Les cotisations retraite-complémentaire des artistes-auteurs

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Les cotisations retraite-complémentaire des artistes-auteurs

Face à l’absence de cotisations au régime de retraite de base mais uniquement au régime de retraite complémentaire, l’artiste auteur doit rapporter la preuve qu’il a effectué une démarche auprès de la CREA, puis de la CIPAV pour régulariser son affiliation et qu’il s’est acquitté du règlement de cotisations auprès de cet organisme. Le cas opposé, ses trimestres de retraite de base ne seront pas validés.

Il appartient à la juridiction saisie d’une action en responsabilité de rechercher si l’assuré, qui n’a pas été affilié au régime d’assurance vieillesse géré par la caisse, s’est manifesté auprès de cette dernière pour se renseigner sur ses droits et obligations à ce titre.

L’affiliation ne fait en outre pas naître l’obligation de cotiser qui dépend de l’exercice de l’activité.

Les artistes auteurs mentionnés à l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale sont rattachés au régime général au titre de leur régime d’assurance vieillesse de base. Ils bénéficient également d’un régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire géré depuis l’origine par l’IRCEC.

Sont concernés les artistes auteurs qui créent des oeuvres originales littéraires et dramatiques, musicales, chorégraphiques, audiovisuelles et cinématographiques, graphiques et plastiques ainsi que photographiques et exercent leur activité selon les règles posées par le code de la propriété intellectuelle pour définir les oeuvres de l’esprit.

Les autres artistes indépendants qui ne répondent pas aux conditions du régime précité des artistes auteurs et ne sont pas mentionnés à l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale relèvent du régime des travailleurs non salariés (article L. 640-1 du code de la sécurité sociale).

L’article R. 641-6, 9°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable, prévoyait parmi les 13 sections professionnelles des professions libérales l’institution d’une section professionnelle des artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1, des professeurs de musique et des musiciens.

Ce régime était géré jusqu’en 2004 par la Caisse de retraite de l’enseignement, des arts appliqués, du sport et du tourisme (la CREA).

Depuis 2004, les artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale sont rattachés une section professionnelle regroupant les architectes, agréés en architecture, ingénieurs, techniciens, géomètres, experts et conseils, artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1, enseignants, professionnels du sport, du tourisme et des relations publiques, et de toute profession libérale non rattachée à une autre section, gérée par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (CIPAV), s’agissant du régime d’assurance vieillesse obligatoire de base, le régime d’assurance vieillesse complémentaire des artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale continuant à être géré par l’IRCEC.

Selon l’article L. 642-1 du code de la sécurité sociale, toute personne exerçant une activité professionnelle relevant de l’organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales est tenue de verser des cotisations destinées à financer notamment les prestations du régime d’assurance vieillesse de base dont elle relève.

Selon l’article L. 642-5 du même code, les sections professionnelles assurent, pour le compte de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales, le recouvrement des cotisations prévues à l’article L. 642-1.

En vertu de l’article D. 642-1 du code de la sécurité sociale, les cotisations sont portables et non quérables, de sorte qu’en l’absence d’appel de cotisations, il appartient à l’assuré de se rapprocher de la caisse afin de régulariser sa situation.

L’obligation d’information incombant aux organismes gestionnaires de l’assurance vieillesse en application de l’article L. 161-17 susvisé ne peut être étendue au-delà des prévisions de ce texte. Celle, générale, découlant de l’article R. 112-2 susvisé dont les organismes de sécurité sociale sont débiteurs envers leurs assurés, leur impose seulement de répondre aux demandes qui leur sont soumises.

Résumé de l’affaire :

Faits

Monsieur [K] [R] a commencé son activité de peinture de décors en 1987 en tant que professionnel libéral. Il a été affilié à l’URSSAF Ile-de-France, à l’assurance maladie des professions libérales, et à la CREA pour sa retraite. En 1993, il a été affilié au régime général. En 2016, souhaitant liquider ses pensions de retraite, il a découvert qu’il n’avait validé aucun trimestre d’assurance pour son activité indépendante entre 1987 et 1992. La CIPAV a confirmé son affiliation de 1993 à 2004, mais l’IRCEC a indiqué qu’il n’avait pas cotisé au régime de base.

Procédure

Monsieur [K] [R] a saisi la commission de recours amiable de la CIPAV en octobre 2019 pour obtenir la validation de ses trimestres d’assurance. En décembre 2019, il a introduit une action en justice. Le tribunal a ordonné la mise en cause de l’IRCEC et de la Maison des Artistes. Le jugement du 3 mai 2021 a reconnu une faute de la CIPAV et a ordonné la validation gratuite des trimestres d’assurance pour la période concernée, ainsi que la reconstitution des points de retraite. La CIPAV a interjeté appel le même jour.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La CIPAV a demandé l’infirmation du jugement et le déboutement de Monsieur [K] [R], tout en réclamant des frais. Monsieur [K] [R] a demandé la confirmation du jugement et des dommages-intérêts pour frais d’appel. L’IRCEC a soutenu que l’appel de la CIPAV était mal fondé et a demandé la confirmation du jugement. La CIPAV a également soulevé la question de la prescription, mais celle-ci a été écartée par le tribunal.

MOTIFS

L’IRCEC a été mise hors de cause, car elle ne gérait que des régimes de retraite complémentaire. La CIPAV a soutenu que Monsieur [K] [R] aurait dû être affilié au régime général dès le début de son activité, mais le tribunal a noté qu’il n’avait pas été informé de ses obligations de cotisation. La cour a conclu que Monsieur [K] [R] n’avait pas effectué de démarches pour régulariser sa situation et a infirmé le jugement du 3 mai 2021, déboutant Monsieur [K] [R] de toutes ses demandes et le condamnant aux dépens.

Quelles sont les obligations des organismes de sécurité sociale en matière d’information des assurés ?

Les obligations d’information des organismes de sécurité sociale sont principalement régies par l’article L. 161-17 du Code de la sécurité sociale. Cet article stipule que les organismes de sécurité sociale doivent informer les assurés de leurs droits et obligations.

Cependant, cette obligation d’information ne peut être étendue au-delà des prévisions de ce texte. En vertu de l’article R. 112-2, les organismes de sécurité sociale sont tenus de répondre aux demandes qui leur sont soumises, mais ils ne sont pas responsables de l’absence d’initiative de l’assuré pour se renseigner sur ses droits.

Ainsi, il appartient à l’assuré de se rapprocher de la caisse afin de régulariser sa situation, notamment en cas de non-versement de cotisations. L’affiliation à un régime de retraite ne crée pas automatiquement l’obligation de cotiser, qui dépend de l’exercice de l’activité professionnelle.

En résumé, les organismes doivent informer, mais l’initiative de vérifier et de régulariser incombe à l’assuré.

Quelles sont les conséquences de la prescription en matière de cotisations sociales ?

La prescription en matière de cotisations sociales est régie par l’article 1224 du Code civil, qui précise que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les Faits lui permettant de l’exercer.

Dans le cas présent, la CIPAV soutient que Monsieur [K] [R] aurait dû se rendre compte dès 1988, en consultant les appels de cotisation, qu’il ne cotisait pas au titre du régime de base. Cependant, il a découvert cette situation lors de sa demande de liquidation de retraite en 2016.

Le tribunal a écarté le moyen tiré de la prescription, considérant que Monsieur [R] n’avait pas eu connaissance de son absence de cotisation au régime de base avant sa demande de liquidation. Cela souligne l’importance de la connaissance des droits et obligations par l’assuré pour le déclenchement du délai de prescription.

Quelles sont les responsabilités des caisses de retraite en matière de gestion des dossiers des assurés ?

Les responsabilités des caisses de retraite sont encadrées par plusieurs articles du Code de la sécurité sociale. L’article L. 640-1 stipule que les artistes auteurs, en tant que travailleurs indépendants, doivent être affiliés à un régime de retraite et que les caisses doivent assurer la gestion de ces régimes.

En cas de faute dans la gestion des dossiers, comme une mauvaise information ou une absence de cotisation, la caisse peut engager sa responsabilité délictuelle. Dans le cas de Monsieur [K] [R], le tribunal a reconnu que la CIPAV avait commis une faute en ne validant pas les trimestres de cotisation pour la période concernée.

La jurisprudence indique que les caisses ont une obligation de résultat en matière d’affiliation et de validation des droits à la retraite. Si un assuré peut prouver qu’il a respecté ses obligations déclaratives, la caisse doit s’assurer que ses droits sont correctement pris en compte.

Comment se déroule la Procédure de recours amiable en matière de sécurité sociale ?

La Procédure de recours amiable en matière de sécurité sociale est régie par les dispositions du Code de la sécurité sociale, notamment l’article L. 142-1, qui prévoit que tout assuré peut saisir la commission de recours amiable de la caisse compétente en cas de litige concernant ses droits.

Dans le cas de Monsieur [K] [R], il a saisi la commission de recours amiable de la CIPAV par courrier du 11 octobre 2019, demandant la validation gratuite de ses trimestres de cotisation. Cette étape est cruciale car elle permet à l’assuré de tenter de résoudre le litige à l’amiable avant d’engager une action en justice.

Si la commission ne donne pas satisfaction, l’assuré peut alors saisir le tribunal compétent, comme cela a été fait par Monsieur [R] par requête reçue le 24 décembre 2019. La Procédure de recours amiable est donc une étape préalable qui peut influencer le cours de la Procédure judiciaire ultérieure.

Quelles sont les implications de l’affiliation à différents régimes de retraite pour un artiste-auteur ?

L’affiliation à différents régimes de retraite a des implications significatives pour les artistes-auteurs, notamment en ce qui concerne leurs droits à la retraite. Selon l’article L. 382-1 du Code de la sécurité sociale, les artistes auteurs d’œuvres originales sont affiliés obligatoirement au régime général de sécurité sociale pour les assurances sociales.

Cela signifie qu’ils doivent cotiser à ce régime pour bénéficier des prestations de retraite de base. En revanche, les artistes qui ne répondent pas aux critères de l’article L. 382-1 relèvent du régime des travailleurs non salariés, comme stipulé dans l’article L. 640-1.

Dans le cas de Monsieur [K] [R], la question de son affiliation à la CREA et à la CIPAV a été centrale. La confusion entre les régimes a conduit à des erreurs dans la validation de ses trimestres de cotisation, ce qui a eu un impact direct sur ses droits à la retraite. Les artistes doivent donc être vigilants quant à leur affiliation et s’assurer qu’ils cotisent correctement aux régimes appropriés pour éviter des conséquences sur leur retraite future.

Q/R juridiques soulevées :

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

15 novembre 2024
Cour d’appel de Paris
RG
21/04420
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 13

ARRÊT DU 15 Novembre 2024

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 21/04420 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDWPO

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Mai 2021 par le Pole social du TJ de BOBIGNY RG n° 19/03627

APPELANTE

LA CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PREVOYANCE ET D’ ASSURANCE VIEILLESSE (CIPAV)

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par Me Hélène LECAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0027 substituée par Me Kévin BOUTHIER, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [K] [R]

[Adresse 1]

[Localité 7]

représenté par Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0322

Caisse IRCEC

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Sophie UETTWILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0261 substitué par Me Cynthia CORCEIRO, avocat au barreau de PARIS

Parties intervenantes

Association [8]

[Adresse 3]

[Localité 5],

non comparante non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de Procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Septembre 2024,en audience publique et double rapporteur, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre et Madame Fabienne ROUGE, présidente, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raoul CARBONARO, président de chambre

Madame Fabienne ROUGE, présidente

Monsieur Gilles REVELLES, conseiller

Greffier : Madame Agnès ALLARDI, lors des débats

ARRET :

– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

– prononcé

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de Procédure civile.

-signé par Monsieur Raoul CARBONARO, président de chambre et par Madame Fatma DEVECI , greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l’appel interjeté par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse d’un jugement rendu le 3 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Bobigny dans un litige l’opposant à M. [K] [R].

Faits, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les Faits de la cause ont été correctement rapportés par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que Monsieur [K] [R] a débuté une activité de peinture de décors courant 1987 en professionnel libéral.

Il a été affilié à l’URSSAF Ile-de-France au 1er juillet 1987, à l’assurance maladie des professions libérales à compter du 3 septembre 1987, et à la Caisse de retraite de l’enseignement des arts appliqués, du sport et du tourisme (ci-après ‘la CREA’) au titre des régimes obligatoires d’assurance vieillesse à compter du 1er janvier 1988 à compter du 1er avril 1993, [K] [R] a été affilié au régime général par la [8] au titre du régime de base. Il a cependant continué de verser des cotisations qui alimentaient son compte de retraite complémentaire IRCEC. Fin 2016, [K] [R] a souhaité liquider ses pensions de retraite au 1er janvier 2019 et a donc sollicité son relevé de situation individuelle. Il s’est aperçu à cette occasion qu’il n’avait validé aucun trimestre d’assurance au titre de son activité indépendante sur la période 1987-1992.

La [8] lui a confirmé son affiliation de 1993 à 2004 ainsi que les droits validés à cette période. Le 13 juin 2019, l’IRCEC l’a informé du fait qu’il avait bien cotisé à l’IRCEC au titre du régime de retraite complémentaire mais pas au titre du régime de base.

Par courrier du 11 octobre 2019, l’assuré a saisi la commission de recours amiable de la CIPAV aux fins d’obtenir la validation gratuite des trimestres du régime de base et une reconstitution de carrière en fonction de ses revenus réels ou estimés pour la période 1990 à 1992.

Par requête reçue le 24 décembre 2019 au greffe, Monsieur [K] [R] a saisi une juridiction compétente en matière de contentieux de la sécurité sociale.

La CIPAV a sollicité la mise en cause de l’IRCEC et de la [8].

Par jugement avant dire droit du 9 juillet 2020, le tribunal a ordonné la mise en cause de l’IRCEC et de la Maison des Artistes afin qu’ils se prononcent sur la nature juridique de l’activité professionnelle exercée par Monsieur [R] pour la période de 1988 à 1992.

Par jugement rendu le 3 mai 2021, le tribunal judiciaire de Bobigny a :

– dit que la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse a commis une faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle au titre du régime de retraite de base de Monsieur [K] [R] ;

– condamné la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse à réparer le préjudice subi par Monsieur [K] [R] au titre du régime de retraite de base et ordonné à titre de dommages-intérêts la validation gratuite par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse des trimestres de cotisations dont il a été privé en tenant compte de ses revenus réels ou estimés soit :

* 4 trimestres d’assurance et les points afférents sur l’année 1988,

* 4 trimestres d’assurance et les points afférents sur l’année 1989,

* 4 trimestres d’assurance et les points afférents sur l’année 1990,

* 4 trimestres d’assurance et les points afférents sur l’année 1991,

* 4 trimestres d’assurance et les points afférents sur l’année 1992 ;

– condamné la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse à reconstituer les points de retraite de base acquis sur la base des revenus déclarés ou estimés de Monsieur [K] [R] ;

– renvoyé la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse à remplir de ses droits Monsieur [K] [R] au regard de la présente décision ;

– débouté Monsieur [K] [R] de sa demande de condamnation, sous astreinte, de la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse à lui transmettre et rendre accessible, y compris en ligne, un relevé de situation conforme dans le délai d’un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

– débouté Monsieur [K] [R] de sa demande de condamnation de la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse à des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral ;

– prononcé la mise hors de cause de l’institution de retraite complémentaire de l’enseignement et de la création ;

– condamné la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse à payer à Monsieur [K] [R] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de Procédure civile ;

– condamné la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse aux dépens de l’instance ;

– rejeté toutes conclusions plus amples ou contraires.

Le jugement lui ayant été notifié le 6 mai 2021, la CIPAV en a interjeté appel le 6 mai 2021.

Au terme de ses dernières conclusions, déposées par voie de RPVA le 16 septembre 2024, et reprises oralement à l’audience du 19 septembre 2024 la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse, appelante, demande à la cour de :

– infirmer le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Bobigny le 3 mai 2021 en toutes ses dispositions ;

– débouter Monsieur [K] [R] de l’intégralité de ses demandes ;

– condamner Monsieur [K] [R] à verser à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de Procédure civile ;

– condamner Monsieur [K] [R] aux entiers dépens de la présente instance.

Au terme de ses conclusions n°2, déposées par voie de RPVA le 12 septembre 2022, développées oralement à l’audience par son conseil Monsieur [K] [R], intimé, demande à la cour de :

– confirmer le jugement rendu par le pôle social de Bobigny le 3 mai 2021 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

– condamner la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse à verser à Monsieur [R] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ;

– condamner la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse aux dépens.

Au terme de ses dernières conclusions, déposées par voie de RPVA le 20 septembre 2023, et reprises oralement l’IRCEC, intimée, demande à la cour de :

– dire mal fondé l’appel interjeté par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse et l’en débouter intégralement ;

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Bobigny ;

– condamner la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse aux entiers dépens.

La [8] n’a pas comparu et n’a pas déposé de conclusions.

MOTIFS

– Sur la mise hors de cause de l’IRCEC

L’IRCEC soutient qu’elle doit être mise hors de cause en ce qu’elle assure exclusivement la gestion de régimes d’assurance vieillesse complémentaire. À ce titre, il ne lui incombait pas, par l’intermédiaire de la CREA d’informer l’assuré de la nécessité de cotiser à un régime de retraite de base ; et ce alors que la CREA n’a plus été habilitée à encaisser les cotisations du régime de base depuis le 1er janvier 1977. Elle soutient que ni la CIPAV, ni Monsieur [R] ne démontrent la nécessité de la maintenir en la cause puisque ni l’un ni l’autre ne formulent de demande à son égard.

En l’absence de toute demande dirigée à son encontre, elle sera donc mise hors de cause, le jugement étant confirmé sur ce point.

– Sur la prescription

La CIPAV soutient que l’action de M. [R] est prescrite en se fondant sur l’article 1224 du code civilqui précise que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les Faits lui permettant de l’exercer.

Elle soutient qu’il aurait dû se rendre compte dés 1988 à la lecture des appels de cotisation de retraite complémentaire qu’il ne cotisait pas au titre du régime de base auprès de la CREA.

Il sera observé que M. [R] a découvert lors de sa demande de liquidation de sa retraite qu’il n’avait pas cotisé au régime de base.

Le moyen tiré de la prescription sera donc écarté.

– Sur la faute de la CIPAV

La CIPAV soutient que l’assuré aurait dû être considéré comme un artiste-auteur dès son affiliation et aurait dû cotiser, pour sa retraite de base, au régime général géré par la [8] et non par la CREA. La CIPAV ajoute que, si la cour devait considérer que l’assuré devait être affilié à la CREA de 1988 à 1992 et non à la [8], elle n’a commis aucune faute dans la gestion de son dossier.

Elle fait valoir que l’assuré n’a pas payé de cotisations de retraite de base pour la période de 1990 à 1992 ; qu’il ne s’en est préoccupé qu’au moment de la liquidation de ses droits à retraite ; que, par conséquent, il n’a pas validé de trimestres pour la période comprise entre le 1er janvier 1988 et le 31 décembre 1992. Elle rappelle que les cotisations sociales ont un caractère portable et non quérable.

À ce titre, il ne peut être reproché à la CREA de n’avoir appelé qu’une cotisation de retraite complémentaire sur son régime IRCEC puisque c’est à l’assuré de prendre ses dispositions pour régler en temps et en heures ses cotisations, quand bien même il n’aurait pas été affilié par l’organisme social compétent.

L’IRCEC soutient que les cotisations au régime de retraite de base ne sont prélevées que sur demande de l’artiste auteur. Par conséquent, il incombait à l’assuré de procéder au règlement des cotisations au titre de son régime de retraite de base.

La CIPAV venant aux droits de la CREA soutient qu’elle n’avait pas à l’affilier au régime de retraite de base puisqu’il était déjà affilié à une autre caisse pour ledit régime, ce qui s’est révélé être faux. Elle expose que le régime de retraite des artistes relevait soit de la CREA soit de la [8]. Elle rappelle que l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale prévoit que ‘les artistes auteurs d’oeuvres littéraires et dramatiques, musicales et chorégraphiques, audiovisuelles et cinématographiques, graphiques et plastiques ainsi que photographiques, sous réserve des dispositions suivantes sont affiliés obligatoirement au régime général de sécurité sociale pour les assurances sociales et bénéficient des prestations familiales dans les mêmes conditions que les salariés’. Elle se fonde sur l’article R. 382-1 et R. 122-3 du code de la propriété intellectuelle et sur l’article L. 640-1 du code de la sécurité sociale pour conclure que M. [R] relevait de la Maison des Artistes.

M. [K] [R] soutient qu’en 1987, l’IRCEC n’avait pas la personnalité morale et que c’est la CREA qui l’a inscrit suite à son inscription par le centre de formalité des entreprises (CFE) comme professionnel libéral. Il rappelle que la CREA au vu de ses statuts avait pour but d’assurer la gestion de l’allocation de vieillesse dite régime de base et des prestations complémentaires. Il ajoute qu’il a respecté son obligation déclarative unique auprès du CFE, que cela a conduit à son affiliation aux régimes de sécurité sociale des indépendants, et que cela mettait à la charge des organismes auxquels il était affilié une obligation de résultat d’une inscription effective et complète à chacun des régimes.

Il souligne que les appels de cotisations de la CREA étaient particulièrement trompeurs en ce qu’ils faisaient apparaître le montant d’une cotisation dénommée ‘cotisation retraite’ sans distinction et qu’ils faisaient figurer les acronymes CREA et IRCEC. Enfin, il relève que cette erreur de gestion concerne 6 500 personnes selon la Cour des comptes qui préconisait une affiliation rétroactive des intéressés sans qu’aucune mesure correctrice n’ait été prise par la CIPAV.

Il conclut que la CIPAV venant aux droits de la CREA doit être condamnée au titre de cette faute commise par la caisse absorbée.

Les artistes auteurs mentionnés à l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale sont rattachés au régime général au titre de leur régime d’assurance vieillesse de base, ce régime étant géré par la [8]. Ils bénéficient également d’un régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire géré depuis l’origine par l’IRCEC.

Sont concernés les artistes auteurs qui créent des oeuvres originales littéraires et dramatiques, musicales, chorégraphiques, audiovisuelles et cinématographiques, graphiques et plastiques ainsi que photographiques et exercent leur activité selon les règles posées par le code de la propriété intellectuelle pour définir les oeuvres de l’esprit.

Les autres artistes indépendants qui ne répondent pas aux conditions du régime précité des artistes auteurs et ne sont pas mentionnés à l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale relèvent du régime des travailleurs non salariés (article L. 640-1 du code de la sécurité sociale).

L’article R. 641-6, 9°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable, prévoyait parmi les 13 sections professionnelles des professions libérales l’institution d’une section professionnelle des artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1, des professeurs de musique et des musiciens.

Ce régime était géré jusqu’en 2004 par la Caisse de retraite de l’enseignement, des arts appliqués, du sport et du tourisme (la CREA).

Depuis 2004, les artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale sont rattachés une section professionnelle regroupant les architectes, agréés en architecture, ingénieurs, techniciens, géomètres, experts et conseils, artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1, enseignants, professionnels du sport, du tourisme et des relations publiques, et de toute profession libérale non rattachée à une autre section, gérée par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (CIPAV), s’agissant du régime d’assurance vieillesse obligatoire de base, le régime d’assurance vieillesse complémentaire des artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale continuant à être géré par l’IRCEC.

Selon l’article L. 642-1 du code de la sécurité sociale, toute personne exerçant une activité professionnelle relevant de l’organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales est tenue de verser des cotisations destinées à financer notamment les prestations du régime d’assurance vieillesse de base dont elle relève.

Selon l’article L. 642-5 du même code, les sections professionnelles assurent, pour le compte de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales, le recouvrement des cotisations prévues à l’article L. 642-1.

En vertu de l’article D. 642-1 du code de la sécurité sociale, les cotisations sont portables et non quérables, de sorte qu’en l’absence d’appel de cotisations, il appartient à l’assuré de se rapprocher de la caisse afin de régulariser sa situation.

L’obligation d’information incombant aux organismes gestionnaires de l’assurance vieillesse en application de l’article L. 161-17 susvisé ne peut être étendue au-delà des prévisions de ce texte. Celle, générale, découlant de l’article R. 112-2 susvisé dont les organismes de sécurité sociale sont débiteurs envers leurs assurés, leur impose seulement de répondre aux demandes qui leur sont soumises.

Il appartient dès lors à la juridiction saisie d’une action en responsabilité de rechercher si l’assuré, qui n’a pas été affilié au régime d’assurance vieillesse géré par la caisse, s’est manifesté auprès de cette dernière pour se renseigner sur ses droits et obligations à ce titre.

L’affiliation ne fait en outre pas naître l’obligation de cotiser qui dépend de l’exercice de l’activité.

M. [R] justifie avoir déclaré son activité de peintre en décors faux marbres, trompe l’oeil, fresques le 3 septembre 1987au centre de formalités des entreprises. Il a été régulièrement affilié à l’Urssaf de [Localité 9], à l’assurance maladie, maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles, ainsi qu’à l’IRCEC Institution de Retraite Complémentaire de l’Enseignement et de la Création via un document délivré à l’entête de la CREA, la caisse de retraite de l’enseignement, des arts appliqués, du sport et du tourisme.

Les notifications d’immatriculation qu’il verse aux débats émanent de l’Urssaf , en date du 1er juillet 1987, de l’assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles en date du 1er octobre 1987 et de la CREA en date du 6 novembre 1987.

Il résulte des appels de cotisations émanant de l’Urssaf et de l’Ircec via la CREA que celui-ci déclarait ses revenus.

Il est également démontré qu’à compter de 1993 il relevait de la [8] qui appelait une cotisation vieillesse.

L’attestation d’affiliation de cette caisse indiquait : ‘Je soussigné directeur de l’institution de retraite complémentaire de l’enseignement et de la création certifie que M [R] est affilié à l’Ircec sous le numéro 2207294 à compter du 1er janvier 1988 pour une activité de peintre.’ Étant précisé que ce courrier est à l’en tête de la CREA.

Avant le 1er janvier 2004, date de l’absorption de la CREA par la CIPAV, l’IRCEC constituait l’une des branches de la CREA, seule titulaire de la personnalité morale, de sorte qu’il est légitime que les documents reçus par l’assuré aient porté en en-tête les noms de l’IRCEC et de la CREA, sans que cette mention ait pu être source d’erreur dès lors qu’ils font clairement référence à la retraite complémentaire et non à la retraite de base. Ainsi, les attestations indiquant qu’il est en règle de cotisations sont signées du directeur de l’institution de retraite complémentaire de l’enseignement et de la création de telle sorte qu’aucune ambiguïté ne saurait être mise en exergue alors que ce document permettait de comprendre qu’il s’agissait de retraite complémentaire.

M. [R] n’apporte pas la preuve qu’il aurait effectué la moindre démarche auprès de la CREA, puis de la CIPAV pour régulariser son affiliation et qu’elle ne s’est acquittée d’aucun règlement de cotisations auprès de cet organisme.

Les demandes de M. [R] seront donc rejetées.

Le jugement déféré sera donc infirmé.

M. [R], qui succombe, sera condamné aux dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 500 euros en application de l’article 700 du code de Procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DÉCLARE recevable l’appel de Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d’Assurance Vieillesse ;

INFIRME le jugement rendu le 3 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Bobigny en ses dispositions soumises à la cour ;

STATUANT À NOUVEAU,

DÉBOUTE M. [K] [R] de l’intégralité de ses demandes ;

CONDAMNE M. [K] [R] à payer à Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d’Assurance Vieillesse la somme de 500 euros en application de l’article 700 du code de Procédure civile ;

CONDAMNE M. [K] [R] aux dépens.

La greffière Le président


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