Le recours à Docusign de nouveau validé

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Le recours à Docusign de nouveau validé
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Le recours à Docusign a été de nouveau validé pour établir l’existence d’un contrat de prêt à la consommation.

Aux termes des dispositions de l’article 1366 du code civil «l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité’.

Il ressort des dispositions de l’article 1367 du même code que «la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie son auteur.

Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l’authenticité à l’acte. Lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat».

L’article 1er du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique prévoit que «la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en œuvre une signature électronique qualifiée. Est une signature électronique qualifiée une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement susvisé et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement».

Résumé de l’affaire : Monsieur [Y] [T] [C] et Madame [M] [H] ont accepté un prêt de 11.890 € pour l’achat d’un véhicule, remboursable en 72 mensualités à un taux de 5,07 %. La Société SANTANDER CONSUMER FINANCE, successeur de la banque initiale, a assigné le couple en raison de défauts de paiement, demandant le remboursement de 10.934,22 € avec intérêts. Monsieur [Y] [T] [C] a déposé un dossier de surendettement, entraînant un effacement total de ses dettes, tandis que Madame [M] [H] a également déposé un dossier, avec des mesures de rééchelonnement de sa dette recommandées. L’affaire a été examinée lors d’une audience où la banque a demandé le déboutement des défendeurs et le paiement de la somme due, tandis que les défendeurs ont contesté la demande, arguant que Madame [M] [H] n’était pas engagée par le crédit et que la banque avait manqué à son obligation de vigilance. L’affaire a été mise en délibéré pour décision ultérieure.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

19 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux
RG n°
23/03103
Du 19 septembre 2024

53B

SCI/

PPP Contentieux général

N° RG 23/03103 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YH7R

S.A. SANTANDER CONSUMER BANQUE

C/

[M] [H], [Y] [T] [C]

– Expéditions délivrées à

– FE délivrée à

Le 19/09/2024

Avocats : la SELARL [Localité 8]-ADER / OLHAGARAY & ASSOCIES
Me Ahmad SERHAN

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
[Adresse 2]

JUGEMENT EN DATE DU 19 septembre 2024

JUGE : Madame Sandrine SAINSILY-PINEAU, Magistrate

GREFFIER : Madame Françoise SAHORES

DEMANDERESSE :

S.A. SANTANDER CONSUMER BANQUE
RCS de Nanterre n° 915 062 012
[Adresse 5]
[Localité 7]

représentée par Me Fabien DUCOS-ADER, Avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEURS :

Madame [M] [H]
née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 9]
[Adresse 3]
[Localité 6]
aide juridictionnelle totale C330632023005893

Monsieur [Y] [T] [C]
né le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 11]
[Adresse 3]
[Localité 6]
aide juridictionnelle totale C330632023005896

représentés par Me Ahmad SERHAN, Avocat au barreau de BORDEAUX

DÉBATS :

Audience publique en date du 13 Juin 2024

PROCÉDURE :

Articles 480 et suivants du code de procédure civile.

QUALIFICATION DU JUGEMENT :

Le jugement contradictoire est rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Monsieur [Y] [T] [C] et Madame [M] [H] ont accepté le 20 avril 2021 une offre préalable de prêt affecté à l’achat d’un véhicule, d’un montant de 11.890 €, remboursable en 72 échéances mensuelles au taux de 5,07 % (taux annuel effectif global : 5,20 %), émise par la Société SANTANDER CONSUMER BANQUE.

Arguant du défaut de paiement des échéances ayant entraîné la déchéance du terme, la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE, venant aux droits de la Société SANTANDER CONSUMER BANQUE, a, par acte délivré le 31 août 2023, fait assigner Monsieur [Y] [T] [C] et Madame [M] [H] devant le juge des contentieux de la protection de ce siège, principalement, aux fins de les voir condamner in solidum à lui payer la somme de 10.934,22 € augmentée des intérêts au taux contractuel.

Monsieur [Y] [T] [C] a, également, déposé un dossier de surendettement. Suivant décision en date du 15 septembre 2022 la Commission de surendettement des particuliers de la GIRONDE a décidé d’imposer un effacement total de ses dettes après validation de la mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

Madame [M] [H] , également, déposé un dossier de surendettement déclaré recevable le 26 octobre 2023. La Commission de surendettement des particuliers de la GIRONDE a préconisé des mesures imposées entrées en vigueur le 6 mars 2024, prévoyant le réechelonnement de la dette de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en 74 mensualités de 150,88 € au taux de 0%.

L’affaire a été retenue à l’audience du 13 juin 2024, après plusieurs renvois justifiés par la nécessité pour les parties d’échanger leurs conclusions et leurs pièces.

A l’audience, la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE, représentée par son conseil, demande au juge des contentieux de la protection, sur le fondement des dispositions des articles 1103 et 1104 du code civil :
– de débouter Madame [M] [H] et Monsieur [Y] [T] [C] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
– de la déclarer recevable et bien fondée en son action,
– y faisant droit :
– de condamner Madame [M] [H] à lui payer la somme de 10.938,22 € selon décompte en date du 3 novembre 2022 augmentée des intérêts au taux contractuel depuis la date de ce décompte jusqu’à la date du règlement effectif des sommes dues,
– d’ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
– de condamner Madame [M] [H] à lui payer une indemnité de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner Madame [M] [H] aux entiers dépens.

En défense, Madame [M] [H] et Monsieur [Y] [T] [C], représentés par leur conseil demandent au juge des contentieux de la protection, de :
– déclarer irrecevable et en tout état de cause, mal fondée la demande de la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE à l’égard de Monsieur [Y] [T] [C],
– juger que Madame [M] [H] n’est pas engagée par le crédit à la consommation souscrit par Monsieur [Y] [T] [C],
– subsidiairement : de dire que la responsabilité de la banque est engagée pour avoir manqué à son obligation de vigilance à l’égard de Madame [M] [H] et la condamner au paiement de la même somme que celle qui sera mise à sa charge et ordonner la compensation entre les deux sommes,
– sur le dossier de surendettement de Madame [M] [H] et très subsidiairement : de reprendre les conditions d’apurement de la dette fixée par la commission de surendettement.

Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.

L’affaire a été mise en délibéré au 19 septembre 2024.

La présente décision, susceptible d’appel, sera contradictoire en application des dispositions de l’article 467 du code de procédure civile.

MOTIFS :

A titre liminaire, il convient de rappeler que l’article R. 632-1 du code de la consommation précise que : “ le juge peut relever d’office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte en outre d’office, après avoir recueilli les observations des parties, l’application d’une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat”.

La créance invoquée par la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE sera donc examinée au regard des dispositions du code de la consommation qui la régissent sur lesquelles elle a été invitée à s’expliquer à l’audience.

Sur la recevabilité de l’action en paiement :

Aux termes de l’article R.312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par :
▸ le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;
▸ ou le premier incident de paiement non régularisé ;
▸ ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable ;
▸ ou le dépassement, au sens du 11° de l’article L. 311-1, non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L. 312-93.

En l’espèce, il ressort des documents produits que la première échéance impayée non régularisée se situe au 15 mai 2022. L’action en paiement, introduite dans le délai de deux ans, est dès lors recevable.

Sur les demandes concernant Monsieur [Y] [T] [C] :

Il y a lieu de constater que la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE prend acte de la décision d’effacement des dettes de Monsieur [Y] [T] [C] à la suite de la décision de rendue le 15 septembre 2022 par la Commission de surendettement des particuliers de la GIRONDE imposant une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire et ne formule aucune demande à son encontre.

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de statuer sur la demande d’irrecevabilité de Monsieur [Y] [T] [C].

Sur la validité du contrat de prêt :

Aux termes des dispositions de l’article 1366 du code civil «l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité’.

Il ressort des dispositions de l’article 1367 du même code que «la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l’authenticité à l’acte. Lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat».

L’article 1er du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique prévoit que «la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en œuvre une signature électronique qualifiée. Est une signature électronique qualifiée une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement susvisé et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement».

Madame [M] [H] conteste avoir signé électroniquement les documents présentés par l’établissement bancaire. Elle soutient n’avoir été identifiée que par l’adresse mail «[Courriel 10] dont Monsieur [Y] [T] [C] est titulaire et qui a été utilisée pour les deux emprunteurs. Elle soutient qu’aucune autre vérification n’a été faite par son téléphone portable ni par face à face. Elle admet avoir déclaré cette dette à la BANQUE DE FRANCE, dans le cadre de la procédure de surendettement puisqu’elle devait déclarer toutes ses créances même celles qui étaient contestées, d’autant que la présente procédure avait déjà été initiée. Enfin, elle fait remarquer que le véhicule acquis ne lui a jamais appartenu, le bon de commande et la carte grise étant au nom de Monsieur [Y] [T] [C].

La Société SANTANDER CONSUMER FINANCE fait valoir le bien fondé de son action à l’encontre de Madame [M] [H]. Elle constate, d’ailleurs, que Madame [M] [H] a déclaré à l’état du passif sa créance, admettant dès lors que cette dette lui est opposable. Elle affirme qu’elle a bien signé le contrat de prêt litigieux, étant souligné que les emprunteurs ont communiqué des numéros de téléphone distincts lesquels étaient nécessaires à la signature du contrat puisque les codes d’identification indispensables à la signature du contrat leur a été adressé par ce mode. Elle affirme disposer d’un procédé fiable d’identification garantissant le lien de la signature identifiant le signataire avec l’acte auquel la signature s’attache et d’un mode sécurisé permettant une signature électronique.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats, plus spécialement de l’offre de contrat de crédit affecté que les emprunteurs ont déclaré la même adresse email mais deux numéros de téléphone portable différents. Or, cette offre de prêt signale que le «code d’authentification indispensable à la signature électronique du contrat sera adressé au numéro de portable ici mentionné» et que «le contrat signé électroniquement sera adressé à l’adresse mail indiquée. Cette information est obligatoire si vous acceptez les échanges par voie électronique». Ainsi et contrairement aux allégations de Madame [M] [H], cette dernière n’a pas été identifiée par l’adresse mail de Monsieur [Y] [T] [C] mais par un numéro de téléphone portable dont elle ne conteste pas en être titulaire. Il s’ensuit qu’il importe peu que les adresses email soient identiques pour les deux emprunteurs, puisqu’elle n’était destinée qu’à l’envoi du contrat déjà signé électroniquement.

En revanche, la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE produit :
– un document intitulé «enveloppe de preuve Service Protect&Sign» créée par la Société DOCUSIGN en sa qualité de de prestataires de services de certification électronique pour les besoins de la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE attestant de la signature électonique par Madame [M] [H] le 20 avril 2021 à 16:11:03, la référence de la transaction étant mentionnée. Ce document est complété par le «Fichier de preuve Protect&Sign», également créé par la Société DOCUSIGN permettant de détailler l’ensemble des opérations de signatures et de les rattacher à Madame [M] [H], en utilisant le code qui lui était personnel et qui lui avait été précédemment adressé par le biais de son téléphone portable,
– l’attestation de conformité établie par la Société ARKHINEO, le 25 octobre 2022, pour le compte de la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE concernant l’archivage de ce dossier de preuve : «atteste que l’archive dont les caractéristiques sont les suivantes est bien conservée par ses soins au sein de son Système d’Archivage Electronique à vocation probatoire. L’intégrité de cette archive a été vérifiée et validée à la création de la présente attestation». Cette attestation permet d’établir la fiabilité du procédé de signature électronique et l’intégrité de l’acte signé,
– un document établi par LSTI indiquant que DOCUSIGN FRANCE est déclaré conforme au règlement européen 910/2014 du 23 juillet 2014 du parlement européen et du conseil sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur pour «le service de : Création de certificats qualifiés de signature électronique».

La Société SANTANDER CONSUMER FINANCE justifie de la remise des cartes nationales d’identité par chacun des signataires et de leur avis d’imposition, lui permettant ainsi de s’assurer de leur identité.

L’ensemble de ces éléments permet d’établir que Madame [M] [H] a bien signé de façon électronique le contrat de prêt par un mode sécurisé, la fiabilité du procédé utilisé étant présumé.
Sur la demande de nullité du contrat de prêt :

Il est indifférent que le véhicule acquis n’appartienne pas à Madame [M] [H], dès lors que les pièces produites permettent de prouver qu’elle a signé le contrat de prêt affecté avec Monsieur [Y] [T] [C], son compagnon.

Sur la demande en paiement :

L’article L.312-39 du code la consommation prévoit qu’«en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret», égale à 8% du capital restant dû à la date de la défaillance.

L’article L.312-38 du même code précise qu’aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur en cas de défaillance prévu par cet article. Toutefois, le prêteur peut réclamer à l’emprunteur, en cas de défaillance de celui-ci, le remboursement

des frais taxables qui lui ont été occasionnés par cette défaillance, à l’exclusion de tout remboursement forfaitaire de frais de recouvrement.

Cependant, en application de l’article L.312-16 du code de la consommation, le prêteur doit, avant de conclure le contrat de crédit, vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l’article L.751-1 du même code.

En application des dispositions de l’article L. 341-2 du code de la consommation, «le prêteur qui n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 312-14 et L. 312-16 est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge».

Madame [M] [H] estime que la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE ne rapporte pas la preuve d’avoir respecté les dispositions de l’article L. 312-16 du code de la consommation.

La Société SANTANDER CONSUMER FINANCE explique avoir remis la fiche de dialogue et de connaissance à Madame [M] [H] et à Monsieur [Y] [T] [C] établie sur support papier et comportant les explications leur permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est bien adapté à leurs besoins ainsi qu’à leurs situations financières. Elle affirme avoir vérifié leur solvabilité au moyen d’un nombre suffisant d’information. Elle ajoute que les emprunteurs ont dissimulé leur véritable situation pour la déterminer à leur accorder un crédit.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que Monsieur [Y] [T] [C] et Madame [M] [H] ont remis lors de la souscription du prêt une copie de leur carte nationale d’identité, de leur avis d’imposition de l’année 2020, année précédant la souscription du prêt, calculée sur les revenus de 2019 et les bulletins de salaire de décembre 2020 et de janvier et février 2021 permettant d’établir le revenu du couple.

Toutefois, il convient de constater que la preuve de la consultation du FICP par le prêteur n’est pas rapportée.

Il est important de rappeler que ce fichier recense les personnes à l’origine d’incidents de paiement caractérisés et les personnes ayant déposé un dossier de surendettement. Chaque dossier est indexé par la Banque de France dans une base de données au moyen d’une clé composée de la date de naissance (jjmmaa) suivie des cinq premières lettres du nom de famille de la personne concernée. Plusieurs personnes pouvant répondre à la même clé, on ajoute, alors, un suffixe propre à chaque dossier : jjmmaaxxxxx/yy. Les établissements interrogent le fichier par le biais de cette clé d’indexation.

L’alinéa 2 de l’article L. 751-6 du code de la consommation indique qu’un arrêté détermine les modalités selon lesquelles les établissements de crédit peuvent justifier qu’ils ont consulté le FICP. L’article 13 – I de l’arrêté du 26 octobre 2010 auquel renvoient les articles précités, modifié par l’arrêté du 17 février 2020 entré en vigueur le 20 février 2020, prévoit qu’afin de prouver la consultation du fichier, les établissements et organismes de crédit doivent, dans les cas de consultation obligatoire, «conserver des preuves de la consultation du fichier sur un support durable. Ils doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation des éléments de preuve de ces consultations garantissent l’intégrité des informations ainsi collectées. Constitue un support durable tout instrument permettant aux établissements et organismes mentionnés à l’article 1er de stocker les informations constitutives de ces preuves, d’une manière telle que ces informations puissent être consultées ultérieurement pendant une période adaptée à leur finalité et reproduites à l’identique. Les éléments de preuve sont apportés conformément au modèle figurant en annexe au présent arrêté. Ils sont à restituer sur papier d’affaire reprenant les mentions obligatoires prévues aux articles R. 123-237 et R. 123-238 du code de commerce.».

Or, en l’espèce, la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE verse aux débats une capture d’écran concernant Madame [M] [H] et Monsieur [Y] [T] [C] ne comportant pas les mentions légales obligatoires et ne correspondant pas au modèle-type proposé par l’article 13 de l’arrêté du 26 octobre 2010.

Il s’en déduit, dans ces conditions, que la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE ne prouve pas avoir respecté son obligation préalable de consultation du FICP et avoir vérifié la solvabilité de l’emprunteur. La déchéance du droit aux intérêts contractuels sera, dès lors, prononcée à compter de la conclusion du contrat, compte tenu du manquement à cette obligation essentielle, et la créance de la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE ne portera pas, non plus, intérêts légaux pour assurer l’effectivité de la sanction de déchéance du droit aux intérêts prononcée. Il apparaît, en effet, eu égard au taux contractuel du prêt, soit 5,07%, et du taux légal que les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont il pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations. Il convient, surtout, de rappeler qu’en application des dispositions de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier, le taux d’intérêt légal peut être majoré de cinq points, nonobstant la déchéance du droit aux intérêts.

Madame [M] [H] ne sera alors tenue qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu.

Par ailleurs, compte tenu de la défaillance de l’emprunteur, la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE était bien fondée à se prévaloir de la déchéance du terme. Le prêteur justifie avoir notifié à Madame [M] [H] et à Monsieur [Y] [T] [C], par courriers recommandés en date du 8septembre 2022, son intention de faire application de la déchéance du terme à défaut de régularisation dans le délai de 15 jours et l’avoir mise en demeure après déchéance du terme par courrier recommandé en date du 27 septembre 2022.

Compte tenu du capital emprunté, soit 11.890 €, auquel il convient d’ajouter les frais d’assurance échus jusqu’à l’exigiblité du capital restant dû soit la somme de 66 € (3 échéances impayées X 22 €), le solde dû après déduction des encaissements, 2.566,92 € (213,91 € X 12 mensualités est de :
(11.890 € + 66 €) – 2.566,92 € = 9.389,08 €
L’indemnité de résiliation prévue par le contrat et qui sanctionne la défaillance de l’emprunteur, en application de l’article 1231-5 du code civil, sera réduite à la somme de 10 €, dans la mesure où accorder à la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE le bénéfice d’une clause pénale de 8% conduirait, compte tenu du préjudice réellement subi par la société de crédit qui a manqué à ses obligations, à une rémunération excessive du prêteur et une pénalisation non moins excessive de l’emprunteur.

Le paragraphe iii – «Co-emprunteur» du contrat de prêt stipule que «s’il y a un co-emprunteur, il est tenu solidairement avec l’emprunteur de rembourser l’intégralité des sommes dues au titre de la présente offre de contrat de crédit».

Madame [M] [H] sera, dès lors, condamnée à payer à la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE les sommes de 9.389,08 € et de 10 € au titre de l’indemnité réduite.

Sur l’action en responsabilité :

Madame [M] [H] soutient que la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE a manqué à son obligation de mise en garde ayant entraîné sa responsabilité puisqu’elle lui a octroyé un prêt de 11.882 € alors qu’elle disposait d’un revenu de 648 € par an.

Il est important de rappeler qu’en matière de crédit, s’il incombe au prêteur de rapporter la preuve qu’il a satisfait au devoir de mise en garde dont il est tenu à l’égard d’un emprunteur non averti qui présente, au regard du crédit souscrit, un risque d’endettement excessif, il appartient, en revanche, à l’emprunteur de rapporter la preuve qu’au moment de cette souscription, sa situation présentait un risque d’endettement excessif et justifiait que le prêteur effectue des diligences supplémentaires au titre de ce devoir de mise en garde.

Il est important de rappeler que l’évolution défavorable de la situation de l’emprunteur après la souscription des prêts litigieux est inopérante pour caractériser un manquement de la banque à son devoir de conseil.

En l’espèce, la qualité d’emprunteur non averti de Madame [M] [H] n’est pas contestée par les parties.

S’agissant de la situation financière de l’emprunteur, il résulte des éléments recueillis par l’établissement bancaire que Monsieur [Y] [T] [C] et Madame [M] [H], alors en couple, ont déclaré lors de la souscription du contrat de prêt litigieux, les éléments suivants :
– Madame [M] [H] : en concubinage et locataire depuis le 1er novembre 2018, bénéficiaire depuis le 22 février 2021 d’un contrat d’apprentissage/alternance, qualification dans le secteur privé et sans crédit en cours. Elle précisait disposer d’un salaire net de 1.000 €.
– Monsieur [Y] [T] [C] : en concubinage et locataire depuis le 1er novembre 2018, bénéficiaire depuis le 23 décembre 2020 d’un contrat à durée indéterminée dans le secteur privé. Il précisait disposer d’un salaire net d’un montant de 1.220 € et supporter un loyer de 305 €.

Madame [M] [H] communiquait à l’établissement bancaire son avis d’impôt de l’année 2020 calculé sur les revenus de 2019 montrant qu’elle disposait d’un revenu annuel de 688 €. Toutefois, elle indiquait que sa situation professionnelle avait

évolué puisqu’elle disposait depuis le mois de février 2021 d’un contrat de travail, étant souligné que le contrat de prêt a été signé le 20 avril 2021.

Monsieur [Y] [T] [C] justifiait de ses revenus à une période contemporaine de la souscription du prêt puisque son bulletin de paie du mois de février 2021 permettait d’établir qu’il disposait depuis le mois de décembre 2020 d’un revenu mensuel moyen de 1.273,30 €.

Au regard des pièces produites par les co-emprunteurs lors de la souscription du prêt, il apparaissait que le couple qui disposait d’un revenu total de 2.273,30 € au jour de la souscription du prêt pouvait supporter les mensualités de remboursement du prêt d’un montant de 213,91€, en sus de leur loyer mensuel de 305 €, en l’absence de crédits en cours. Ces mensualités ne représentaient pas un risque d’endettement excessif puisque le couple conservait un reste à vivre de 2.059,39 €.

Par ailleurs, il échet de constater que Madame [M] [H] ne communique pas d’élement permettant d’établir qu’au regard de sa situation, ce prêt présentait un risque d’endettement excessif justifiant que le prêteur effectue des diligences supplémentaires au titre de son devoir de mise en garde. Il y a lieu, en effet, de noter qu’elle ne mentionne pas dans sa déclaration de surendettement les dates de souscription de l’ensemble des prêts à la consommation qu’elle a souscrits. Il n’est donc pas démontré qu’ils existaient au moment de la souscription du prêt litigieux.

Elle échoue donc à prouver la faute qu’elle allègue et sera, en conséquence, déboutée de sa demande d’indemnisation.

Sur la capitalisation des intérêts :

L’article L.312-38 du code de la consommation interdit de mettre tout autre «indemnité ou coût» à la charge de l’emprunteur défaillant sous réserve des frais taxables justifiés occasionnés par la défaillance de l’emprunteur. La demande de capitalisation des intérêts sera donc rejetée, les dispositions du code de la consommation étant dérogatoires aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil. Au demeurant la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, pour assurer son effacité effective, s’oppose à ce que le créancier puisse bénéficier de la capitalisation des intérêts.

Sur les conséquences de la procédure de surendettement :

Il est important de rappeler que la saisine de la Commission de Surendettement des Particuliers ne prive pas le créancier du droit de saisir le juge des contentieux de la protection pour obtenir un titre garantissant l’exécution forcée notamment en cas de non respect par le débiteur du plan de désendettement ou des mesures imposées. Toutefois, pendant le temps des mesures imposées, sauf caducité selon les modalités prévues par la loi ou la commission de surendettement, le créancier ne pourra pas poursuivre le recouvrement forcé de sa créance.

Sur les demandes accessoires :

Madame [M] [H], partie perdante, sera condamnée aux dépens.

En considération de la situation économique de chaque partie, l’équité commande de laisser à chacune la charge de leurs propres frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

La vice-présidente chargée des contentieux de la protection, statuant publiquement par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort ;

DÉCLARE la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE recevable en son action en paiement ;

CONSTATE que la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE ne formule pas de demande de condamnation à l’encontre de Monsieur [Y] [T] [C] ;

PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts contractuels depuis l’origine et DIT que la créance de la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE ne portera pas intérêts au taux légal ni au taux contractuel ;

CONDAMNE Madame [M] [H] à payer à la Société SANTANDER CONSUMER FINANCE les sommes de :
– 9.389,08 € et de 10 € au titre de l’indemnité réduite,

DEBOUTE Madame [M] [H] de sa demande d’indemnité ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

DIT n’y avoir lieu à indemnités sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [M] [H] aux dépens ;

En foi de quoi, le présent jugement a été signé par la Vice-Présidente et la Greffière.

LA GREFFIÈRE LA VICE PRÉSIDENTE chargée des contentieux de la protection


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