La révélation de l’existence, réelle ou supposée, de la relation extra-conjugale d’une présentatrice TV constitue une atteinte à sa vie privée.
En l’espèce, l’évocation par le magazine Public, sous le prétexte du récit d’une promenade, d’une relation sentimentale l’unissant les intéressés, agrémentée de détails et d’extrapolations sur la façon dont elle aurait débuté, son déroulement et leurs sentiments réciproques et le fait qu’ils “ne se cacheraient plus”, relève de la vie privée. Le fait que cette thématique ait été abordée par d’autres magazines ne confère aucun caractère notoire à cette relation dès lors que ce ne sont pas les intéressés eux-mêmes qui en ont fait état. Le simple fait que les intéressés soient des personnalités connues du public en raison de leurs fonctions de présentatrice et de chroniqueur à la télévision ne suffit pas à faire de cette relation sentimentale, strictement privée et sans incidence sur la vie de la cité ou des institutions, un événement d’actualité justifiant qu’ils soient photographiés et que leurs déplacements communs soient commentés. Par ailleurs, les photographies représentant les personnalmités en cause dans la rue ont été prises à l’insu de cette dernière et publiées sans son autorisation. L’atteinte à la vie privée de cette dernière est ainsi prolongée par l’utilisation de ces photographies qui attentent également aux droits qu’elle détient sur son image, dès lors qu’elles illustrent des informations illicites et sans que là non plus, cela soit rendu nécessaire par un débat d’intérêt général ou un rapport avec l’actualité. S’agissant de la photographie de plateau et de celle prise lors d’une manifestation publique, leur publication constitue aussi une atteinte au droit à l’image de la demanderesse dès lors qu’elles sont utilisées, sans son accord, hors de leur contexte initial de fixation, pour illustrer une information illicite. Les articles 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales et 9 du code civil garantissent à toute personne, quelles que soient sa notoriété, sa fortune, ses fonctions présentes ou à venir, le respect de sa vie privée et de son image. L’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales garantit l’exercice du droit à l’information des organes de presse dans le respect du droit des tiers. La combinaison de ces deux principes conduit à limiter le droit à l’information du public d’une part, pour les personnes publiques, aux éléments relevant de la vie officielle, et d’autre part, aux informations et images volontairement livrées par les intéressés ou que justifie une actualité ou un débat d’intérêt général. Ainsi chacun peut s’opposer à la divulgation d’informations ou d’images ne relevant pas de sa vie professionnelle ou de ses activités officielles et fixer les limites de ce qui peut être publié ou non sur sa vie privée, ainsi que les circonstances et les conditions dans lesquelles ces publications peuvent intervenir. |
Résumé de l’affaire :
Débats et AudienceL’audience s’est tenue le 25 septembre 2024, présidée par Sophie COMBES, sans opposition des avocats. Après avoir entendu les parties, le tribunal a été informé conformément à l’article 786 du code de procédure civile. Assignation et Demandes de [T] [Y]Le 21 février 2024, [T] [Y] a assigné la société CMI FRANCE, éditrice du magazine PUBLIC, pour atteinte à sa vie privée et à son droit à l’image, suite à la publication d’un article dans le numéro 1053 du magazine. [T] [Y] a demandé 20.000 euros pour atteinte à sa vie privée, 20.000 euros pour atteinte à son droit à l’image, 5.000 euros pour l’utilisation d’une photographie hors contexte, ainsi que d’autres mesures, y compris un communiqué judiciaire. Réponses de CMI FRANCEDans ses conclusions du 3 juin 2024, CMI FRANCE a demandé le déboutement de [T] [Y] ou, subsidiairement, une réparation symbolique d’un euro. La société a également demandé 3.000 euros pour ses frais de justice. Publication de l’Article ContestéL’article en question, publié dans le magazine PUBLIC, évoque la relation entre [T] [Y] et [E] [O], illustré par des photographies prises à leur insu. L’article décrit des moments de complicité entre les deux, ce qui a conduit [T] [Y] à se sentir exposée dans sa vie privée. Atteintes à la Vie Privée et au Droit à l’ImageLes articles 8 et 9 de la Convention européenne des droits de l’Homme garantissent le respect de la vie privée et de l’image. [T] [Y] a soutenu que l’article portait atteinte à sa vie sentimentale et à son droit à l’image, en publiant des photographies sans son consentement. CMI FRANCE a tenté de relativiser l’atteinte en arguant que d’autres médias avaient déjà évoqué la relation. Évaluation du PréjudiceLe tribunal a évalué le préjudice moral de [T] [Y] en tenant compte de l’exposition de son intimité affective et de la nature des atteintes. Bien que l’article ait causé un préjudice, le tribunal a noté que la relation n’était pas totalement dissimulée et que [T] [Y] avait déjà partagé des éléments de sa vie privée dans les médias. Décision du TribunalLe tribunal a condamné CMI FRANCE à verser 3.000 euros à [T] [Y] pour le préjudice moral, tout en déboutant les parties de leurs demandes supplémentaires. CMI FRANCE a également été condamnée à payer 2.000 euros pour les frais de justice de [T] [Y] et aux dépens. ConclusionLa décision a été rendue le 13 novembre 2024, avec des implications pour la protection de la vie privée des personnalités publiques et la responsabilité des médias dans la publication d’informations sensibles. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS
■
MINUTE N°:
17ème Ch. Presse-civile
N° RG 24/04890 – N° Portalis 352J-W-B7I-C35RE
S.C
Assignation du :
21 Février 2024
[1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
République française
Au nom du Peuple français
JUGEMENT
rendu le 13 Novembre 2024
DEMANDERESSE
[T] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Jean ENNOCHI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0330
DEFENDERESSE
S.A.S. CMI FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Patrick SERGEANT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B1178
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Magistrats ayant participé au délibéré :
Sophie COMBES, Vice-Présidente
Présidente de la formation
Anne-Sophie SIRINELLI, Vice-présidente
Gauthier DELATRON, Juge
Assesseurs
Greffier :
Viviane RABEYRIN, Greffier lors des débats et Amélie CAILLETET, Greffier lors de la mise à disposition
A l’audience du 25 Septembre 2024 tenue publiquement devant Sophie COMBES, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les parties, en rendu compte au tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du code de procédure civile.
JUGEMENT
Mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
Vu l’assignation délivrée le 21 février 2024 à la société CMI FRANCE, éditrice du magazine PUBLIC, à la requête d’[T] [Y], au visa de l’article 9 du code civil, au motif qu’il avait été porté atteinte au respect dû à sa vie privée et à son droit à l’image dans un article intitulé “[T] [Y] et [E] [O], ils ne se cachent plus” paru dans le magazine PUBLIC n°1053 daté du 15 septembre 2023,
Vu les conclusions notifiée par voie électronique le 28 août 2024, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, par lesquelles [T] [Y] demande au tribunal:
– de condamner la société CMI FRANCE à lui verser la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à sa vie privée,
– de condamner la société CMI FRANCE à lui verser la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à son droit à l’image,
– de condamner la société CMI FRANCE à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à son droit à l’image pour la publication de la photographie identitaire utilisée hors contexte,
– d’ordonner la publication en page de couverture du premier numéro du magazine PUBLIC à paraître dans les huit jours après la signification de la décision à intervenir, d’un communiqué judiciaire, dont la teneur est précisée, sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard,
– de se réserver la liquidation de l’astreinte,
– de faire interdiction à la défenderesse de publier à nouveau tout ou partie des photographies publiées dans le magazine PUBLIC n°1053, sous astreinte de 10.000 euros par photographie,
– de condamner la société défenderesse à lui verser la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile au bénéfice de Maître Jean ENNOCHI,
Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 3 juin 2024, par lesquelles la société CMI FRANCE demande au tribunal, au visa des articles 9 du code civil et 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme :
– de débouter [T] [Y] de ses demandes,
– subsidiairement, de ne lui allouer qu’une réparation de principe évaluée à un euro,
– la condamner à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,
Vu l’ordonnance de clôture rendue le 18 septembre 2024,
Les parties ont oralement soutenu leurs écritures lors de l’audience du 25 septembre 2024.
A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 13 novembre 2024, par mise à disposition au greffe.
Sur la publication litigieuse
[T] [Y] est journaliste et présente l’émission “C à vous” diffusée sur la chaîne de télévision France 5.
L’hebdomadaire PUBLIC n°1053, daté du 15 septembre 2023, consacre à la demanderesse ses pages intérieures 8 et 9 (extrait du magazine communiqué en pièce n°1 en demande).
L’article est annoncé en page de couverture sous le titre “[T] [Y] et [E] [O] Ils ne se cachent plus ! Entre la présentatrice et son chroniqueur, c’est une affaire qui roule…”. Cette annonce est illustrée d’une photographie, prise sur la voie publique, qui les montre debout côte à côte, les visages rapprochés, prêts à s’embrasser, la demanderesse tenant son vélo à la main.
L’article comporte notamment les propos suivants :
“Quelques mois après leur coup de coeur, la présentatrice et le chroniqueur semblent vouloir vivre leur histoire au grand jour. Pas question de la jouer C tabou !
Ce vendredi 8 septembre, en début de soirée, l’été indien donne un air de vacances à la capitale. Dans le très chic 7ème [Localité 5], les gens se promènent, savourant cette rentrée d’une douceur peu coutumière. Parmi eux, un duo paraît particulièrement complice : elle, à côté de son vélo, n’est que sourires, pendant que lui la dévore des yeux, avant de l’embrasser dans le cou. Un couple lambda ? Pas vraiment non. Car les nombreux passants ne tarderont pas à reconnaître deux visages phares du Paf français : l’animatrice [T] [Y] et [E] [O], son chroniqueur, et à l’évidence, un peu plus que ça… Quelques minutes plus tôt, ils étaient encore en plateau, pour un C à vous riche en invités. (…) Mais comme chaque soir dans l’émission, un moment a semblé particulièrement réjouir [T] : Les actualités de [E] [O], la chronique que ponctuent les éclats de rire de la présentatrice. (…) Elle est extrêmement friande de l’humour du trentenaire… A l’écran mais également en privé, visiblement. Car en mai dernier, alors que le programme était délocalisé au festival de [Localité 6], leur entente aurait, semble-t-il, évolué, passant d’une tendresse télévisuelle à une relation beaucoup plus personnelle, comme le révélaient nos confrères de Voici cet été. Une histoire toutefois compliquée, tous deux ayant des vies de famille déjà bien remplies. Mais à la discrétion des débuts a aujourd’hui succédé quelques chose de manifestement plus assumé. Pas question de se cacher ! Ce 8 septembre, parmi les passants, ils ne prenaient pas beaucoup de précautions afin de masquer leur connivence.Or depuis qu’ils évoluent dans ce milieu, ils savent bien qu’ils ne passent pas inaperçus. (…) Reste que pour la pétillante animatrice, ce coup de coeur a été une bouffée d’air frais dans une vie d’apparence bien rangée. (…)”.
L’article est illustré des six photographies suivantes, dont quatre sont prises sur la voie publique et, ce qui n’est pas contesté par la défenderesse, à l’insu de la demanderesse :
– une photographie grand format occupant toute une page, similaire à celle figurant en page de couverture, portant en surimpression l’inscription “Paris 08/09/2023”,
– deux photographies faisant suite à la première où [E] [O] embrasse la demanderesse dans le cou,
– une photographie les montrant en train de marcher dans la rue, la demanderesse tenant son vélo à la main,
– deux photographies prises au festival de [Localité 6], l’une sur le plateau de l’émission montrant [E] [O] en train d’embrasser la demanderesse, et l’autre les montrant en tenue de soirée lors d’un événement public.
Sur les atteintes à la vie privée et au droit à l’image
Les articles 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales et 9 du code civil garantissent à toute personne, quelles que soient sa notoriété, sa fortune, ses fonctions présentes ou à venir, le respect de sa vie privée et de son image.
L’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales garantit l’exercice du droit à l’information des organes de presse dans le respect du droit des tiers.
La combinaison de ces deux principes conduit à limiter le droit à l’information du public d’une part, pour les personnes publiques, aux éléments relevant de la vie officielle, et d’autre part, aux informations et images volontairement livrées par les intéressés ou que justifie une actualité ou un débat d’intérêt général. Ainsi chacun peut s’opposer à la divulgation d’informations ou d’images ne relevant pas de sa vie professionnelle ou de ses activités officielles et fixer les limites de ce qui peut être publié ou non sur sa vie privée, ainsi que les circonstances et les conditions dans lesquelles ces publications peuvent intervenir.
La demanderesse reproche principalement à l’article ci-dessus décrit de s’immiscer dans sa vie sentimentale en révélant l’existence, réelle ou supposée, de la relation extra-conjugale qu’elle entretiendrait avec [E] [O]. Elle souligne que la défenderesse ne peut s’abriter derrière des articles antérieurs évoquant cette relation dès lors que ces derniers étaient illicites. Elle dénonce par ailleurs une atteinte à son droit à l’image par la diffusion, sans son autorisation, d’une photographie professionnelle détournée de son contexte initial de fixation ainsi que de photographies prises à son insu sur la voie publique.
La société défenderesse affirme que l’atteinte doit être relativisée dès lors qu’il ne s’agit pas d’une révélation, d’autres magazines ayant fait état de cette relation, et l’article ne faisant que commenter les manifestations publiques de cette tendresse.
L’évocation, sous le prétexte du récit d’une promenade du “8 septembre 2023”, d’une relation sentimentale l’unissant à [E] [O], agrémentée de détails et d’extrapolations sur la façon dont elle aurait débuté, son déroulement et leurs sentiments réciproques et le fait qu’ils “ne se cacheraient plus”, relève de la vie privée d’[T] [Y]. Le fait que cette thématique ait été abordée par d’autres magazines ne confère aucun caractère notoire à cette relation dès lors que ce ne sont pas les intéressés eux-mêmes qui en ont fait état.
Au vu de ces éléments, alors qu’il appartient à chacun de fixer les limites de ce qui peut être publié ou non sur sa vie privée, ainsi que les circonstances et les conditions dans lesquelles ces publications peuvent intervenir, l’atteinte à la vie privée de la demanderesse apparaît constituée.
Il sera ici souligné que le simple fait que la demanderesse et [E] [O] soient des personnalités connues du public en raison de leurs fonctions de présentatrice et de chroniqueur à la télévision ne suffit pas à faire de cette relation sentimentale, strictement privée et sans incidence sur la vie de la cité ou des institutions, un événement d’actualité justifiant qu’ils soient photographiés et que leurs déplacements communs soient commentés.
Les photographies représentant [E] [O] et la demanderesse dans la rue ont été prises à l’insu de cette dernière et publiées sans son autorisation. L’atteinte à la vie privée de cette dernière est ainsi prolongée par l’utilisation de ces photographies qui attentent également aux droits qu’elle détient sur son image, dès lors qu’elles illustrent des informations illicites et sans que là non plus, cela soit rendu nécessaire par un débat d’intérêt général ou un rapport avec l’actualité. S’agissant de la photographie de plateau et de celle prise lors d’une manifestation publique, leur publication constitue aussi une atteinte au droit à l’image de la demanderesse dès lors qu’elles sont utilisées, sans son accord, hors de leur contexte initial de fixation, pour illustrer une information illicite.
Sur les mesures sollicitées
Si la seule constatation de l’atteinte à la vie privée et au droit à l’image par voie de presse ouvre droit à réparation, le préjudice étant inhérent à ces atteintes, il appartient au demandeur de justifier de l’étendue du dommage allégué, le préjudice étant apprécié concrètement, au jour où le juge statue, compte tenu de la nature des atteintes et des éléments versés aux débats.
Par ailleurs, dans les cas où le demandeur s’est largement exprimé sur sa vie privée, cette attitude, de nature à attiser la curiosité du public, ne le prive pas de toute protection de sa vie privée mais justifie une diminution de l’appréciation de son préjudice.
Il sera ici précisé que le dommage résultant pour [T] [Y] de l’article litigieux sera évalué de façon globale, le préjudice causé par l’atteinte à la vie privée étant indissociable de celui causé à son droit à l’image, les photographies litigieuses, y compris celles identitaires, étant le strict reflet du contenu de l’article.
Pour évaluer l’étendue du préjudice moral de la demanderesse, il convient de prendre en considération le fait qu’elle subit l’exposition de son intimité affective, dans un article agrémenté de photographies, prises à son insu lors d’un moment privé ou détournées de leur contexte. Il sera au surplus relevé que l’article est annoncé en page de couverture, ce qui est propre à attirer l’attention d’un public plus large que celui des seuls acheteurs du magazine et, ainsi, à aggraver le préjudice subi.
D’autres éléments commandent néanmoins de minorer le préjudice subi.
Il sera d’abord relevé que l’article litigieux fait état d’une relation affective dont les manifestations étaient exposées aux yeux de tous par les intéressés, comme le montrent les photographies prises dans la rue, lieu où la demanderesse était visible du public. Si le récit de cette relation à un large public, par voie de presse, a évidemment une incidence pour la demanderesse et entraîne pour elle un préjudice indéniable devant être réparé, il n’est pas équivalent à celui qui résulterait de la révélation stricto sensu de cette relation, laquelle n’était pas dissimulée par les intéressés.
Il sera en outre relevé, au vu des vêtements portés par [T] [Y] et [E] [O], que les photographies ont été prises dans un même trait de temps.
Il sera, de plus, souligné que la demanderesse ne produit aucune pièce démontrant le préjudice spécifique résultant pour elle de la diffusion de l’article et des photographies, au-delà de celui résultant nécessairement de ce type de publication.
Il apparaît par ailleurs, au vu des pièces communiquées par la société défenderesse, que la demanderesse s’est déjà exprimée dans les médias (notamment ses pièces n°3 à 9) et sur les réseaux sociaux (notamment sa pièce n°10) sur des sujets privés comme son enfance, son mal-être, sa vie familiale. Il peut notamment être relevé un entretien paru le 28 février 2022 dans du magazine TéléStar où elle fait part du déroulement de ses soirées avec son mari et ses enfants, un entretien du 30 mai 2022 où elle évoque sa relation avec son époux, ou encore un entretien du 1er juillet 2018 dans le magazine Psychologie où elle fait part d’une période dépressive et de son rapport à son corps. Cette complaisance d’un personne jouissant d’une importante notoriété télévisuelle est de nature à attiser la curiosité du public et à relativiser sa sensibilité à l’évocation d’éléments de sa vie privée par un magazine ainsi que l’importance qu’elle accorde à la protection de sa vie privée.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, il convient d’allouer à [T] [Y], à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, la somme de 3.000 euros au titre de l’atteinte faite au droit au respect de sa vie privée et à son droit à l’image au sein de l’article publié dans le magazine PUBLIC n°1053.
Il n’y a en revanche pas lieu d’interdire pour l’avenir à la société défenderesse de publier les photographies figurant dans l’article paru dans le magazine dès lors que la licéité de chaque publication est appréciée in concreto par le juge. Il sera néanmoins rappelé que chaque diffusion irrégulière peut être sanctionnée.
Enfin, le préjudice étant ainsi suffisamment réparé, il ne sera pas fait droit à la demande de publication de communiqué judiciaire.
Sur les demandes accessoires
Il serait inéquitable de laisser au demandeur la charge des frais irrépétibles qu’elle a dû exposer pour la défense de ses intérêts vis-à-vis de la société CMI FRANCE. Il y a lieu en conséquence de condamner la société défenderesse à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La société CMI FRANCE sera condamnée aux entiers dépens, avec autorisation pour Maître Jean ENNOCHI, avocat, de recouvrer directement ceux qu’il aura exposés, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Statuant, après débats publics, par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort :
Condamne la société CMI FRANCE à verser à [T] [Y] la somme de 3.000 euros en réparation du préjudice moral résultant de l’atteinte faite au droit au respect de sa vie privée et à son droit à l’image au sein de l’article paru dans le magazine PUBLIC n°1053 daté du 15 septembre 2023, outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne la société CMI FRANCE à verser à [T] [Y] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société CMI FRANCE aux dépens avec autorisation pour Maître Jean ENNOCHI, avocat, de recouvrer directement ceux qu’elle aura exposés, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Fait et jugé à Paris le 13 Novembre 2024
Le Greffier La Présidente