Liberté d’expression du salarié : 21 décembre 2006 Cour de cassation Pourvoi n° 05-42.113

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Liberté d’expression du salarié : 21 décembre 2006 Cour de cassation Pourvoi n° 05-42.113

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X…, engagé le 1er mars 1974 en qualité de chef de ventes de cultures spéciales par la société Compo horticulture et jardin, aux droits de laquelle se trouve la société Compo France, a été licencié pour faute grave par lettre du 26 février 2003 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt d’avoir dit le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1 / que l’envoi d’un courrier -fût-il électronique- est un fait juridique dont la preuve est libre ; qu’en l’espèce, pour prouver que M. X… avait adressé un courrier électronique non seulement au secrétaire du comité d’entreprise comme il le reconnaissait, mais encore à tous les salariés de l’entreprise, la société Compo produisait des attestations ainsi que la copie d’écran d’ordinateur d’un des salariés ;

qu’en affirmant néanmoins que la société Compo n’établissait pas la diffusion de ce courrier aux salariés dès lors qu’elle ne produisait pas l’édition certifiée à partir du serveur centralisé de la messagerie intranet de l’entreprise et s’est abstenue de faire sauvegarder toutes les boîtes de courriers électroniques en émission ou en réception, la cour d’appel a violé l’article 1315 du code civil ;

2 / que toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation ; que porte manifestement atteinte à l’honneur ou la considération d’une société l’imputation de pratiquer des augmentations hors mérite et à la tête du client ; qu’en l’espèce, il résulte des termes de l’arrêt que M. X…, chef des ventes nationales, a bien adressé au secrétaire du comité d’entreprise le courrier litigieux stipulant que « les augmentations de salaires hors mérite et bonne gueule ne suivent pas l’inflation chez Compo » ; qu’en affirmant néanmoins que ledit courrier n’était pas diffamatoire, la cour d’appel a violé l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;

3 / que les juges ne peuvent sous couvert d’interprétation dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu’en l’espèce, la lettre de licenciement reprochait à M. X… non pas de ne pas s’être rendu à un rendez-vous programmé, mais d’avoir fourni à sa hiérarchie un emploi du temps frauduleux en indiquant comme programmé un rendez-vous qui ne l’était pas, et en ne fournissant pas une activité de remplacement ;

qu’en affirmant néanmoins que ne constituait pas un motif sérieux de licenciement le fait de ne pas s’être rendu à un rendez-vous qu’il avait programmé, lorsque ce n’était pas ce qui était reproché par la lettre de licenciement, la cour d’appel a dénaturé cette dernière en violation de l’article 1134 du code civil ;

4 / que c’est à compter du jour où l’employeur a eu connaissance du fait fautif que court le délai de prescription de deux mois pour pouvoir le sanctionner ; qu’en l’espèce, la société Compo France indiquait dans la lettre de licenciement n’avoir eu connaissance des propos tenus le 29 novembre 2002 par M. X… à l’égard de Mme Y… qu’en février 2003 à l’occasion de l’engagement de la procédure de licenciement ; qu’en se contentant d’affirmer que les faits allégués étaient prescrits, sans rechercher à quelle date l’employeur en avait eu connaissance, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 122-44 du code du travail ;

Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel, sans méconnaître la liberté de la preuve des faits, a estimé insuffisants les éléments fournis, et a pu décider que le courrier privé en cause n’excédait pas les limites de la liberté d’expression du salarié ;

Attendu, ensuite, que c’est sans dénaturation du troisième motif de licenciement, qu’elle a pu décider que le même courrier ne constituait pas une faute grave, et a, dans le cadre des pouvoirs qu’elle tient de l’article L. 122-14-3 du code du travail, décidé qu’il n’était pas constitutif d’une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

Et attendu, enfin, que l’employeur qui n’a pas critiqué la décision des premiers juges en ce qu’elle avait déclaré prescrits les faits d’indélicatesse, ne peut faire grief à la cour d’appel d’avoir pareillement statué ;

D’où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n’est pas fondé pour le surplus ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles 14-3 et 14-4 de l’avenant cadres de la convention collective des industries chimiques ;

Attendu, selon ces textes, que la rémunération à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de congédiement s’entend du salaire de base du dernier mois précédant le préavis, augmenté des gratifications, celles dont la périodicité est supérieure à un mois n’étant prises en compte que pour la part venant en rémunération dudit mois ;

Qu’en prenant en compte pour le calcul de l’indemnité de licenciement due au salarié l’intégralité de la prime d’objectif qu’il avait perçue en janvier 2003, au titre de l’ensemble de l’année 2002, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

 


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