La preuve de prêts de sommes d’argent

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La preuve de prêts de sommes d’argent

Les époux [G] [N], [P] [U] et leur fils [E] [N] ont assigné les époux [C] [K] et [L] [U] devant le tribunal de grande instance de Vienne pour obtenir le remboursement de sommes d’argent prêtées entre 2005 et 2010, totalisant 297 000 €, avec des reconnaissances de dette signées en 2011. Après le décès de Mme [P] [N] en 2016, ses héritiers ont poursuivi l’affaire. Les époux [K] ont soulevé des exceptions d’irrecevabilité, notamment en raison de la liquidation judiciaire de Mme [L] [K] et de l’existence de titres exécutoires en Turquie. Le tribunal a rejeté certaines de leurs demandes et a condamné M. [K] à verser des sommes aux consorts [N]. M. [K] a interjeté appel, contestant l’intérêt à agir des demandeurs et la validité des reconnaissances de dette, invoquant des vices de consentement. Les consorts [N] ont demandé la confirmation du jugement. L’instruction a été clôturée en mai 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 septembre 2024
Cour d’appel de Grenoble
RG
22/03673
N° RG 22/03673

N° Portalis DBVM-V-B7G-LRL2

C1

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SELAS AGIS

la SCP THOIZET & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

1èRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 17 SEPTEMBRE 2024

Appel d’un Jugement (N° R.G. 13/00707)

rendu par le tribunal judiciaire de Vienne

en date du 15 septembre 2022

suivant déclaration d’appel du 11 octobre 2022

APPELANT :

M. [C] [K]

né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 10] (TURQUIE)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

représenté par Me Alexia SADON de la SELAS AGIS, avocat au barreau de VIENNE

INTIMÉS :

M. [G] [N]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 11] (TURQUIE)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

M. [E] [N]

né le [Date naissance 7] 1985 à [Localité 14] (38)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

M. [Z] [N]

né le [Date naissance 6] 1989 à [Localité 14] (38)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

M. [D] [N]

né le [Date naissance 3] 1999 à [Localité 14] (38)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

Mme [O] [N]

née le [Date naissance 8] 2003 à [Localité 14] (38)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

représentés par Me Jacques THOIZET de la SCP THOIZET & ASSOCIES, avocat au barreau de VIENNE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ   :

Mme Catherine Clerc, président de chambre,

Mme Joëlle Blatry, conseiller,

Mme Véronique Lamoine, conseiller

Assistées lors des débats de Mme Anne Burel, greffier

DÉBATS :

A l’audience publique du 27 mai 2024, madame Lamoine, conseiller, a été entendue en son rapport.

Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.

*

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte du 28 mai 2013, les époux [G] [N] et [P] [U], ainsi que leur fils [E] [N], ont assigné devant le tribunal de grande instance de Vienne les époux [C] [K] et [L] [U] pour les voir condamner in solidum au paiement des sommes suivantes en principal, outre intérêts à compter de l’assignation :

à M. [E] [N] la somme de 106’000 €,

à M. [G] [N] la somme de 105’000 €,

à Mme [P] [N] la somme de 86’000 €.

Ils exposaient que Mmes [P] et [L] [U] étaient soeurs, et que les époux [K], propriétaire de plusieurs commerces sur les agglomérations de [Localité 13] et [Localité 14] (38) et rencontrant des difficultés, les avaient régulièrement sollicités pour leur apporter une aide financière.

C’est ainsi qu’entre 2005 et 2010, les demandeurs auraient respectivement versé au total aux époux [K] les sommes dont ils réclament dès lors le remboursement. Ils indiquaient que, sur cette réclamation, les époux [K] leur auraient signé des reconnaissances de dette le 17 décembre 2011, mais qu’ils se sont refusés depuis lors à tout remboursement malgré leurs multiples relances.

Mme [P] [N] est décédée le [Date décès 5] 2016, et le juge de la mise en état a ordonné la radiation de l’affaire pour défaut de diligence des demandeurs.

Les héritiers de Mme [P] [N] soit MM. [G], [E], [Z] et [D] [N] ainsi que Mme [O] [N], sont intervenus volontairement à l’instance en cette qualité et l’affaire a été réinscrite.

Le juge de la mise en état a rejeté une exception de péremption d’instance par ordonnance du 4 novembre 2020 confirmée par cette cour le 11 mai 2021.

Les époux [K] se sont opposés aux demandes formées contre eux en soulevant divers moyens d’irrecevabilité, notamment concernant Mme [L] [K] placée en liquidation judiciaire le 25 septembre 2012, procédure clôturée pour insuffisance d’actif le 3 décembre 2013, sans qu’aucune déclaration de créance ait été opérée par les demandeurs.

Ils opposaient encore une fin de non-recevoir tirée d’un défaut d’intérêt à agir, en soutenant que les demandeurs disposaient déjà de titres exécutoires à savoir des jugements obtenus auprès de juridictions turques. Ils invoquaient enfin, à titre subsidiaire, des vices de forme et vices du consentement concernant les reconnaissances de dette.

Par jugement du 15 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Vienne a :

rejeté la fin de non-recevoir soulevée par les époux [K] tirée du défaut d’intérêt à agir,

déclaré irrecevables les demandes de condamnation formées par les consorts [N] à l’encontre de Mme [L] [K],

condamné M. [K] à verser les sommes suivantes outre intérêts au taux légal à compter du jugement :

à MM. [G] [N], [E] [N], [Z] [N], [D] [N] et Mme [O] [N] la somme de 32 500 €,

à M. [G] [N] la somme de 100 500 €,

à M. [E] [N] la somme de 61 000 €,

à MM. [G] [N], [E] [N], [Z] [N], et Mme [O] [N] la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

rejeté la demande reconventionnelle des époux [K] à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

condamné M. [K] aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 11 octobre 2022, M. [K] a, seul, interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions sauf celle par laquelle ont été déclarées irrecevables les demandes de condamnation formées par les consorts [N] à l’encontre de son épouse Mme [L] [K].

Par dernières conclusions (n° 2) notifiées le 12 mars 2024, il demande à cette cour d’infirmer le jugement déféré sauf en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes dirigées contre son épouse [L] [K], et, statuant à nouveau, de :

A titre principal :

déclarer irrecevables l’ensemble des demandes formées par les consorts [N] à son encontre, pour défaut d’intérêt à agir, en l’état des titres exécutoires déjà délivrés par les juridictions turques ainsi que des mesures d’exécution déjà mises en oeuvre pour le recouvrement des créances,

A titre subsidiaire:

rejeter l’ensemble des demandes formées par les consorts [N] à son encontre, en raison :

de l’irrégularité des reconnaissances de dettes qui fondent la prétendue créance,

de l’absence de fondement de la créance tant en son principe qu’en son montant,

du vice de son consentement, la signature par lui des reconnaissances de dette ayant été obtenue sous la violence,

En tout état de cause :

rejeter toutes demandes, fins et moyens, plus amples ou contraires qui pourraient être formés à son encontre,

débouter les consorts [N] de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

les condamner in solidum aux entiers dépens de première instance et d’appel, et à lui verser les sommes de :

5 000 € à titre de dommages intérêts pour procédure abusive,

3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir :

Sur la fin de non-recevoir tirée de l’absence d’intérêt à agir :

que les jugements rendus par le tribunal d’ERMIDAG en Turquie en dates des 29 avril 2015 et 20 janvier 2016 doivent être considérés comme des titres exécutoires, la créance ayant été fixé par ces deux jugements à la somme totale de 192’200 € (106’200 + 86’000),

qu’en outre plusieurs biens immobiliers situés en lui appartenant ainsi qu’à son épouse ont déjà été saisis et vendus aux enchères le 19 septembre 2017 si bien qu’une partie de la créance a d’ores et déjà été recouvrée,

Subsidiairement, sur le fond :

que les reconnaissances de dette versée au débat ont été dactylographiées par les consorts [N], qu’elles ne comportent ni le montant de la somme due en toutes lettres, ni même son montant en chiffres écrit par la main de son signataire, c’est-à-dire lui-même qui de surcroît ne lit et n’écrit pas le français,

que ce n’est que dans un deuxième temps que Mme [K] a, pour sa part, signé également les documents en précisant que son accord n’était donné que « sous réserve de vérification des opérations bancaires », tout en ne reprenant pas davantage le montant des sommes réclamées, affirmant au contraire son désaccord sur ce point,

qu’il est évident que la signature de ce document n’a été réalisée afin d’apaiser d’urgence une situation qui lui paraissait inextricable pour la famille tout en cherchant, par la mention apposée par une non-juriste, à marquer son désaccord en pensant qu’elle lui suffirait à remettre en question sa signature, une fois la famille [N] rentrée chez elle et les esprits calmés,

que, dans ces conditions, ce document ne saurait suffire, aucune autre pièce versée aux débats ne venant confirmer la créance, a fortiori pour les montants exorbitants réclamés,

que le consentement de M. [K] a, pour sa part, été vicié par la violence pesant depuis quelques années sur les deux familles qui sont par ailleurs voisines,

qu’il ressort des éléments versés aux débats que les deux s’urs, qui s’entendaient très bien auparavant, tenaient des comptes entre elles dans le but que Mme [N] puisse cacher des dépenses à son mari,

que ce dernier, ayant découvert les dépenses faites par sa femme et son fils, Mme [N] est venue demander de l’aide à sa soeur, lui demandant endosser leurs dépenses,

que, dans ces conditions, les sommes en cause devaient, en réalité, être remboursées à la famille [K], ainsi qu’il ressort de la traduction de conversations enregistrées,

que M. [N], lorsqu’il a découvert les arrangements entre sa femme et sa belle-s’ur, a prétendu avoir prêté la somme de 297 000 € à la famille [K], alors même que, malgré une sommation d’avoir à communiquer ses avis d’imposition de 2004 à 2011, il n’a jamais justifié du montant de ses revenus, et donc de la provenance d’une telle somme pour la période correspondante,

que le climat de violence ayant entouré la signature des reconnaissances de dette est bien établi, ainsi qu’il ressort notamment de son dépôt de plainte en date du 29 décembre 2011, pour des faits de menaces de mort réitérées du 17 décembre 2011 au 29 décembre 2011,

que les explications données par les consorts [N] sur ce point sont particulièrement peu développées, leur principal argument étend que les plantes ont été classées sans suite.

Les consorts [N], par uniques conclusions notifiées le 5 avril 2023, demandent la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, et la condamnation de M. [K] aux entiers dépens et à leur payer la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais engagés en cause d’appel.

Ils reprennent, en les développant, les motifs du jugement déféré, en insistant sur le caractère incohérent des explications fournies quant aux prétendus échanges de sommes d’argent, en déniant l’affirmation selon laquelle M. [K] ne saurait ni lire ni écrire le français alors qu’il a géré huit commerces, et enfin soulignant que les plaintes déposées par M. [K] pour violence ont été classées sans suite, et qu’elles concernaient des faits qui se seraient déroulés en décembre 2012 soit un an après la signature des reconnaissances de dette en litige.

L’instruction a été clôturée par une ordonnance rendue le 7 mai 2024.

MOTIFS

Il sera relevé, in limine litis, que la disposition du jugement déféré par laquelle ont été déclarées irrecevables les demandes de condamnation formées par les consorts [N] à l’encontre de Mme [L] [K], en raison de la procédure de liquidation judiciaire ouverte contre cette dernière le 25 septembre 2012, ne fait l’objet ni de l’appel principal, ni d’un appel incident, de sorte qu’elle est aujourd’hui définitive.

Sur la demande principale dirigée contre M. [K]

# sur la fin de non-recevoir tirée de l’absence d’intérêt à agir

C’est par des motifs pertinents, que la cour adopte en l’absence de tout élément nouveau ou offre de preuve nouvelle en appel,que les premiers juges ont écarté le moyen d’irrecevabilité tiré de l’existence d’un titre exécutoire qu’auraient d’ores et déjà obtenu en Turquie les consorts [N], en ce que l’examen des pièces produites par M. [K] à l’appui de ce moyen révèle que les décisions de justice rendues en Turquie dont il se prévaut (jugements des 9 octobre 2013, 29 avril 2015 et 20 janvier 2016, ses pièces n° 20 à 22) ont été rendues non pas par des juridictions statuant au fond, mais selon leurs mentions traduites en français par une traductrice mandatée par lui, par le ‘Tribunal de l’exécution d’EMIRDAG’ ; par ces décisions, la juridiction saisie a statué, là aussi au vu de leurs mentions, uniquement sur des mesures d’exécution à savoir, pour le premier sur une saisie conservatoire, le second sur l’appel formé contre une ‘saisie exécutoire’ et pour le dernier sur l’appel formé contre une ‘saisie exécution’.

Peu importe, sur ce point, que la juridiction de l’exécution turque ait, dans certaines des décisions invoquées, visé ‘une décision du tribunal de Grande instance de Vienne du 28 mai 2013″ laquelle, aux dires mêmes de l’appelant, n’existe pas, la circonstance que ces décisions soient, ainsi qu’il le soutient, fondées sur des déclaration mensongère étant inopérante quant à la nature et à l’objet de ces décisions qui ne concernent que des voies d’exécution.

S’agissant, enfin, du moyen tiré de ce que des biens immobiliers ayant appartenu aux époux [K] auraient été saisis et vendus en Turquie et qu’une partie de la créance aurait ainsi d’ores et déjà été recouvré, il touche au fond du litige et au montant de la créance due, et sera examiné à ce titre.

# sur le bien-fondé de la demande

– sur les reconnaissances de dette

Les consorts [N] versent aux débats trois documents dactylographiés en date, chacun, du 17 décembre 2011, intitulés ‘RECONNAISSANCE DE DETTE DETAILS’, signés tous trois notamment de M. [K] qui ne dénie pas sa signature.

Ces documents portent sur les sommes totales suivantes, et comportent, à chaque fois, le détail de plusieurs sommes pour parvenir au total correspondant, ainsi que, pour celle établie au nom de M. [E][N]Nc, des précisions concernant des numéros de chèques, ou encore la mention ‘virement’ :

au profit de Mme [P] [N] la somme totale de 86 000 €,

au profit de M. [G] [N] la somme totale de 105 000 €,

au profit de M. [E] [N] la somme totale de 106 200 €.

Ainsi que l’a justement considéré le tribunal, ces documents, non conformes aux prescriptions de l’article 1326 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, en ce que la mention de la somme en chiffres et en lettres est dactylographiée et non pas écrite par celui qui s’engage, n’en demeurent pas moins des commencements de preuve par écrit au sens de l’article 1347 du même code, c’est-à-dire un écrit émané de celui contre lequel la demande est formée et qui rend vraisemblable le fait allégué. Pour avoir force de preuve, cet écrit doit donc être corroboré par d’autres éléments, extérieurs à l’acte.

M. [K], qui soutient tout d’abord ne pas savoir lire ou écrire le français, ne produit aucun en vue d’établir la réalité de cette affirmation.

Par ailleurs, ainsi que l’a justement analysé le tribunal, la mention manuscrite portée par Mme [L] [U] ainsi libellée : ‘sous réserves de vérifications des opérations bancaires’, ne signifie pas son désaccord sur le montant des sommes réclamées mais seulement une réserve et il ne saurait en être conclu, sauf à entrer dans des suppositions hasardeuses, qu’elle aurait été rédigée comme le soutient M. [K], lequel, au demeurant, n’est pas l’auteur de cette mention : ‘afin d’apaiser l’urgence d’une situation qui paraissait inextricable pour la famille tout en cherchant pour une non juriste à marquer son désaccord’ (sic).

M. [K] prétend encore que son consentement à ces actes aurait été obtenu par violence ou sous menace de violence et, comme tel, serait affecté d’un vice de nature à entraîner leur nullité en application des articles 1109, et 1111 à 1113 du code civil alors applicable.

Il produit, pour en justifier :

des procès-verbaux d’audition de lui-même et de son épouse Mme [L] [U], en dates des :

16 décembre 2012, pour un dépôt de plainte par lui contre son beau-frère [G] [N] pour des faits de menaces et violence avec arme, qui auraient été commis la veille soit le 15 décembre 2012,

15 décembre 2012 pour l’audition de son épouse se déclarant témoin des faits commis le même jour contre son mari, et se disant elle aussi victime de menaces émanant, immédiatement après, de son neveu [E] [N],

1er décembre 2012 pour un dépôt de plainte de Mme [L] [U] épouse [K] contre son beau-frère [G] [N] pour des faits de menaces et violencequi auraient été commis la veille 30 novembre 2012,

un récépissé de dépôt de plainte en date du 29 décembre 2011 de Mme [L] [U] épouse [K] pour des faits de menace de mort réitérée du 17 au 29 décembre 2012.

Ainsi que l’a justement relevé le tribunal, ces pièces ne sont pas suffisantes à elles seules pour établir la réalité des faits allégués, en l’absence de tout document complémentaire relatif aux suites données le cas échéant à ces plaintes, en particulier de toute audition des personnes mentionnées comme impliquées.

En outre, il sera relevé que les trois dépôts de plainte dont les procès-verbaux d’audition des plaignants sont produits, se rapportent à des faits qui auraient été commis en décembre 2012

soit un an après la date portée sur les reconnaissances de dette, ce qui ne permet en aucun cas d’établir que des violences ou menaces auraient précédé ou présidé à la signature de ces document près de douze mois auparavant.

Enfin, le récépissé de dépôt de plainte en date du 29 décembre 2011 ne mentionne pas l’identité de la ou des personnes contre lesquelles la plainte a été déposée, et n’est accompagnée d’aucun autre document justificatif relatif à cette procédure.

En l’état de ces éléments, et en l’absence de tout autre élément produit en ce sens en cause d’appel, c’est par une juste et pertinente analyse que le tribunal a considéré que la preuve n’était pas rapportée de ce que le consentement de M. [K] aurait été surpris par violence.

– sur l’existence d’éléments extrinsèques corroborant le commencement de preuve par écrit

Le tribunal a précisément analysé les relevés de comptes respectifs de Mme [P] [N], M. [E] [N] et M. [G] [N], ainsi que les copies de chèques produits, ce dont il résulte la réalité de paiements, sans contrepartie établie, opérés par chacun des titulaires de ces comptes au profit de M. [K] ou de Mme [L] [K] à hauteur des sommes suivantes :

pour le compte au nom de Mme [P] [N] : 32 500 €,

pour le compte au nom de M. [G] [N] : 100 500 €,

pour le compte au nom de M. [E] [N] : 61 000 €,

ce dont les intimés demandent la confirmation.

Ces mouvements en débit sans contrepartie constituent les preuves extrinsèques nécessaires pour confirmer la véracité des reconnaissances de dettes à hauteur de chacun de ces montants.

C’est en vain que M. [K] prétend, pour justifier les versements ainsi opérés :

que des arrangements seraient intervenus entre son épouse [L] [U] et Mme [P] [N], soeur de celle-ci, dans le but que cette dernière puisse cacher des dépenses à son mari,

que ce dernier ayant découvert ces dépenses, Mme [P] [N] aurait demandé à sa soeur d’ « endosser leurs dépenses, qui correspondait en réalité à des sommes qui étaient remboursées à la famille [K]» (sic).

En effet, il produit seulement, pour en justifier :

une liasse de plusieurs dizaines de pages dactylographiées, dont les numérotations sont difficilement lisibles, correspondant à la transcription traduite en français de conversations en turc entre [L] [U] et Mme [P] [N], particulièrement peu exploitables comme évoquant des faits ou événements qui ne sont pas décrits de façon précise mais seulement commentés, en outre ponctués de nombreuses interpellations sans intérêt, dont l’appelant extrait une seule phrase émanant de Mme [P] [N] ‘Il dit que vous payerez dans dix ans à peu près, et en dix ans on les économisera plus ou moins bien et on lui rendra’ (sic) totalement inopérante pour constituer la preuve des faits allégués,

une liasse établie par Mme [L] [K] intitulée ‘vente de meubles’ pour 30 000 €, réglés par six chèques de 5 000 € chacun, dont les numéros, précisés, ne correspondent pas avec ceux figurant dans les relevés de compte en débit de Mme [P] [N] et retenus par le tribunal pour corroborer l’existence et le montant de la dette, la vente étant, au surplus, justifiée par une facture non numérotée d’une entreprise ‘Styl’tex’ dont l’adresse ([Adresse 4] à [Localité 9]) est la même que celle des époux [N],

une autre liasse intitulée ‘échange d’argent liquide contre des chèques’, et une intitulée ‘échange d’argent liquide contre des virements’, établies toutes deux par Mme [L] [K] seule, accompagnée de relevés de comptes sans aucune preuve de la remise d’argent liquide en échange.

Enfin, si M. [K] fait état de ce que des biens immobiliers situés en Turquie lui appartenant ainsi qu’à son épouse auraient été saisis et vendus, ce qui devrait venir en déduction de la dette, il ne produit aux débats, pour en justifier, qu’un document, au demeurant non conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile concernant les attestations, d’une personne se présentant comme étant l’avocat en Turquie de sa famille, faisant état :

d’une part de la vente, dans le cadre des mesures d’exécution engagées par la famille [N] en Turquie contre les époux [K], d’un bâtiment à [Localité 12] et d’une maison et un commerce à [Localité 10], en indiquant leur prix de vente mais sans préciser quelles sommes seraient, sur ces prix, revenues aux créanciers après déduction de frais éventuels, et sans qu’aucun justificatif soit joint concernant ces ventes ainsi que la distribution de sommes recueillies,

d’autre part d’une action en responsabilité engagée contre l’ancien avocat de la famille [K] dans le cadre de ces actions, sans qu’il soit précisé si ses clients avaient ou non été indemnisés d’un éventuel préjudice dans ce cadre.

En l’absence d’éléments plus précis et de documents justificatifs, il ne peut être tenu compte de ce seul témoignage pour voir réduire la dette en l’espèce.

C’est donc à bon droit que le tribunal a condamné M. [K] au paiement des sommes ci-dessus, et le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les demandes accessoires

M. [K], qui succombe en son appel, devra supporter les dépens conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile. Pour les mêmes motifs, il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en sa faveur.

Il est équitable de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit des consorts [N].

Les mesures accessoires du jugement déféré sont par ailleurs confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré.

Y ajoutant,

Condamne M. [C] [K] à payer à Mme [O] [N] et MM. [G], [E], [Z] et [D] [N] unis d’intérêt la somme complémentaire de 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Rejette toutes les autres demandes.

Condamne M. [C] [K] aux dépens d’appel.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de la procédure civile,

Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


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