La solidarité est légale ou conventionnelle
Aux termes de l’article 1310 du code civil :« La solidarité est légale ou conventionnelle ; elle ne se présume pas. ». En vertu de l’article 1313 du code civil : « La solidarité entre les débiteurs oblige chacun d’eux à toute la dette. Le paiement fait par l’un d’eux les libère tous envers le créancier.
Le créancier peut demander le paiement au débiteur solidaire de son choix. Les poursuites exercées contre l’un des débiteurs solidaires n’empêchent pas le créancier d’en exercer de pareilles contre les autres. »
Comme l’a relevé le tribunal, la société Playground n’invoque ici ni une solidarité légale ni une solidarité conventionnelle mais une solidarité de fait qui en tout état de cause ne peut être retenue.
Affaire Playground
La société Playground soutient qu’après avoir reçu des subventions conséquentes la Fédération Française de Lutte a créé le Comité d’Organisation des Mondiaux, structure totalement confondue et dépendante d’elle dès sa création, tout au long de son fonctionnement et dans la gestion des difficultés financières. La Fédération Française de Lutte ayant reçu une subvention de 700.000 euros par le Centre National pour le Développement du Sport, la société Playground fait valoir que si la subvention a été versée à la FFL, l’organisation des Mondiaux revenait au Comité qui a donc nécessairement été alimenté financièrement par la FFL. Elle estime que la FFLDA s’est toujours comportée à son égard comme son cocontractant, solidaire et co-débitrice du Comité d’Organisation. Elle en déduit qu’une solidarité de fait existait entre les deux entités.
La demande d’extension de la liquidation judiciaire
La demande d’extension de la liquidation judiciaire du Comité d’Organisation à la FFLDA sollicitée par lettre du 12 juin 2020 a été rejetée, un plan de sauvegarde de la FFLDA ayant déjà été adopté par jugement du 3 février 2020.
Preuve insuffisante
Ainsi, et alors que la société Playground savait, comme le confirment ses factures établies à l’ordre du Comité d’Organisation, qu’elle contractait avec ce dernier et que la convention liant le CO à la FFLDA distingue les rôles respectifs de chacune de ces deux entités, l’appelante échoue à démontrer l’existence d’une solidarité de fait entraînant l’obligation pour l’intimée de supporter les conséquences financières de l’activité du Comité d’Organisation.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 11
ARRET DU 26 JANVIER 2024
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/18080 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEPYW
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Septembre 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CRETEIL – RG n° 19/08991
APPELANTE
S.A.S. PLAYGROUND
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Localité 3]
immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 827 641 184
représentée par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Assistée de Me Olivia GUIGUET, avocate au barreau de MARSEILLE
INTIMES
FEDERATION FRANCAISE DE LUTTE ET DE DISCIPLINES ASSOCIEES
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Localité 6]
immatriculée sous le numéro SIREN 784 448 706
représentée par Me François BALIQUE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0108
PARTIES INTERVENANTES
Maître Florence TULIER-POLGE
Es-qualité d’administrateur judiciaire à la procédure de sauvegarde de la FEDERATION FRANCAISE DE LUTTE ET DE DISCIPLINES ASSOCIEES
[Adresse 7]
[Localité 5]
DÉFAILLANT
S.E.L.A.R.L. S21Y
EN LA PERSONNE DE ME [P] [G] Prise en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la FEDERATION FRANCAISE DE LUTTE ET DE DISCIPLINES ASSOCIEES
[Adresse 4]
[Localité 6]
DÉFAILLANTE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère,
Madame CAROLINE GUILLEMAIN, Conseillère,
M. Julien RICHAUD, Conseiller désigné afin de compléter la formation collégiale de la cour,
Qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : M.Damien GOVINDARETTY
ARRÊT :
– réputé contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère faisant fonction de Président, et par Damien GOVINDARETTY, Greffier présent lors de la mise à disposition.
FAITS ET PROCEDURE
La Fédération Française de Lutte et Disciplines Associées est une association déclarée d’utilité publique par décret du 20 novembre 1991 et agréée par arrêté du Ministère des Sports du 25 mars 2004.
La Fédération Internationale de Lutte a chargé la FFLDA d’accueillir le Championnat du Monde de Lutte Seniors devant se dérouler à [Localité 8] en août 2017.
A cette occasion a été créée une association dénommée Comité d’Organisation du Championnat du Monde Seniors de Lutte 2017.
La société Playground, créée en février 2017, est spécialisée dans la réalisation de prestations de conseil et d’accompagnement au bénéfice d’organisateurs d’événements sportifs et la production et l’organisation d’événements sportifs. Elle est intervenue à la demande du Comité d’Organisation des Championnats du Monde Seniors de Lutte 2017 et a émis plusieurs factures portant sur des prestations de transport, d’hébergement et de restauration pour un montant total de 210.258 euros dont 71.160 euros TTC ont été réglés.
Déplorant l’absence de règlement de ses factures, la société Playground a mis en demeure, par lettres des 5 décembre 2007 et 30 mars 2018, la Fédération Française de Lutte et de Disciplines Associées de lui régler la somme de 139.098 euros TTC, en vain.
Suivant jugement du 28 janvier 2019, le tribunal de grande instance de Créteil a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard du Comité d’organisation du Championnat du Monde Seniors de Lutte 2017 et fixé la date de cessation des paiements au 14 octobre 2018.
Par jugement du 17 décembre 2018, le tribunal de grande instance de Créteil a ouvert une procédure de sauvegarde de la FFLDA qui a bénéficié d’un plan de sauvegarde par jugement du 3 février 2020.
Le 5 février 2019 la société Playground a déclaré sa créance pour un montant de 139.098 euros au passif de la liquidation judiciaire du Comité au titre de cinq factures de prestations impayées.
Elle a également sollicité le même jour l’admission de sa créance au passif de la FFLDA mais la société S21Y ès qualités de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde lui a indiqué que le président de la Fédération contestait être redevable de cette facture. Selon ordonnance du 14 octobre 2019, le juge commissaire a rappelé être dépourvu de pouvoir juridictionnel pour trancher la contestation sérieuse qui opposait les parties et a prononcé un sursis à statuer jusqu’à la décision définitive de la juridiction compétente.
La société Playground a sollicité l’extension à la FFLDA de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’encontre du Comité d’Organisation, compte tenu de la confusion des patrimoines entre les deux entités. Maître [E] [O], ès qualités de liquidateur du Comité, a indiqué, après avoir constaté que la FFLDA bénéficiait d’un plan de sauvegarde, que cette situation faisait obstacle à l’extension de la procédure.
Suivant exploit du 14 novembre 2019, la société Playground a fait assigner la Fédération Française de Lutte et de Disciplines Associées, la société S21Y prise en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la FFLDA et Maître [J] [H] prise en sa qualité d’administrateur judiciaire à la procédure de sauvegarde de la FFLDA devant le tribunal judiciaire de Créteil.
Par ordonnance du 3 décembre 2020, le juge de la mise en état a dit que la demande tirée du défaut de qualité à agir ne relevait pas de sa compétence et a rejeté l’exception d’incompétence matérielle soulevée par la Fédération Française de Lutte au bénéfice du tribunal administratif.
Par jugement du 14 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Créteil a :
débouté la société Playground de ses demandes,
dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire,
condamné la société Playground aux dépens.
La société Playground a formé appel du jugement par déclaration du 15 octobre 2021 enregistrée le 18 octobre 2021.
Suivant acte du 17 juin 2022, la société Playground a fait assigner en intervention forcée devant la cour d’appel de Paris, avec signification de conclusions, la Selarl S21Y en la personne de Maître [P] [G] prise en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la FFLDA, en sa nouvelle qualité de commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde de la FFLDA désignée à cette fonction par jugement du tribunal judiciaire de Créteil en date du 3 février 2021.
Suivant ses dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 4 octobre 2023, la société Playground demande à la cour, au visa des articles 1310 et suivants du code civil :
– de dire la société Playground recevable et bien fondée en son appel,
– de dire la Fédération Française de Lutte et des Disciplines Associées irrecevable ou à tout le moins mal fondée en son appel incident,
– En conséquence,
– de confirmer l’ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Créteil en date du 3 décembre 2020 en toutes ses dispositions,
– d’infirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Créteil en date du 14 septembre 2021 en ce qu’il a débouté la société Playground de ses demandes et condamné la société Playground aux dépens,
– Statuant à nouveau :
– de condamner la Fédération Française de Lutte et des Disciplines Associées, solidairement tenue avec le Comité d’Organisation des Championnats du Monde Seniors de Lutte 2017 de la dette contractée auprès de la société Playground, au paiement de 115.915 euros HT, soit 139.098 euros TTC, en principal, outre les intérêts au taux annuel contractuel de 10,05 % à compter du 5 décembre 2017, date de la première mise en demeure,
– Par voie de conséquence de fixer au passif de la procédure de sauvegarde de la Fédération Française de Lutte et des Disciplines Associées la créance de la société Playground pour un montant de 115.915 euros HT, soit 139.098 euros TTC, en principal, outre les intérêts au taux annuel contractuel de 10,05 % à compter du 5 décembre 2017, date de la première mise en demeure,
– de condamner la Fédération Française de Lutte et des Disciplines Associées au paiement de la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Suivant ses dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 20 septembre 2023, la Fédération Française de Lutte et de Disciplines Associées demande à la cour :
A titre principal,
Vu l’article 795 du code de procédure civile ;
– de recevoir l’appel incident de la FFLDA sur son exception d’incompétence d’ordre public ;
Vu les articles L 131-14 et L131-15 du code des sports ;
– de déclarer la juridiction judiciaire incompétente au profit de la juridiction administrative pour statuer sur la demande de la société Playground dirigée contre la FFLDA ;
– de renvoyer la société Playground, si elle s’y croit fondée, à saisir le tribunal administratif de Melun de sa demande ;
A titre subsidiaire,
Vu l’article 1310 du code civil ;
– de débouter la société Playground de ses demandes qui sont mal fondées en ce qu’elles sont dirigées contre la FFLDA qui ne lui a passé aucune commande et n’a bénéficié d’aucune prestation à son profit ;
– de rejeter l’appel de la société Playground contre le jugement du tribunal judiciaire de Créteil du 3 septembre 2021
– de condamner société Playground à payer à la FFLDA la somme de 5.000 euros en en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– de condamner la société Playground aux dépens de la procédure d’appel distraits au profit de Maître François Balique, Avocat, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
*
La clôture a été prononcée suivant ordonnance en date du 5 octobre 2023.
SUR CE, LA COUR,
Sur l’exception d’incompétence
La FFLDA soulève une exception d’incompétence au profit de la juridiction administrative en soutenant que son appel incident sur ce point est recevable. Elle argue de l’absence d’autorité de la chose jugée de l’ordonnance du juge de la mise en état du 3 décembre 2020.
La société Playground soutient que la FFLDA est irrecevable en son appel incident, l’ordonnance du juge de la mise en état querellée n’ayant pas été déférée à la cour et la décision dont appel étant le jugement du tribunal judiciaire de Créteil du 14 septembre 2021.
Aux termes de l’article 795 du code de procédure civile dans sa version applicable en la cause :
« Les ordonnances du juge de la mise en état ne sont pas susceptibles d’opposition.
Elles ne peuvent être frappées d’appel ou de pourvoi en cassation qu’avec le jugement statuant sur le fond.
Toutefois, elles sont susceptibles d’appel dans les cas et conditions prévus en matière d’expertise ou de sursis à statuer.
Elles le sont également, dans les quinze jours à compter de leur signification, lorsque :
1° Elles statuent sur un incident mettant fin à l’instance, elles ont pour effet de mettre fin à celle-ci ou elles en constatent l’extinction ;
2° Elles statuent sur une exception de procédure ou une fin de non-recevoir ;
3° Elles ont trait aux mesures provisoires ordonnées en matière de divorce ou de séparation de corps ;
4° Dans le cas où le montant de la demande est supérieur au taux de compétence en dernier ressort, elles ont trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier au cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. »
Par ordonnance du 3 décembre 2020, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Créteil a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la FFLDA.
Cette ordonnance, susceptible d’un appel immédiat en application de l’article précité, n’a pas fait l’objet d’un appel, peu important que celle-ci n’ait pas été signifiée à partie.
L’appel interjeté par la société Playground le 15 octobre 2021 a été formé à l’encontre du jugement rendu le 14 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Créteil de sorte que la cour n’est pas saisie d’un appel portant sur l’ordonnance du 3 décembre 2020.
Il en résulte que l’appel incident interjeté par la Fédération Française de Lutte et de Disciplines Associées est irrecevable.
Sur le fond
La société Playground soutient qu’après avoir reçu des subventions conséquentes la Fédération Française de Lutte a créé le Comité d’Organisation des Mondiaux, structure totalement confondue et dépendante d’elle dès sa création, tout au long de son fonctionnement et dans la gestion des difficultés financières. La Fédération Française de Lutte ayant reçu une subvention de 700.000 euros par le Centre National pour le Développement du Sport, la société Playground fait valoir que si la subvention a été versée à la FFL, l’organisation des Mondiaux revenait au Comité qui a donc nécessairement été alimenté financièrement par la FFL. Elle estime que la FFLDA s’est toujours comportée à son égard comme son cocontractant, solidaire et co-débitrice du Comité d’Organisation. Elle en déduit qu’une solidarité de fait existait entre les deux entités.
La FFLDA fait valoir que c’est le Comité d’Organisation du Championnat du Monde de Lutte Seniors 2017, entité distincte de la FFLDA, qui a procédé à l’intégralité de l’organisation matérielle du Championnat du Monde de Lutte Seniors 2017 et a pu seul passer commande des prestations à la société Playground et en bénéficier. Elle soutient qu’aucune solidarité légale ou contractuelle n’existait entre ces deux entités.
Aux termes de l’article 1310 du code civil :
« La solidarité est légale ou conventionnelle ; elle ne se présume pas. »
En vertu de l’article 1313 du code civil :
« La solidarité entre les débiteurs oblige chacun d’eux à toute la dette. Le paiement fait par l’un d’eux les libère tous envers le créancier.
Le créancier peut demander le paiement au débiteur solidaire de son choix. Les poursuites exercées contre l’un des débiteurs solidaires n’empêchent pas le créancier d’en exercer de pareilles contre les autres. »
Comme l’a relevé le tribunal, la société Playground n’invoque ici ni une solidarité légale ni une solidarité conventionnelle mais une solidarité de fait.
Le Comité d’Organisation des Mondiaux avait pour objet « la préparation, l’organisation, la gestion administrative, financière et logistique des championnats du monde seniors de lutte 2017 à [Localité 8] ».
La Convention conclue entre l’association « Comité d’Organisation des Championnats du Monde Seniors de Lutte 2017 » et l’association « Fédération Française de Lutte et Disciplines Associées » non datée mais dont le terme est fixé au 31 décembre 2017, prévoit :
Article 1 ‘ Organisation de la compétition
« La FFLDA s’engage à mettre à disposition du Comité d’Organisation :
Les moyens matériels et techniques utiles (matériels informatiques, reprographiques, machine à affranchir, téléphones et télécopieurs…)
L’assistance du personnel fédéral en fonction des besoins de l’organisation et sous l’autorité du Secrétaire Général de la FFLDA afin d’effectuer les prestations administratives nécessaires
Les mises à disposition du personnel de droit privé. L’aspect financier sera réglé par facturation trimestrielle de la part de la FFLDA. »
Article 2 ‘ Financement de l’organisation des Championnats
« La FFLDA s’engage à faire verser, à verser ou à rétrocéder au Comité d’Organisation l’ensemble des sommes et subventions de toutes natures qui pourront lui être attribuées à quelque titre que ce soit par quelques interlocuteurs que ce soit et notamment toutes personnes physiques ou morales de droit privé comme de droit public destinées au soutien et au financement de la compétition et de son organisation quelque soit leur forme, leur origine et leur dénomination. »
Article 4 ‘ Responsabilité du Comité d’Organisation
« Le Comité d’Organisation s’engage irrévocablement à supporter toutes les conséquences de l’organisation de la compétition et du déroulement de celle-ci. (…) »
Il ressort de cette convention à la fois une autonomie du Comité d’Organisation créé pour l’événement sportif de 2017 et responsable de son organisation et son lien indéfectible avec la FFLDA qui doit mettre à sa disposition tous moyens et lui reverser les subventions perçues. Cette convention distingue cependant bien le rôle de chacune de ces associations, peu important que le siège social et les personnes physiques dirigeantes dédiées soient identiques. En outre, il ne ressort pas de cette convention une confusion des comptabilités de la FFLDA et du Comité d’Organisation.
La société Playground verse aux débats les factures suivantes à l’ordre du Comité d’Organisation Championnats du Monde Lutte 2017 :
facture 1009 du 24 février 2017 « FF Lutte Conseil & Accompagnement ‘ Transport » 16.320 euros TTC,
facture 1058 du 16 juin 2017 « Conseil «& Accompagnement – Restauration » et « Conseil & Accompagnement – Hébergement » pour un total de 17.160 euros TTC,
facture 1068 du 13 juillet 2017 « Conseil & Accompagnement – Transport » 7.680 euros TTC
facture 1069 du 13 juillet 2017 « Conseil & Accompagnement – Hébergement » « Conseil & Accompagnement – Transport » et « Conseil & Accompagnement – Restauration », de 61.680 euros TTC,
facture 1092 du 31 août 2017 « Conseil & Accompagnement – Hébergement » « Conseil & Accompagnement – Transport », « Conseil & Accompagnement – Restauration » et « Conseil & Accompagnement – Restauration », de 38.400 euros TTC,
facture 1093 du 30 septembre 2017 « Conseil & Accompagnement – Hébergement » « Conseil & Accompagnement – Transport », « Conseil & Accompagnement – Restauration » et « Directeur de projet » de 18.960 euros TTC,
facture 1094 du 30 septembre 2017 « Directeur de projet » de 24.000 euros TTC,
facture 1095 du 30 septembre 2017 « Régie opérationnelle » et « frais divers » de 26.058 euros TTC.
Le solde dû s’élève à 139.098 euros TTC.
Il n’est pas contesté qu’aucun contrat écrit n’a été régularisé entre la société Playground et le Comité d’Organisation ou la FFLDA. Un document intitulé « Proposition d’accompagnement HEB-TRA-RES » a manifestement été produit en première instance mais il n’en est pas fait état en appel. La société Playground a donc réalisé des prestations dont les contours n’ont pas été fixés par écrit. En effet, aucun courriel ne détermine davantage le contenu de la prestation confiée à la société Playground.
La société Playground, pour démontrer l’implication de la FFLDA, s’appuie notamment sur un échange de courriels intervenus du 27 octobre 2017 au 22 décembre 2017 et particulièrement sur celui du 22 décembre 2017, émanant de M. [I] [D] directeur général des Championnats du Monde de lutte 2017 et adressé à la société Playground : « Je te confirme que nous reconnaissons la dette de 139.098 euros TTC due à Playground par le CO à ce jour. Toutefois, comme évoqué par téléphone, nous n’avons pour l’instant pas la trésorerie suffisante pour honorer l’intégralité des sommes restant dues. Nous affichons un déficit à l’issue du championnat du monde, dont la Fédération Française de Lutte est solidaire et en assumera l’absorption en contractant un emprunt auprès de notre partenaire bancaire. Si le dossier bancaire est quasi finalisé,nous sommes toutefois contraints de respecter l’échéance du 7 avril 2018, date à laquelle l’assemblée générale fédérale entérinera le budget prévisionnel 2018 prenant en compte le montant annuel de l’emprunt. Par ailleurs, le conseil d’administration fédéral a validé le samedi 9 décembre 2017 les orientations budgétaires intégrant l’absorption du déficit du mondial. Nous sommes sensibles à l’accompagnement de Playground dans cette phase post mondial et vous en remercions. »
Dans sa signature, M. [D] inclut la mention « Comité d’organisation [Localité 8] Lutte 2017 ».
Si ce courriel évoque la possibilité d’une absorption du déficit par le biais d’un emprunt, d’une part il confirme que la dette est due à la société Playground par le Comité d’Organisation et d’autre part que cette absorption est conditionnée à l’entérinement du budget prévisionnel 2018 par l’assemblée générale fédérale. Tel n’ayant pas été le cas, même si la FFLDA cherchait un moyen de faire en sorte que le Comité d’Organisation puisse solder sa dette, la FFLDA ne peut être considérée, sur la base de ce simple courriel, solidaire du Comité d’Organisation à l’égard duquel une procédure collective a ultérieurement été ouverte.
Par ailleurs, la demande d’extension de la liquidation judiciaire du Comité d’Organisation à la FFLDA sollicitée par lettre du 12 juin 2020 a été rejetée, un plan de sauvegarde de la FFLDA ayant déjà été adopté par jugement du 3 février 2020.
Ainsi, et alors que la société Playground savait, comme le confirment ses factures établies à l’ordre du Comité d’Organisation, qu’elle contractait avec ce dernier et que la convention liant le CO à la FFLDA distingue les rôles respectifs de chacune de ces deux entités, l’appelante échoue à démontrer l’existence d’une solidarité de fait entraînant l’obligation pour l’intimée de supporter les conséquences financières de l’activité du Comité d’Organisation.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté la société Playground de l’ensemble de ses demandes.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
La société Playground succombant à l’action, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles et statuant de ces chefs en cause d’appel, elle sera aussi condamnée aux dépens, dont distraction au profit de Maître François Balique, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. Il apparaît en outre équitable de la condamner à payer à la FFLDA la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
DECLARE irrecevable l’appel incident, formé par la Fédération Française de Lutte et de Disciplines Associées, relatif à une exception d’incompétence au profit de la juridiction administrative rejetée par ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Créteil du 3 décembre 2020 ;
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions et y ajoutant,
CONDAMNE la société Playground aux dépens, dont distraction au profit de Maître François Balique ;
CONDAMNE la société Playground à payer à la Fédération française de Lutte et de Disciplines Associées la somme de 3.000 euros le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA CONSEILLÈRE FAISANT
FONCTION DE PRÉSIDENT