Le harcèlement moral du salarié peut être constitué par l’envoi de SMS déplacés et à caractère sexuel.
En la cause, le salarié objective i) avoir été prénommé comme un personnage d’animation de Disney ; ii) l’envoi par son responsable de messages à connotation sexuelle tels que » va te coucher et laisse tomber les gonzesses » » Tu te fais sucer dans la forêt qui est juste à l’entrée du village ‘ » » Mdr et ma gaterie » » » Rappelle-moi s’il te plaît quand t’as plus rien entre les dents « . Le salarié établit des éléments de fait, lesquels, pris dans leur ensemble laisseraient supposer l’existence d’un harcèlement moral. L’employeur, qui se borne à minimiser la réalité des faits invoqués par le salarié en alléguant qu’il s’agissait de plaisanteries usuelles entre salariés et patron, de » blagues » échangées entre tout le personnel ce dont il ne justifie pas s’agissant de messages à connotation sexuelle, n’apporte aucun élément susceptible de justifier que ces messages reposaient sur des justifications objectives étrangères à tout harcèlement moral. Celui-ci est donc établi. Le préjudice du salarié a été réparé à hauteur de 6 000 euros. Pour rappel, aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. En vertu de l’article L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. |
Résumé de l’affaire :
Engagement de M. [P] [M]M. [P] [M] a été engagé par la société Entreprise [Y] en tant qu’assistant commercial le 17 février 2021, sous un contrat à durée indéterminée. Cette entreprise, qui emploie moins de onze salariés, est spécialisée dans la réalisation de couvertures et d’isolations de combles et toitures. Licenciement de M. [M]Le 30 juin 2021, M. [M] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, qui a eu lieu le 7 juillet. Il a été mis à pied à titre conservatoire et a reçu une lettre de licenciement le 13 octobre 2021, invoquant une faute grave. Action en justice de M. [M]Le 14 octobre 2021, M. [M] a saisi le conseil de prud’hommes de Rambouillet pour contester son licenciement, demandant sa requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que le versement de diverses indemnités. La société Entreprise [Y] a contesté ces demandes. Jugement du conseil de prud’hommesLe 26 août 2022, le conseil a rendu un jugement déclarant le licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse. Il a également reconnu le caractère vexatoire du licenciement et le manquement de l’employeur à ses obligations de prévention. La société a été condamnée à verser plusieurs indemnités à M. [M]. Appel de la société Entreprise [Y]Le 22 septembre 2022, la société Entreprise [Y] a interjeté appel de cette décision. Par la suite, des incidents de procédure ont eu lieu, notamment concernant la recevabilité des conclusions de la société. Conclusions des partiesDans ses dernières conclusions, la société Entreprise [Y] a demandé l’infirmation du jugement et le débouté de M. [M]. De son côté, M. [M] a demandé la confirmation du jugement initial et a soulevé des irrecevabilités concernant les demandes de la société. Harcèlement moral et manquement à l’obligation de sécuritéM. [M] a allégué avoir subi des humiliations et des messages à connotation sexuelle de la part de son employeur, ce qui a été reconnu comme constitutif de harcèlement moral. Il a également soutenu avoir été contraint d’effectuer des tâches dangereuses sans formation adéquate, mais n’a pas pu prouver un préjudice lié à ce manquement. Exécution déloyale du contrat de travailM. [M] a affirmé que son contrat de travail avait été exécuté de manière déloyale, n’ayant pas été affecté à des tâches correspondant à son poste d’assistant commercial. Ce manquement a été reconnu, et le préjudice a été réparé. Analyse du licenciementLa lettre de licenciement a été examinée, et bien que certains griefs aient été établis, la cour a jugé que ceux-ci n’étaient pas suffisamment graves pour justifier un licenciement. Le licenciement a donc été déclaré sans cause réelle et sérieuse. Indemnisation et documents de fin de contratM. [M] a été indemnisé pour son licenciement injustifié, et des sommes ont été allouées pour la remise tardive de documents de fin de contrat. La société a été condamnée à fournir une attestation Pôle emploi conforme. Décision finale de la courLa cour a confirmé en grande partie le jugement du conseil de prud’hommes, tout en réformant certains points concernant les indemnités. Elle a également ordonné à la société de remettre les documents nécessaires à M. [M] sous astreinte. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
Chambre sociale 4-6
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 07 NOVEMBRE 2024
N° RG 22/02842 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VNRR
AFFAIRE :
S.A.S. ENTREPRISE [Y]
C/
[P] [M]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Août 2022 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de RAMBOUILLET
N° Chambre :
N° Section :
N° RG :
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Claude LEGOND de
la SCP LEGOND & ASSOCIES
Me Camille BROSSEAU-GOTTI
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.S. ENTREPRISE [Y]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentant : Me Claude LEGOND de la SCP LEGOND & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 007 –
APPELANTE
****************
Monsieur [P] [M]
né le 17 Novembre 1999 à [Localité 3]
de nationalité Française
[Adresse 1]
Chez M. et Mme [M]
[Localité 3]
Représentant : Me Camille BROSSEAU-GOTTI, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 707
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 09 Septembre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Odile CRIQ, Conseillère chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Nathalie COURTOIS, Présidente,
Madame Véronique PITE, Conseillère,
Madame Odile CRIQ, Conseillère,
Greffière lors des débats : Madame Isabelle FIORE,
M. [P] [M] a été engagé selon contrat à durée indéterminée en date du 17 février 2021, en qualité d’assistant commercial, par la société Entreprise [Y], qui a pour activité la réalisation de couvertures et d’isolations de combles et toitures, emploie moins de onze salariés et relève de la convention collective nationale du bâtiment ETAM Région parisienne.
Convoqué le 30 juin 2021 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 7 juillet suivant, et mis à pied à titre conservatoire, M. [M] a été licencié par courrier du 13 octobre 2020 énonçant une faute grave.
M. [M] a saisi, le 14 octobre 2021, le conseil de prud’hommes de Rambouillet aux fins de requalification de son licenciement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en condamnation de la société au versement de diverses indemnités, ce à quoi la société s’opposait.
Par jugement rendu le 26 août 2022 et notifié le 29 août 2022, le conseil a statué comme suit :
Fixe le salaire de référence à 1.660 euros bruts
Dit et juge :
Le licenciement irrégulier
Le licenciement sans cause réelle et sérieuse
Le caractère vexatoire du licenciement
L’exécution déloyale du contrat de travail
Le manquement de la société Entreprise [Y] à ses obligations de prévention,
Condamne la société Entreprise [Y] à payer à M. [M] les sommes de :
1.660 euros au titre du licenciement irrégulier
1.660 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse
1.135 euros au titre du rappel de salaire et 113,50 euros pour les congés payés afférents
1.660 euros au titre de l’indemnité de préavis et 166 euros au titre des congés payés afférents
6.000 euros au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail
1.000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire
5.000 euros au titre du manquement de l’employeur à son obligation de prévention
3.000 euros au titre des dommages et intérêts pour harcèlement
2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne la société Entreprise [Y] aux entiers dépens
Ordonne :
La mise à jour de l’attestation Pôle Emploi, des bulletins de salaire et du solde de tout compte conformes à la décision
La remise de l’attestation Pôle Emploi, du solde de tout compte et des bulletins de salaire conformes aux décisions, sous astreinte 50 euros par jour à compter du 8eme jour après la mise à disposition du présent jugement.
La capitalisation à compter de la date de convocation à l’audience de conciliation
L’exécution provisoire de la décision à intervenir sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile.
Déboute M. [M] de sa demande d’indemnité légale de licenciement.
Déboute la société Entreprise [Y] de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le 22 septembre 2022, la société Entreprise [Y] a relevé appel de cette décision par voie électronique.
Par ordonnance d’incident du 11 septembre 2023, le conseiller de la mise en état a statué ainsi :
Dit n’y avoir lieu à déclarer irrecevables les conclusions remises au greffe le 6 décembre 2022 par la société Entreprise [Y],
Rejette la demande de voir prononcer la caducité de la déclaration d’appel,
Condamne M. [P] [M] à payer à la société Entreprise [Y] 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens de l’incident suivront le sort des dépens au principal,
Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 24 mai 2024, la société Entreprise [Y] demande à la cour de :
Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
Débouter M. [M] de ses demandes,
Condamner M. [M] à payer à l’entreprise [Y] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 26 mars 2024, M. [M] demande à la cour de :
Recevoir M. [M] en ses demandes, fins et conclusions, et les dire bien fondées,
In limine litis, déclarer irrecevables les demandes formées par la société Entreprise [Y] postérieurement à ses premières conclusions d’appelant, et en tout état de cause, toutes demandes formées au-delà du délai pour conclure, y compris sur l’appel incident de M. [M], et tel que prévu aux articles 905 et 908 à 910 du code de procédure civile.
Confirmer le jugement du 26 août 2022 en ce qu’il a :
Fixé le salaire de référence à 1.660 euros bruts
Dit et jugé :
– le licenciement irrégulier
– le licenciement sans cause réelle et sérieuse
– le caractère vexatoire du licenciement
– l’exécution déloyale du contrat de travail
– le manquement de la société Entreprise [Y] à ses obligations de prévention,
Condamné la société Entreprise [Y] à payer à M. [M] les sommes de :
– 1.660 euros au titre du licenciement irrégulier
– 1.660 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse
– 1.135 euros au titre du rappel de salaire et 113,50 euros pour les congés payés afférents
– 1.660 euros au titre de l’indemnité de préavis et 166 euros au titre des congés payés afférents
– 6.000 euros au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail
– 1.000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire
– 5.000 euros au titre du manquement de l’employeur à son obligation de prévention
– 3.000 euros au titre des dommages et intérêts pour harcèlement
– 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– Aux entiers dépens
Ordonné :
– la mise à jour des documents de fin de contrat
– la remise de documents de fin contrat sous astreinte de 50 euros par jour
– la capitalisation à compter de la date de l’audience de conciliation
– L’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Infirmer le jugement du 26 août 2022 en ce qu’il a débouté M. [M] de sa demande de dommages et intérêts pour délivrance d’une attestation Pôle emploi, et un solde de tout compte non conformes,
Et statuant à nouveau sur ce point,
Condamner l’entreprise [Y] au paiement de la somme de 1.500 euros de dommages et intérêts au titre de la délivrance d’une attestation pôle emploi et d’un solde de tout compte non conformes,
En tout état de cause,
Débouter l’entreprise [Y] de toutes demandes formées à l’encontre de M. [M],
Fixer à la somme de 1.650 euros le montant de la liquidation de l’astreinte provisoire d’une durée de 33 jours, et courant à compter du 8ème jour de la date de notification du jugement du 29 août 2022,
Condamner l’entreprise [Y] à verser à M. [M] la somme de 1.650 euros au titre de la liquidation de l’astreinte prononcée par le conseil de prud’hommes de Rambouillet,
Condamner l’entreprise [Y] à régler à M. [M] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Par message transmis par RPVA aux conseils des parties, la cour invitait ces dernières à présenter leurs observations quant à la demande de liquidation de l’astreinte présentée par M. [M].
Par courrier transmis par RPVA le 17 octobre le conseil de l’entreprise [Y] observait sur le fondement de l’article L.131-3 du code des procédures civiles d’exécution que la cour n’était pas compétente, le premier juge ne s’étant pas réservé la liquidation du montant de l’astreinte.
Le conseil de M. [M] n’a pas présenté d’observation de ce chef.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
Par ordonnance rendue le 26 juin 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 9 septembre 2024.
Sur l’étendue de la saisine de la cour :
Aux termes de l’article 954 du code de procédure civile, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
Il en découle que nonobstant les moyens et, le cas échéant, les demandes formulées dans le corps des conclusions de chacune des parties, telle que la demande de l’intimé de fixation du montant d’une astreinte définitive, la cour n’est saisie que des demandes figurant dans le dispositif des conclusions et pas de celles qui n’auraient pas été reprises dans ce dispositif.
Sur la demande d’irrecevabilité des conclusions de l’appelante et la caducité de l’appel :
Les premières conclusions de la société ne comportant aucune demande hormis une demande d’infirmer le jugement entrepris, M. [M] conclut sur le fondement de l’article 910-4 du code de procédure civile à l’irrecevabilité des demandes postérieures aux premières conclusions de l’appelante aux termes desquelles la société sollicite le débouté des demandes de l’intimé. Le salarié conclut également à l’irrecevabilité de toute demande formée au-delà du délai pour conclure y compris sur l’appel incident de M. [M].
Le salarié fait valoir qu’au-delà des premières conclusions déposées par l’appelante, il n’est plus possible d’élargir le périmètre des prétentions formées au sein de celles-ci.
M. [M] demande essentiellement la confirmation du jugement déféré.
Rappelant qu’un incident a été formé par M. [M] devant le conseiller de la mise en état aux fins de voir prononcer la caducité de la déclaration d’appel et l’irrecevabilité des conclusions au motif qu’elles ne formulent aucune demande et que par ordonnance d’incident du 11 septembre 2023 le conseiller de la mise en état a débouté M. [M] de son incident, la société affirme que la demande d’ irrecevabilité de ses conclusions a été tranchée par le conseiller et ne peut plus être soumise à la cour.
La société conclut à la régularité de la déclaration d’appel, les chefs de jugement critiqués ayant été précisés et l’infirmation du jugement ayant été demandée dans les écritures.
Par ordonnance d’incident du 11 septembre 2023, le conseiller de la mise en état disait n’y avoir lieu à déclarer irrecevables les conclusions remises au greffe le 6 décembre 2022 par la société Entreprise [Y] en relevant son incompétence à statuer sur la recevabilité des conclusions au regard de leur contenu. Force est donc de relever que le conseiller de la mise en état ne s’est pas prononcé sur la recevabilité des conclusions litigieuses sur laquelle il revient à la cour de statuer.
L’objet du litige, en application de l’article 4 du code de procédure civile est déterminé par les prétentions respectives des parties.
Aux termes de l’article 910-4 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties doivent présenter dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910 du code de procédure civile l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées les prétentions ultérieures.
L’article 954 alinéa 2 du même code prévoit notamment que les conclusions d’appel doivent comprendre un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. L’alinéa 3 de ce même article dispose notamment que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Aux termes de ses premières conclusions transmises par RPVA le 6 décembre 2022, la société Entreprise [Y] demandait l’infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et la condamnation de M. [M] à payer à la société la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Selon ses conclusions signifiées le 09 février 2023, la société sollicitait l’infirmation du jugement entrepris, le débouté des demandes de M. [M] ainsi que sa condamnation au paiement des frais irrépétibles.
La demande qui a été ajoutée dans les conclusions du 9 février 2023 sans avoir été formulée dans les premières conclusions en date du 6 décembre 2022 et sans qu’il puisse être considéré qu’il s’agit d’une réponse à des questions nées ultérieurement est en application de l’article susvisé, irrecevable.
Il n’en demeure pas moins que le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur le harcèlement moral :
Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En vertu de l’article L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le salarié énonce avoir subi les faits suivants constitutifs selon lui d’un harcèlement moral :
– Des humiliations en étant prénommé » [C] » et en étant envoyé aux tâches de réassort fournitures ou restauration pour les équipes,
– Envoi par son responsable de messages à connotation sexuelle.
Le salarié objective avoir :
-été prénommé » [C] » aux termes de SMS (pièces n° 20 et 21) que lui adressait le 10 mai son employeur accompagné d’une image représentant le personnage d’animation de Disney.
– l’envoi par son responsable de messages à connotation sexuelle (pièce n° 21 à 23) tels que » va te coucher et laisse tomber les gonzesses » » Tu te fais sucer dans la forêt qui est juste à l’entrée du village ‘ » » Mdr et ma gaterie » » » Rappelle-moi s’il te plaît quand t’as plus rien entre les dents « .
Le salarié établit des éléments de fait, lesquels, pris dans leur ensemble laisseraient supposer l’existence d’un harcèlement moral.
L »ensemble des éléments dont la matérialité est retenue, examinée de façon globale, est de nature à laisser supposer l’existence d’un harcèlement moral.
L’employeur, qui se borne à minimiser la réalité des faits invoqués par le salarié en alléguant qu’il s’agissait de plaisanteries usuelles entre salariés et patron, de » blagues » échangées entre tout le personnel ce dont il ne justifie pas s’agissant de messages à connotation sexuelle, n’apporte aucun élément susceptible de justifier que ces messages reposaient sur des justifications objectives étrangères à tout harcèlement moral. Celui-ci est donc établi.
Le préjudice du salarié a été justement réparé par les premiers juges à hauteur de 6 000 euros le
jugement entrepris sera confirmé de ce chef.
Sur le manquement à l’obligation de sécurité :
Le salarié qui rappelle avoir été embauché en qualité d’assistant commercial affirme avoir été contraint de réaliser des missions de couverture à plusieurs mètres du sol, en méconnaissance des règles de sécurité élémentaires, ne disposant d’aucune formation et d’aucune compétence technique pour le faire.
Le salarié soutient avoir souffert de ce fait d’un lumbago très douloureux ayant donné lieu à un arrêt de travail, avoir subi des complications et avoir dû porter une ceinture et consulter pour des douleurs dorsales compte tenu de ses activités de portage de charges.
Il ajoute ne pas avoir bénéficié de visite médicale d’information et de prévention.
La société conteste avoir demandé au salarié d’exécuter des tâches de couvreur en alléguant seulement lui avoir demandé d’effectuer des courses avec le véhicule de service.
En vertu des articles L.4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, l’employeur est tenu à l’égard de son salarié d’une obligation de sécurité dont il doit assurer l’effectivité. Il doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, actions d’information et de formation, mise en place d’une organisation et de moyens adaptés) en respectant les principes généraux de prévention, tels que éviter les risques, évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités, combattre les risques à la source, adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production (…).
Il appartient à l’employeur de rapporter la preuve qu’il a mis en place toutes les mesures de protection et prévention nécessaires, conformément à ses obligations, surtout lorsqu’il a connaissance des risques encourus par le salarié.
La société communique sous sa pièce n° 15, le témoignage de M. [N] chef d’équipe salarié de la société, qui indique que M. [M] était seulement chargé de rapporter le matériel avec la camionnette de l’entreprise sans que M. [Y] ne lui ait jamais demandé de monter sur le toit puisqu’il n’était pas couvreur.
Les trois clichés photographiques ( pièces n° 28 et 31 produits par le salarié) sans aucune précision de date ni de lieu sur lesquels on peut voir M. [M] sur un toit donner des tuiles à un ouvrier sont insuffisantes à objectiver que la salarié était affecté à des missions de couverture au bénéfice de la société.
M. [M] produit aux débats sous sa pièce n° 21, une feuille de soin établie à son profit le 6 avril 2021 par le docteur [D], médecin généraliste. Cette seule pièce ne suffit à justifier de l’arrêt de travail allégué ou du préjudice dont aurait souffert le salarié ensuite de ses missions de couverture qui ne sont pas établies.
S’agissant de l’absence de suivi médical alléguée par le salarié, selon l’article R.4624-10 tout travailleur bénéficie d’une visite d’information et de prévention réalisée par l’un des professionnels de santé mentionnés au premier alinéa de l’article L. 4624-1 dans un délai qui n’excède pas trois mois à compter de la prise effectif du poste de travail.
L’employeur ne fait aucune observation de ce chef et ne justifie d’aucun suivi médical.
Mais, le salarié ne justifie d’aucun préjudice en lien avec ce manquement sera débouté de sa demande indemnitaire et le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur l’exécution déloyale du contrat de travail :
Au soutien de sa demande en paiement de dommages intérêts de ce chef, M. [M] affirme que le contrat de travail a été exécuté de façon déloyale par la société.
La bonne foi contractuelle étant présumée, il incombe au salarié de rapporter la preuve de la
déloyauté alléguée.
M. [M] fait état des railleries subies de la part de son employeur.
Le salarié allègue sans être contredit utilement par la société ne pas avoir exercé la fonction d’assistant commercial pour laquelle il avait été engagé, mais avoir été envoyé sur des chantiers sans avoir d’expérience, ni aucune formation dispensée par l’employeur.
En effet, la société qui admet avoir confié au salarié d’autres tâches, telle que celle de faire des courses ou livraisons, se borne à soutenir sans en justifier que la tâche d’assistant commercial n’a pas été concluante et que M. [Y] a conservé à son service le salarié, ami de son fils, alors qu’il aurait pu mettre un terme à son contrat pendant la période d’essai.
De ce fait, l’employeur qui n’a pas respecté les fonctions attribuées au salarié a manqué à l’exécution loyale du contrat de travail.
Étant relevé que les railleries subies de la part de son employeur dont fait état M. [M] ont été réparées au titre du harcèlement moral subi, le préjudice du salarié sera justement réparé à hauteur de 3 000 euros. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.
Sur le licenciement :
La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi libellée :
» Monsieur,
Nous vous avons reçu le 7 juillet 2021 pour un entretien préalable au licenciement que nous envisagions de prononcer à votre encontre.
Malgré les explications que vous nous avez fournies, nous avons décidé de vous licencier.
Ainsi que nous vous l’avons exposé lors de l’entretien, les motifs de ce licenciement sont les suivants :
Vous avez à plusieurs reprises, été négligeant avec le matériel de l’entreprise.
Le 7 juin 2021, vous avez, en voulant garer le véhicule mis à votre disposition par l’entreprise, abimé le côté droit du pare-chocs ainsi que le pilier du portail qui se trouvait à côté.
Le 14 juin 2021, vous avez perdu la carte bleue de l’entreprise après avoir indiqué plusieurs fois le mauvais code. Vous avez, là également, volontairement omis de le signaler. En effet, vous avez rendu la carte sans rien dire et ce n’est que lorsque l’un de vos collègues a eu besoin de l’utiliser le 18 juin 2021, qu’il s’en est rendu compte. Vous avez par la suite accusé l’un de vos collègues de l’avoir bloqué avant de finalement avouer que le blocage de la carte relevait d’une mauvaise manipulation de votre part.
Le 28 juin 2021, suite à un désaccord, vous m’avez envoyé des messages menaçants, indiquant que vous alliez venir me voir et que ça n’aurait pas dû se passer comme ça. Vous avez également été incorrect à mon encontre en m’écrivant » d’arrêter votre bla bla à deux balles « .
A 16 heures ce même jour, vous êtes venu me voir et avez insulté de manière très vulgaire et virulente l’une de vos collègues. Ces faits se sont déroulés en présence de personnes extérieures à notre désaccord alors même que j’étais en entretien avec une future collaboratrice.
Nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien même temporaire dans l’entreprise.
Votre licenciement est donc immédiat, sans préavis, ni indemnité de rupture et vous cessez donc de faire partie des effectifs de notre société à compter du 16 juillet 2021. »
La société explique avoir engagé M. [M] en qualité d’assistant commercial parce qu’il était un ami du fils de M. [Y] et qu’il était sans activité alors qu’il n’avait aucune expérience professionnelle et ne disposait d’aucun diplôme.
La société affirme que M. [M] avait un comportement routier dangereux, était négligent et que peu impliqué dans son travail, il arrivait régulièrement en retard.
Pour sa part, l’intime’ objecte que la faute grave reprochée n’est pas démontrée.
En cas de litige, en vertu des dispositions de l’article L.1235-1 du code du travail, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste il profite au salarié.
La faute grave se définit comme résultant d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et la poursuite du contrat et la charge de la preuve repose sur l’employeur qui l’invoque.
Sur la négligence de M. [M] avec le matériel de l’entreprise.
L’employeur reproche au salarié d’avoir abîmé le véhicule mis à sa disposition le 7 juin 2021 en le garant (côté droit du pare-chocs) et d’avoir endommagé le pilier du portail qui se trouvait à côté.
Le salarié qui explique que le véhicule n’était pas mis à sa disposition, mais imposé pour se rendre sur les chantiers sur lesquels il exerçait une activité de couvreur ou pour se rendre chez les fournisseurs pour récupérer de l’outillage, ne conteste pas l’accrochage du véhicule en soulignant qu’il n’avait pas suscité de commentaire particulier de son employeur.
Ce grief est établi.
Sur la perte de la carte bleue et son blocage.
Alors qu’aux termes de ses conclusions la société allègue la perte de deux cartes bleues de l’entreprise par le salarié, la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige n’évoque la perte que d’une seule carte bleue.
C’est à juste titre que le salarié relève une contradiction de la part de l’employeur qui lui reproche à la fois la perte d’une carte bleue de la société, en évoquant à la fois la remise de celle-ci à la société par le salarié et le blocage de cette carte.
Pour preuve du grief, la société produit aux débats sous sa pièce n°1 un SMS du Crédit Agricole du 26 juin 2021 lui indiquant qu’une carte bancaire lui a été adressée par courrier et une copie d’écran (pièce n°2 ) portant information le 13 avril 2021 qu’une carte est disponible à l’agence.
Ces deux pièces ne sont probantes ni de la perte de la carte bancaire alléguée, ni de son blocage par le salarié.
Dans ces circonstances, le fait que le salarié aurait volontairement omis de signaler le blocage de la carte bleue n’est ni avéré, ni justifié.
Le grief n’est pas établi.
Sur l’envoi de messages menaçants.
L’employeur affirme qu’à l’issue d’un entretien avec le salarié le 28 juin 2021, ce dernier a menacé M. [Y], puis s’est rendu au domicile de ce dernier à 15 heures en étant très énervé, en tentant de rentrer de force dans son domicile et en proférant des menaces à son encontre.
Pour preuve du grief, la société communique :
-le témoignage de M. [S] [B] (pièce n° 5 de l’appelante) qui indique avoir été témoin le lundi 28 juin vers 15 heures de l’arrivée au domicile de M. [Y] en ces termes : » Le jeune homme qui travaillait pour la société se présente à son portillon, (‘) après une discussion le jeune a essayé de rentrer dans le domicile de M. [Y] qu’il a légèrement repoussé en arrière (..) le jeune homme est reparti très énervé. « .
-le témoignage de M. [V], lycéen (pièce n° 6 de l’appelante) qui indique qu’il se trouvait dans la chambre de la fille de M.[Y] le lundi 28 juin et avoir entendu vers 15 heures le bruit de la sonnette, puis avoir entendu le salarié de M. [Y] traiter » la mère de sa de pute. « .
Mais force est de relever que le témoignage de M. [S] [B] n’a aucune valeur probante pour ne pas évoquer des menaces qui auraient été proférées par le salarié.
L’attestation non précise de M.[V] quant à l’identité exacte du salarié, n’emporte pas la conviction de la cour, de sorte qu’il n’est pas établi que le grief soit imputable à M. [M]
Le grief n’est pas établi.
Sur les autres griefs :
Aucune pièce n’est produite aux débats portant sur la tenue de propos incorrects par le salarié à l’encontre de son employeur ou d’une de ses collègues.
En considération du seul grief, dont la matérialité est avérée, mais qui est insuffisamment sérieux pour constituer une faute grave et justifier d’un licenciement, le jugement sera confirmé en ce qu’il a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur l’indemnisation du licenciement injustifié :
En application des dispositions de l’article L.1235-3, dans sa rédaction applicable au litige, issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minima et maxima variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l’ancienneté du salarié, M. [M] ayant acquis cinq mois d’ancienneté au moment de la rupture dans la société employant habituellement moins de 11 salariés, le montant de l’indemnité minimale pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est indiquée sans objet.
Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération ( 1 660 euros bruts ), de son âge, de son ancienneté, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a été alloué au salarié la somme de 1 660 euros en réparation du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Selon l’article 10-1 de la convention collective du bâtiment, aux termes duquel le préavis est fixé à deux semaines pour les salariés ayant moins de six mois d’ancienneté, la demande du salarié de fixation de l’indemnité du préavis à la somme de 1 660 euros n’est pas fondée.
M. [M] ayant cinq mois d’ancienneté, l’indemnité compensatrice de préavis sera fixée à la somme de 830 euros bruts , outre la somme de 83 euros bruts au titre des congés payés afférents.
Le jugement entrepris sera réformé de ce chef.
Sur la demande de dommages intérêts pour licenciement vexatoire :
M. [M] justifie sous sa pièce n° 5 que M. [U] [Y] attestait renvoyer le salarié en ces termes : » Je soussigné M. [Y] [U] de renvoyer l’employé [P] [M] à son domicile sur le champ, sans faire acte de présence « .
Par lettre du 30 juin 2021 de la société remise en main propre au salarié le convoquant à un entretien préalable à un licenciement, il était seulement indiqué que » compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés nous avons décidé de procéder à une mise à pied conservatoire. « .
Alors que la société ne conteste pas préalablement à cette lettre, le renvoi verbal du salarié et sans motif par l’employeur, M. [M] justifie de circonstances entourant son licenciement de nature brutale ou vexatoire.
Le préjudice subi par le salarié a été justement réparé par les premiers juges à hauteur de 1 000 euros, le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur la procédure irrégulière de licenciement :
Le salarié soutient que ses droits n’ont pas été respectés lors de la procédure de licenciement, qu’il n’a pas été en mesure de se défendre utilement lors de l’entretien préalable qui s’est déroulé sur le bord d’une route, en présence d’un tiers non autorisé à y assister et que M. [Y] a fait usage de violences verbales à son encontre.
Dans sa rédaction applicable au jour de l’engagement de la procédure de licenciement, l’article L. 1235-2 du code du travail énonce que lorsqu’une irrégularité a été commise au cours de la procédure, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
L’indemnité n’est donc pas cumulable avec celles dues en cas de défaut de cause réelle et sérieuse.
La demande de M. [M] sera en conséquence rejetée par infirmation du jugement à ce titre.
Sur la délivrance non conforme de l’attestation Pôle emploi et du solde de tout compte :
Il est constant que M. [M] licencié par lettre du 16 juillet 2021 n’a été destinataire d’une attestation Pôle emploi que le 13 octobre 2022. Le salarié allègue que cet envoi tardif a compliqué ses démarches auprès de Pôle Emploi.
Cette attestation n’est pas conforme pour mentionner dans le cadre 6.1 à la fois que le dernier jour travaillé payé est le 16 juillet 2021 en contradiction avec la mention du mois de juin 2021 comme étant le dernier mois travaillé et payé.
L’employeur qui ne communique ni le solde de tout compte, ni les fiches de paie du salarié ne justifie pas d’être libéré de son obligation.
Il sera ordonné à l’employeur de remettre au salarié l’attestation France Travail régularisée.
Cette injonction étant assortie d’une astreinte afin d’en garantir l’exécution, selon les modalités précisées au dispositif.
Le préjudice subi par le salarié par la remise tardive des documents de fin de contrat plus d’un an après la rupture du contrat de travail sera justement réparé l’allocation de la somme de 500 euros. Le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur la demande de liquidation de l’astreinte provisoire prononcée par les premiers juges :
Selon l’article L. 131-3 du code des procédures civiles d’exécution le juge compétent pour statuer sur une demande de liquidation de l’astreinte est le juge de l’exécution.
Il n’y aura pas lieu de statuer sur cette demande pour laquelle M. [M] sera invité à saisir le juge compétent.
Sur les autres demandes :
Conformément aux articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances de nature salariale porteront intérêt à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le conseil de prud’hommes, alors que les créances indemnitaires porteront intérêt au taux légal à compter de la décision qui les ordonne.
La capitalisation des intérêts sera ordonnée en application de l’article 1343-2 du code civil.
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Dit irrecevable la demande par la société Entreprise [Y] tendant au débouté des demandes de M. [M] formulée postérieurement à ses premières conclusions d’appelant.
Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Rambouillet du 26 août 2022 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté M. [P] [M] de sa demande de dommages intérêts pour délivrance des documents de fin de contrat non conformes, en ce qu’il a condamné la société Entreprise [Y] à payer à M.[P] [M] la somme de 5000 euros au titre du manquement par l’employeur à son obligation de prévention, en ce qu’il a condamné la société Entreprise [Y] à payer à [P] [M] la somme de 1 660 euros à titre d’indemnité de préavis, outre la somme de 166 euros au titre des congés payés afférents.
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne la société Entreprise [Y] à payer à M.[P] [M] les sommes suivantes :
– 500 euros de dommages intérêts au titre de la remise tardive des documents de fin de contrat,
– 830 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 83 euros bruts au titre des congés payés afférents,
– 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel,
Déboute M.[P] [M] de sa demande de dommages intérêts en réparation du manquement à l’ obligation de sécurité,
Ordonne à la société Entreprise [Y] de remettre à M.[P] [M] l’attestation France Travail régularisée et ce sous astreinte de 30 euros par jour de retard passé le délai de deux mois suivant la signification de la présente décision, la durée de l’astreinte provisoire étant limitée à 90 jours.
Dit le juge prud’homal incompétent pour procéder à la liquidation du montant de l’astreinte provisoire.
Invite M.[P] [M] à saisir le juge de l’exécution quant à la demande de liquidation du montant de l’astreinte provisoire.
Rappelle que les créances de nature salariale porteront intérêt à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le conseil de prud’hommes, pour les créances salariales échues à cette date et à compter de chaque échéance devenue exigible, s’agissant des échéances postérieures à cette date, alors que les créances indemnitaires porteront intérêt au taux légal à compter de la décision qui les ordonne,
Ordonne la capitalisation des intérêts,
Condamne la société Entreprise [Y] aux dépens d’appel.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Nathalie COURTOIS, Présidente et par Madame Isabelle FIORE, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente