La preuve des contrats de prêt par une signature électronique

·

·

La preuve des contrats de prêt par une signature électronique
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

Sont suffisants pour établir un lien entre les documents contractuels d’un emprunt bancaire et le fichier de preuve destiné à caractériser la signature électronique de l’emprunteur, les éléments de preuve suivants :

– Un document intitulé « attestation du processus de signature » établi par la société Worldline qui « indique toutes les étapes du processus de signature électronique, ainsi que l’ensemble des interactions entre les différents signataires » ; mentionne une référence de session « 02021060201438715320335 », les 10 derniers chiffres correspondant au numéro de l’offre de crédit ; comporte le nom, le prénom, l’adresse postale et l’adresse mail de M. [S] et fait apparaître que « [Z] [S] » a fourni sa carte nationale d’identité le 3 juin 2021 à 12:35:16, a approuvé le 3 juin 2021 à 12:41:16 « le document 102021060201438715320335108 en utilisant une checkbox accompagnée du texte suivant : « je reconnais avoir pris connaissance de la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées, de la fiche explicative, de l’ensemble des conditions de la présente offre de contrat de crédit (de la page 1 à la page 10) et j’accepte la présente offre de contrat de crédit » », a saisi à 12:41:56 le code d’identification qui lui a été envoyé par SMS au numéro de téléphone figurant sur les documents contractuels, que « la signature [électronique] a été créée et horodatée » et que « les validations de la signature et de l’horodatage ont été réussies » à 12:42:00,

– Une attestation de conformité délivrée par la société LTSI le 10 novembre 2020, qui certifie que la société Worldline est déclarée conforme au règlement européen no 910/2014 du 23 juillet 2024 du Parlement européen et du Conseil sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur, pour le service de création de certificats de cachet électronique,

– Une copie de la carte d’identité et des bulletins de salaire des mois de février à mai 2021 de M. [S], étant précisé que les deux derniers bulletins de salaire mentionnent la même adresse postale que celle figurant dans les documents contractuels.

En la cause, la société BNP Paribas Personal Finance a apporté la preuve que l’offre de crédit de son client a été signée électroniquement. Selon l’article 1353, alinéa 1, du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

L’article 1359, alinéa 1, du même code dispose que l’acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique.

En vertu de l’article 1367, alinéa 2, lorsque la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

L’article 1, alinéa 1, du décret no 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique précise que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en oeuvre une signature électronique qualifiée.

La SA BNP Paribas Personal Finance a assigné M. [Z] [S] devant le tribunal judiciaire de Châteauroux pour obtenir le paiement de diverses sommes liées à un contrat de crédit, incluant des intérêts et une indemnité de résiliation. M. [S] ne s’est pas présenté au tribunal, qui a débouté la société de toutes ses demandes, en raison de l’absence de preuves concernant la signature électronique de M. [S] et l’existence du contrat. BNP Paribas a interjeté appel de cette décision. En appel, la cour a infirmé le jugement de première instance, prononcé la résiliation judiciaire du contrat, et condamné M. [S] à rembourser une somme de 6 597,56 euros, avec des intérêts, tout en déboutant la société de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en condamnant M. [S] aux dépens.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 octobre 2024
Cour d’appel de Bourges
RG n°
23/00899
SM/MMC

COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

– SCP ROUAUD & ASSOCIES

Expédition TJ

LE : 17 OCTOBRE 2024

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 17 OCTOBRE 2024

N° – Pages

N° RG 23/00899 – N° Portalis DBVD-V-B7H-DSUP

Décision déférée à la Cour :

Jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de CHATEAUROUX en date du 07 Juillet 2023

PARTIES EN CAUSE :

I – S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social:

[Adresse 2]

[Localité 5]

N° SIRET : 542 097 902

Représentée par la SCP ROUAUD & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGES

timbre fiscal acquitté

APPELANTE suivant déclaration du 04/09/2023

II – M. [Z] [S]

né le [Date naissance 1] 1991 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Non représenté

Suivants déclaration d’appel et conclusions signifiées par commissaire de justice les 27 octobre 2023 et 21 décembre 2023 transformés en procès-verbal de recherches infructueuses

INTIMÉ

17 OCTOBRE 2024

N° /2

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Septembre 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme CLEMENT, Présidente chargée du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Odile CLEMENT Présidente de Chambre

M. Richard PERINETTI Conseiller

Mme Marie-Madeleine CIABRINI Conseillère

*

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme SERGEANT

*

ARRÊT : RENDU PAR DEFAUT

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte d’huissier en date du 10 mars 2023, la SA BNP Paribas Personal Finance a fait assigner M. [Z] [S] devant le tribunal judiciaire de Châteauroux aux fins de voir, en l’état de ses dernières demandes,

‘ condamner M. [S] à lui payer la somme de 6 841,97 euros avec intérêts au taux contractuel,

‘ condamner M. [S] à lui payer la somme de 481,87 euros au titre de l’indemnité légale de résiliation de 8 %, augmentée des intérêts au taux légal,

‘ subsidiairement, prononcer la résiliation judiciaire du contrat et en conséquence condamner M. [S] à lui payer la somme de 6 841,97 euros au titre des échéances échues et impayées et du capital restant dû, ainsi qu’à lui payer la somme de 481,87 euros au titre de l’indemnité légale de résiliation de 8 %, augmentées des intérêts au taux légal,

‘ déclarer irrecevable toute demande de nullité du contrat de crédit,

‘ en cas de nullité du contrat, condamner M. [S] à lui payer la somme de 6 597,56 euros, déduction faite du montant des règlements effectués,

‘ à titre infiniment subsidiaire, condamner M. [S] à lui payer la somme de 6 597,56 euros au titre de l’enrichissement sans cause, déduction faite du montant des règlements effectués,

‘ condamner M. [S] à lui payer la somme de 450 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

M. [S] n’a pas comparu ni été représenté devant le tribunal.

Par jugement réputé contradictoire en date du 7 juillet 2023, le tribunal judiciaire de Châteauroux a :

‘ débouté la société BNP Paribas Personal Finance de l’ensemble de ses demandes,

‘ condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens.

Le tribunal a notamment retenu que la société BNP Paribas Personal Finance ne produisait pas d’éléments de preuve de nature à permettre de vérifier le procédé selon lequel la signature électronique de M. [S] aurait été recueillie ni l’identité de la personne physique signataire, et qu’aucune certitude quant à l’existence du contrat produit et à sa signature par M. [S] ne pouvait être établie.

Par déclaration en date du 4 septembre 2023, la société BNP Paribas Personal Finance a interjeté appel de cette décision en l’ensemble de ses dispositions.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 3 décembre 2023 et signifiées à l’intimé par procès-verbal de recherches infructueuses le 21 décembre 2023, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu’elle développe, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :

‘ infirmer le jugement entrepris en ce qu’elle a été déboutée de l’ensemble de ses demandes et a été condamnée aux dépens,

‘ déclarer recevable et bien fondée l’action en paiement poursuivie à l’encontre de M. [S] en exécution du contrat de prêt signé électroniquement le 3 juin 2021,

‘ condamner M. [S] au paiement de la somme de 6 841,97 euros, ladite somme augmentée du montant des intérêts calculés au taux contractuel jusqu’au parfait règlement,

‘ condamner M. [S] au paiement de la somme de 481,87 euros au titre de l’indemnité légale de résiliation de 8%, ladite somme augmentée du montant des intérêts calculés au taux légal jusqu’au parfait règlement,

‘ subsidiairement, prononcer la résiliation judiciaire du contrat et condamner en conséquence M. [S] au paiement de la somme de 6 841,97 euros au titre des échéances échues et impayées et du capital restant dû ainsi qu’au paiement de la somme de 481,87 euros au titre de l’indemnité légale de résiliation, lesdites sommes étant augmentées des intérêts au taux légal jusqu’au parfait règlement,

‘ le cas échéant, déclarer irrecevable toute demande en nullité du contrat de crédit,

‘ s’il devait toutefois en être jugé autrement, condamner M. [S] au paiement de la somme de 6 597,56 euros,

‘ à titre infiniment subsidiaire, condamner M. [S] au paiement de la somme de 6 597,56 euros en application des règles de la théorie de l’enrichissement sans cause,

‘ condamner M. [S] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ condamner M. [S] aux dépens de première instance et d’appel.

M. [S] n’a pas constitué avocat devant la cour.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 août 2024.

SUR CE

Sur l’existence du contrat de prêt

Selon l’article 1353, alinéa 1, du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

L’article 1359, alinéa 1, du même code dispose que l’acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique.

En vertu de l’article 1367, alinéa 2, lorsque la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

L’article 1, alinéa 1, du décret no 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique précise que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en oeuvre une signature électronique qualifiée.

En l’espèce, la société BNP Paribas Personal Finance soutient avoir consenti à M. [S] un prêt personnel d’un montant de 7 000 euros suivant offre en date du 2 juin 2021 acceptée par l’intimé le 3 juin 2021.

Pour prouver l’existence de cet acte juridique, elle produit une copie numérique d’une offre de contrat de prêt personnel établie le 2 juin 2021 au nom de M. [Z] [S] d’un montant de 7 000 euros (no de l’offre : 15320335), qui ne comporte aucune signature en page 17 intitulée « acceptation de l’offre de contrat de crédit ».

Afin de justifier que cette offre de contrat a été signée électroniquement par M. [S] le 3 juin 2021, le prêteur verse notamment aux débats les pièces suivantes :

‘ un document intitulé « attestation du processus de signature » établi par la société Worldline qui « indique toutes les étapes du processus de signature électronique, ainsi que l’ensemble des interactions entre les différents signataires » ; mentionne une référence de session « 02021060201438715320335 », les 10 derniers chiffres correspondant au numéro de l’offre de crédit ; comporte le nom, le prénom, l’adresse postale et l’adresse mail de M. [S] et fait apparaître que « [Z] [S] » a fourni sa carte nationale d’identité le 3 juin 2021 à 12:35:16, a approuvé le 3 juin 2021 à 12:41:16 « le document 102021060201438715320335108 en utilisant une checkbox accompagnée du texte suivant : « je reconnais avoir pris connaissance de la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées, de la fiche explicative, de l’ensemble des conditions de la présente offre de contrat de crédit (de la page 1 à la page 10) et j’accepte la présente offre de contrat de crédit » », a saisi à 12:41:56 le code d’identification qui lui a été envoyé par SMS au numéro de téléphone figurant sur les documents contractuels, que « la signature [électronique] a été créée et horodatée » et que « les validations de la signature et de l’horodatage ont été réussies » à 12:42:00,

‘ une attestation de conformité délivrée par la société LTSI le 10 novembre 2020, qui certifie que la société Worldline est déclarée conforme au règlement européen no 910/2014 du 23 juillet 2024 du Parlement européen et du Conseil sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur, pour le service de création de certificats de cachet électronique,

‘ une copie de la carte d’identité et des bulletins de salaire des mois de février à mai 2021 de M. [S], étant précisé que les deux derniers bulletins de salaire mentionnent la même adresse postale que celle figurant dans les documents contractuels.

Ces pièces établissent un lien entre les documents contractuels litigieux et le fichier de preuve destiné à caractériser la signature électronique de l’emprunteur.

La société BNP Paribas Personal Finance apporte donc la preuve que l’offre de crédit a été signée électroniquement par M. [S] le 3 juin 2021.

Sur la validité de la déchéance du terme

L’article 1225, alinéa 2, du code civil dispose que la résolution du contrat est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire.

En l’espèce, la société BNP Paribas Personal Finance fait valoir au soutien de sa demande en paiement dirigée contre M. [S] que le contrat de prêt a été résilié du fait de la déchéance du terme.

L’offre préalable de prêt prévoit en page 15 que le prêteur pourra résilier le contrat après envoi à l’emprunteur d’une mise en demeure par lettre recommandée en cas de non-paiement à la bonne date de toute somme due au titre du contrat.

Pour justifier de la validité de la déchéance du terme, le prêteur produit deux lettres recommandées avec accusé de réception, adressées à M. [S], la première datée du 11 février 2022 portant mise en demeure avant déchéance du terme et la seconde datée du 4 mars 2022 portant déchéance du terme.

Il résulte cependant des avis de réception que ces deux courriers ont été renvoyés à l’expéditeur avec la mention « destinataire inconnu à l’adresse ».

La société BNP Paribas Personal Finance ne démontre donc pas avoir mis en demeure M. [S] de régulariser les échéances impayées et avoir régulièrement prononcé la déchéance du terme du contrat.

Sur la résiliation judiciaire du contrat

Aux termes de l’article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

L’article 1227 du même code dispose que la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice.

Pour l’exercice de l’action en résolution autorisée par ce texte, l’acte introductif d’instance suffit à mettre en demeure la partie qui n’a pas exécuté son engagement, sans qu’il soit nécessaire de faire précéder cet acte d’une sommation ou d’un commandement (voir notamment en ce sens Cass. civ. 1re, 23 janvier 2001, no 98-22.760).

En l’espèce, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour, à titre subsidiaire, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de prêt.

Il résulte de l’historique des règlements du 4 mars 2022 et du détail de la créance du 2 février 2023 produits par le prêteur que la première échéance impayée non régularisée date du 4 octobre 2021 et que M. [S] n’a plus effectué aucun règlement en remboursement du crédit depuis lors, ce qui caractérise une inexécution suffisamment grave de l’obligation essentielle de l’emprunteur de restituer les fonds prêtés.

En conséquence, infirmant le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société BNP Paribas Personal Finance de l’ensemble de ses demandes, il y a lieu de prononcer la résiliation du contrat de crédit au 10 mars 2023, date de l’assignation.

Sur la déchéance du droit aux intérêts conventionnels

L’article L. 312-16 du code de la consommation dispose qu’avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l’article L. 751-1, dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné à l’article L. 751-6, sauf dans le cas d’une opération mentionnée au 1 de l’article L. 511-6 ou au 1 du I de l’article L. 511-7 du code monétaire et financier.

L’article L. 341-2 du même code prévoit que le prêteur qui n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 312-14 et L. 312-16 est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

En l’espèce, la société BNP Paribas Personal Finance soutient avoir consulté le fichier prévu à l’article L. 751-1 du code de la consommation dans les conditions prévues par l’arrêté du 17 février 2020 pris en application de l’article L. 751-6 du même code et conclut à l’absence de déchéance de son droit aux intérêts conventionnels.

L’attestation de consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers produite par le prêteur, datée du 2 février 2023, ne comporte cependant ni la date de la consultation du fichier, ni le type de contrat, ni la réponse obtenue, ni le numéro de consultation obligatoire.

La société BNP Paribas Personal Finance échoue donc à apporter la preuve de la consultation obligatoire du FICP.

Il convient en conséquence de prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels.

Sur le montant de la créance de la banque

L’article L. 312-39 du code de la consommation prévoit qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt.

L’article L. 341-8 du même code ajoute que lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts dans les conditions prévues aux articles L. 341-1 à L. 341-7, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu.

Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

La Cour de cassation juge par ailleurs que la déchéance du droit aux intérêts conventionnels ne dispense pas l’emprunteur du paiement des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure (voir notamment en ce sens Cass. civ. 1re, 26 novembre 2002, no 00-17.119).

Cependant, afin de garantir l’effectivité des règles de protection des consommateurs prévues par la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs, il incombe au juge de réduire d’office, dans une proportion constituant une sanction effective et dissuasive du manquement du prêteur à son obligation, le taux légal, lorsque celui-ci est supérieur ou équivalent au taux conventionnel (voir notamment en ce sens Cass. civ. 1re, 28 juin 2023, no 22-10.560).

En l’espèce, il ressort de l’historique des règlements produit par le prêteur que M. [S] a versé la somme totale de 402,44 euros en remboursement du prêt, étant précisé que le premier impayé non régularisé est intervenu le 4 octobre 2021.

Il reste donc à devoir à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 7 000 – 402,44 = 6 597,56 euros, étant rappelé que la banque ne peut prétendre à aucun intérêt conventionnel sur cette somme.

Eu égard à la déchéance totale du droit aux intérêts contractuels, le prêteur est mal fondé à solliciter le paiement de l’indemnité légale de 8 %.

Enfin, le taux d’intérêt légal fixé à 4,92 % au second semestre 2024, date du prononcé du présent arrêt, et susceptible d’être majoré de 5 points en cas d’inexécution de l’arrêt dans un délai de deux mois, est supérieur (en cas de majoration) au taux conventionnel de 5,20 %. Son application ne permettrait pas de sanctionner de manière effective et dissuasive le manquement du prêteur à son obligation de consultation du FICP.

Les intérêts dus par M. [S] seront donc fixés au taux de 1 % à compter du 10 mars 2023, date de l’assignation.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il convient de condamner M. [S] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 6 597,56 euros en remboursement du prêt, avec intérêts au taux de 1 % à compter du 10 mars 2023, date de l’assignation.

Eu égard au prononcé de cette condamnation, il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes en paiement du prêteur présentées à titre subsidiaire sur les fondements de la nullité du contrat de prêt et de l’enrichissement sans cause.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement entrepris sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens de première instance.

Partie principalement succombante, M. [S] sera condamné aux dépens de première instance et d’appel.

Nonobstant l’issue de la procédure, l’équité et la disparité économique majeure existant entre les parties commandent de débouter la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement entrepris en l’ensemble de ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de crédit, conclu le 3 juin 2021 entre la SA BNP Paribas Personal Finance et M. [Z] [S], au 10 mars 2023, date de l’assignation,

PRONONCE la déchéance totale de la SA BNP Paribas Personal Finance de son droit aux intérêts conventionnels,

CONDAMNE M. [Z] [S] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 6 597,56 euros en remboursement du prêt, avec intérêts au taux de 1 % à compter du 10 mars 2023, date de l’assignation,

DÉBOUTE la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [Z] [S] aux dépens de première instance et d’appel.

L’arrêt a été signé par O. CLEMENT, Président, et par S. MAGIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

S. MAGIS O. CLEMENT


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x