Le statut du gérant de boutique Jennyfer

Le statut du gérant de boutique Jennyfer

conseil juridique IP World

Le contrat de commission affiliation du réseau Jennifer ne s’analyse pas en un contrat de travail. 


Le Contrat de commission affiliation


Si à l’examen d’un contrat de commission affiliation il peut être inféré que la gérante a exercé son activité au sein d’un service organisé dont la société commettante déterminait unilatéralement les conditions d’exécution, y compris en ce qui concerne l’outil informatique utilisé, ce qui constitue un indice de l’existence du lien de subordination allégué, la juridiction relève aussi que la convention ayant lié les parties rappelle que l’affilié est un commerçant indépendant et que le contrat exclut toute relation de subordination.

L’obligation d’exclusivité

L’obligation d’exclusivité, dont le non-respect ouvre droit pour le commettant à pénalité, et l’obligation de non-concurrence constituent des indices d’une relation salariée mais ne suffisent pas à démontrer son existence.

L’information pré-contractuelle 

Ces obligations ne sont pas propres aux relations de travail salariées. C’est ainsi par exemple que l’article L. 330-3 du code de commerce relatif à l’information pré-contractuelle dispose :


« Toute personne qui met à la disposition d’une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d’elle un engagement d’exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l’exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties, de fournir à l’autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s’engager en connaissance de cause.
Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l’ancienneté et l’expérience de l’entreprise, l’état et les perspectives de développement du marché concerné, l’importance du réseau d’exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités.


Lorsque le versement d’une somme est exigé préalablement à la signature du contrat mentionné ci-dessus, notamment pour obtenir la réservation d’une zone, les prestations assurées en contrepartie de cette somme sont précisées par écrit, ainsi que les obligations réciproques des parties en cas de dédit.


Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat, ou, le cas échéant, avant le versement de la somme mentionnée à l’alinéa précédent. »

 

République française
Au nom du peuple français

 

ARRÊT N°
CE/SMG
COUR D’APPEL DE BESANÇON
ARRÊT DU 12 JANVIER 2023
CHAMBRE SOCIALE
Audience publique
du 08 février 2022
N° de rôle : N° RG 21/00242 – N° Portalis DBVG-V-B7F-EKYC
S/appel d’une décision
du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de VESOUL
en date du 12 janvier 2021
Code affaire : 80O
Demande de requalification du contrat de travail
 
APPELANTE
 
Madame [D] [K], demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Cédric MENDEL, avocat au barreau de DIJON, absent
 
INTIMEE
 
S.A.S. STOCK J BOUTIQUE JENNYFER sise [Adresse 4]
représentée par Me Laurent HAENNIG, Postulant, avocat au barreau de BELFORT absent et par Me Annaël BASHAM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, présente
 
COMPOSITION DE LA COUR :
 
Lors des débats du 8 Février 2022 :
Monsieur Christophe ESTEVE, Président de Chambre
Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, Conseiller
Mme Florence DOMENEGO, Conseiller
qui en ont délibéré,
Mme MERSON GREDLER, Greffière lors des débats
Les parties ont été avisées de ce que l’arrêt sera rendu le 12 Avril 2022 par mise à disposition au greffe. A cette date la mise à disposition de l’arrêt a été prorogé au 17 mai 2022, au 14 juin 2022, au 12 juillet 2022, au 27 septembre 2022, au 11 octobre 2022 , au 15 novembre 2022, au 20 décembre 2022, au 3 janvier 2023, au 10 janvier 2023 et au 12 janvier 2023.
**************
Statuant sur l’appel interjeté le 8 février 2021 par Mme [D] [K] d’un jugement rendu le 12 janvier 2021 par le conseil de prud’hommes de Vesoul, qui dans le cadre du litige l’opposant à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER a :
– débouté Mme [D] [K] de l’ensemble de ses demandes,
– condamné Mme [D] [K] à verser à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER la somme de 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,
Vu les dernières conclusions transmises le 29 avril 2021 par Mme [D] [K], appelante, qui demande à la cour de :
– infirmer le jugement entrepris,
à titre principal,
– requalifier le contrat de commission affiliation en contrat de travail,
– condamner la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER à lui verser les sommes suivantes :
– 21 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 4 920,52 euros nets à titre d’indemnité de licenciement,
– 10 128 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 1 012,80 euros au titre des congés payés afférents,
– 123 037 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de 2016 à 2019 outre la somme de 12 303,7 euros à titre de congés payés afférents,
– 20 256 euros nets à titre d’indemnité de travail dissimulé,
à titre subsidiaire,
– requalifier le contrat de commission affiliation en contrat de gérance de succursale,
– condamner la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER à lui verser les sommes suivantes :
– 21 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 4 920,52 euros nets à titre d’indemnité de licenciement,
– 10 128 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 1 012,80 euros au titre des congés payés afférents,
– 123 037 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de 2016 à 2019 outre la somme de 12 303,7 euros à titre de congés payés afférents,
– 20 256 euros nets à titre d’indemnité de travail dissimulé,
en tout état de cause,
– condamner la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER à lui remettre les documents légaux rectifiés correspondant aux condamnations prononcées,
– condamner la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER aux entiers dépens de première instance et d’appel,
Vu les dernières conclusions transmises le 22 juillet 2021 par la société par actions simplifiée STOCK J BOUTIQUE JENNYFER, intimée, qui demande à la cour de :
– confirmer le jugement entrepris,
à titre principal :
– constater l’absence des conditions cumulatives d’un contrat de travail et, spécialement, l’absence de tout lien de subordination hiérarchique et juridique entre la société JENNYFER et Mme [K],
– constater l’absence des conditions cumulatives d’un contrat de gérance de succursale,
– débouter Mme [D] [K] de toutes ses demandes,
à titre subsidiaire :
– constater que Mme [D] [K] ne démontre pas avoir subi un préjudice du fait de la rupture de son contrat de travail ou de son contrat de gérance de succursale qui ne soit pas couvert par les trois mois de salaire de l’article L. 1253-3 du code du travail et limiter toute éventuelle condamnation en conséquence,
– constater que Mme [D] [K] ne démontre pas que la société JENNYFER ait eu l’intention de dissimuler une quelconque activité salariale,
en tout état de cause et statuant à nouveau :
– condamner Mme [D] [K] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Vu l’ordonnance de clôture en date du 20 janvier 2022,
La cour faisant expressément référence aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties,
 
SUR CE
 
EXPOSE DU LITIGE
 
La société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER et la SARL MSN BOUTIC représentée par sa gérante Mme [D] [K] ont conclu le 26 novembre 2013, pour une durée de cinq ans, un contrat de commission affiliation portant sur l’exploitation par la société MSN BOUTIC d’un magasin à l’enseigne JENNYFER situé [Adresse 1] à [Localité 5].
 
En contrepartie de la vente des produits JENNYFER qui demeuraient la
propriété 
exclusive du commettant, le contrat prévoyait que l’affilié percevrait une commission calculée en fonction du chiffre d’affaires hors taxes par année de référence, le premier taux de commission étant fixé à 40% pour un chiffre d’affaires entre 0 et 650.000 euros.
 
A l’issue du terme prévu le 26 novembre 2018, les relations contractuelles entre les parties se sont poursuivies tacitement conformément à l’article 4 du contrat, qui stipule notamment :
 
« En cas de poursuite des relations entre les parties au-delà du terme du contrat et hors signature d’un nouvel accord entre elles, le présent contrat se poursuivra dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée résiliable à tout moment par l’une ou l’autre des parties moyennant le respect d’un préavis raisonnable de six mois. »
 
Par courrier du 19 février 2019, la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER a notifié à la société MSN BOUTIC la résiliation du contrat de commission affiliation les liant, à effet au 25 août 2019.
 
En vue de la fermeture du magasin, la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER lui a ensuite envoyé le rétro-planning.
 
Considérant que la relation contractuelle ne s’était pas inscrite uniquement dans un cadre commercial mais que compte tenu de ses conditions de travail elle était en réalité engagée dans le cadre d’une relation salariée, Mme [D] [K] a saisi le conseil de prud’hommes de Vesoul le 21 janvier 2020 pour voir requalifier la relation contractuelle en contrat de travail ou subsidiairement en contrat de gérance de succursale.
 
Entre-temps, par acte d’huissier signifié le 21 novembre 2019, la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER a attrait la société MSN BOUTIC devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris pour obtenir le paiement d’une provision de 29 516,22 euros à parfaire, au titre des factures échues et impayées, ainsi que la restitution sous astreinte des produits JENNYFER, du matériel informatique et du matériel lui appartenant, demandes auxquelles il a été fait droit par ordonnance du 12 février 2020.
 
L’appel interjeté par la société MSN BOUTIC à l’encontre de cette décision a fait l’objet d’une radiation sur le fondement de l’article 526 ancien du code de procédure civile, par ordonnance rendue le 29 septembre 2020 par le délégataire du premier président de la cour d’appel de Paris.
C’est dans ces conditions que le jugement entrepris a été rendu le 12 janvier 2021.
 
MOTIFS
 
1- Sur la nature de la relation contractuelle ayant lié les parties :
Mme [D] [K] sollicite à titre principal la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail et, à titre subsidiaire, sa requalification en contrat de gérance de succursale.
 
1-1- Sur l’existence d’un contrat de travail :
 
Le contrat de travail se définit par l’engagement d’une personne à travailler pour le compte et sous la direction d’une autre moyennant rémunération, le lien de subordination juridique ainsi exigé se caractérisant par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
 
Le fait que le travail soit effectué au sein d’un service organisé peut constituer un indice de l’existence d’un lien de subordination lorsque l’employeur en détermine unilatéralement les conditions d’exécution.
 
L’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité.
 
Au cas présent, il n’existe aucun contrat de travail apparent entre les parties.
Il appartient dès lors à Mme [D] [K] de démontrer la réalité du contrat de travail dont elle se prévaut.
 
A ce stade, la cour relève que si le contrat de commission affiliation a été signé entre la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER (le commettant) et la SARL MSN BOUTIC (l’affiliée) représentée par sa gérante, pour autant il a été conclu intuitu personae ainsi qu’il ressort de plusieurs de ses clauses :
 
– page 14, paragraphe 6.4 relatif au droit d’entrée : « Il est entendu que pour l’application du présent paragraphe les parties conviennent de considérer la qualité intuitu personae du contrat de commission-affiliation en rapport avec la personne physique gérante ou dirigeante de la société affiliée. » ;
– page 19, paragraphe 9.3 intitulé « direction de la boutique ‘ gestion régulière et indépendante » : « L’affilié doit personnellement assurer l’exploitation effective de l’activité de la boutique. » ;
– page 33, paragraphe 14 intitulé « intuitu personae – transfert » : « Afin de garantir l’image de marque de son réseau, le contrat est nécessairement conclu par STOCK J en considération de la répartition du capital de l’affilié et de la direction effective de la société affiliée telle que précisée en annexe 3, au moment de la signature. (‘). L’affilié ne pourra céder à titre onéreux ou gratuit, ni transmettre, à un titre quelconque, le bénéfice du contrat. Il ne pourra se substituer une autre personne dans l’exécution de ses engagements. Il y est tenu personnellement. ».
 
Il en résulte que c’est en réalité la personne même de la gérante qui était déterminante dans l’exécution de l’activité confiée, la société affiliée n’étant ainsi qu’une société interposée.
 
Mme [D] [K] expose que la qualification de contrat de travail suppose la réunion de trois critères cumulatifs, à savoir une prestation de travail qui doit être effective et personnelle, une rémunération dont l’absence contribue à exclure la qualité de salarié et un lien de subordination entre les parties.
 
S’agissant des deux premiers critères, elle fait valoir que sa prestation de travail est indiscutable dans la mesure où elle était chargée de gérer la vente de vêtements et d’accessoires de mode de la marque JENNYFER et que sa rémunération était versée sous forme de commissions.
 
Si au regard des écrits et des productions des parties il est indéniable que Mme [D] [K] a effectué une prestation de travail durant toute la relation contractuelle, en revanche les premiers juges ont fait observer avec pertinence que la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER n’intervenait aucunement dans sa rémunération personnelle. En effet, cette dernière lui versait des commissions calculées sur le chiffre d’affaires, mais ces commissions devaient permettre également à la gérante de la SARL MSN BOUTIC de financer les frais de fonctionnement courants de la boutique et surtout de rémunérer ses salariés (au nombre de deux selon l’annexe 2 à l’avenant « redevances SACEM et SPRE » au contrat de commission affiliation), de sorte qu’en fonction de ces charges Mme [D] [K] fixait elle-même sa rémunération ou le montant de ses prélèvements personnels, sans que l’entreprise commettante n’intervienne à quelque titre dans la répartition des commissions versées.
 
S’agissant du troisième critère, élément essentiel du contrat de travail, Mme [D] [K] soutient d’abord que la preuve du lien de subordination résulte des clauses mêmes du contrat de commission affiliation :
 
– l’article 3 relatif à l’exclusivité et au territoire :
 
Cette clause prévoit que l’affilié est soumis à une exclusivité des produits JENNYFER et n’a pas la possibilité d’afficher ou d’apposer tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la boutique des éléments promotionnels ou publications autres que ceux relatifs à la marque et aux produits JENNYFER.
 
– l’article 7 relatif à l’aménagement de la boutique :
 
Cette clause prévoit que le plan d’aménagement de la boutique est réalisé par un architecte fournisseur agréé par la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER et que celle-ci transmet la liste de ses fournisseurs agréés, parmi lesquels à l’exception du mobilier développé pour l’enseigne, l’affilié est libre de choisir les entreprises de travaux qu’il missionne pour procéder ensuite aux travaux d’aménagement de la boutique dans le respect des standards de JENNYFER.
 
– l’article 15 relatif à la clause de non-concurrence :
 
Il stipule en particulier que « pendant toute la durée du contrat, interdiction est faite à l’affilié d’exploiter, de créer, directement ou indirectement, d’autres magasins avec une enseigne ou marque directement concurrente à celle de STOCK J, autres que ceux des marques qu’il possède à ce jour ».
En cas de violation de ces dispositions et sans préjudice du droit de résilier le contrat, il est prévu que l’affilié sera tenu, à titre de réparation forfaitaire du préjudice en résultant, au paiement d’une indemnité égale à 50% du chiffre d’affaires mensuel moyen réalisé au cours des six derniers mois, avec un minimum de 20 000 euros.
 
En outre, à la cessation du contrat, quelle qu’en soit la cause, l’article 15 stipule que l’affilié ne pourra exercer dans la boutique, ainsi que dans une zone géographique de trois kilomètres, une activité affiliée à une enseigne de renommée internationale similaire, activité résultant de l’adhésion à une organisation, un groupement commercial ou un organisme de distribution concurrençant directement STOCK J ou un des membres de son réseau, pendant une période d’une année, « conformément au Règlement d’exemption européen du 22 décembre 1999 ».
 
Mme [D] [K] considère ces clauses qui lui sont imposées comme contraires à l’essence même du contrat de commission affiliation, qui autorise en principe l’affilié à contracter avec d’autres enseignes en sus de l’entreprise commettante, et révélatrices de l’existence d’un contrat de travail.
 
Toutefois l’obligation d’exclusivité, dont le non-respect ouvre droit pour le commettant à pénalité, et l’obligation de non-concurrence constituent des indices d’une relation salariée mais ne suffisent pas à démontrer son existence.
 
Il doit en effet être relevé que ces obligations ne sont pas propres aux relations de travail salariées.
C’est ainsi que l’article L. 330-3 du code de commerce relatif à l’information pré-contractuelle dispose :
« Toute personne qui met à la disposition d’une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d’elle un engagement d’exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l’exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties, de fournir à l’autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s’engager en connaissance de cause.
Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l’ancienneté et l’expérience de l’entreprise, l’état et les perspectives de développement du marché concerné, l’importance du réseau d’exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités.
Lorsque le versement d’une somme est exigé préalablement à la signature du contrat mentionné ci-dessus, notamment pour obtenir la réservation d’une zone, les prestations assurées en contrepartie de cette somme sont précisées par écrit, ainsi que les obligations réciproques des parties en cas de dédit.
Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat, ou, le cas échéant, avant le versement de la somme mentionnée à l’alinéa précédent. »
Au cas présent, ce document pré-contractuel a précisément été remis à la gérante de la SARL MSN BOUTIC dans le délai légal, ainsi qu’il ressort de l’introduction au contrat de commission affiliation.
 
En outre, ces obligations découlent de l’entrée dans le réseau de distribution exploité par la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER et de la circonstance que la boutique porte l’enseigne JENNYFER, le commettant concédant en contrepartie à l’affiliée l’exclusivité sur un territoire contractuellement défini, ici la commune de [Localité 5], ainsi que le droit exclusif d’utiliser sur ce territoire les droits de <
propriété
>
<
intellectuelle
liés au concept JENNYFER pour la vente des produits.
Rien n’interdit de prévoir de telles obligations réciproques dans le cadre d’un contrat de commission affiliation.
 
Si à l’examen du contrat et des productions des parties il peut être inféré que la gérante de la SARL MSN BOUTIC a exercé son activité au sein d’un service organisé dont la société commettante déterminait unilatéralement les conditions d’exécution, y compris en ce qui concerne l’outil informatique utilisé, ce qui constitue un indice de l’existence du lien de subordination allégué, la cour relève aussi que la convention ayant lié les parties rappelle que l’affilié est un commerçant indépendant et que le contrat exclut toute relation de subordination.
De surcroît, l’article 9.3 du contrat de commission affiliation stipule :
« L’affilié consacrera une part appropriée de son activité à l’exploitation et à la direction effective de la boutique et à employer un personnel qualifié en effectif suffisant (dont il sera seul responsable) pour exploiter sa boutique conformément aux dispositions du présent contrat et en respectant tout particulièrement la cohésion et l’image de marque du réseau à l’égard de la clientèle.
Le non-respect des standards, définis en article 1 « Définitions », pourra être constaté par STOCK J qui en informera l’affilié afin qu’il remédie à la situation dans les plus brefs délais.
L’affilié fixera librement les horaires d’ouverture et les périodes de fermeture de sa boutique, dans le respect des lois et réglementations localement applicables et en tenant compte de la nécessité d’une bonne exploitation de sa boutique, des usages inhérents à son activité et de l’environnement commercial de la boutique.
(…)
L’affilié fera son affaire personnelle de la sélection et du recrutement des personnes qui l’aideront dans son activité, toutes personnes amenées à être au contact de la clientèle devront être choisies en cohérence avec l’image du réseau JENNYFER. L’affilié recrute, emploie et rémunère son personnel sous sa responsabilité exclusive en termes d’obligations fiscales et sociales. (…) »
Il résulte également du contrat que si l’entreprise commettante organise les opérations promotionnelles et les campagnes publicitaires, l’affilié peut aussi, de sa propre initiative avec l’approbation préalable et écrite de STOCK J, programmer une opération de communication locale spécifique.
Enfin, en son article 22, le contrat prévoit diverses clauses pénales, en cas de retard de paiement de l’affilié, en cas de vente de produits en violation des stipulations relatives au territoire et aux exclusivités, ainsi qu’en cas de divulgation constatée concernant le concept JENNYFER.
 
Considérant ses clauses contractuelles prises dans leur ensemble, le contrat de commission affiliation ayant lié les parties ne s’analyse pas en un contrat de travail, contrairement à l’argumentation de l’appelante.
 
Cependant, par-delà la convention des parties, il appartient à la cour de rechercher les conditions de fait dans lesquelles l’activité litigieuse a été exercée.
A cet égard, Mme [D] [K] soutient essentiellement que la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER lui donnait continuellement des ordres et des directives, lui imposait des plannings, contrôlait son travail et organisait des formations auxquelles elle était contrainte de participer.
 
Mais les courriels produits à l’appui de ces allégations sont pour la plupart des courriels circulaires adressés à de nombreux responsables de magasin et non spécifiquement à Mme [D] [K]. Certains d’entre eux concernent même une autre région, d’autres sont envoyés tant aux magasins affiliés qu’aux magasins mixtes et aux magasins succursales.
 
Il ne ressort pas de ces documents que Mme [D] [K] recevait des ordres et des directives. S’agissant des quelques courriels communiqués qui lui sont personnellement destinés, ils s’inscrivent dans les rapports habituels entre un commettant et un commissionnaire, similaires à ceux entre un donneur d’ordre et son prestataire de services, et ne sont en tout état de cause pas significatifs.
Il n’est pas davantage rapporté la preuve que l’intéressée était soumise à des horaires de travail, ni à des horaires d’ouverture et de fermeture. A cet égard, rien n’établit que les conditions effectives dans lesquelles Mme [D] [K] a exercé son activité n’étaient pas conformes aux prévisions contractuelles ci-dessus rappelées.
 
Les quelques comptes rendus de visite du « directeur régional » fournis, qui peuvent contenir le cas échéant des recommandations en rapport avec le concept et les standards de la marque, sont insuffisants pour caractériser le lien de subordination dont se prévaut l’appelante. Il ressort d’ailleurs du compte rendu de visite du 2 août 2018 communiqué en pièce n° 23 que la présence de Mme [D] [K] lors de ces visites n’était pas obligatoire, la visite considérée ayant été effectuée en présence d’une vendeuse [O]. Il est à noter que le directeur régional le transmet le 6 août 2018 avec ce simple commentaire, bien peu contraignant : « Bonjour. Ci-joint le compte rendu de ma visite sur votre magasin. Je reste à votre disposition pour toutes informations complémentaires. Bonne journée. [B] ».
 
Mme [D] [K] ne justifie pas non plus qu’elle devait rendre compte de ses absences ou de ses congés.
 
Il n’est pas établi que les formations organisées par l’entreprise commettante au cours de la relation contractuelle étaient, dans les faits, obligatoires.
S’agissant des conférences téléphoniques, il est uniquement justifié de celle du 6 février (l’année n’est pas indiquée), par un courriel adressé aux magasins de la région faisant état de la « présence indispensable de toutes les RM ».
Il résulte des développements qui précèdent qu’aucun élément ne permet ne serait-ce que de supposer que l’entreprise commettante s’immisçait dans l’organisation du travail au sein de la boutique, Mme [D] [K] gérant manifestement son personnel comme elle l’entendait et par voie de conséquence son propre emploi du temps.
 
Les contraintes dont Mme [D] [K] fait état, relatives notamment au planning des démarques et des soldes, aux « flyers », aux spots publicitaires, aux changements de vitrine, aux inventaires, aux stocks, sont inhérentes à ses obligations de commissionnaire affiliée exclusive et ne sauraient caractériser le lien de subordination allégué.
 
Quant aux objectifs en termes de chiffre d’affaires, fixés jour par jour sous forme de tableaux par l’entreprise commettante au regard des pièces n° 31 et 32 (qui concernent les mois de mai et juin 2019), il n’est pas justifié de leur caractère contraignant ni des suites données quand ils ne sont pas atteints.
Il s’ensuit que Mme [D] [K] manque à rapporter la preuve de l’existence du lien de subordination allégué et donc du contrat de travail dont elle se prévaut.
1-2- Sur la qualité de gérante de succursale :
Aux termes de l’article L. 7321-2 du code du travail, est gérant de succursale notamment toute personne dont la profession consiste essentiellement à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise.
Si le local n’a pas été fourni par le commettant, celui-ci l’a en revanche agréé.
En effet, outre le fait qu’il est expressément visé en annexe 5 du contrat, laquelle comporte l’adresse de la boutique [Adresse 2] à [Localité 5] et le territoire d’exclusivité (la ville de [Localité 5]), le local correspond aux caractéristiques du réseau de distribution JENNYFER, en termes d’emplacement et d’agencement.
C’est ainsi que l’article 6.1 du contrat de commission affiliation stipule :
« Le réseau est constitué de boutiques, définies comme un local à usage commercial situé, soit en rez-de-chaussée et s’ouvrant sur la rue, soit dans une galerie marchande ou galerie d’un centre commercial et disposant de vitrines, soit dans un « Retail Park », dans laquelle l’activité de vente de produits JENNYFER est exercée sous l’enseigne JENNYFER ; le tout exploité dans des conditions uniformes en particulier pour la décoration, les aménagements, les signes distinctifs de la marque JENNYFER, les méthodes opérationnelles et les procédures utilisées. »
A cette fin, il résulte de l’article 7.1.1 du contrat que le plan d’aménagement de la boutique est nécessairement réalisé par un architecte agréé par la société STOCK J.
En revanche, il ne ressort d’aucun élément que l’entreprise commettante ait imposé des prix de vente à la société MSN BOUTIC, par exemple par la pratique des prix pré-étiquetés sur les articles vendus, le contrat en son article 12.1 prévoyant au contraire que dans le cadre de son assistance, STOCK J « communiquera à l’affilié des prix maximum de vente recommandés, incluant les périodes de soldes et de promotions, pour chaque produit afin d’assurer l’homogénéité de la politique commerciale et le positionnement de l’image de marque » et que « l’affilié fera ses meilleurs efforts pour observer la politique de vente de STOCK J ».
Les deux conditions prévues par ce texte étant cumulatives et la seconde n’étant pas remplie, le contrat liant les parties ne peut s’analyser en un contrat de gérance de succursale, de sorte qu’il ne peut être fait droit à la demande subsidiaire de requalification en ce sens.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
2- Sur les frais irrépétibles et les dépens :
La décision attaquée sera également confirmée en ce qu’elle a statué sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance.
En équité, il ne sera pas fait application, à hauteur de cour, de l’article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque.
Mme [D] [K], qui succombe, supportera les dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour ;
Condamne Mme [D] [K] aux dépens d’appel.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le douze janvier deux mille vingt trois et signé par Christophe ESTEVE, Président de chambre, et Mme MERSON GREDLER, Greffière.
 
LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE,

 


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