Your cart is currently empty!
Après la résiliation du contrat de franchise assorti d’une licence de marque (ERA), le franchiseur peut obtenir contre ses anciens franchisés, une injonction de faire cesser tout usage des éléments d’identification de sa marque sur tout support et en tout lieu, notamment sur et dans leur agence et auprès du registre du commerce et des sociétés en détruisant lesdits éléments d’identification.
Par ailleurs, un contrat de franchise peut être passé entre le franchiseur et des personnnes agissant tant en leur « nom personnel qu’en qualité de représentant (sic) de leur société », tous dénommés « le franchisé ». Il en résulte alors implicitement mais nécessairement que le contrat institue des obligations solidaires entre l’ensemble des personnes physiques et morales regroupées sous la qualité de franchisé. Il convient de rappeler à cet égard que le caractère commercial du contrat apparaît indiscutable, de sorte que la solidarité est présumée (solution constante, Com., 21 avril 1980, pourvoi n° 78-14.765, P). Il n’y a donc pas plus de contestation sérieuse de ce chef. |
Résumé de l’affaire : La société Era France, titulaire de la licence de la marque Era, a conclu un contrat de franchise avec la société PGI pour l’exploitation d’une agence immobilière. En juin 2023, Era France a assigné PGI et ses dirigeants devant le tribunal de commerce de Paris, réclamant des paiements et la transmission de documents comptables. Le 4 octobre 2023, le juge a condamné PGI et ses dirigeants à payer une provision et à transmettre certains documents, tout en déboutant Era France de certaines demandes. PGI et ses dirigeants ont interjeté appel, contestando la décision. Era France a également formulé un appel incident pour obtenir des condamnations supplémentaires. Le 28 mars 2024, l’ordonnance de clôture a confirmé la décision initiale tout en ajoutant des condamnations pour les frais d’appel.
|
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 3
ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2024
(n° 304 ,6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/17565 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CIOEQ
Décision déférée à la cour : ordonnance du 04 octobre 2023 – président du TC de [Localité 7] – RG n° 2023036799
APPELANTS
M. [L] [M]
[Adresse 5]
[Localité 3]
M. [D] [X]
[Adresse 2]
[Localité 3]
S.A.R.L. PGI, RCS de Toulouse n°751998766, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentés par Me Nadia BELAÏD de la société NB AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2253
Ayant pour avocat plaidant Me Edouard JUNG, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMEE
S.A.S. ERA FRANCE, RCS de Versailles n°390051464, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP CAROLINE REGNIER AUBERT – BRUNO REGNIER, AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
Ayant pour avocat plaidant Me Nathalie KORCHIA, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 juin 2024, en audience publique, devant Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre chargé du rapport, et Valérie GEORGET, conseillère, les avocats ne s’y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre
Anne-Gaël BLANC, conseillère
Valérie GEORGET, conseillère
Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Anne-Gaël BLANC, conseillère, le président de chambre empêché, et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.
La société Era France est titulaire de la licence d’exploitation de la marque Era pour la France et dispose à ce titre d’un réseau de franchises de produits immobiliers sous l’enseigne Era.
Le 3 avril 2018 elle a consenti un contrat de franchise à la société PGI, portant sur l’exploitation d’une agence immobilière sous l’enseigne Era Capitole à [Localité 3] (31), d’une durée de cinq ans renouvelable par tacite reconduction pour une même période de cinq ans.
Par acte extrajudiciaire du 12 juin 2023, la société Era France a fait assigner la société PGI, MM. [M] et [X] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris en lui demandant notamment de :
condamner solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] à lui payer la somme de 10 735,44 euros TTC en principal, augmentée des intérêts à compter de la dernière mise en demeure du 24 février 2023, sauf à parfaire au vu des documents comptables ci-dessous à communiquer ;
faire injonction, solidairement à la société PGI, M. [M] et M. [X] de lui transmettre sous astreinte :
leurs éléments comptables, bilans et grands livres des produits non centralisés au titre de 2021, 2022 et 2023,
les bordereaux de déclaration de chiffre d’affaires et de TVA de novembre 2022 à février 2023 inclus,
la liste exhaustive de tous les actes de mutation de biens et droits immobiliers (notamment les promesses de ventes, promesses, d’achat, cessions de baux, cessions de fonds de commerce) en cours à la date de résiliation soit le 18 février 2023, inclus avec les noms et coordonnées des notaires rédacteurs d’actes chargés de la régularisation de ces actes, conformément à l’article 10 du contrat de franchise,
tous ces documents devant être certifiés par leur comptable et président, conformément à l’article 5.8 alinéa 4 du contrat de franchise, pour permettre de calculer les redevances et contributions contractuellement dues au franchiseur sur ces transactions ;
condamner solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] à lui payer les frais de retard de 50 euros par jour à compter de la dernière mise en demeure soit le 24 février 2023 jusqu’à parfait paiement ainsi que les frais de constats d’huissier pour 410 euros TTC ;
condamner solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] à lui verser la somme de 2 886 euros sauf à parfaire au vu des documents comptables par ailleurs sollicités, en principal, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l’ordonnance à intervenir ;
faire injonction, solidairement à la PGI, M. [M] et M. [X] d’avoir à cesser sans délai à compter du prononcé de l’ordonnance tout usage des éléments d’identification Era sur tout support et en tout lieu, notamment sur et dans leur agence et auprès du registre du commerce et des sociétés en détruisant lesdits éléments d’identification en justifiant auprès de la société Era France dans le délai de 8 jours à compter du prononcé de l’ordonnance à intervenir par tout constat d’huissier qu’ils devront faire dresser à leurs frais et contradictoirement sous astreinte de 300 euros par jour de retard conformément à l’article 10 du contrat de franchise.
Par ordonnance du 4 octobre 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, a :
condamné solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] à payer, à titre de provision, à la société Era France la somme de 10 735,44 euros TTC en principal, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la dernière mise en demeure du 24 février 2023, sauf à parfaire au vu des documents comptables ci-dessous à communiquer ;
fait injonction solidairement à la SARL PGI, M. [M] et M. [X] de transmettre à la société Era France sous astreinte de 100 euros par jour, déboutant pour le surplus demandé, à compter du 8e jour suivant la signification de l’ordonnance :
leurs éléments comptables, bilans et grands livres des produits non centralisés au titre de 2021, 2022 et 2023,
les bordereaux de déclaration de chiffre d’affaires et de TVA de novembre 2022 à février 2023 inclus,
la liste exhaustive de tous les actes de mutation de biens et droits immobiliers (notamment les promesses de ventes, promesses, d’achat, cessions de baux, cessions de fonds de commerce) en cours à la date de résiliation soit le 18 février 2023, inclus avec les noms et coordonnées des notaires rédacteurs d’actes chargés de la régularisation de ces actes, conformément à l’article 10 du contrat de franchise ;
tous ces documents devant être certifiés par leur comptable et président, conformément à l’article 5.8 alinéa 4 du contrat de franchise, pour permettre de calculer les redevances et contributions contractuellement dues au franchiseur sur ces transactions ;
condamné solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] à payer à titre de provision à la société ERA France les frais de constats d’huissier pour 410 euros TTC, déboutant pour le surplus demandé ;
débouté la société Era France de sa demande de paiement de la somme de 2 886 euros sauf à parfaire au vu des documents comptables qui sont par ailleurs sollicités, en principal ;
fait injonction solidairement à la société PGI, M. [M] et M. [X] de cesser sans délai à compter de la signification de l’ordonnance tout usage des éléments d’identification Era sur tout support et en tout lieu, notamment sur et dans leur agence et auprès du registre du commerce et des sociétés en détruisant lesdits éléments d’identification en en justifiant auprès de la société Era France dans le délai de 8 jours à compter de la signification de l’ordonnance par tout constat d’huissier qu’ils devront faire dresser à leurs frais et contradictoirement sous astreinte de 100 euros par jour de retard conformément à l’article 10 du contrat de franchise, déboutant pour le surplus demandé ;
rejeté toutes demandes autres, plus amples ou contraires des parties ;
condamné solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] à payer à la société Era France la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamné en outre solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] aux dépens de l’instance.
Par déclaration du 27 octobre 2023, la société la société PGI, M. [M] et M. [X] ont interjeté appel de cette décision en critiquant l’ensemble de ses chefs de dispositif, sauf en ce qu’elle a débouté la société Era France de sa demande de paiement de la somme de 2 886 euros sauf à parfaire au vu des documents comptables qui sont par ailleurs sollicités, en principal.
Aux termes de leurs dernières conclusions en date du 12 décembre 2023 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens développés, ils demandent à la cour de :
réformer intégralement la décision entreprise ;
débouter intégralement la société Era France de ses demandes de condamnation formulées à l’encontre de M. [X] et de M. [M] à titre personnel ;
mettre purement et simplement hors de cause M. [M] et M. [X] ;
débouter la société Era France de toutes ses demandes ;
débouter intégralement la société Era France de l’intégralité de ses demandes qui se heurtent à des contestations sérieuses ;
condamner la société Era France au paiement de la somme de 3 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens de l’instance.
La société Era France, aux termes de ses dernières conclusions en date du 11 janvier 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour de :
déclarer la SARL PGI, M. [M] et M. [X] mal fondés en leur appel ; les en débouter ;
la recevoir en son appel incident ;
y faisant droit,
infirmer l’ordonnance du 4 octobre 2023 en ce qu’elle a :
débouté la société ERA France de sa demande au titre des frais de retard de 50 euros par jour à compter de la dernière mise en demeure soit le 24 février 2023 jusqu’à parfait paiement ;
débouté la société Era France de sa demande de condamnation solidaire de la société PGI, M. [M] et M. [X] à lui verser à la somme de 2 886 euros sauf à parfaire au vu des documents comptables par ailleurs sollicités, en principal, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l’ordonnance à intervenir ;
statuant à nouveau,
condamner solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] à lui payer les frais de retard de 50 euros par jour à compter de la dernière mise en demeure soit le 24 février 2023 jusqu’à parfait paiement ;
condamner solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] à payer à la société ERA France à la somme de 2 886 euros sauf à parfaire au vu des documents comptables par ailleurs sollicités, en principal, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir ;
confirmer l’ordonnance du 4 octobre 2023 pour le surplus ;
en conséquence,
débouter la société PGI, M. [M] et M. [X] de l’ensemble de leur demandes ;
y ajoutant,
porter l’astreinte à 300 euros par jour à compter de la date de la signification de la décision à intervenir au titre de la communication des éléments comptables ;
porter à 300 euros par jour à compter de la date de la signification de la décision à intervenir l’astreinte au titre de l’usage des éléments d’identification Era ;
condamner solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamner solidairement la société PGI, M. [M] et M. [X] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 mars 2024.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
Sur ce,
MM. [M] et [X] font valoir que lors de la conclusion du contrat de franchise le 3 avril 2018, la société SB transaction était constituée uniquement par M. [M] et a été transformée en SARL PGI par le biais d’une augmentation de capital réalisée le 5 avril 2018 intégrant M. [X] en qualité d’associé et modifiant la dénomination sociale de SB transaction en PGI. Selon les appelants, M. [M] ne pouvait valablement engager la société PGI dans sa nouvelle configuration qui n’existait pas encore, pour n’avoir été adoptée qu’à partir du 5 avril 2018.
Ils soutiennent que le contrat de franchise a été exclusivement exécuté par la société PGI, et ne peut valablement impliquer des obligations à la charge de MM. [M] et [X] à titre personnel, ces derniers n’ayant jamais eu à titre personnel l’usage de la marque Era ou des services.
Ils ajoutent qu’à aucun moment du contrat de franchise, la solidarité entre eux n’est instituée de sorte que la décision attaquée encourt manifestement la réformation.
Cependant, le moyen selon lequel M. [M] ne pouvait engager la société PGI qui ne portait pas encore ce nom manque en droit puisqu’il résulte des pièces produites par les appelants que la personne morale engagée a simplement changé de nom entre le 3 et 5 avril 2018, de sorte que les obligations contractées le 3 avril 2018 ne peuvent être devenues caduques pour ce seul motif. Il n’y a de ce chef aucune contestation sérieuse.
Par ailleurs, il résulte de l’acte sous seing privé du 3 avril 2018 que le contrat de franchise est passé entre la société Era France, franchiseur et MM. [M] et [X] agissant tant en leur « nom personnel qu’en qualité de représentant (sic) de la société PGI », tous dénommés « le franchisé ». Il en résulte implicitement mais nécessairement que le contrat institue des obligations solidaires entre l’ensemble des personnes physiques et morales regroupées sous la qualité de franchisé. Il convient de rappeler à cet égard que le caractère commercial du contrat apparaît indiscutable, de sorte que la solidarité est présumée (solution constante, Com., 21 avril 1980, pourvoi n° 78-14.765, P). Il n’y a donc pas plus de contestation sérieuse de ce chef.
Les stipulations claires et précises de l’article 5.8 du contrat de franchise obligent le franchisé à transmettre à première demande à la société Era France une copie certifiée conforme par expert-comptable des bordereaux de déclaration de chiffres d’affaires, des documents financiers et professionnels, notamment le registre des mandats, le registre répertoire et le répertoire des actes, ainsi que, trois mois après la clôture de l’exercice social, le bilan, le compte de résultat et les annexes.
Les appelants affirment que la demande de production de documents doit être rejetée puisque la société PGI n’a plus aucune activité et qu’elle a même décidé sa dissolution par assemblée générale extraordinaire du 2 octobre 2023. Ce moyen manque en fait et ne peut constituer une contestation sérieuse puisqu’il procède par voie de simple allégation sans aucune production de pièce pertinente.
L’ordonnance entreprise sera donc confirmée de ce chef.
Les appelants ne formulent aucun moyen de nature à caractériser une contestation sérieuse concernant les condamnations pécuniaires provisionnelles prononcées par le premier juge, qui seront donc confirmées.
De la même manière, ils ne formulent aucune critique concernant l’injonction de cesser tout usage des éléments d’identification Era sur tout support et en tout lieu, notamment sur et dans leur agence et auprès du registre du commerce et des sociétés en détruisant lesdits éléments d’identification, tout en ne contestant pas non plus que le contrat de franchise a été résilié par la société Era France le 18 février 2023.
La demande d’augmentation du montant des astreintes sera rejetée.
Les demandes de la société Era France tendant à la condamnation des appelants à lui payer les frais de retard de 50 euros par jour à compter de la dernière mise en demeure, à titre d’indemnité forfaitaire prévue à l’article 6.5.3 du contrat, et d’une somme de 2 886 euros au titre de l’indemnité contractuelle de résiliation seront rejetées en ce qu’elles excèdent les pouvoirs du juge des référés, qui peut seulement allouer une provision. Par substitution de motifs, l’ordonnance entreprise sera confirmée de ce chef.
L’ordonnance entreprise sera confirmée dans ses dispositions relatives aux dépens et à l’allocation d’une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
MM. [M] et [X] seront tenus in solidum aux dépens d’appel et devront payer in solidum à l’intimée une somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne M. [M] et M. [X] in solidum à payer à la société Era France une somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés en cause d’appel.
Condamne M. [M] et M. [X] in solidum aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LA CONSEILLÈRE