembre 2021 dans la limite de 30 mois : à parfaire au jour du prononcé de la rupture sur la base de 6 934,33 euros mensuels

* 20 803,01 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis

* 2 080,29 euros bruts au titre des congés payés afférents

* montant à parfaire au jour du prononcé de l’arrêt à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement sur la base d’un salaire annuel brut de 8 212,04 euros

– de condamner la société ORANGE SA à lui délivrer des bulletins de paie, une attestation Pôle Emploi, un reçu pour solde de tout compte, un certificat de travail rectifiés en fonction des condamnations prononcées et ce, sous astreinte de 50 euros nets par jour de retard à compter du 10ème jour calendaire suivant la notification de l’arrêt à venir

– de se réserver le droit de liquider l’astreinte 

– de dire que les condamnations de nature indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision à intervenir 

– de condamner la société ORANGE à lui payer la somme de 10 000 euros nets en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile

– de condamner la société ORANGE aux entiers dépens d’instance et d’appel dont distraction au profit de Maître Alban POUSSET-BOUGERE, SELARL CORNET VINCENT SEGUREL.

Par ordonnance du 14 mai 2020, le conseiller de la mise en état, saisi d’un incident notifié le 7 février 2020, a :

– déclaré recevables les conclusions et pièces notifiées par la société ORANGE le 26 décembre 2019 ;

– condamné M. [M] aux dépens de l’incident et à payer à la société la somme de 300 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– dit qu’il n’y a pas lieu à recouvrement des dépens d’incident.

La société Orange demande à la cour :

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a déclaré inopposable à Monsieur [R] [M] la convention de forfait à compter du 1er janvier 2015 ;

– de confirmer le jugement pour le surplus

à titre subsidiaire, si la cour prononçait la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [R] [M] à ses torts ,

– de dire que le montant de l’indemnité compensatrice de préavis ne saurait être supérieur à la somme de 11 951 euros bruts outre 1 195,10 euros bruts à titre de congés payés afférents ;

– de dire que le montant de l’indemnité de licenciement ne saurait être supérieur à la somme de 21 533 euros nets ;

– de débouter Monsieur [R] [M] de toute demande de dommages et intérêts qui excéderait le strict seuil fixé par l’article L.1235-3 du code du travail ;

– de dire que l’indemnité allouée au titre de la violation du statut protecteur ne saurait être supérieure au montant des salaires dus à Monsieur [R] [M] du jour du prononcé de la résiliation judiciaire du contrat jusqu’au 19 novembre 2018 

– de débouter Monsieur [R] [M] de toute demande à ce titre

en tout état de cause,

– de condamner Monsieur [R] [M] au paiement de la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l’article 70 du code de procédure civile ;

– de le condamner aux entiers dépens de l’instance distraits en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 octobre 2022.

SUR CE :

A l’appui de la demande aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail, M. [M] invoque les manquements graves suivants de l’employeur qui seront examinés successivement :

– la modification de ses conditions de travail et de son contrat de travail

– le non paiement de sa rémunération variable

– la discrimination syndicale dont il a été victime

– le harcèlement moral dont il a été victime

– la procédure de licenciement introduite à son encontre et la mise à pied abusivement longue dont il a fait l’objet.

Sur la modification des conditions de travail et du contrat de travail

Le salarié soutient que la société a modifié unilatéralement et de manière discrétionnaire le périmètre et la nature du portefeuille clients qui lui était confié en supprimant en décembre 2015 son portefeuille ‘haut de client’ et en lui retirant l’affaire Fiducial, et que, malgré son refus, il s’est vu imposer à compter du 13 janvier 2016, un portefeuille de clients d’un niveau ‘milieu de marché’ normalement attribué aux coefficients D et D bis, alors qu’il est classé E.

Il explique qu’en réalité, les portefeuilles de clients étaient indirectement rattachés aux ingénieurs commerciaux qui travaillaient souvent avec le même segment de clients et les mêmes commerciaux (vendeurs) auxquels était affecté un portefeuille de clients, que, contrairement à ce que prétend l’employeur, avant 2016, il n’a jamais travaillé tout type de client mais seulement le ‘haut de marché’ et que, de manière totalement arbitraire, ce segment lui a été retiré pour être attribué à M. [Z].

Il affirme que cette modification a eu des conséquences sur le calcul de sa part variable et donc sur le montant de sa rémunération.

L’employeur soutient que M. [M] a toujours occupé, avant et après le 1er janvier 2016, le poste d’ingénieur commercial services (ICS), en charge de la clientèle entreprises, et ce même si la dénomination interne du poste a changé, les  ‘ICS CCS’ étant devenus des  ‘ICS TD’ (transformation digitale), que les classification, qualification, fonctions et rémunération du salarié n’ont pas été modifiées et qu’il n’a pas été rétrogradé 

Il fait valoir que l’activité des ‘ICS’ peut être réalisée indifféremment sur du ‘haut de marché’ comme sur du ‘ milieu de marché’, que, si les vendeurs se voient confier un portefeuille de clients en fonction de leur segment d’intervention, ce n’est pas le cas des ingénieurs commerciaux qui n’ont ni clientèle ni portefeuille-clients mais interviennent chez des clients en soutien des vendeurs.

****

En vertu de l’avenant du 5 juin 2010, M. [M] bénéficie en sa qualité d’ingénieur commercial services du dispositif spécifique relatif à la part variable des vendeurs correspondant à son poste et complété par les décisions d’application portées à sa connaissance par son encadrement et à ce titre, il lui sera remis périodiquement une lettre d’objectifs.

Le 28 juin 2010, l’employeur a informé le salarié de sa nomination sur le poste d’ingénieur commercial services au sein de la direction ventes spécialisées à l’agence entreprises Rhône Alpes Auvergne à effet du 1er juillet 2010.

Il ressort de la fiche de poste correspondant à une offre d’emploi diffusée en mars 2010 que les missions de l’ingénieur commercial services à l’agence entreprises Rhône Alpes Auvergne sont les suivantes : en totale synergie avec les vendeurs, il assure la relation commerciale client et contribue au développement du chiffre d’affaires sur les comptes des clients concernés et dans son domaine de spécialisation.

Dans son courriel du 18 décembre 2015, le supérieur hiérarchique annonce à M. [M] que M. [Z] sera rattaché à l’équipe le 1er janvier (2016) en tant qu”ICS TD’ et travaillera sur le haut de marché (avec [L]), tandis que lui-même va être positionné prioritairement sur les comptes milieu de marché pour développer les ventes, en précisant qu’il a bien évidemment un droit de suite sur les affaires haut de marché en cour ‘au moins sur le T1″ sur la base des affaires ‘en pipe’.

L’employeur explique ensuite dans un courriel du 6 janvier 2016 que les comptes haut de marché seront adressés par ‘[L] et [U]’ avec une répartition par portefeuille et que [R] ([M]) adressera prioritairement les comptes milieu de marché et confirme, en réponse au salarié qui écrit le 8 janvier 2016 à son supérieur hiérarchique pour lui indiquer qu’il n’est pas d’accord sur le principe car il a des affaires haut de marché déjà en cours et que cela ne correspond plus à sa fiche de poste, qu’il s’agit d’une nouvelle répartition des comptes pour intégrer M. [Z] sur les comptes haut de marché et mettre à profit ses propres compétences sur les comptes milieu de marché et que cette répartition des activités des ingénieurs dans l’équipe est une décision managériale touchant à l’organisation opérationnelle.

Une liste de clients ‘haut de marché’ et ‘milieu de marché’ est annexée au courriel du 6 janvier 2016 montrant que seuls des clients ‘milieu de marché’ sont attribués à M. [M], par l’intermédiaire des responsables de vente, et que tous les clients ‘haut de marché’ sont attribués à ses deux collègues ingénieurs dont M. [Z] qui vient d’arriver.

La directrice des ressources humaines répond le 27 janvier 2015 aux interrogations de M. [M] relayées par le délégué syndical en ces termes : ‘ la répartition de l’activité entre vendeurs relève de la seule responsabilité des managers et aucun vendeur de l’agence entreprise ne choisit les clients avec lesquels il travaille.’

Or, l’employeur se réfère lui-même à une fiche de souhaits du salarié en date du 23 mai 2012 entérinée par le comité de direction en vertu de laquelle il a été convenu que la zone géographique du salarié était la zone ouest, le salarié travaillait sur les trois segments de marchés existants (haut de marché, milieu de marché et ‘SpeS’) et la répartition des comptes devait être consensuelle entre les ingénieurs commerciaux de l’équipe.

Le salarié démontre ainsi que, contrairement à ce qu’il soutient, l’employeur a modifié son secteur d’activité en lui retirant les clients ‘hauts de marché’ avec lesquels il travaillait pour les confier à un autre salarié de l’équipe et en lui attribuant uniquement des clients de ‘milieu de marché’, l’argument selon lequel aucun ingénieur commercial services n’était en droit de revendiquer la propriété d’un portefeuille de clients étant dès lors inopérant.

Dans ses éléments explicatifs produits en pièce 36, l’employeur indique que la volonté de l’agence entreprises Rhône Alpes Auvergne de créer un poste ‘d’ICS TD M de M’ (ingénieur commercial spécialisé transformation digitale milieu de marché) n’est pas une décision isolée, ce qui tend à confirmer qu’un nouveau poste a été confié à M. [M], celui du milieu de marché.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 février 2016, l’employeur a informé le salarié qu’à la suite de l’entretien du 24 février 2016 en présence de la déléguée du personnel, il était en mesure de lui proposer un périmètre d’action (suit la liste des segments de marché attribués), les clients correspondants étant implantés dans un périmètre géographique identique à celui qui était le sien fin 2015.

La liste comprend deux segments haut de marché et les autres segments sont des segments de milieu de marché.

Le salarié a répondu que cette correspondance confirmait la suppression des portefeuilles clients haut de marché et haut de marché ‘SPES’ officialisée le 6 janvier 2016 et qu’il refusait ce nouveau périmètre d’action.

Au vu de ces éléments, il est établi que l’employeur a modifié en janvier 2016 la structure du secteur de clientèle attribué à M. [M] et donc modifié ses conditions de travail.

A la suite de deux réunions en date des 21 et 24 novembre 2016, le supérieur hiérarchique de M. [M] a décidé d’un nouveau schéma d’organisation ‘co-construit par l’équipe ICSTD’ destiné à entrer en vigueur le 2 janvier 2017.

La liste annexée au projet de réorganisation positionne les quatre ‘ICS TD référents’ dont M. [M] sur des vendeurs ‘haut de marché, milieu de marché et SPES’. En ce qui concerne le segment haut de marché, M. [M] est positionné sur deux vendeurs et chacun des trois autres ingénieurs sur trois vendeurs. La note explicative précise que les affectations ainsi listées ont été construites sur la base du critère géographique en priorité, tous marchés confondus, puis sur la base des desideratas de chaque ingénieur commercial spécialisé discutés lors de la réunion d’équipe du 21 novembre 2016 et l’équilibre de chaque ‘groupe’ ingénieur commercial/ vendeur responsable de compte a été vérifié en termes de poids de chiffre d’affaires, nombre de SIREN et chiffre d’affaires potentiel.

Le 22 novembre 2016, M. [M] a fait observer que cette répartition était loin d’être équitable et a présenté une analyse par type de segmentation, chiffre d’affaires potentiel et nombre de siret clients démontrant que cette nouvelle répartition entraînait une perte de 80 % de son portefeuille clients sans contrepartie. Il a indiqué qu’il refusait cette nouvelle répartition.

Le 23 novembre 2016, le délégué du personnel titulaire, M. [I], a rappelé à l’employeur que M. [M] était porteur de mandat et qu’à ce titre, ses conditions de travail ne pouvaient être modifiées sans son accord préalable.

Par courriel du 25 novembre 2016, le salarié a demandé à son supérieur de rétablir son périmètre identique à décembre 2015.

La directrice des ressources humaines, sollicitée par le délégué du personnel, a écrit le 25 novembre 2016 que les périmètres d’action ainsi déterminés étaient équilibrés, permettaient à chacun de travailler sur tous les marchés, tenaient également compte des aspects géographiques et ne remettaient en aucun cas en cause les conditions de travail des salariés de l’équipe et celles de M. [M] en particulier.

Le supérieur hiérarchique, M. [S], a maintenu cette nouvelle organisation par courriel du 28 novembre 2016.

Le salarié démontre que l’attribution en janvier 2016 d’un segment de clientèle exclusivement, puis presqu’exclusivement composé de ‘milieu de marché’ a entraîné une diminution du nombre des affaires signées et une diminution consécutive de sa rémunération variable par rapport à 2014 et 2015 (44 446,64 euros en 2015 et 15 817,68 euros en 2016) même si cette diminution est également la conséquence de la modification des coefficients servant de base au calcul et du seuil de déclenchement de la rémunération variable et que l’on tient compte des périodes d’inactivité correspondant aux arrêts maladie.

La preuve de la modification du calcul de la rémunération variable qui représentait une part importante de la rémunération globale du salarié est ainsi rapportée.

Les deux tableaux produits par l’employeur intitulés ‘ bilan PVV HdM, MdM et SpeS entreprises’ pour les 1er et 2ème semestres de l’année 2016 mentionnant que la ‘PVV moyenne du S1 2016 correspond à 146 % et celle du S2 2016 à 141 % de l’espérance de gains contiennent notamment une ligne ‘ICS TD MdM’ et une ligne ‘ICS TD’ et des colonnes contenant des chiffres sous les titres : espérance de gains, minimum, médiane, moyenne et maximum, mais ne contenant aucune ligne ‘ICS TD HdM’ ou mixte ‘HdM MdM’ qui correspondrait au secteur attribué à M. [M] avant le 1er janvier 2016, ne rapportent pas la preuve contraire, aucune comparaison utile ne pouvant être effectuée.

L’employeur ne pouvant imposer au salarié protégé ni modification de son contrat de travail, ni changement de ses conditions de travail, le manquement est caractérisé.

Sur la demande de rappel de rémunération variable

M. [M] sollicite le paiement de la rémunération variable qu’il aurait perçue si son secteur de clientèle n’avait pas été modifié et si les coefficients et le seuil de déclenchement de la rémunération variable n’avaient pas non plus été modifiés.

Déduction faite des sommes qu’il a effectivement perçues au titre de la rémunération variable de l’année 2016, il demande que la société Orange soit condamnée à lui payer la somme de 29 928,15 euros pour l’année 2016, sur la base des calculs qu’il effectue dans ses conclusions, par comparaison avec la moyenne de la rémunération variable perçue pour chacun des quatre trimestres 2015.

En appliquant la même méthode de calcul, par référence à l’année 2015, il demande que la société Orange soit condamnée à lui payer la somme de 39 818,09 euros à titre de rappel de rémunération variable pour l’année 2017.

La société Orange fait valoir que M. [M] a appliqué les anciens coefficients et qu’il est intervenu à 89 % sur le premier semestre 2016 sur des clients haut de marché, versant aux débats à cet effet sa pièce 40, c’est à dire une feuille volante intitulée placements S. [M] 1er semestre 2016 contenant une liste de clients haut de marché et de clients milieu de marché, dont la valeur probante n’est pas établie.

Le tableau présenté par le salarié montre qu’au premier trimestre 2016, il a perçu la même part variable qu’au premier trimestre 2015, mais que, alors qu’il avait perçu la somme de 21 970 euros au deuxième trimestre 2015 et 9 875,90 euros au quatrième trimestre 2015, il a perçu pour les trimestres correspondants en 2016 les sommes respectives de 3 577 euros et 2 041 euros.

Mais dans la mesure où, s’agissant de la modification des seuils de déclenchement et des coefficients, celle-ci s’est appliquée à tous les salariés, les objectifs étant fixés unilatéralement par l’employeur, le calcul présenté par le salarié, qui repose sur une moyenne, ne peut être retenu et, la créance revendiquée n’étant pas certaine, la demande doit être rejetée.

En ce qui concerne le premier trimestre 2017, M. [M] n’est pas fondé à revendiquer une part variable correspondant à une période pendant laquelle il n’a pas exercé d’activité.

En ce qui concerne les autres trimestres de l’année 2017, il n’apporte pas non plus d’éléments sur son activité à compter de son retour dans la société le 22 mars 2017 et indique dans ses conclusions qu’il a été placé en invalidité de catégorie 2 sans reprise de travail à ce jour.

La demande de rappel de rémunération variable pour l’année 2017 sera rejetée, de même que les demandes au titre des années suivantes.

Sur la discrimination syndicale

En application de l’article L 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte telle que définie à l’article 1er de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle (…) en raison de ses activités syndicales ou mutualistes.

L’article 2141-5 du même code énonce qu’il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

L’article L.1134-1 du code du travail dispose qu’en cas de survenance d’un litige au sujet d’une discrimination invoquée par un salarié, celui-ci doit seulement présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, les éléments apportés par le salarié devant être examinés dans leur ensemble, et il incombe ensuite à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

A l’appui de sa demande, le salarié présente les éléments de fait suivants :

1) l’employeur n’a pas tenu compte de ses heures de délégation et lui a fixé pour 2016 des objectifs quantitatifs et collectifs irréalisables au regard de ses mandats syndicaux

2) il est le seul vendeur du département haut de marché à ne traiter que de clients milieu de marché avec des objectifs conçus pour des clients haut de marché ; il a donc été privé de la chance de percevoir une rémunération variable d’un montant de 30 000 euros par semestre, ce qui constitue une discrimination salariale

3) depuis sa prise de mandat, il n’a plus été invité aux événements commerciaux de l’entreprise et depuis sa réintégration du 22 mars 2017 jusqu’au mois d’octobre 2017, il n’a pas été convié à une seule réunion d’équipe

4) il n’a pas été nommé vendeur excellence, bien qu’il ait été gagnant du ‘challenge T2 2015 ICS TD HDM’ contrairement à ses homologues

5) il a été écarté de fait des challenges internes

6) il était le seul de l’équipe haut de marché à être installé au 8ème étage; le jour de sa réintégration, le 22 mars 2017, il a été installé au 9ème étage

7) il n’a pas bénéficié de tous ses entretiens individuels semestriels

8) il a été mis à pied et une procédure de licenciement disciplinaire a été engagée à son encontre en réponse à son refus de la modification de son secteur d’activité

9) il a déposé une plainte pour délit d’entrave le 30 décembre 2016.

****

M. [M] a été élu délégué syndical suppléant le 20 novembre 2014.

Il a été inscrit pour la première fois sur la liste des défenseurs syndicaux établie par le DIRECCTE Auvergne Rhône Alpes le 23 décembre 2016.

1) M. [M] a écrit à l’employeur le 18 novembre 2016 pour signaler :

– qu’au titre du premier semestre 2016, son activité de porteur de mandat représentant 37 heures, soit 5,14 % de son temps, n’avait pas été prise en compte dans le calcul de sa part variable et qu’il aurait dû percevoir au titre de la prime variable correspondant à son activité de porteur de mandat la somme de 671,45 euros au lieu de 215,87 euros

– que ses 16 heures de délégation n’avaient pas été prises en compte dans la fixation de ses objectifs du 3 ème trimestre 2016.

Le 19 septembre 2017, M. [M] a précisé à l’inspecteur du travail que, sur le second trimestre 2016, il avait calculé 37 heures de délégation tandis qu’Orange lui avait envoyé un document mentionnant 41 heures de délégation sur ce même trimestre, mais que ses fiches de résultat indiquaient 100 % d’heures de présence et ne tenaient pas compte de ces 41 heures de délégation.

Le 6 juillet 2017, M. [M] a informé l’employeur qu’aucun objectif ni quantitatif, ni qualitatif ne lui avait été fixé pour le deuxième trimestre 2017.

2) La modification des conditions de travail et la diminution de la rémunération variable pour partie consécutive sont établies.

3) M. [M] produit quatre courriels adressés à son supérieur hiérarchique les 25 et 26 janvier 2016, 8 février 2016 et 21 mars 2016 signalant qu’il n’a reçu ni invitation et/ou ni demande pour pouvoir inviter des clients aux rendez-vous ‘cercle marketing’, ‘club orange 2015″, ‘événement client connecté’, ‘event cercle retail DGC du 26 mai’, ainsi qu’un courriel du 4 octobre 2017 dans lequel le responsable des ventes haut de marché lui écrit ‘les récents changements de mon équipe avec l’arrivée de nouvelles personnes te permettront de participer aux réunions d’équipe dans un climat de bien vaillance (ou plutôt bienveillance)’.

4) Le 12 février 2016, M. [M] a écrit au directeur des ventes, M. [S], qu’il souhaitait savoir pourquoi il n’avait pas été désigné comme vendeur excellence à l’agence entreprises Rhône Alpes Auvergne pour la promotion 2015-2016 contrairement à l’autre gagnant du challenge national dans une autre catégorie de la même agence.

M. [S] lui a répondu une première fois que la réponse à cette question ne lui appartenait pas puis lui a proposé d’échanger avec le directeur du département vente milieu de marché auquel il était rattaché au moment des faits et lui a indiqué que, si cette proposition ne lui convenait pas, il lui restait la voie syndicale qu’il avait évoquée en alternative ( ‘via les questions mensuelles des délégués du personnel pour connaître les critères et grands principes retenus pour la nomination des lauréats de la promotion vendeur excellence 2015-2016″).

5) M. [M] reproche à l’employeur, dans un courriel du 14 juin 2017, de l’avoir inscrit au challenge du deuxième trimestre 2017 sans son autorisation alors qu’il n’a pas pu réaliser un ‘pipe’ au premier trimestre 2017 en raison de sa mise à pied abusive de décembre 2016 à mars 2017, lui donnant une chance de gagner ce challenge, si bien que son nom et l’affichage de son résultat à 0 est ‘extrêmement angoissant et dénigrant vis à vis de ses collègues’.

6) Le 9 mars 2016, M. [M] écrit à l’employeur que, depuis fin 2014, il demande à son responsable, M. [O], à déménager du 8ème au 5ème étage pour se rapprocher des personnes avec lesquelles il travaille mais également pour rompre l’isolement qu’il vit.

Il fait observer qu’il a demandé ce changement à plusieurs reprises et que M. [Z], nouvel arrivant dans l’équipe, a, dès son arrivée, été placé dans un bureau au 5ème étage puis déménagé ‘comme par hasard après ma demande du 11 janvier précisément dans le bureau où j’ai proposé de m’installer’.

M. [O] a répondu une première fois le 11 janvier 2016 : ‘cela étant, ton activité est priorisée sur les comptes milieu de marché et marchands et SPES en ce début 2016, il serait donc contre-productif que tu sois installé durablement au milieu des équipes haut de marché. En attendant que le sujet de l’aménagement des bureaux soit traité, (…) n’hésite pas à briser l’isolement que tu ressens en allant travailler ponctuellement auprès de tes interlocuteurs (autres bureaux ou sites distants) nous disposons tous d’outils de travail permettant une grande liberté à ce sujet.’

Le 9 mars 2016, l’employeur a écrit : ‘nous regardons le sujet. Sois bien persuadé qu’il n’y a aucune volonté de t’isoler. Nous revenons vers toi très vite.’

Le 22 mars 2017, le délégué du personnel, M. [I], avertit l’employeur que pour le bureau 943 (attribué à M. [M] à son retour dans l’entreprise), il n’y a pas de réseau, ni de téléphone fixe.

Le 21 août 2017, la directrice des ressources humaines informe M. [M] que son installation dans ce bureau répondait à sa demande de ne pas travailler à proximité de son ancien manager, que ce dernier ayant changé de poste et de bureau, les conditions sont réunies pour qu’il puisse réintégrer son ancien bureau.

7) La convention collective nationale des télécommunications prévoit que chaque salarié doit pouvoir bénéficier d’un examen de sa situation individuelle, de préférence annuellement, et en tout état de cause sans excéder trois ans, dont l’objectif est de permettre au salarié de faire le point et d’échanger avec son responsable hiérarchique sur ses performances individuelles ainsi que d’apprécier les compétences acquises et mises en oeuvre du fait notamment d’actions de formation ou de développements d’expériences ou d’activités nouvelles.

La société Orange verse aux débats les compte-rendus des entretiens individuels de performance organisés deux fois par an pour les années 2012, 2013 et le premier semestre 2014.

L’entretien d’évaluation relatif au second semestre de l’année 2014 a été réalisé mais le compte-rendu n’a pas été renseigné en totalité, ni signé par les parties.

Il n’est pas justifié de la tenue d’un entretien annuel pour les années 2015, 2016 et 2017.

8) M. [M] a fait l’objet d’une mesure de mise à pied conservatoire, le 29 décembre 2016.

Le 18 janvier 2017, l’employeur a saisi l’inspection du travail d’une demande d’autorisation de licencier le salarié pour faute grave en raison des faits suivants : des actes répétés d’insubordination se manifestant par le non-respect des consignes managériales et une attitude conflictuelle et d’opposition vis à vis de sa hiérarchie et des membres de son équipe qui nuisent au fonctionnement de l’équipe et à l’activité commerciale.

Dans sa séance du 17 février 2017, la commission consultative paritaire a été saisie pour avis.

A l’issue des délibérations, la proposition de licenciement pour faute grave a obtenu deux voix pour et deux voix contre.

9 ) Le 30 décembre 2016, M. [M] a déposé plainte auprès des services de la gendarmerie contre son supérieur hiérarchique, M. [S], pour entrave à la constitution ou au fonctionnement d’une section syndicale , en expliquant que ce dernier lui avait demandé de quitter immédiatement l’entreprise alors qu’il se trouvait en entretien téléphonique dans le cadre de ses heures de délégation syndicale et avait refusé la remise en mains propres de sa lettre de mise à pied conservatoire.

Ces éléments pris dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une discrimination syndicale.

L’employeur répond que :

– M. [M] ne vise aucun des critères prévus à l’article L. 1132-1 du code du travail et ne démontre pas qu’il aurait eu une rémunération différente ou inférieure à celle d’un salarié de l’entreprise placé dans une situation identique à la sienne 

– le salarié qui n’est pas vendeur se voit appliquer les mêmes systèmes de rémunération collectifs que ses collègues 

– le salarié n’établit pas que pouvait lui être décerné le titre de vendeur ‘excellence 2015″, il n’a pas été isolé dans les locaux de l’entreprise, il occupait en effet le bureau litigieux bien avant d’être élu représentant du personnel suppléant, il ne précise pas les réunions ou événements dont il aurait été évincé et la direction a toujours été parfaitement à son écoute

– l’entretien individuel pour l’année 2014 a bien été réalisé comme ceux des années précédentes, l’entretien de l’année 2015 programmé en janvier 2016 a été décalé à deux reprises à la demande de M. [M], cet entretien a bien eu lieu mais le salarié a refusé d’en signer le rapport

– les enquêtes menées à la suite des signalements du salarié ont conclu à l’inexistence de tout acte de discrimination ou de harcèlement ; une alerte CHSCT pour danger grave et imminent a en revanche été déclenchée par le supérieur hiérarchique de M. [M] face au comportement de ce dernier, les auditions et entretiens ont révélé que le salarié avait fait acte d’insubordination délibérée et caractérisée et que son comportement avait désorganisé et démobilisé l’équipe.

Or, la matérialité des faits présentés ayant été démontrée, il appartient à l’employeur d’apporter des éléments permettant de justifier que ses décisions n’ont pas été prises en considération du mandat de délégué du personnel suppléant exercé par M. [M].

En ce qui concerne la modification des conditions de travail ayant entraîné pour partie une diminution de la rémunération variable de M. [M], lequel établit avoir été le seul salarié de l’équipe des ingénieurs commerciaux TD spécialisés de l’agence à avoir subi cette situation, ainsi que la non fixation d’objectifs au deuxième trimestre 2017, l’employeur n’apporte aucune justification.

Sur les autres faits :

– l’absence de prise en compte des heures de délégation du salarié dans la fixation de ses objectifs en 2016

L’employeur expose dans sa réponse à l’inspecteur du travail en date du 18 septembre 2017, d’une part que l’entretien de prise de mandat de début 2015 a défini un niveau d’activité institutions de représentation du personnel (IRP) à 0% compte-tenu d’un mandat de délégué du personnel suppléant sans heures de délégation, d’autre part que M. [M] étant ingénieur commercial spécialisé, il n’a pas d’objectif de vente mais un seuil de déclenchement de sa part variable de rémunération.

Cependant, dans la mesure où M. [M] a, en pratique, utilisé des heures de délégation dans l’exercice de son mandat et que le montant de sa part variable de rémunération dépendait du temps consacré à son activité d’ingénieur commercial spécialisé, cette non prise en compte n’est pas justifiée par des éléments objectifs

– la non désignation de M. [M] comme vendeur d’excellence 2015-2016

L’employeur n’a en définitive jamais répondu à la question précise qui lui avait été posée sur ce point, se contentant de renvoyer le salarié vers un autre responsable ou vers la représentation syndicale.

– l’absence de convocation du salarié aux réunions ci-dessus visées

L’employeur produit à ce sujet la convocation à une réunion d’équipe dont la date a été déplacée au 4 janvier 2016 mais sur laquelle ne figurent pas les noms des destinataires et une pièce 80 retraçant les échanges et entretiens intervenus au cours de l’année 2016 à la suite des alertes et signalements de M. [M] et du délégué du personnel, ce qui est sans rapport avec le grief.

Il verse également aux débats le compte-rendu d’une réunion d’équipe ‘ICS IT, GRC et M2M’ du 18 janvier 2016 à laquelle participait M. [M] et les compte-rendus des réunions d’équipe ‘ICS TD’ suivants : 4 avril 2016, 25 avril 2016, juin 2016, 6 juin 2016, 5 septembre 2016, 10 octobre 2016, 21 novembre 2016 (cette réunion étant celle au cours de laquelle M. [M] s’est opposé à la modification de son périmètre en indiquant que le seul périmètre qu’il jugeait légitime était celui du second semestre 2015 soit la moitié des comptes de l’agence sur le périmètre ‘GCR’ alors partagé avec [L] [Y]). Les deux compte-rendus des 14 mars 2016 et 18 juillet 2016 mentionnent l’absence de M. [M] en arrêt-maladie.

L’employeur n’a donc pas expliqué pour quels motifs M. [M] n’avait pas été convié aux réunions litigieuses.

– les entretiens d’évaluation annuels

L’employeur explique que l’entretien individuel du second semestre 2014 a eu lieu le 17 mars 2015 mais que ‘M. [M] a refusé d’attester la relecture’ et que l’évaluation est ‘satisfaisante’.

Sur l’entretien 2015, il indique que le responsable hiérarchique avait programmé l’entretien le 29 janvier 2016, et l’a décalé à la demande de M. [M] au 29 février 2016.

Par courriel du 4 mars 2016, M. [O] a ‘souhaité partager’ avec M. [M] le contenu de leur échange du 29 février 2016 relatif à ses ‘EI 2015″. Il écrit notamment : nous avons réalisé ton bilan du S1 2015 et nous nous sommes arrêtés à ta demande à l’étape de l’évaluation de ta charge de travail car tu demandais une nouvelle fois que ton EI du S2 2014 soit modifié. Devant cette situation de blocage, l’EI a pris fin au bout d’1 heure 30 d’échange. (…) Pour conclure, nous continuerons donc nos échanges le 21 mars prochain.

L’employeur ne démontre pas que l’entretien s’est poursuivi le 21 mars 2016 comme convenu ni que les entretiens ont été réalisés pour les années 2016 et 2017.

– l’isolement géographique

L’employeur expose que M. [M] travaille au huitième étage de l’immeuble du [Adresse 5] depuis de nombreuses années, bien avant qu’il ait été élu délégué du personnel suppléant et avant le 1er janvier 2016, et qu’il travaillait jusqu’en mars 2017 dans un bureau voisin de celui de son responsable, M. [O].

Il ne répond pas à la demande de M. [M] en 2016, à savoir se rapprocher des équipes avec lesquelles il travaille, situées au cinquième étage, et lors de son retour en mars 2017, il l’installe dans un bureau encore plus éloigné (au neuvième étage).

– la procédure disciplinaire

L’autorisation de licencier M. [M] a été refusée par l’inspection du travail, selon décision en date du 20 mars 2017.

L’inspecteur du travail a retenu notamment qu’en raison du non-retour de la direction auprès des équipes pour clarifier la situation au cours de l’année 2016 quant aux zones de prospection des différents ‘ICS TD’, M. [M] ne pouvait porter seul la responsabilité des dysfonctionnements, mésententes et tensions au sein de l’équipe.

Certes, le refus d’autoriser le licenciement n’est pas définitif puisque la société Orange a formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat contre l’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel le 3 décembre 2020.

Il apparaît néanmoins que la société Orange n’a jamais voulu admettre qu’elle avait modifié les conditions de travail et le contrat de travail de M. [M].

Ce dernier ayant refusé de manière réitérée pendant toute l’année 2016 d’accepter ces modifications, demandant à chaque réunion que son précédent secteur soit rétabli et rappelant son statut de salarié protégé, elle a engagé une procédure de licenciement pour faute grave à son encontre, fondée sur ce refus et sur l’opposition qu’il a manifestée devant ses supérieurs hiérarchiques et ses collègues de travail, tel que relevé par le tribunal administratif dans son jugement du 2 avril 2019.

Dans ces conditions, la société ne démontre pas que sa décision de licencier le salarié pour faute grave était exempte de tout lien avec son statut de salarié protégé car détenteur d’un mandat de représentation syndicale, étant observé que la modification a été imposée à M. [M] un an après son élection, alors qu’il avait obtenu de très bons résultats en 2015 et que ses entretiens d’évaluation, ses auditions au cours de l’enquête préalable à la procédure d’autorisation de licenciement et ses propres écrits démontrent qu’avant cette élection, il n’avait jamais rencontré de difficultés dans l’exécution de son contrat de travail.

Il est résulté pour M. [M] des faits de discrimination syndicale ainsi établis un préjudice dont la réparation doit être évaluée à la somme de 5 000 euros. L’employeur sera condamné à lui payer ladite somme, à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt fixant la créance indemnitaire.

Sur le harcèlement moral

A l’appui de sa demande, le salarié présente les mêmes faits que ceux invoqués au titre de la discrimination syndicale, à savoir la modification de son contrat de travail et de ses conditions de travail malgré son désaccord, un isolement et une mise à l’écart, la suppression de ses clients haut de marché, le déclenchement de la procédure de licenciement et une longue mise à pied conservatoire.

La matérialité de ces faits est établie, comme il a été dit ci-dessus.

M. [M] justifie en outre de la dégradation de son état de santé.

Il a déposé une déclaration de maladie professionnelle qui a donné lieu à une enquête administrative de la caisse primaire d’assurance maladie. L’enquête a conclu le 9 avril 2019 à l’admission de l’exposition au risque et au renvoi du dossier devant le Comité de reconnaissance régional des maladies professionnelles (CRRMP) s’agissant d’une maladie hors tableau.

Il bénéficie d’une pension d’invalidité de catégorie 2 en vertu d’une décision du 30 septembre 2020.

Ces faits pris dans leur ensemble laissent présumer un harcèlement moral.

L’employeur se réfère au rapport établi ‘suite aux entretiens menés dans le cadre de l’alerte CHSCT pour danger grave et imminent concernant [C] [O]’, responsable de M. [M], pour estimer qu’il n’a commis aucun acte de harcèlement mais qu’au contraire, M. [M] s’est enfermé dans une démarche d’opposition, de provocation systématique et de déstabilisation délibérée de son équipe par un comportement conflictuel et agressif.

Ce rapport rédigé le 9 décembre 2016 est signé par le secrétaire du CHSCT et la responsable des relations sociales ayant mené les entretiens avec M. [O], le supérieur hiérarchique, M. [S], les quatre ingénieurs commerciaux membres de l’équipe de M. [M] et M. [H], salarié contre lequel M. [M] avait déposé une main courante à la suite de propos téléphoniques agressifs tenus à son encontre, M. [M] et M. [I], délégué du personnel, n’ayant pas souhaité être reçus.

Mais l’employeur n’a apporté aucune justification objective à ses décisions, ainsi qu’il résulte de ce qui précède.

Le harcèlement moral est donc établi.

Il a causé à M. [M] un préjudice distinct de celui résultant de la discrimination syndicale.

Il convient dès lors de condamner l’employeur à payer au salarié la somme de 10 000 euros en réparation de ce préjudice, à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt fixant la créance indemnitaire.

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail

Il appartient au salarié qui sollicite la résiliation judiciaire de rapporter la preuve de manquements de l’employeur à ses obligations contractuelles suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail et ainsi justifier la rupture à ses torts.

Les manquements ci-dessus démontrés, lesquels se sont poursuivis pendant au moins deux ans sont d’une gravité telle qu’ils empêchent la poursuite de la relation de travail.

Il convient en conséquence de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur, laquelle produit les effets d’un licenciement nul à la date du présent arrêt.

En application de l’article L 2411-5 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 applicable au litige compte-tenu de la date de la requête en résiliation judiciaire introduite le 17 février 2017, le salarié protégé dont la demande de résiliation judiciaire est accueillie n’a droit, au titre de la violation de son statut protecteur, qu’au paiement d’une indemnité égale à la rémunération qu’il aurait dû percevoir jusqu’à l’expiration de la période de protection en cours au jour de sa demande en résiliation, dans la limite de deux ans, durée minimale légale de son mandat, augmentée de six mois, soit trente mois au total.

A la date de la requête introductive d’instance de M. [M], le 17 février 2017, il s’était écoulé un délai de vingt sept mois depuis son élection du 20 novembre 2014.

Sur la base d’un salaire mensuel moyen brut de 6 934,33 euros perçu sur les douze mois ayant précédé la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail, la demande de rappel de rémunération variable ayant été rejetée, il convient de condamner la société Orange à payer à M. [M] la somme de 20 803,01 euros à titre d’indemnité pour violation du statut protecteur représentant trois mois de salaire, qui sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt fixant la créance indemnitaire.

Il convient en outre de condamner la société Orange à payer à M. [M] les sommes suivantes en conséquence de la résiliation judiciaire produisant les effets d’un licenciement nul, sur la même base :

– 20 803,01 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis de trois mois, outre l’indemnité de congés payés afférents

– 46 598,74 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement (83 212,04 euros x 3 % x 9 ans ) + (83 212,04 euros x 4% x 7ans et trois mois à la date du présent arrêt soit 7,25),

ces sommes étant augmentées des intérêts au taux légal à compter du 21 février 2017, date de réception de la requête par la société Orange

– 80 000 euros à titre de dommages et intérêts, en application de l’article L 1235-3-1 du code du travail,dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2017-1387, tenant compte de l’ancienneté de M. [M], de son âge (45 ans) et des circonstances de la rupture, augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt fixant la créance indemnitaire.

La demande fondée sur les circonstances vexatoires de la rupture doit être rejetée, M. [M] ne justifiant pas avoir subi un préjudice distinct de celui qui se trouve réparé par l’allocation des dommages et intérêts consécutifs à la résiliation judiciaire produisant les effets d’un licenciement nul.

Sur la demande en paiement d’heures supplémentaires

Aux termes de son contrat de travail, M. [M] relève du régime des cadres exécutifs autonomes conformément aux dispositions conventionnelles en vigueur et il bénéficie de jours de réduction du temps de travail.

L’accord collectif France Télécom portant sur l’organisation du travail, la réduction et l’aménagement du temps de travail signé le 2 février 2000 produit par l’employeur prévoit que les cadres exécutifs autonomes travailleront sur la base d’un forfait de 207 jours travaillés, soit l’équivalent de 14 jours forfaitaires supplémentaires de temps libre.

C’est à juste titre que le conseil de prud’hommes a déclaré inopposable à M. [M] à compter du 1er janvier 2015 la convention de forfait dont il bénéficiait, en relevant que l’entretien pour le premier semestre 2015 n’avait pas été mené à son terme, la charge de travail n’ayant donc pas été évoquée et qu’aucun entretien semestriel complet faisant l’objet d’une validation des deux parties n’était produit sur la période allant du 1er juillet 2015 au 31 décembre 2016 et en considérant que n’avait pas été respectée l’obligation de suivi régulier par le supérieur hiérarchique de l’organisation de travail et de la charge de travail du salarié.

L’argumentation de l’employeur devant la cour, selon laquelle M. [M] ne peut solliciter la nullité de son forfait annuel en jours pour un tel motif alors que des entretiens ont bien eu lieu mais que c’est lui seul qui a refusé tout échange, notamment concernant l’année 2015, ne vient pas remettre en cause la pertinence des constatations opérées par le conseil de prud’hommes sur ce point, étant précisé qu’il a jugé non pas que la convention de forfait était nulle mais qu’elle était privée d’effet.

La demande en paiement des heures de travail accomplies au-delà de 35 heures par semaine est en conséquence recevable.

M. [M] sollicite le règlement de 635,4 heures supplémentaires majorées de 25 % et de 96,17 heures supplémentaires majorées de 50 % (total des heures supplémentaires revendiquées : 731,57).

Il présente des tableaux d’heures supplémentaires reprenant ses horaires de travail journaliers pour les années 2015, 2016 et 2017.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre en apportant ses propres éléments, sans qu’il soit nécessaire de demander au salarié de corroborer ses tableaux par des éléments extérieurs, comme le soutient l’employeur.

L’employeur a fait établir un contrôle de cohérence par des enquêteurs de son service général de contrôle en confrontant les déclarations d’heures avec les relevés de péage et la carte de paiement essence du véhicule de service attribué au salarié, dont il ressort que pour les années 2015 et 2016, 62 déclarations de prise de service et 110 déclarations de fin d’heures de service énoncées dans les tableaux de M. [M] sont incompatibles avec ses heures de passage au péage de [Localité 4] (lieu de son domicile), ce qui donne une différence de 456 heures et que M. [M] a inexactement déclaré 5 heures 15 supplémentaires pour des jours où il était en congé.

Il ajoute que M. [M] bénéficiait de 20 jours de RTT par an qui doivent être déduits des heures revendiquées.

M. [M] fait valoir en réponse d’une part que, selon l’accord collectif OARTT versé aux débats par l’employeur, les déplacements professionnels constituent du temps de travail effectif et qu’il était très souvent en déplacement professionnel, d’autre part, qu’aucun rapport ne peut être fait entre l’heure de passage au péage de [Localité 4], la carte de paiement Total et ses heures de travail effectif puisque dans une même journée, il pouvait effectuer un ou des déplacements professionnels ainsi que d’autres tâches avant ou après.

Le juge départiteur, après avoir examiné les éléments apportés par les deux parties, a estimé que la preuve de l’accomplissement d’heures supplémentaires par le salarié n’était pas rapportée.

L’annexe 1 de l’accord France Télécom dispose que le temps qui correspond au parcours du domicile au lieu de travail habituel est exclu du temps de travail effectif et que la durée des trajets effectués par les salariés avec le véhicule de l’entreprise entre le lieu habituel de travail et les chantiers et entre les chantiers est considérée comme du temps de travail effectif.

Mais quand M. [M] déclare prendre son service antérieurement à l’heure à laquelle il passe au péage de son domicile le matin ou travailler après qu’il a passé le péage pour rentrer chez lui à la fin de sa journée de travail, il ne peut être en déplacement professionnel.

Or, il ne prétend pas avoir travaillé à son domicile, de sorte qu’il convient de déduire du nombre d’heures supplémentaires revendiquées les 456 heures telles que comptabilisées dans le rapport d’enquête interne et les 5 heures 15 correspondant à des jours de congé.

Il convient également de déduire les jours de RTT sur la base de 7 heures par jour, soit 140 heures.

Au vu des éléments apportés par l’une et l’autre partie, le nombre d’heures supplémentaires accomplies par le salarié en 2015 et 2016 doit être fixé à 130 heures. Pour l’année 2017, le tableau du salarié (pièce 112) fait apparaître deux heures supplémentaires.

En conséquence, la créance d’heures supplémentaires de M. [M] sera fixée à la somme de 4 300 euros.

L’employeur doit être condamné à payer au salarié ladite somme de 4 300 euros, outre l’indemnité de congés payés afférents, le jugement étant infirmé en ce qu’il a rejeté ce chef de demande.

Ces sommes seront augmentées des intérêts au taux légal dûs à compter du 21 novembre 2016, date de réception par l’employeur de la convocation devant le conseil de prud’hommes à la suite de la requête déposée le 10 novembre 2016.

La demande au titre de la contrepartie en repos sera rejetée, le contingent annuel de 130 heures par an n’ayant pas été dépassé.

La demande en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé sera également rejetée, la preuve du caractère intentionnel d’une dissimulation des heures travaillées n’étant pas rapportée, en l’absence de preuve de la mauvaise foi de l’employeur dans l’exécution de la convention de forfait en jours appliquée au salarié.

Il convient de condamner d’office l’employeur, en application de l’article L1235-4 dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage qui seront versées au salarié dans la limite de six mois d’indemnités.

La société Orange devra délivrer à M. [M] un bulletin de salaire récapitulatif, un certificat de travail et une attestation Pôle emploi tenant compte des dispositions du présent arrêt, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette obligation du prononcé d’une astreinte.

Compte-tenu de la solution apportée au présent litige, il y a lieu d’infirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et de condamner la société Orange à payer à M. [M] la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :

INFIRME le jugement, sauf en ce qu’il a rejeté la demande de rappel de rémunération variable et les demandes au titre de la contrepartie en repos et en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé

STATUANT à nouveau sur les chefs infirmés,

CONDAMNE la société Orange à payer à M. [R] [M] les sommes suivantes :

– 5 000 euros en réparation du préjudice causé par la discrimination syndicale

– 10 000 euros en réparation du préjudice causé par le harcèlement moral,

ces sommes étant augmentées des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt

– 4 300 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires pour les années 2015, 2016 et 2017 et 430 euros à titre d’indemnité de congés payés afférents, outre les intérêts au taux légal à compter du 21 novembre 2016

PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [M] produisant les effets d’un licenciement nul à la date du présent arrêt

CONDAMNE la société Orange à payer à M. [R] [M] les sommes suivantes :

– 20 803,01 euros à titre d’indemnité pour violation du statut protecteur, outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt

– 20 803,01 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre 2 080,30 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférents

– 46 598,74 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

ces trois sommes étant augmentées des intérêts au taux légal à compter du 21 février 2017

– 80 000 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur, outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt

CONDAMNE la société Orange à délivrer à M. [M] un bulletin de salaire récapitulatif, un certificat de travail et une attestation Pôle emploi tenant compte des dispositions du présent arrêt

REJETTE la demande en fixation d’une astreinte

CONDAMNE d’office l’employeur à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage qui seront versées au salarié dans la limite de six mois d’indemnités

CONDAMNE la société Orange aux dépens de première instance et d’appel

DIT que les dépens d’appel pourront être recouvrés par Maître Alban POUSSET-BOUGERE de la SELARL CORNET VINCENT SEGUREL, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

CONDAMNE la société Orange à payer à M. [R] [M] la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x