En matière de location de matériel, le matériel loué reste la propriété de la société qui l’a acquis pour le mettre à disposition de ses clients.
L’accord du loueur, pour l’enlèvement du matériel est toujours nécessaire, de surcroît lorsque les conditions générales du contrat de location stipulent que tout déplacement de l’équipement doit être autorisé préalablement et par écrit par le loueur. |
Résumé de l’affaire : La société Isra-dis exploite un magasin et a souhaité s’équiper d’un système de vidéo surveillance, engageant deux chaînes de contrats en 2013 et 2015. En 2013, elle a signé des contrats de fourniture et de maintenance avec SLS et un contrat de location avec Atlance France. En 2015, elle a conclu de nouveaux contrats avec Save et Locam, incluant une clause de reprise du contrat SLS. Un litige a surgi lorsque Isra-dis a cessé de payer les loyers à Atlance, arguant que Save ne remboursait plus les loyers du premier contrat. Atlance a résilié le contrat de location en septembre 2017.
Isra-dis a ensuite assigné Save et Locam, mais a été déboutée par le tribunal de commerce de Marseille en mars 2019. La cour d’appel a ensuite annulé ce jugement en avril 2022, prononçant la résiliation du contrat de maintenance avec Save et la caducité du contrat de location avec Locam, tout en condamnant Save à verser des dommages-intérêts à Isra-dis. En 2018, Atlance a assigné Isra-dis pour le paiement des loyers dus, mais le tribunal a déclaré l’affaire incompétente. Isra-dis a ensuite assigné Save pour être garantie contre les condamnations d’Atlance. En septembre 2020, le tribunal a condamné Isra-dis à payer Atlance et a débouté ses demandes contre Save. Isra-dis a fait appel de ce jugement. Les parties ont formulé diverses demandes et prétentions, notamment concernant la résiliation des contrats et des demandes de dommages-intérêts. La cour a finalement confirmé certaines décisions du tribunal tout en statuant sur d’autres demandes, notamment en condamnant Save à garantir Isra-dis contre les demandes d’Atlance. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 10 OCTOBRE 2024
N°2024/193
Rôle N° RG 20/11436 – N° Portalis DBVB-V-B7E-
BGROL
S.A.S. ISRA-DIS
C/
S.A.S. ATLANCE FRANCE
S.A.S.U. GROUP SAVE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Karine TOLLINCHI
Me Mireille GRANIER
Me Marc FOLLANA
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 08 Septembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 2019F00272.
APPELANTE
Société ISRA-DIS S.A.S. poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Karine TOLLINCHI de la SCP CHARLES TOLLINCHI – CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMEES
Société ATLANCE FRANCE S.A.S. prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Mireille GRANIER de la SELARL GRANIER-MELCHIONNO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me MELCHIONNO Julien, avocat de la SELARL GRANIER-MELCHIONNO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Soiété GROUP SAVE S.A.S.U. anciennement dénommée SAVE, agissant poursuites et diligences de son président en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Marc FOLLANA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 Juillet 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président Rapporteur,
et Madame Laetitia VIGNON, conseiller- rapporteur,
chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président
Madame Laetitia VIGNON, Conseiller
Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller, magistrat rédacteur
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024.
Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La société Isra-dis exploite un magasin dénommé ‘utile’ situé à [Localité 4].
Ayant souhaité s’équiper d’un système de vidéo surveillance puis d’un nouveau matériel de même type plus récent, elle s’est engagée dans deux chaînes successives tripartites de contrats, impliquant chacune une location portant sur ledit matériel, d’abord en 2013 puis ensuite en 2015.
Concernant la première opération tripartite de 2013, la société Isra-dis a conclu les contrats suivants le 10 juillet 2013 :
-deux contrats de fourniture du matériel de vidéosurveillance, de maintien et d’entretien, avec la société SLS,
– un contrat de location avec la société Atlance France, d’une durée de 63 mois, commençant à courir à compter du 1 er août 2013 jusqu’au 31 octobre 2018.
Le 1er août 2013, le matériel loué auprès de la société Atlance France a fait l’objet d’un procès-verbal de réception.
Au titre du premier contrat de location, les loyers dus par la société locataire à la société Atlance France étaient prélevés sur le compte bancaire de la première.
La société SLS, qui devait assurer la maintenance du matériel loué, était placée en redressement judiciaire le 19 juillet 2016 puis en liquidation judiciaire le 21 mars 2017.
A partir de 2015, la société Isra-dis s’est engagée dans une seconde chaîne tripartite de contrats portant encore sur du nouveau matériel de vidéosurveillance. Elle a alors conclu les contrats suivants :
– le 1er décembre 2015, avec la société Save deux contrats de fourniture et de maintenance intitulés ‘contrat d’abonnement de télésurveillance avec option de prestation sécuritaire’et ‘contrat d’abonnement de vidéosurveillance’. Le second contrat comprend la mention suivante ‘ reprise contrat SLS’,
-avec la société Locam un contrat de location longue durée moyennant le versement de 60 loyers de 492 euros TTC.
La société Save a fourni le matériel loué selon le procès-verbal de livraison non daté.
En exécution de la clause du contrat du 1er décembre 2015 intitulé ‘contrat d’abonnement de vidéosurveillance’, conclu entre les sociétés Save et Isra-dis, prévoyant la ‘reprise contrat SLS’, la société Save remboursait à la société locataire les loyers payés par cette dernière à la première société de location.
Un litige s’est noué entre la société locataire, le premier loueur (Atlance France) et la société de fourniture et de maintenance de la seconde chaîne de contrats (société Save devenue Group Save).
La société Isra-dis a cessé de régler les loyers dus auprès de la société Atlance France (dans le cadre de la première location) en suspendant les prélèvements, au motif que la société Save, société de fourniture et de maintenance avec laquelle elle avait contracté dans le cadre de la deuxième opération tripartite de 2015, avait elle-même cessé de lui rembourser les mensualités du premier contrat de location.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 septembre 2017, la société Atlance France s’est prévalue de la résiliation du premier contrat de location
Une première procédure au fond a eu lieu concernant la seconde chaîne de contrats interdépendants conclus en 2015, la société Isra-dis ayant fait assigner les sociétés Save et Locam aux fins d’obtenir d’une part la résiliation des contrats de fourniture et de maintenance conclus avec la société Save aux torts de cette dernière et, d’autre part, la caducité du contrat de location conclu avec la société Locam.
Par jugement du 11 mars 2019, le tribunal de commerce de Marseille déboutait la société locataire de toutes ses demandes et la condamnait à payer à la société Locam les sommes dues en exécution du second contrat de location, soit la somme totale de 17 827, 60 euros au titre des loyers impayés.
Par arrêt prononcé le 28 avril 2022, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a infirmé le jugement et s’est en particulier prononcé en ces termes :
-prononce la résiliation à la date du 15 septembre 2017 du contrat de maintenance du 1er décembre 2015 liant la société locataire et la société Save aux torts exclusifs de cette dernière,
-prononce la caducité à la date du 15 septembre 2017 du contrat de location signé le 1er décembre 2015 entre les sociétés Isra-dis et Locam,
-condamne la société Locam à payer à la société Isra-dis la somme de 1722 euros au titre du remboursement des loyers payés postérieurement au 15 septembre 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2018,
-condamné la société Save à payer à la société Isra-dis la somme de 8000 euros de dommages-intérêts.
Pour prononcer la résiliation du contrat de fourniture et de maintenance du 1er décembre 2015 conclu entre les sociétés Isra-dis et Save, la cour d’appel retenait que la société de fourniture et de maintenance avait commis plusieurs graves manquements contractuels.
La cour précisait que la société Save avait, à tort, refusé d’intervenir au titre du contrat de maintenance du 1er décembre 2015 et refusé d’assurer ses prestations techniques de maintenance, pour un motif dénué de pertinence, à savoir que la société locataire ne remboursait plus les loyers dus dans le cadre du premier contrat de location conclu avec la société Atlance France en 2013. La cour rappelait que le contrat de maintenance du 1er décembre 2015 était indépendant du premier contrat de maintenance.
Toujours au titre des manquements commis par la société Save justifiant selon elle le prononcé de la résiliation des contrats de maintenance du 1er décembre 2015, la cour retenait que certaines caméras ne fonctionnaient pas. Par ailleurs, elle énonçait que la société Save avait été la première à ne pas respecter son engagement de reprise du contrat SLS. Enfin, la cour précisait que la société Save n’avait jamais pris en charge le paiement direct des mensualités dues au premier loueur, imposant dès lors à la société locataire de faire d’abord l’avance des loyers dus au titre du premier contrat de location.
Concernant la condamnation de la société Save à payer à la société Isra-dis des dommages-intérêts à hauteur de 8000 euros, la cour relevait que la société Save avait produit, devant le premier juge, de fausses factures qui avaient été prises en considération par ce dernier. La cour retenait aussi que la société Save avait volontairement mis en défaut la société locataire en versant des sommes à cette dernière au lieu d’effectuer les versements directement entre les mains de la société Atlance France.
Ensuite, en 2018, une deuxième procédure au fond opposait cette fois-ci la société locataire, le premier loueur et la société de fourniture et de maintenance de la seconde chaîne de contrats.
Par acte d’huissier signifié le 23 janvier 2018, la société Atlance France a fait assigner la société Isra-dis devant le tribunal de commerce de Nanterre en paiement des sommes dues au titre du premier contrat de location.
Selon un jugement du 17 octobre 2018, le tribunal de commerce de Nanterre s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Marseille.
Par acte d’huissier délivré le 10 octobre 2019, la société Isra-dis a fait assigner la société Save devant le tribunal de commerce de Marseille, en intervention forcée, notamment aux fins d’être relevée et garantie par cette dernière de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre à la requête de la société Atlance France.
Par jugement du 8 septembre 2020, le tribunal de commerce de Marseille s’est prononcé en ces termes :
vu la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à 1’épidémie de covid-19,
vu les dispositions de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale,
-joint les instances enrolées sous les numéros 2019F00272 et 2019F0l455, par application des dispositions de l’article 367 du code de procédure civile,
-condamne la société Isra-dis S.A.S. à payer à la société Atlance France S.A.S. la somme de 6.082,56 euros outre intérêts au taux applicable par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points (ancien article
L 441-6 du code de commerce) à compter de la date d’exigibilité de chacune des créances ainsi que la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-déboute la société Isra-dis de ses demandes reconventionnelles à l’encontre de la Société Atlance France,
-déboute la société Isra-dis de son appel en garantie diligenté à l’encontre de la société Save,
-condamne la société Isra-dis S.A.S. à payer à la société Save :
– 3.000 euros en application des modalités prévues par l’article 1240 du code civil pour procédure abusive,
– 2.000 euros au titre des frais irrépetibles occasionnés par la présente procédure,
conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile,
-condamne la société Isra-dis S.A.S. aux dépens toutes taxes comprises des instances jointes tels qu’énoncés par l’article 695 du code de procédure civile,
conformément aux dispositions de l’article 515 du code de procédure civile, ordonne pour le tout l’exécution provisoire,
-rejette pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement,
Pour se prononcer ainsi concernant la condamnation de la société Isra-dis à payer 6.082,56 euros à la société Atlance France, le tribunal de commerce estimait d’abord que ni le contrat de fourniture du matériel, ni le contrat de location n’étaient devenus caducs par suite de la mise en liquidation judiciaire de la société SLS.
Le tribunal précisait que la société Isra-dis ne démontrait pas la résiliation du contrat conclu avec la société SLS et que la cour de cassation avait dit que la liquidation judiciaire n’emportait pas, en elle-même, la résiliation ou l’anéantissement du contrat de telle manière qu’elle était sans conséquence sur le contrat interdépendant.
Le tribunal ajoutait, d’une part, qu’il refusait de prononcer la caducité du contrat de fourniture du matériel conclu avec la société SLS, laquelle n’était pas dans la cause et, d’autre part, que la société de location Atlance France avait pu à bon droit résilier le contrat de location.
Pour rejeter l’appel en garantie de la société Isra-dis dirigé contre la société Save, le tribunal estimait que la preuve d’une faute commise par cette dernière n’était pas démontrée. Il précisait, sur cette absence de faute, que la société Save avait respecté son engagement contractuel pris auprès de la locataire de lui rembourser les loyers préalablement payés à la société Atlance France au titre de la première location. Il ajoutait que ne constituait pas une faute, pour la société Save, le fait d’avoir cessé tout paiement envers la locataire lorsqu’elle avait compris que cette dernière avait elle-même cessé de régler ses loyers auprès du premier loueur.
Pour faire droit à la demande de dommages-intérêts de la société Save contre la société Isra-dis, pour procédure abusive, le tribunal estimait cette dernière avait fait preuve de mauvaise foi à l’encontre de la première, en ayant volontairement gardé pour elle les versements faits par la société Save, sans ensuite les réaffecter à la société Atlance France.
La société Isra-dis a formé un appel le 23 novembre 2020.
Sa déclaration d’appel est ainsi rédigée :’Objet/Portée de l’appel : L’appel tendant à la réformation du jugement ayant :
– condamné la société Isra-dis S.A.S. à payer à la Société Atlance France S.A.S. la somme de 6.082,56 euros outre intérêts au taux applicable par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points à compter de la date d’exigibilité de chacune des créances ainsi que la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté la société Isra-dis S.A.S. de ses demandes reconventionnelles à l’encontre de la Société Atlance France,
– débouté la société Isra-dis S.A.S. des fins de son appel en garantie diligenté à l’encontre de la société Save,
– condamné la société Isra-dis S.A.S. à payer à la société Save la somme de 3.000 euros en application de modalités prévues par l’article 1240 du code civil pour procédure abusive et la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles,
– condamné la Société Isra-dis aux dépens et ordonné l’exécution provisoire
– rejeté pour le surplus toutes autres demandes de la société Isra-dis.
L’instruction de la procédure était clôturée par ordonnance prononcée le 11 juin 2024.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 avril 2022, la société Isra-dis demande à la cour de :
-recevoir l’appel interjeté par la société Isra-dis et le déclarer bien fonde
– débouter la société Atlance et la société Group Save de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes,
-réformer le jugement en ce qu’il a :
– condamné la société Isra-dis à payer à la société Atlance France la somme de 6.082,56 euros outre intérêts au taux applicable par la Banque centrale européenne a son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points a compter de la date d’exigibilité de chacune des créances ainsi que la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de I’article 700 du code de procédure civile,
– débouté la société Isra-dis de ses demandes reconventionnelles à l’encontre de la société Atlance France,
– débouté la société Isra-dis des fins de son appel en garantie diligenté à l’encontre de la société Save,
– condamné la société Isra-dis à payer à la société Save la somme de 3.000 euros en application des modalités prévues par I’article 1240 du code civil pour procédure abusive et la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles occasionnes par la présente procédure,
-condamné la société Isra-dis aux dépens toutes taxes comprises des instances jointes tels qu’énoncés par l’article 695 du code de procédure civile,
statuant à nouveau,
-juger que la résiliation des contrats de prestation de services SLS est intervenue à l’initiative de la société SLS à la date du 1er décembre 2015, jour ou elle a procédé à l’enlèvement du matériel appartenant à la société Atlance dont elle était le fournisseur et l’installateur agréé,
vu l’article 1131 ancien du code civil,
vu la jurisprudence de la cour de cassation sur l’interdépendance des contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière,
– prononcer la caducité du contrat de location financière de la société Atlance à effet du 16 décembre 2015 pour défaut de cause et en raison de son interdépendance avec les contrats de prestations de services conclus avec la société SLS qui ont pris fin le 1er décembre 2015 au moment de l’enlèvement du matériel par la société SLS,
– juger que la résiliation du contrat de location financière notifiée le 15 septembre 2017 par la société Atlance est nulle et de nul effet,
vu les articles 1376 et 1378 anciens du code civil,
– condamner la société Atlance à restituer à la société Isra-dis les loyers perçus indûment au titre des échéances de décembre 2015 a juin 2017 inclus, soit la somme principale de 6.556,40 euros TTC outre les intérêts au taux REFI majore de 10 points a compter de la date d’exigibilité de chacune des créances,
-condamner la société Atlance France a verser à la société Isra-dis a somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Atlance France aux entiers dépens de première instance et d’appel, ceux d’appel étant distraits,
subsidiairement, si la société Isra-dis était déboutée de ses demandes,
– condamner la société Group Save à relever et garantir la société Isra-dis de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre sur les demandes de la société Atlance,
– condamner la société Group Save à payer la société Isra-dis la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Group Save aux entiers dépens de première instance et d’appel,ceux d’appel étant distraits.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 décembre 2023, la société Atlance France demande à la cour de :
vu les articles 1103, 1128, 1193, 1231-1, 1231-5, 1231-6, 1240 et 1892 et suivants du code civil,
vu l’article 1902 du code civil,
vu l’article L.441-10-II du code de commerce,
-dire recevable mais mal fondé l’appel interjeté par la société Isra-dis à l’encontre du jugement,
en conséquence :
-confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
-déclarer la société Isra-dis irrecevable en sa demande de résiliation du contrat de prestations de services conclu avec la société SLS et, par voie de conséquence, irrecevable en se demande subséquente de résiliation du contrat de location,
-débouter la société Isra-dis de l’ensemble de ses demandes, moyens et prétentions,
à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour venait à prononcer la résiliation du contrat conclu entre la société Isra-dis et la société SLS, ainsi que la résiliation subséquente du contrat de location, condamner la société Group Save à garantir la société Atlance France de l’ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, outre le paiement de la somme de 12.096 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi du fait de la résiliation du contrat de location n° 157228/01.
-condamner la société Isra-dis, ou tout autre succombant, à verser à la société Atlance France la somme de 6.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamner la société Isra-dis aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Mireille Granier, avocat au Barreau d’Aix-en-Provence, conformément aux dispositions de l’Article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 4 juin 2024, la société Group Save demande à la cour de :
-débouter la société Isra-dis de ses demandes dirigées contre la société Group Save (anciennement dénommée Save),
-dire irrecevables les demandes de la société Atlance dirigées contre la société Group Save (anciennement dénommée Save), comme constituant des prétentions nouvelles et ce en application des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile,
-confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a condamné la société Isra-dis au paiement à la société Group Save (anciennement dénommée Save) de la somme de 3000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive, de celle de 2000 euros au titre des frais irrépétibles et des dépens de 1 ère instance,
ajoutant au jugement dont appel, condamner la société Isra-dis au paiement à la société Group Save (anciennement dénommée Save) des sommes de :
– 3000 euros de dommages et intérêts pour appel abusif, en application des dispositions de l’article 1240 du code civil,
– 4000 euros au titre des frais irrépétibles de la société Group Save (anciennement dénommée Save) devant la cour d’appel, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– condamner la société Isra-dis aux dépens d’appel, en application des dispositions des articles 696 et suivants du code de procédure civile,
– juger que les intérêts échus sur ces condamnations, dus pour au moins une année entière, produiront intérêt, en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil.
1-sur l’interdépendance des contrats
L’article 1902 du code civil,cité par la société Atlance France dans ses conclusions, dispose que : « L’emprunteur est tenu de rendre les choses prêtées, en même quantité et qualité, et au terme convenu ».
Il est de principe que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants et que, de plus, sont réputées non-écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance.
Il en résulte que l’anéantissement de l’un quelconque d’entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres, sans que la reconnaissance de la caducité soit conditionnée par le constat de ce que, après l’anéantissement de l’un des contrats, l’exécution des autres serait devenue objectivement impossible.
En l’espèce, la société Isra-dis prétend que les contrats conclus en 2013 sont interdépendants, ce que conteste la société Atlance France.
En l’espèce, tant le contrat de location que le contrat de fourniture et de maintenance du matériel ont été conclus le même jour soit le 10 juillet 2013. Ils portent sur le même matériel de vidéosurveillance qui sera mis à disposition au profit de la même personne morale, la société Isra-dis. Ainsi, il s’agit d’une chaîne de contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière.
Pour s’opposer au constat de l’interdépendance des contrats du 10 juillet 2013, la société de location soutient que, selon le contrat de location, la société Isra-dis aurait renoncé à tout recours contre elle pour quelle que cause que ce soit.
La société de location s’appuie en particulier sur l’article 8.3 des conditions générales du location annexées au contrat de location stipulant en particulier que le locataire renonce à toute indemnité et droit à résiliation vis-à-vis du loueur.
Cependant, de telles clauses ne sont pas de nature à faire échec à l’interdépendance des contrats litigieux dès lors que sont réputées non-écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance.
La société Atlance France invoque encore l’effet relatif des contrats en citant l’article 1199 du code civil. Cependant, d’une part, cette disposition entrée en vigueur le 1er octobre 2016 n’est pas applicable aux contrats litigieux en ce qu’ils ont été conclus antérieurement à cette date, et, d’autre part, n’est pas de nature à faire obstacle au principe de l’interdépendance des contrats.
Ainsi, contrairement à ce que soutient la société Atlance France, les contrats conclus en 2013 sont bien interdépendants.
2-sur la recevabilité des demandes de la société Isra-dis relative à la résiliation des contrats de fourniture et de maintenance conclus en 2013 avec la société SLS
Selon l’article 14 du code de procédure civile :Nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée.
Dans le cadre de cette instance en appel, l’appelante présente en particulier les demandes suivantes :
-juger que la résiliation des contrats de prestation de services SLS est intervenue à l’initiative de la société SLS à la date du 1er décembre 2015, jour ou elle a procédé à l’enlèvement du matériel appartenant à la société Atlance dont elle était le fournisseur et l’installateur agréé,
-prononcer la caducité du contrat de location financière de la société Atlance à effet du 1er décembre 2015 pour défaut de cause et en raison de son interdépendance avec les contrats de prestations de services conclus avec la société SLS qui ont pris fin le 1er décembre 2015 au moment de l’enlèvement du matériel par la société SLS.
Ainsi, la société Isra-dis demande à la cour de dire que le contrat de prestations de services avec la société SLS est résilié à la date du 18 décembre 2015.
Or, comme le fait justement observer la société Atlance, la société Isra-dis n’a jamais mis en cause, tant en première instance qu’en appel, la société SLS.
Faute de mise en cause de la société SLS, il ne saurait être jugé que les contrats conclus entre celle-ci et la société Isra-dis le 1er décembre 2015 seraient résiliés.
Pour tenter d’échapper à l’irrecevabilité de ses demandes, la société Isra-dis entend implicitement se prévaloir d’une résiliation du contrat de prestation de services SLS qui serait déjà intervenue selon elle.
Cependant, l’appelante ne démontre pas suffisamment la réunion des conditions d’une supposée résiliation du contrat de prestation de services. En particulier, elle ne produit pas un quelconque courrier aux termes duquel la société SLS lui aurait notifié la résiliation du contrat de fourniture et de maintenance du 10 juillet 2013.
A supposer même que l’on puisse considérer que l’enlèvement du matériel loué constituerait une cause de résiliation du contrat de fourniture et de maintenance (ce qui n’est pas démontré), la société Isra-dis ne démontre pas, dans les faits, les circonstances dans lesquelles il serait intervenu, ni qui a pris l’initiative de le proposer et qui y a procédé.
En tout état de cause, le matériel loué restait la propriété de la société Atlance France, qui l’avait acquis auprès de la société SLS et rien ne démontre que la société Atlance France avait donné son accord pour que ce matériel soit enlevé. Cet accord du loueur, pour l’enlèvement, était d’autant plus nécessaire que les conditions générales du contrat de location stipulent que tout déplacement de l’équipement doit être autorisé préalablement et par écrit par le loueur.
En conséquence, la société Isra-dis ne démontre pas que le contrat du 10 juillet 2013 conclu avec la société SLS aurait été résilié par cette dernière au 1er décembre 2015.
L’appelante ne peut se prévaloir d’une supposée résiliation d’ores et déjà intervenue du contrat de prestation de service conclu avec la société SLS et il lui appartenait de mettre en cause cette dernière pour obtenir le prononcé de la résiliation dudit contrat.
Conformément à la demande de la société Atlance et confirmant le jugement, il y a lieu de déclarer irrecevable la demande de la société Isra-dis de voir juger que la résiliation des contrats de prestation de service SLS est intervenue à l’initiative de la société SLS à la date du 1er décembre 2015, jour où elle a procédé à l’enlèvement du matériel appartenant à la société Atlance dont elle était le fournisseur et l’installateur agréé.
3-sur la demande de la société de locataire de caducité du contrat de location financière du 10 juillet 2013
Les contrats de fourniture et de maintenance du 10 juillet 2013, conclus entre les sociétés Isra-dis et SLS n’étant pas anéantis, le contrat interdépendant de location conclu à la même date n’encourt aucune caducité.
Confirmant le jugement, la cour rejette la demande de la société Isra-dis de voir prononcer la caducité du contrat de location conclu avec la société Atlance France pour cause de résiliation du contrat de fourniture et de maintenance conclu avec la société SLS.
4-sur les demandes de la société Isra-dis de prononcé de la caducité du contrat de location financière conclu Atlance France pour défaut de cause
Aux termes de l’article 1131 du code civil, dans sa version en vigueur jusqu’au 1er octobre 2016 :L’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.
En outre, l’article 10.1 des conditions générales de location précisent que : « Tout déplacement de l’équipement hors du lieu d’installation précisé dans les conditions particulières doit être autorisé préalablement et par écrit par le loueur ».
Le moyen tiré de la prétendue résiliation du contrat de fourniture et de maintenance n’est pas le seul à être invoqué par la société locataire pour tenter d’obtenir la caducité du contrat de location financière de 2013.En effet, celle-ci invoque aussi le défaut de cause dudit contrat de location.
Concernant le défaut de cause du contrat de location financière, la société Isra-dis précise que :
-l’existence même du contrat de location financière était subordonnée à ce que le matériel fut à sa disposition,
-or, le matériel n’a pas été maintenu à sa disposition puisqu’il a au contraire été enlevé en décembre 2015.
-si la cause existait lors de la formation du contrat au moment de la livraison du matériel à la société Isra-dis, cette cause a disparu dès l’instant ou le matériel a été enlevé, non pas par la société Isra-dis ou un tiers non autorisé mais par la société SLS, agrée par la société Atlance France.
L’appelante invoque aussi une jurisprudence selon laquelle s’agissant des contrats à exécution successive, il est de jurisprudence constante que la disparition de la cause de l’engagement entraîne sa caducité.
Il est exact que si, pour apprécier la validité d’un contrat au regard de l’existence de sa cause, il faut se placer au moment de la conclusion dudit contrat, il n’en demeure pas moins que, dans le cas particulier d’un engagement à exécution successive, la disparition de la cause entraîne sa caducité.
En l’espèce, au soutien de sa demande de prononcé de caducité du contrat de location, la société Isra-dis invoque tout d’abord l’enlèvement du matériel par la société SLS.
Toutefois, le contrat de location a bien été causé tout au long de son existence, puisque la société de location a bien respecté son engagement d’acheter le matériel fourni par la société SLS et ensuite de louer ledit matériel à la société locataire.
Ce n’est pas la société de location qui a enlevé le matériel, ce serait une société tierce. Or, il n’est pas démontré que la société Isra-dis aurait sollicité l’accord de la société Atlance France avant que le matériel que lui louait cette dernière ne soit enlevé.
Rien ne permet d’affirmer que la société Isra-dis se serait opposée à la dépose du premier matériel de vidéosurveillance loué le 18 décembre 2015, alors même qu’elle venait de conclure de nouveaux contrats de fourniture et de location portant sur du nouveau matériel de vidéo surveillance le 1er décembre de la même année.
Le contrat de location conclu entre la société Isra-dis et la société Atlance France le 10 juillet 2013 stipule que tout déplacement de l’équipement hors du lieu d’installation doit être autorisé préalablement et par écrit par le loueur. De plus, le matériel n’était que loué à la société Isra-dis et c’est la société Atlance France qui en demeurait la propriétaire.
Le deuxième moyen opposé par la locataire, tiré de la caducité du contrat de location pour disparition de sa cause en cours d’exécution est inopérant.
La cour rejette la demande de la société Isra-dis de prononcer la caducité du contrat de location financière de la société Atlance France à effet du 1er décembre 2015 pour défaut de cause et en raison de son interdépendance avec les contrats de prestations de services conclus avec la société SLS qui ont pris fin le 1er décembre 2015 au moment de l’enlèvement du matériel par la société SLS.
La cour rejette la demande de la société Isra-dis de juger que la résiliation notifiée le 15 septembre 2017 par la société Atlance France est nulle et de nul effet.
Enfin, la cour, qui n’a pas prononcé la caducité du contrat de location conclu entre la société Isra-dis et la société Atlance France le 10 juillet 2013, ne peut que rejeter la demande en restitution de la société Isra-dis formée contre la société Atlance France à hauteur de 6 556, 40 euros TTC.
5-sur la demande de la société Atlance France en paiement des sommes dues au titre du contrat de location
Selon l’article 1134 du code civil, dans sa version en vigueur jusqu’au 1er octobre 2016 :Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.Elles doivent être exécutées de bonne foi.
L’article 1353 ancien du même code ajoute :Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
L’article 14.4 des conditions générales de location stipule expressément que : Le locataire doit verser au Loueur, sans mise en demeure préalable, outre les sommes dues à la date de résiliation, une somme égale au solde des loyers dus jusqu’au terme contractuel de la location.
L’article 14.5 des mêmes conditions ajoute : Pour assurerla bonne exécution du présent contrat de location et des conditions particulières, le locataire doit en outre payer une indemnité égale à 10 % du montant de la somme due en application de l’article 14.4 ci-dessus.
En l’espèce, la cour n’a pas prononcé la caducité du contrat de location au 1er décembre 2015 et celui-ci s’est donc exécuté jusqu’à la résiliation prononcée par la société de location le 15 septembre 2017.
La société Isra-dis devait régler les sommes dues en exécution du contrat de location du 10 juillet 2013, ce qu’elle n’a pas fait, ayant cessé de régler les loyers dus à compter du mois de juillet 2017.
Pour calculer le montant de la dette de la société Isra-dis, le tribunal a retenu que cette dernière était redevable envers la société Atlance France des sommes de :
-1036,80 euros au titre des loyers impayés de juillet à septembre 2017,
-4492, 80 euros au titre des loyers à échoir d’octobre 2017 à octobre 2018,
-552, 96 euros au titre de la clause pénale contractuelle (article 14 paragraphe 5 du contrat).
Le tribunal concluait que la société Isra-dis était recevable d’une somme totale de 6082, 56 euros envers la société Atlance France et la condamnait à payer cette somme à cette dernière.
L’intimée sollicite la confirmation du montant de la condamnation mise à la charge de la société Isra-dis, tandis que si la société Isra-dis demande l’infirmation de sa condamnation, elle ne critique pour autant pas, à titre subsidiaire, le montant de celle-ci. En particulier, elle ne sollicite pas la réduction des clauses pénales.
Confirmant le jugement, la cour condamne la société Isra-dis à payer à la société Atlance France la somme de 6.082,56 euros outre intérêts au taux applicable par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points (ancien article L 441-6 du code de commerce) à compter de la date d’exigibilité de chacune des créances.
7-sur l’appel en garantie formulée à titre subsidiaire par la société Isra-dis contre la société Save Groupe
Vu l’ancien article 1147 du code civil,
La société Isra-dis demande là a cour, pour le cas où elle serait déboutée de toutes ses demandes à l’encontre de la société Atlance France, de condamner la société Group Save à la relever et garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre sur les demandes de la société Atlance France.
La cour ayant débouté la société Isra-dis de ses demandes principales et l’ayant condamnée à régler à la société Atlance France une somme de 6082, 56 euros, doit examiner l’appel subsidiaire en garantie formé par cette dernière.
Concernant cet appel en garantie, la société Isra-dis reproche à la société Save Groupe d’avoir commis des fautes à l’origine de son propre défaut de paiement des loyers auprès du premier loueur, la société Atlance France.
Sur la nature de ces fautes, la société Isra-dis indique que :
-la société Group Save n’a pas soldé le contrat de location financière auprès de la société Atlance comme elle s’y était engagée mais a procédé au lieu de cela à des remboursements de loyers par virements bancaires après paiement des loyers,
-la société Group Save n’a pas respecté son engagement et a cessé les remboursements à la société Isra-dis. Suite à ce défaut de remboursement, la société Isra-dis s’est trouvée dans une situation financière délicate car elle devait payer deux loyers, l’un à la société Atlance France et l’autre à la société Locam,
-la société Group Save a refusé de réparer les caméras tombées en panne et fournies dans le cadre du second contrat de location conclu avec la société Locam.
Concernant les préjudices en lien avec les fautes reprochées à la société Group Save, la société Isra-dis prétend que c’est en raison du défaut de paiement effectué en toute connaissance de cause par la première, que la société Atlance France a engagé une procédure judiciaire à son encontre.
Pour s’opposer à la demande de dommages-intérêts présentée contre elle par la société Isra-dis, la société Group Save réfute avoir commis toute faute contractuelle à l’égard de cette dernière.
Pour la société Group Save, elle n’a jamais pris l’engagement de solder le premier contrat de location contrairement à ce que soutient la société Isra-dis, mais seulement de rembourser à cette dernière ses paiements après avoir été effectués au profit du premier loueur.
La société Group Save rétorque encore que si elle a arrêté les remboursements auprès de la société Isra-dis en février 2018 c’est uniquement parce que cette dernière avait elle-même cessé de régler les loyers dus au premier loueur à compter de juillet 2017 et ce contrairement à ses propres engagements contractuels.
Pour déterminer si la société Group Save a commis une ou des fautes contractuelles à l’égard de la société Isra-dis, il y a lieu d’abord de se référer aux clauses des contrats conclus entre elles et déterminant leurs obligations réciproques.
Concernant les obligations réciproques des parties au titre de la première location et de l’engagement financier de la société Save, le contrat conclu entre elles le 1er décembre 2015, intitulé ‘ contrat d’abonnement de télésurveillance avec option de prestation sécuritaire’, prévoit la seule mention très succincte suivante : ‘reprise contrat SLS’.
Quel que soit le sens que l’on donne à cette clause très succincte et nonobstant le fait que cette clause évoque seulement le ‘contrat SLS’, il n’en demeure pas moins qu’il résulte des débats que la commune intention des parties était que la société Group Save règle les sommes restant dues par la société Isra-dis à la société Atlance France au titre du premier contrat de location.
Sur la nature de cet engagement financier pris par la société Save auprès de la société Isra-dis, la société de fourniture et de maintenance indique d’ailleurs, en ce sens et dans ses conclusions : ‘la société Group Save (anciennement dénommée SAVE) a accepté de supporter le paiement des loyers dus à Atlance jusqu’au terme contractuel d’octobre 2018″.
Toujours concernant le sens à donner à cette clause, il n’est en revanche pas possible de soutenir, contrairement à ce que fait la société Group Save, qu’il existait aussi un accord des parties sur :
-le fait que l’engagement financier de la société Group Save de reprendre les mensualités dues au titre du premier contrat de location était subordonné à l’absence d’incident de paiement des loyers par la société Isra-dis au titre du premier contrat de location,
-le fait que l’engagement financier de la société Group Save doive se faire sous forme de remboursements à la société locataire des loyers payés par cette dernière à la société Atlance France au lieu d’un paiement directe des loyers restant dus au profit de cette dernière.
De plus, il importe peu de savoir que les parties, dans la pratique, ont mis en place un système financier selon lequel la société Isra-dis payait d’abord les loyers à la société Group Save et selon lequel la société Group Save remboursait ensuite, deux mois, après, à la société Isra-dis les loyers ainsi payés.
En effet, d’une part, la clause litigieuse ne prévoit nullement les modalités de prise en charge du contrat SLS, et, d’autre part, rien ne permet d’affirmer que la société Isra-dis consentait à la prise en charge du premier contrat de location financière par le biais de simples remboursements au lieu d’un paiement unique et direct auprès de la société Atlance France.
Bien au contraire, la société Isra-dis produit les copies de plusieurs courriers qu’elle a adressés, au cours de l’exécution des contrats de location conclus en 2013 et en 2015, à la société Save, lesquels témoignent de son désaccord sur cette pratique.
Ainsi, dans un courrier du 30 mars 2017, la société locataire rappelle à la société Save qu’elle a repris les contrats SLS et qu’elle doit ‘solder directement(…) Le financement pris auprès de la société Atlance’. Dans un autre courrier du 16 juin 2017, l’avocat de la société Isra-dis demande à la société Save ‘ de faire son affaire personnelle auprès d’Atlance des contrats SLS (…)sans que ma cliente ne soit inquiétée’.
En outre, même si la société locataire a cessé de payer les loyers dus au premier loueur, à compter de juillet 2017, commettant ainsi une faute contractuelle à l’égard du premier loueur au regard du premier contrat de location du 10 juillet 2013, elle n’a en revanche pas commis de faute contractuelle à l’égard de la société Group Save au regard du contrat distinct les liant (contrat du 1er décembre 2015).
En effet, il convient de rappeler qu’il ne résulte nullement des contrats conclus entre la société locataire et Group Save en 2015 que la première aurait pris l’engagement auprès de la seconde d’honorer le paiement de tous les loyers au titre de la première location. D’ailleurs, la mention relative à l’engagement financier de la société Group Save, extrêmement succincte, ne conditionne aucunement l’engagement de cette dernière à un paiement effectif des loyers par la société Isra-dis.
En revanche, en ayant cessé ses propres paiements à compter du mois de février 2018, au titre de la ‘reprise’ du premier contrat de location, la société Group Save a bien commis une faute contractuelle à l’égard de la société locataire au regard du contrat du 1er décembre 2105.
Par la faute de la société Group Save, la société locataire s’est retrouvée en défaut de paiement des loyers et le contrat de location conclu avec la société Atlance France a été résilié.
En effet, la société Isra-dis a dû alors assumer seule les coûts des deux contrats de location à partir du moment où la société Group Save a cessé ses remboursements, ce qui l’a placée en grande difficulté financière.
Faisant droit à l’appel en garantie de la société Isra-dis et infirmant le jugement, la cour condamne la société Group Save à relever et garantir la société Isra-dis de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre sur les demandes de la société Atlance france.
8-sur l’appel en garantie formé à titre subsidiaire par la société Atlance France contre la société Group France
Aux termes de l’article 564 du code procédure civile :A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
Selon l’article 565 du même code :Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
L’article 566 du code civil dispose enfin :Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Pour s’opposer à la demande d’appel en garantie dirigée contre elle, la société Group Save prétend d’abord qu’elle est irrecevable au motif qu’il s’agirait d’une demande nouvelle non déjà présentée en première instance.
A hauteur d’appel et pour la première fois, la société Atlance France présente, à titre subsidiaire, une demande d’appel en garantie contre la société Group Save rédigée en ces termes : ‘, condamner la Société Group Save à garantir la Société Atlance France de l’ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre outre le paiement de la somme de 12 096 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice financier subi du fait de la résiliation du contrat de location’.
La société Atlance France estime que sa demande d’appel en garantie n’est pas irrecevable, constituant une demande accessoire à sa demande principale d’exécution forcée du contrat de location présentée contre la société locataire.
Il est de principe que la cour d’appel est tenue d’examiner au regard de chacune des exceptions prévues aux textes susvisés si la demande est nouvelle.
Il résulte de l’article 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent soumettre à la cour d’appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles-ci soient l’accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge.
En première instance, la société Atlance France avait effectivement présenté une demande en paiement des loyers impayés, à l’encontre de la société locataire, en invoquant le contrat de location conclu entre elles le 10 juillet 2013.
Or, l’appel en garantie de la société Atlance France contre la société Save n’est pas l’accessoire de la demande précédente. En effet, la demande présentée en première instance est une demande de condamnation de la société locataire à lui payer des sommes alors que son appel en garantie est une demande de condamnation d’une société tierce à prendre en charge les sommes auxquelles la société Atlance France pourrait elle-même être condamnée.
Il convient donc de déclarer irrecevable la demande de la société Atlance France de condamnation de la société Group Save ‘à garantir la société Atlance France de l’ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre’.
9-sur la demande de la société Atlance France de dommages-intérêts contre la société Group Save
Vu les articles 564, 565, 565 du code de procédure civile précédemment cités,
A hauteur d’appel et pour la première fois, la société Atlance France présente une demande de dommages-intérêts contre la société Group Save à hauteur de 12 096 euros, somme correspondant aux loyers prévus de décembre 2015 à octobre 2018, terme du contrat de location.
Il est de principe que la cour d’appel est tenue d’examiner au regard de chacune des exceptions prévues aux textes susvisés si la demande est nouvelle.
Il résulte de l’article 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent soumettre à la cour d’appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles-ci soient l’accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge.
En première instance, la société Atlance France avait présenté une demande en paiement des loyers impayés, à l’encontre de la société locataire, en invoquant le contrat de location conclu entre elles le 10 juillet 2013.
Or, la demande additionnelle de la société Atlance France de dommages-intérêts dirigée contre la société Group Save, pour le cas où la cour prononcerait la caducité du contrat de location au 1er décembre 2105, n’est pas une demande accessoire à la demande précédente.
Il convient donc de déclarer irrecevable la demande de la société Atlance France de condamnation de la société Group Save à hauteur de 12 096 euros
10-sur les demandes de dommages-intérêts de la société Group Save contre la société Isra-dis
Vu l’article 1240 du code civil,
La société Group Save demande à la cour d’appel de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Isra-dis à lui payer une somme 3000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Elle sollicite en outre la condamnation de la même à lui payer une somme complémentaire de 3000 euros pour appel abusif.
Il ne saurait être fait droit aux demandes indemnitaires de la société Group Save, aucune faute ne pouvant être retenue contre la société Isra-dis dont le bien-fondé de l’appel en garantie contre cette dernière est consacré.
Infirmant le jugement, la cour rejette la demande de la société Group Save de condamnation de la société Isra-dis à lui payer une somme 3000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive.
La cour déboute également la même de sa demande complémentaire de 3000 euros pour appel abusif.
11-sur les frais du procès
Le jugement de première instance est infirmé concernant les dépens et l’article 700.
En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la société Group Save devra supporter la charge de ses propres dépens et sera également condamnée aux dépens de première instance et d’appel tant de la société Isra-dis dont distraction au profit de la SCP Tollinchi Bujoli Tollinchi que de la société Atlance France dont distraction au profit de Maître Mireille Granier, avocat au barreau d’Aix-en-Provence.
La société Group Save est condamnée à payer les sommes de 5 000 euros à la société Isra-dis et de 5 000 euros à la société Altance France à titre d’indemnités de procédure. La société Group Save est déboutée de ses demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile formée tant en première instance qu’à hauteur d’appel.
La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire :
-déclare irrecevable la demande de la société Isra-dis de juger que la résiliation des contrats de prestation de services SLS est intervenue à l’initiative de la société SLS à la date du 1er décembre 2015, jour où elle a procédé à l’enlèvement du matériel appartenant à la société Atlance france dont elle était le fournisseur et l’installateur agréé,
-confirme le jugement en ce qu’il :
-rejette la demande de la société Isra-dis de voir prononcer la caducité du contrat de location conclu avec la société Atlance France,
-rejette la demande de la société Isra-dis de juger que la résiliation du contrat de location financière est nulle et de nul effet,
-rejette la demande en restitution de la société Isra-dis formée contre la société Atlance France,
-condamne la société Isra-dis S.A.S. à payer à la Société Atlance France la somme de 6.082,56 euros outre intérêts au taux applicable par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points (ancien article L 441-6 du code de commerce) à compter de la date d’exigibilité de chacune des créances,
-infirme le jugement pour le surplus de ses dispositions soumises à la cour,
statuant à nouveau et y ajoutant,
-condamne la société Group Save à relever et garantir la société Isra-dis de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre sur les demandes de la société Atlance France,
– déclare irrecevable la demande de la société Atlance France de condamnation de la société Group Save ‘à garantir la société Atlance France de l’ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,’.
– déclare irrecevable la demande de la société Atlance France de condamnation de la société Group Save à lui payer la somme de 12 096 euros à titre de dommages-intérêts,
-rejette les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et pour appel abusif de la société Group Save contre la société Isra-dis,
-condamne la société Group Save à payer 5 000 euros à la société Isra-dis et 5 000 euros à la société Altance France à titre d’indemnités de procédure,
-rejette les demandes de la société Group Save au titre de l’article 700 du code de procédure civile formées tant en première instance qu’à hauteur d’appel ainsi qu’au titre des dépens tant pour la première instance qu’à hauteur d’appel,
-condamne la société Group Save aux entiers dépens de première instance et d’appel tant de la société Isra-dis dont distraction au profit de la SCP Tollinchi Bujoli Tollinchi que de la société Atlance France dont distraction au profit de Maître Mireille Granier, avocat au barreau d’Aix-en-Provence.
LE GREFFIER LE PRESIDENT