Liberté d’expression du salarié : 27 juin 2007 Cour de cassation Pourvoi n° 06-43.507

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Liberté d’expression du salarié : 27 juin 2007 Cour de cassation Pourvoi n° 06-43.507

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (chambre détachée de la cour d’appel de Fort-de-France à Cayenne, 27 mars 2003) que M. X…, engagé le 1er juillet 2001 par l’association pour l’amélioration des conditions de travail (ARACT Guyanne) en qualité de directeur, a été licencié le 30 mai 2003 ;

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt d’avoir dit son licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1 / qu’il a écrit le 5 mars 2003 aux membres du conseil d’administration de l’Union des entreprises de Guyane MEDEF/CGPME, organisation dont est issu M. Y…, le président de l’association, et les 21 et 23 mars 2003 aux membres du conseil d’administration et du comité d’orientation de l’ARACT, pour se plaindre du harcèlement moral dont il était victime de la part du président et pour se justifier sur les accusations dont il était l’objet ; qu’en décidant que ces lettres avaient été envoyées à des tiers et qu’elles jetaient le discrédit également sur le conseil d’administration, la cour d’appel a dénaturé les termes clairs et précis de ces lettres, en violation de l’article 1134 du code civil ;

2 / qu’il résulte des constatations des juges du fond qu’en qualité de directeur, il était chargé de mettre en oeuvre les politiques et décisions du conseil d’administration et de rendre des comptes à ce dernier, et qu’en outre il ne pouvait être licencié que sur mandat explicite du conseil d’administration ; qu’en vertu de son contrat de travail, le programme annuel qu’il appliquait était préalablement soumis au comité d’orientation ; de sorte qu’en cas de problème avec le président de l’ARACT, les seules instances pouvant influer sur la situation et auxquelles il pouvait en référer étaient l’organisation patronale à laquelle appartenait le président, le conseil d’administration et le comité d’orientation ; qu’il résultait également de ces constatations que ses relations avec le président avaient dégénéré en conflit personnel ; qu’en statuant comme elle l’a fait, alors que l’envoi de trois lettres à ces trois seules instances, concernées par le conflit, dans un espace de temps très limité et qui répondaient en des termes vifs mais non diffamatoires à des accusations calomnieuses et les alertaient du comportement malveillant du président à son égard, ne caractérisait pas un abus de la liberté d’expression du salarié, la cour d’appel a violé les articles L. 120-2 et L. 122-14-5 du code du travail ;

3 / que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ; qu’en se bornant à relever que les accusations contenues dans les trois lettres étaient graves, irrespectueuses et n’étaient pas démontrées, la cour d’appel n’a pas caractérisé d’abus de la liberté d’expression par rapport à la nature des tâches à accomplir ou au but recherché ; que ce faisant, elle a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 120-2 du code du travail ;

4 / que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu’il appartient au juge du fond d’examiner les motifs invoqués dans la lettre de licenciement et exclusivement ces motifs ; qu’en reprochant au salarié d’avoir donné de la publicité au différend qui l’opposait au président de l’ARACT par la diffusion des dites lettres à des tiers avec une intention de nuire, la Cour d’appel a ajouté un motif qui n’était pas énoncé dans la lettre de licenciement et a dépassé le cadre du litige, en violant les articles L. 122-14-2 et suivants du code du travail ;

Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel, tant par motifs propres qu’adoptés, s’est bornée à analyser les griefs énoncés dans la lettre de licenciement sans en ajouter de nouveaux ;

Attendu, ensuite, que la cour d’appel a relevé, d’une part, que le salarié avait adressé, le 5 mars 2003 aux membres du conseil d’administration de l’Union des entreprises de Guyane, et les 21 et 23 mars 2003 aux membres du conseil d’administration et du comité d’orientation de l’ARACT, trois lettres circulaires qu’elle n’a pas dénaturées, portant à l’égard du président des accusations graves qui n’étaient étayées par aucun élément et dont le contenu calomnieux jetait le discrédit sur le fonctionnement de la présidence et du conseil d’administration de l’organisme, et d’autre part, qu’en donnant de la publicité au différend qui l’opposait au président de l’association par la diffusion des lettres à des tiers, il avait porté atteinte à l’autorité du président et au-delà, à l’ARACT elle-même ; qu’ayant, dès lors, caractérisé l’abus par le salarié de sa liberté d’expression, elle a, exerçant, le pouvoir d’appréciation qu’elle tient de l’article L. 122-14-3 du code du travail, décidé que le licenciement procédait d’une cause réelle et sérieuse ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de M. X… ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille sept.

 


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