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Le délai abusif de réparation d’un équipement informatique, en l’absence de toute disposition contractuelle prévoyant un quelconque délai, ne constitue pas un manquement contractuel et ne peut caractériser un manquement suffisamment grave, justifiant une résiliation du contrat de location et de maintenance informatique, sans préavis, ni justifier le non-paiement des loyers ou autres factures, au titre d’une exception d’inexécution.
L’article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, applicable en l’espèce, prévoit que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts.
La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.
En l’espèce, l’article 7, intitulé ‘maintenance’, du contrat prévoit que les prestations générales de maintenance ont pour objet d’assurer la maintenance (…) et le remplacement nécessaire du matériel après son examen par le bailleur et l’article 7.3.1 ‘prestations couvertes’ indique que la maintenance couvre ‘les prestations comprenant la main-d”uvre et les pièces détachées’, à savoir ‘les interventions correctives ‘en retour atelier’ qui ont pour but la remise en état de marche du matériel présentant des défauts de fonctionnement et le remplacement des pièces défectueuses, usées ou cassées à la suite de l’usage normal du matériel’.
L’article 7.3.2 relatif aux ‘exclusions et aux prestations et fournitures hors contrat’ précise que sont exclus et facturés au tarif en vigueur à la date de l’intervention, les réparations ou échanges à la suite d’un bris de matériel et le dysfonctionnement des matériels qui ne seraient pas utilisés selon les conditions normales d’utilisation définie par le bailleur ou le constructeur’.
L’article 8 relatif à l”assurance et au dommage à l’équipement’ prévoit que ‘le locataire est tenu de s’assurer contre les conséquences des dommages causés aux équipements (perte, vol, détérioration ou destruction des équipements) ou par les équipements à des personnes ou des biens du fait de leur utilisation et de leur garde. (…)’.
L’article 9, intitulé ‘résiliation anticipée- restitution -reconduction’, stipule que le contrat peut être résilié de plein droit sans aucune formalité judiciaire huit jours après une mise en demeure restée infructueuse en cas de non-exécution par le locataire d’une seule de ses obligations légale ou contractuelle, notamment lorsqu’il est en retard de paiement d’une échéance de loyer. (…) En cas de résiliation, les équipements (…) doivent être immédiatement remis en bon état à l’endroit défini par le bailleur et le locataire doit immédiatement au bailleur une indemnité égale à la totalité des loyers restant à courir, majorée des intérêts au taux légal à dater du jour de la résiliation. (…) En cas de retard de restitution, le locataire acquitte jusqu’à la restitution effective des équipements un montant calculé prorata temporis sur la base du dernier loyer échu. Les sommes dues en cas de restitution pour quelles que raisons que ce soient, sont imputables en priorité sur la caution prévue (…).
Il n’est pas contesté que la société Ubique a remplacé courant janvier 2018 deux terminaux portables (ou télécommandes) sur les quatre transmis en septembre et octobre 2017.
Ce délai de réparation, en l’absence de toute disposition contractuelle prévoyant un quelconque délai, ne constitue pas un manquement contractuel et ne peut caractériser un manquement suffisamment grave, justifiant une résiliation du contrat sans préavis, ni justifier le non-paiement des loyers ou autres factures, au titre d’une exception d’inexécution.
La société Ubique n’a formé aucune observation à la réception des quatre télécommandes, qu’elle indique avoir transmises au constructeur ; elle se prévaut du caractère irréparable de deux d’entre elles suite à une ‘casse’ sans, pour autant, justifier d’un usage dans des conditions anormales, excluant la maintenance réclamée alors que les photographies, qu’elle produit, ne permettent pas d’écarter une usure normale du matériel à l’issue de cinq années d’utilisation, la description qu’elle effectue de celui-ci, dans un courrier du 29 avril 2019, concernant des pièces manquantes (capot, batterie, touche) et une impossibilité de démarrage.
Ainsi, la société Ubique devait remplacer lesdites télécommandes, ce qu’elle a fait au mois d’août 2018 sans que ce retard (dix mois) dans l’exécution de son obligation de remplacement ne puisse davantage caractériser un manquement suffisamment grave justifiant la résiliation sans préavis du contrat, ni justifier le non-paiement des factures de loyers ou d’intervention au titre d’une exception d’inexécution, notamment, celles antérieures au dysfonctionnement des terminaux portables, à défaut pour la société SCAP Marée de rapporter, contrairement à ce qu’elle soutient, qu’elle était dans l’incapacité totale ou partielle de faire fonctionner le système informatique de sa chaîne de froid du fait de l’immobilisation desdits terminaux portables, le contrat qu’elle indique avoir souscrit pour pallier cette défaillance étant en date du mois de décembre 2018.
La résiliation immédiate, en date du 11 juin 2018, dont s’est prévalue la société SCAP Marée, est donc sans effet ; ses demandes en paiement au titre du remboursement du quatrième trimestre 2017 et de la restitution de la caution (cette dernière demande étant recevable en ce qu’elle ne fait que compléter et n’être qu’une demande accessoire à la demande de résolution soumise au premier juge), ne peuvent prospérer (étant entendu que la demande de ‘donner acte’ relative à la restitution des matériels loués ne constituant pas une prétention, elle ne peut, de ce fait, constituer une demande nouvelle à hauteur d’appel).
A contrario, le non-paiement d’une partie des loyers pour l’année 2015 ainsi que de factures d’intervention pour les années 2015, 2016, 2017 et 2018 et des loyers pour l’année 2018 constitue un manquement contractuel suffisamment grave justifiant la résiliation du contrat à l’initiative de la société Ubique par courrier en date du 11 juin 2019 et à effet au 30 novembre suivant, date anniversaire du contrat.
Les dispositions de l’article 4 du contrat de location et maintenance relatives à la perception par le bailleur d’intérêts de retard au taux d’intérêt légal majoré de 3 % à compter de la date d’exigibilité ne concerne que le retard dans le paiement de tout ou partie d’un loyer et non l’hypothèse de la résiliation du contrat, définie par l’article 9, qui entraîne le paiement d’une indemnité portant intérêt au taux légal, ni celle d’un retard de paiement n’affectant pas le loyer.
En conséquence, la société SCAP Marée, qui ne conteste aucun des montants sollicités, a été condamnée à payer la somme de 35 985,60 euros (=27 417,60 euros + 8 568 euros) au titre des loyers impayés à la date du 30 novembre 2019 ainsi que la somme de 30 844,80 euros (1 713,60 euros x 18) au titre des loyers ayant couru à défaut de restitution du matériel pour la période du 1er décembre 2019 au 31 mai 2021, et à restituer le matériel loué ainsi qu’à payer les loyers, qui continuent de courir jusqu’à ladite restitution.
La société SCAPMarée ne conteste pas davantage être débitrice de la somme de 5 286,88 au titre de factures d’interventions entre le 5 janvier 2015 et le 14 décembre 2018 et sera condamnée à verser cette somme.
Ces condamnations porteront intérêt au taux légal à compter du 17 juin 2019, date de la réception de la mise en demeure du 7 juin 2019 (selon un courrier du 18 juin 2019 de la société SCAP Marée), avec anatocisme en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 03 JANVIER 2023
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 21/00455 – N° Portalis DBVK-V-B7F-O25X
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 30 NOVEMBRE 2020
TRIBUNAL DE COMMERCE DE CARCASSONNE
N° RG 2019001964
APPELANTE :
S.A. SOCIETE COOPERATIVE APPROVISIONNEMENT – SCAPMAREE venant aux droits de la SA SCAFISH.
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Thierry CHOPIN de la SELAS CHOPIN-PEPIN & ASSOCIES, avocat au barreau de NARBONNE
INTIMEE :
Société UBIQUE venant aux droits de la société ITAQUE
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Fanny LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 04 Octobre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 OCTOBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller
M. Thibault GRAFFIN, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Audrey VALERO
ARRET :
– Contradictoire
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.
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FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES:
La société anonyme coopérative de commerçants détaillants SCAfish, devenue le 31 mars 2020 la société à forme anonyme Société coopérative approvisionnement-SCAPMarée (la société SCAPMarée), exerce l’activité de grossiste de marchandises et services au profit de ses associés et regroupe dans une même centrale les magasins à l’enseigne ‘E. Leclerc’.
Par acte sous seing privé en date du 11 juin 2012, la société SCAP Marée et la SAS Qualiboo (en réalité Traceo) ont signé un contrat de location et de maintenance n°CLQ-037, portant sur la mise à disposition de la société SCAfish d’équipements et logiciels composant le système de traçabilité Qualiboo avec un loyer mensuel fixé a la somme de 1 428 euros HT pour une durée de 36 mois avec, à défaut de résiliation, une reconduction tacite d’année en année.
Lors de la conclusion du contrat, la société SCAP Marée a versé une caution d’un montant de 5 121,84 euros.
La SARL Itaque a acquis auprès de la SAS Traceo, par acte sous seing privé des 28 décembre 2013 et 2 janvier 2014, le fonds de commerce de conception, développement, installation, formation et maintenance de systèmes de traçabilité des matières pour l’industrie agro-alimentaire et la restauration collective, en ce compris le nom commercial et la marque Qualiboo.
La SAS Ubique, dont le nom commercial est Itaque, a pour activité la conception, développement, commercialisation, installation, fourniture, formation, maintenance d’équipements et solutions informatiques. Elle a absorbé, dans le cadre d’une transmission universelle de patrimoine, la société Itaque le 21 avril 2020.
Auparavant, par lettre recommandée avec avis de réception (signé) du 28 décembre 2017, la société SCAPMarée indiquait à la société Ubique lui avoir adressé il y a plusieurs semaines (les 15 septembre et 23 octobre) quatre terminaux portables afin qu’une maintenance soit effectuée et qu’en l’absence de restitution des matériels, elle sollicitait le remboursement du loyer du 4ème trimestre 2017 (4 284 euros) et l’obtention d’une solution technique probante destinée à ‘permettre le règlement des échéances futures».
Par courriel en date du 25 janvier 2018, la société Itaque lui répondait que le constructeur leur avait fait part de son ‘diagnostic après un délai plus important qu’à l’habitude’, dont il ressort que deux télécommandes sont irréparables suite à une ‘casse’ et les deux autres en cours de réparation (…) et lui adressait un devis pour le remplacement des deux télécommandes irréparables, s’opposant au remboursement du loyer du 4ème trimestre 2017, n’ayant ‘nullement manqué pour [sa] part au bon traitement de la demande’.
Par lettre recommandée avec avis de réception (signé) en date du 11 juin 2018, la société SCAPMarée a mis un terme au contrat et sollicité la restitution de la caution à hauteur de 5 121,84 euros, celle-ci conditionnant, pour elle, celle des matériels au motif que suite au rachat de la société Ubique, dont elle n’a pas été informée, les services se sont dégradés et que depuis octobre 2017, elle est privée de l’usage d’une partie des équipements loués, faute d’avoir obtenu une réparation ou un remplacement conformément à l’article 7.3.1 des conditions générales.
Par courrier en date du 3 juillet 2018, la société Ubique lui a indiqué en réponse qu’aucune opération de rachat n’a eu lieu et que le courrier de résiliation adressé sans date d’échéance violait les stipulations de l’article 9 du contrat, l’effectivité d’une dénonciation de la convention étant soumise au respect d’un préavis de 9 mois.
Par lettre recommandée avec avis de réception (signé) en date du 5 juillet 2018, la société SCAPMarée confirmait la résiliation du contrat arguant que les ‘manquements graves signalés depuis des mois’ font obstacle à l’application des délais prévus à l’article 9.
Par courriel du 8 août 2018, la société Ubique effectuait un geste commercial en offrant le remplacement des deux télécommandes cassées, qu’elle faisait livrer le 20 août suivant.
Suite à une première mise en demeure par courriel du 19 octobre 2018, réitérée par courriers des 9 novembre 2018 et 27 février 2019, par lettre recommandée avec avis de réception (non produit) en date du 7 juin 2019, la société Ubique a procédé à la résiliation du contrat et mis en demeure la société SCAPMarée de payer la somme de 35 985,60 euros TTC au titre des loyers échus et impayés (27 417,60 euros TTC) et des loyers à échoir (8 568 euros) sollicitant la restitution immédiate du matériel, objet de la location.
Les parties ont poursuivi leur correspondance épistolaire.
Par ordonnance en date du 7 août 2019, le président du tribunal de commerce de Carcassonne a enjoint à la société SCAP Marée de payer à la société Ubique les sommes de 41 262,48 euros en principal, 869,39 euros au titre des intérêts au taux contractuel de 3,01 %, 16,51 euros au titre des frais accessoires outre les dépens, et ce avec ‘intérêts de droit’.
Statuant sur opposition, le tribunal de commerce de Carcassonne a, par jugement du 30 novembre 2020 :
‘- Confirmé en son intégralité l’ordonnance en injonction de payer (…),
– En conséquence, condamné la société SCAfish à payer la somme de 41262,48 euros en principal à la société Itaque devenue Ubique, augmenté des intérêts de retard au taux d’intérêt légal majoré de 3% à compter de la date d’exigibilité,
– Débouté la société Itaque devenue Ubique dans sa demande de percevoir des intérêts sur intérêts échus,
– Condamné la société SCAfish à payer la somme de 16,51 euros à la société Itaque devenue Ubique au titre des frais accessoires,
– Ordonné à la société SCAfish de restituer à la société Itaque devenue Ubique l’intégralité des matériels loués listés dans le contrat initial et renouvelés,
– Condamné la société SCAfish à payer à la société Itaque devenue Ubique les loyers jusqu’a restitution complète des matériels,
– Débouté la société SCAfish de l’ensemble de ses demandes,
– Condamné la société SCAfish au paiement de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au profil de la société Itaque devenue Ubique,
– Condamné la société SCAfish au paiement des dépens,
– Ordonné l’exécution provisoire de la présente décision.’
Par déclaration reçue le 21 janvier 2021, la société SCAP Marée a régulièrement relevé appel de ce jugement.
Elle demande à la cour, en l’état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 15 mars 2021, de :
«-Vu les articles 1183 ancien, 1184 ancien et 1690 du Code civil, (…)
– Réformer en totalité le jugement rendu (…),
– Par conséquent, constater que la cession de contrat survenue entre les sociétés Itaque et Qualiboo ne lui a pas été régulièrement signifiée,
– Dire et juger que la cession opérée par les sociétés Qualiboo et Itaque relative au contrat de location et de maintenance du 11 juin 2012 lui est inopposable,
– Constater que la société Itaque n’a pas satisfait à ses obligations relatives à sa mission de maintenance dans un délai raisonnable,
– Prononcer la résolution du contrat survenu entre les sociétés SCAfish et Qualiboo conformément aux dispositions de l’article 1184 ancien du Code civil,
– Condamner la société Itaque devenue Ubique, prise en la personne de son représentant légal, au paiement de la somme de 5 140,80 euros au titre du loyer du 4ème trimestre 2017 indûment perçu,
– Condamner la société Itaque devenue Ubique, prise en la personne de son représentant légal, au paiement de la somme de 5 121,84 euros au titre de la restitution de la caution du matériel informatique,
– Donner acte à la société Itaque devenue Ubique que les matériels loués lui seront restitués une fois que cette dernière aura restitué les sommes relatives au dépôt de garantie et au loyer du 4ème trimestre 2017 indûment perçu,
– Condamner la société Itaque devenue Ubique, prise en la personne de son représentant légal, au paiement 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– Débouter la société Itaque devenue Ubique de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions..»
Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :
– aucune cession du contrat signé ne lui est opposable, en l’absence de signification de cette cession en application de l’article 1690 du code civil,
– l’absence d’exécution du contrat l’a placée face à de lourdes difficultés pour assurer son obligation de traçabilité durant 5 mois et ce délai ne peut être considéré comme raisonnable eu égard à son activité (grossiste de produits de la mer),
– les conditions d’exercice de son activité (milieu froid, humide et salin), que la société Itaque connaissait parfaitement, ont, par nature, malgré un usage normal depuis 2012, engendré une vétusté du matériel, l’usage anormal avancé n’étant qu’un prétexte pour lui faire supporter le coût du remplacement du matériel,
– aucune réserve n’a été émise lors de la réception des télécommandes,
– elle a dû souscrire un nouveau contrat,
– la gravité des manquements justifie la résolution du contrat faisant obstacle à tout paiement de factures injustifiées ainsi que la restitution du 4ème trimestre de loyer 2017 et de la caution.
Formant appel incident, la société Ubique sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 29 septembre 2022:
«- (…) Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,
– Vu les articles 1405 et suivants du Code de procédure civile,
– confirmer le jugement (…) en toutes ces dispositions sauf celles qui ont rejeté l’application de l’article 1343-2 du Code civil sur les intérêts ;
– Déclarer la demande de la société SCAPMarée de condamnation au paiement de la somme de 5.121 ,84 euros irrecevable ;
– Déclarer la demande de la société SCAPMarée relative à la restitution du matériel irrecevable ;
– Par conséquent, condamner la société SCAPMarée à lui payer la somme de
– 41 262,48 euros, augmentée des intérêts de retard au taux d’intérêt légal majoré de 3 % à compter de leur exigibilité, étant précisé que, conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du Code civil, les intérêts échus deviennent eux-mêmes productifs d’intérêts au bout d’un an ;
– 16,51 euros au titre des frais accessoires ;
– Ordonner à la société SCAPMarée de lui restituer les matériels loués et renouvelés ;
– Condamner la société SCAPMarée à lui payer les loyers jusqu’à la restitution des matériels loués, soit la somme de 30 844,80 euros arrêtée au 3 mai 2021 et à parfaire au jour de la décision à intervenir, augmentée des intérêts de retard au taux d’intérêt légal majoré de 3 % à compter de leur exigibilité, étant précisé que, conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du Code civil, les intérêts échus deviennent eux-mêmes productifs d’intérêts au bout d’un an ;
– Condamner la société SCAPMarée à lui payer la somme de 2 865,13 euros au titre des intérêts échus au titre du contrat de location et de maintenance ainsi que les intérêts de retard dus sur toutes les factures au taux d’intérêt légal majoré de 3 % a compter de leur exigibilité, sommes à parfaire au jour de l’arrêt à intervenir ;
– Débouter la société SCAPMarée de l’ensemble de ses demandes ;
– Condamner la société SCAPMarée au paiement de la somme de 3 000 euros (…) en application de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance (…)’.
Elle expose en substance que :
– les demandes de condamnation au paiement de la somme de 5 121 ,84 euros et de restitution du matériel sont irrecevables comme étant nouvelles à hauteur d’appel,
– le contrat litigieux a été cédé à la société Itaque le 2 janvier 2014, conformément aux dispositions générales, la société SCAfish avait acceptée par anticipation cette cession sans formalité, l’article 1690 du code civil est inapplicable en l’espèce tandis que la société SCAfish a depuis 2014 payé entre les mains de la société Itaque les loyers, acceptant implicitement la cession de contrat,
– sa créance est fondée au titre de factures n’entrant pas dans le champ contractuel du contrat de location à hauteur de la somme de 5 286,88 euros TTC et ne sont pas contestées,
– le montant de la caution ne peut être restitué, à défaut de déclaration de créance dans le cadre du redressement judiciaire de la société Itaque,
– le montant des factures à hauteur de 27 417 eurosTTC est dû, seules étant couvertes les réparations relatives à des défauts de fonctionnement et à des pièces défectueuses à la suite d’un usage normal du matériel, le bris de matériel étant expressément exclu,
– il appartenait au locataire en application de l’article 8 du contrat de s’assurer contre le risque de détérioration ou destruction des équipements,
– elle a réparé et rendu en janvier 2018 deux terminaux sur les quatre et les deux restant n’étaient pas vétustes, mais endommagés et l’acceptation du devis adressé, demande à laquelle il n’a pas été donné suite, aurait permis leur remplacement, elle a, en outre, effectué un geste commercial,
– aucun délai d’exécution dans le cadre de la maintenance n’est prévu contractuellement,
– aucune spécificité quant à l’activité de la société SCAfish n’a été portée à sa connaissance dans le cadre d’une inexécution de son obligation de coopération,
– le courrier de résiliation de la société SCAfish n’a pu produire effet, à défaut de respect du préavis de neuf mois, le contrat ayant été résilié par son courrier du 7 juin 2019, à effet au 30 novembre 2019.
Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
C’est en l’état que l’instruction a été clôturée par ordonnance du 4 octobre 2022.
MOTIFS de la DECISION :
1- Au préalable, le jugement ayant implicitement reçu l’opposition de la société SCAP Marée et mis à néant l’ordonnance portant injonction de payer en date du 7 août 2019, il ne pouvait, sauf excès de pouvoir, confirmé ladite ordonnance et sera infirmé de ce chef.
2- Sur l’opposabilité de la cession du contrat de location et maintenance :
Il est établi que le contrat de location et maintenance en date du 11 juin 2012 a été cédé dans le cadre de la cession d’un fonds de commerce d’activités de conception et développement de systèmes de traçabilité des matières pour l’industrie agro-alimentaire, en date des 28 décembre 2013 et 2 janvier 2014, par la société Traceo au profit de la société Ubique.
Les contrats de cession de fonds de commerce, conclus avant le 1er octobre 2016, date d’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, devaient, en application de l’article 1690 du code civil, qui prévoit que le cessionnaire n’est saisi à l’égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur, être signifiés par acte d’huissier au débiteur cédé afin de les lui rendre opposables.
Ce contrat de location et de maintenance prévoit, dans son article 10, que le locataire reconnaît avoir été informé de la faculté pour le bailleur de céder ou apporter la propriété des équipements et les créances objet du présent contrat, à tout cessionnaire de son choix (…), le locataire consent dès à présent sans réserve à cette substitution éventuelle du bailleur (…), il s’engage à signer à première demande une autorisation de prélèvement ou autre document nécessaire au nom du cessionnaire (…) et en cas de substitution du bailleur par le cessionnaire, le locataire accepte par la présente de lui verser sans réserve possible la totalité des créances ayant fait l’objet de la substitution (…).
À défaut de toutes clauses du contrat écartant les dispositions de l’article 1690 du code civil, celles-ci sont applicables sans, pour autant, qu’une signification de la cession n’ait été effectuée.
Toutefois, la société SCAPMarée a accepté par anticipation la substitution de cocontractant et ne conteste pas avoir versé depuis 2014 les loyers dus à la société Ubique, envers laquelle elle s’est naturellement adressée au mois de novembre 2017 dans le cadre de la réparation des terminaux portables.
Il en résulte que la cession du contrat de location et maintenance lui est opposable et le jugement sera confirmé de ce chef implicite.
3- Sur la résiliation du contrat de location et maintenance :
L’article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, applicable en l’espèce, prévoit que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.
L’article 7, intitulé ‘maintenance’, du contrat prévoit que les prestations générales de maintenance ont pour objet d’assurer la maintenance (…) et le remplacement nécessaire du matériel après son examen par le bailleur et l’article 7.3.1 ‘prestations couvertes’ indique que la maintenance couvre ‘les prestations comprenant la main-d”uvre et les pièces détachées’, à savoir ‘les interventions correctives ‘en retour atelier’ qui ont pour but la remise en état de marche du matériel présentant des défauts de fonctionnement et le remplacement des pièces défectueuses, usées ou cassées à la suite de l’usage normal du matériel’.
L’article 7.3.2 relatif aux ‘exclusions et aux prestations et fournitures hors contrat’ précise que sont exclus et facturés au tarif en vigueur à la date de l’intervention, les réparations ou échanges à la suite d’un bris de matériel et le dysfonctionnement des matériels qui ne seraient pas utilisés selon les conditions normales d’utilisation définie par le bailleur ou le constructeur’.
L’article 8 relatif à l”assurance et au dommage à l’équipement’ prévoit que ‘le locataire est tenu de s’assurer contre les conséquences des dommages causés aux équipements (perte, vol, détérioration ou destruction des équipements) ou par les équipements à des personnes ou des biens du fait de leur utilisation et de leur garde. (…)’.
L’article 9, intitulé ‘résiliation anticipée- restitution -reconduction’, stipule que le contrat peut être résilié de plein droit sans aucune formalité judiciaire huit jours après une mise en demeure restée infructueuse en cas de non-exécution par le locataire d’une seule de ses obligations légale ou contractuelle, notamment lorsqu’il est en retard de paiement d’une échéance de loyer. (…) En cas de résiliation, les équipements (…) doivent être immédiatement remis en bon état à l’endroit défini par le bailleur et le locataire doit immédiatement au bailleur une indemnité égale à la totalité des loyers restant à courir, majorée des intérêts au taux légal à dater du jour de la résiliation. (…) En cas de retard de restitution, le locataire acquitte jusqu’à la restitution effective des équipements un montant calculé prorata temporis sur la base du dernier loyer échu. Les sommes dues en cas de restitution pour quelles que raisons que ce soient, sont imputables en priorité sur la caution prévue (…).
Il n’est pas contesté que la société Ubique a remplacé courant janvier 2018 deux terminaux portables (ou télécommandes) sur les quatre transmis en septembre et octobre 2017. Ce délai de réparation, en l’absence de toute disposition contractuelle prévoyant un quelconque délai, ne constitue pas un manquement contractuel et ne peut caractériser un manquement suffisamment grave, justifiant une résiliation du contrat sans préavis, ni justifier le non-paiement des loyers ou autres factures, au titre d’une exception d’inexécution.
La société Ubique n’a formé aucune observation à la réception des quatre télécommandes, qu’elle indique avoir transmises au constructeur ; elle se prévaut du caractère irréparable de deux d’entre elles suite à une ‘casse’ sans, pour autant, justifier d’un usage dans des conditions anormales, excluant la maintenance réclamée alors que les photographies, qu’elle produit, ne permettent pas d’écarter une usure normale du matériel à l’issue de cinq années d’utilisation, la description qu’elle effectue de celui-ci, dans un courrier du 29 avril 2019, concernant des pièces manquantes (capot, batterie, touche) et une impossibilité de démarrage.
Ainsi, la société Ubique devait remplacer lesdites télécommandes, ce qu’elle a fait au mois d’août 2018 sans que ce retard (dix mois) dans l’exécution de son obligation de remplacement ne puisse davantage caractériser un manquement suffisamment grave justifiant la résiliation sans préavis du contrat, ni justifier le non-paiement des factures de loyers ou d’intervention au titre d’une exception d’inexécution, notamment, celles antérieures au dysfonctionnement des terminaux portables, à défaut pour la société SCAP Marée de rapporter, contrairement à ce qu’elle soutient, qu’elle était dans l’incapacité totale ou partielle de faire fonctionner le système informatique de sa chaîne de froid du fait de l’immobilisation desdits terminaux portables, le contrat qu’elle indique avoir souscrit pour pallier cette défaillance étant en date du mois de décembre 2018.
La résiliation immédiate, en date du 11 juin 2018, dont s’est prévalue la société SCAP Marée, est donc sans effet ; ses demandes en paiement au titre du remboursement du quatrième trimestre 2017 et de la restitution de la caution (cette dernière demande étant recevable en ce qu’elle ne fait que compléter et n’être qu’une demande accessoire à la demande de résolution soumise au premier juge), ne peuvent prospérer (étant entendu que la demande de ‘donner acte’ relative à la restitution des matériels loués ne constituant pas une prétention, elle ne peut, de ce fait, constituer une demande nouvelle à hauteur d’appel).
A contrario, le non-paiement d’une partie des loyers pour l’année 2015 ainsi que de factures d’intervention pour les années 2015, 2016, 2017 et 2018 et des loyers pour l’année 2018 constitue un manquement contractuel suffisamment grave justifiant la résiliation du contrat à l’initiative de la société Ubique par courrier en date du 11 juin 2019 et à effet au 30 novembre suivant, date anniversaire du contrat.
Les dispositions de l’article 4 du contrat de location et maintenance relatives à la perception par le bailleur d’intérêts de retard au taux d’intérêt légal majoré de 3 % à compter de la date d’exigibilité ne concerne que le retard dans le paiement de tout ou partie d’un loyer et non l’hypothèse de la résiliation du contrat, définie par l’article 9, qui entraîne le paiement d’une indemnité portant intérêt au taux légal, ni celle d’un retard de paiement n’affectant pas le loyer.
En conséquence, la société SCAP Marée, qui ne conteste aucun des montants sollicités, sera condamnée à payer la somme de 35 985,60 euros (=27 417,60 euros + 8 568 euros) au titre des loyers impayés à la date du 30 novembre 2019 ainsi que la somme de 30 844,80 euros (1 713,60 euros x 18) au titre des loyers ayant couru à défaut de restitution du matériel pour la période du 1er décembre 2019 au 31 mai 2021, et à restituer le matériel loué ainsi qu’à payer les loyers, qui continuent de courir jusqu’à ladite restitution.
La société SCAPMarée ne conteste pas davantage être débitrice de la somme de 5 286,88 au titre de factures d’interventions entre le 5 janvier 2015 et le 14 décembre 2018 et sera condamnée à verser cette somme.
Ces condamnations porteront intérêt au taux légal à compter du 17 juin 2019, date de la réception de la mise en demeure du 7 juin 2019 (selon un courrier du 18 juin 2019 de la société SCAP Marée), avec anatocisme en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil.
Par ces motifs, le jugement entrepris sera infirmé, sauf en ce qu’il a ordonné la restitution des matériels loués, condamné la société SCAP Marée à payer les loyers jusqu’à ladite restitution et débouté la société SCAP Marée de l’ensemble de ses demandes.
4- Sur les autres demandes :
Succombant sur son appel, la société SCAP Marée sera condamnée aux dépens et au vu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 2 000 euros, en ce compris les frais accessoires (lettres recommandées), sa demande sur ce fondement étant rejetée.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement du tribunal de commerce de Carcassonne en date du 30 novembre 2020, sauf en ce qu’il a ordonné la restitution des matériels loués, condamné la société SCAP Marée à payer les loyers jusqu’à ladite restitution et débouté la société SCAP Marée de l’ensemble de ses demandes,
Statuant à nouveau,
Dit que le chef du dispositif du jugement entrepris confirmant l’ordonnance portant injonction de payer du président du tribunal de commerce de Carcassonne en date du 7 août 2019 est nul pour excès de pouvoir,
Condamne la société à forme anonyme SCAP Marée à payer à la SAS Ubique la somme de 35 985,60 euros au titre des loyers impayés à la date du 30 novembre 2019,
Condamne la société à forme anonyme SCAP Marée à payer à la SAS Ubique la somme de 30 844,80 euros au titre des loyers, ayant couru à défaut de restitution du matériel, pour la période du 1er décembre 2019 au 31 mai 2021,
Condamne la société à forme anonyme SCAP Marée à payer à la SAS Ubique la somme de 5 286,88 euros au titre de factures d’interventions entre le 5 janvier 2015 et le 14 décembre 2018,
Dit que ces condamnations porteront intérêt au taux légal à compter du 17 juin 2019 avec anatocisme en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
Rejette le surplus des demandes en paiement de la société Ubique,
Confirme le jugement entrepris dans le surplus de ses dispositions,
Condamne la société SCAP Marée à payer à la société Ubique la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande de la société SCAP Marée fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société SCAP Marée aux dépens d’appel.
le greffier, le président,