M. [X] [Z] a confié l’entretien et la surveillance de son bateau « Ti One » à la société Lacoche Yacht Maintenance. Cette dernière a assigné M. [X] [Z] en paiement de factures impayées totalisant 25.728,38 euros, émises entre 2017 et 2021, par acte du 17 novembre 2022. M. [X] [Z] a contesté la demande en invoquant la prescription de certaines factures, arguant que l’article L. 218-2 du code de la consommation, qui impose un délai de prescription de deux ans, s’appliquait. Il a demandé que les demandes de paiement pour les factures antérieures à novembre 2020 soient déclarées irrecevables et a sollicité un renvoi pour discuter des factures postérieures. La société Lacoche Yacht Maintenance a répliqué en rejetant cette fin de non-recevoir, affirmant que seule une partie des factures était concernée par la prescription et que le délai avait été interrompu par une reconnaissance de dette de M. [X] [Z] dans un e-mail du 29 avril 2021. L’incident a été examiné lors de l’audience du 13 juin 2024, avec une décision attendue le 17 septembre 2024.
|
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE NICE
4ème Chambre civile
Date : 17 Septembre 2024
MINUTE N°
N° RG 22/04564 – N° Portalis DBWR-W-B7G-OR5W
Affaire : S.A.R.L. LACOCHE YACHT MAINTENANCE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
C/ [X] [Z]
ORDONNANCE DE MISE EN ETAT
Nous, Cécile SANJUAN-PUCHOL, Juge de la Mise en Etat,
assistée de Madame BOTELLA, Greffier.
DEMANDERESSE AU PRINCIPAL ET DÉFENDERESSE À L’INCIDENT :
S.A.R.L. LACOCHE YACHT MAINTENANCE
[Adresse 4]
[Localité 1]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
représentée par Me Bertrand COSTE de la SCP VILLENEAU-ROHART-SIMON & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE
DÉFENDEUR AU PRINCIPAL ET DEMANDEUR À L’INCIDENT :
M. [X] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Robin EVRARD de la SELARL BOSIO-EVRARD ET ASSOCIES, avocats au barreau de NICE
Vu les articles 780 et suivants du Code de Procédure Civile,
Ouï les parties à notre audience du 13 Juin 2024
La décision ayant fait l’objet d’un délibéré au 17 Septembre 2024 a été rendue le 17 Septembre 2024 par Madame SANJUAN-PUCHOL Juge de la Mise en état,
assistée de Madame PROVENZANO, Greffier.
la SCP VILLENEAU-ROHART-SIMON & ASSOCIES
la SELARL BOSIO-EVRARD ET ASSOCIES
Le 17 Septembre 2024
Mentions diverses :
Renvoi MEE 11/12/2024
M. [X] [Z] a confié l’entretien et la surveillance de son bateau dénommé « Ti One » à la société Lacoche Yacht Maintenance.
Faisant valoir que des factures émises entre les années 2017 et 2021 étaient demeurées impayées pour un total de 25.728,38 euros, la société Lacoche Yacht Maintenance a fait assigner M. [X] [Z] en paiement devant le tribunal judiciaire de Nice par acte du 17 novembre 2022.
Le 16 octobre 2023, M. [X] [Z] a saisi le juge de la mise en état de conclusions d’incident.
Dans ses dernières conclusions d’incident notifiées le 23 janvier 2024, M. [X] [Z] sollicite :
– que les demandes en paiement des factures émises entre l’année 2017 et le mois de novembre 2020 soient déclarées irrecevables car prescrites,
– le renvoi du litige à une audience ultérieure pour conclure sur le bien-fondé de la demande en paiement des autres factures,
– le paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il est fait valoir que l’article L. 218-2 du code de la consommation, en vertu duquel l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans, est applicable au litige. Or, il estime en conséquence que les demandes en paiements des factures émises plus de deux ans avant l’acte introductif d’instance du 14 novembre 2022 sont irrecevables car prescrites. Il considère que l’action ne pourra être poursuivie que pour les factures postérieures au mois de novembre 2020.
Dans ses écritures sur incident communiquées le 19 octobre 2023, la société Lacoche Yacht Maintenance conclut au rejet de la fin de non-recevoir ainsi qu’à la condamnation de M. [X] [Z] à lui payer la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle expose qu’elle poursuit le recouvrement de sept factures dont deux seulement ont été émis antérieurement au mois de novembre 2020. Elle fait valoir en tout état de cause que le délai de prescription a, conformément à l’article 2240 du code civil, été interrompu par la reconnaissance de son droit par le débiteur dans un e-mail du 29 avril 2021. Elle estime que cet incident devra être « joint » au fond car le demandeur reconnaît qu’en toutes hypothèses, une partie de ses demandes n’est pas prescrite.
L’incident a été retenu à l’audience du 13 juin 2024. La décision a été mise en délibéré au 17 septembre 2024.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription.
En vertu de l’article 789-6° du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non-recevoir.
Au terme de l’article L. 218-2 du code de la consommation, l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.
Le point de départ de ce délai se situe, conformément à l’article 2224 du code civil, au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer l’action concernée.
Il est acquis que le délai de prescription de l’action en paiement de factures, formée par un professionnel et soumise à l’article L. 218-2 du code de la consommation, court à compter du jour de l’établissement de la facture.
L’article 2240 du code civil précise que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription.
Si la reconnaissance expresse des droits du créancier n’est assujettie à aucune condition de forme, elle doit néanmoins être claire et sans équivoque.
En l’espèce, la société Lacoche Yacht Maintenance, professionnel, a fait assigner M. [X] [Z], consommateur, en paiement de factures émises les 1er avril 2017, 10 juin 2019, 18 novembre 2020, 24 mai 2021, 2 février 2022, 10 août 2022 et 7 octobre 2022.
Cette action en paiement introduite par acte du 17 novembre 2022 est soumise à un délai de prescription de deux ans à compter de l’établissement des factures, ce qui n’est pas discuté.
Or, les factures FA 878 d’un montant de 1.226,78 € du 1er avril 2017 et FA 1422 d’un montant de 1.210,20 € du 10 juin 2019 sont les seules factures antérieures au 17 novembre 2020 qui pourraient être atteintes par la prescription extinctive.
Toutefois, en réponse à un message électronique du 26 avril 2021 réclamant le paiement de la somme de 13.529,35 euros correspondant aux factures :
N 1899 du 16/02/21 : 876 € TTC
N 1851 du 18/11/20 : 792 € TTC
N 1702 du 04/06/20 : 8.140,32 € TTC
N 1193 du 07/06/19 : 387,45 € TTC
N 1812 du 11/10/20 : 802 € TTC
N 1662 du 12/03/20 : 266 € TTC
N 1493 du 04/09/19 : 266,62 € TTC
N 1422 du 10/06/19 : 1.210,10 € TTC
N 1331 du 28/02/19 : 792 € TTC,
M. [X] [Z] a répondu le 29 avril 2021 : « Veuillez m’envoyer les factures N 1702 et 1193 dûment modifiée que ce mois-ci je paierai et les autres le mois prochain. »
Ce message vaut donc reconnaissance par le débiteur de sa dette incluant la facture FA 1422 d’un montant de 1.210,20 € du 10 juin 2019 réclamée par l’acte introductif d’instance si bien que la prescription ayant été interrompu le 29 avril 2021, elle n’était pas expirée lors de la délivrance de l’acte introductif d’instance.
En revanche, cette reconnaissance ne vise pas la facture FA 878 d’un montant de 1.226,78 € émise le 1er avril 2017 puisqu’il ressort au contraire d’un message électronique de M. [X] [Z] qu’il a toujours contesté la devoir.
Dès lors, la demande en paiement de cette facture d’un montant de 1.226,78 € établies le 1er avril 2017 formée par assignation du 17 novembre 2022 est irrecevable car prescrite.
Par conséquent, seule la demande de paiement de la facture FA 878 d’un montant de 1.226,78 € émise le 1er avril 2017 sera déclarée irrecevable car prescrite.
La cause et les parties seront renvoyées à l’audience de mise en état du mercredi 11 décembre 2024 et le conseil de M. [X] [Z] sera invité à communiquer ses conclusions avant cette date.
Sur les demandes accessoires.
Succombant à l’incident, la société Lacoche Yacht Maintenance sera condamnée aux dépens de l’incident. L’équité ne commande pas en revanche, à ce stade de la procédure, de prononcer de condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile si bien que les parties seront déboutées de leurs demandes formées de ce chef.
Nous, juge de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, rendue en premier ressort, susceptible d’appel dans les conditions de l’article 795 du code de procédure civile:
DECLARONS la demande de paiement de la facture FA 878 d’un montant de 1.226,78 € émise le 1er avril 2017 par la société Lacoche Yacht Maintenance irrecevable car prescrite ;
DECLARONS recevable l’action en paiement de la société Lacoche Yacht Maintenance à l’encontre de M. [X] [Z] des autres factures ;
DISONS n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et déboutons les parties de leurs demandes formées de ce chef ;
RENVOYONS la cause et les parties à l’audience de mise en état du mercredi 11 décembre 2024 à neuf heures et invitons le conseil de M. [X] [Z] sera invité à communiquer ses conclusions avant cette date ;
CONDAMNONS la société Lacoche Yacht Maintenance aux dépens de l’incident.
Et la présente ordonnance a été signée par le Juge de la mise en état et le Greffier.
LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ÉTAT