La SA MY MONEY BANK a consenti un prêt de 183 859,15 euros aux époux [L] en novembre 2014, remboursable sur 240 mensualités avec un taux variable, garanti par une hypothèque. En novembre 2021, la banque a mis en demeure les époux pour huit échéances impayées, entraînant la déchéance du terme. En février 2022, un commandement de payer a été délivré pour une saisie immobilière de leur bien. Les époux ont contesté la validité de la saisie, invoquant la forclusion et des irrégularités dans le commandement. Le juge de l’exécution a rejeté la demande de saisie, prononcé la déchéance des intérêts de la banque, et ordonné la mainlevée de la saisie. La banque a fait appel, demandant l’annulation de ce jugement. En mars 2024, la cour a constaté que la banque détenait un titre exécutoire et a autorisé la vente amiable du bien, fixant un prix de vente minimum. Les époux ont également formé un appel incident, demandant la nullité des commandements de payer. La cour a partiellement infirmé le jugement initial, validant les commandements de payer et autorisant la vente amiable, tout en confirmant d’autres aspects du jugement.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Au nom du peuple français
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Cour d’appel de Nancy
Chambre de l’Exécution – JEX
Arrêt n° /24 du 17 OCTOBRE 2024
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 24/00480 – N° Portalis DBVR-V-B7I-FKNL
Décision déférée à la Cour : jugement du juge de l’exécution du Juge de l’exécution de NANCY,
R.G.n° 22/00032, en date du 08 février 2024,
APPELANTE :
La société MY MONEY BANK (anciennement denommée GE Sovac, GE Capital Bank PUIS GE Money Bank)
société anonyme – établissement de crédit agréé en qualité de banque, dont le siège social est à [Adresse 11], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Nanterre sous le numéro 784 393 340, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Michèle SCHAEFER, avocat au barreau de NANCY substituée par Me Christian OLSZOWIAK, avocat au barreau de NANCY
INTIMES :
Monsieur [J] [L]
né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 9] (Congo), domicilié [Adresse 6]
Représenté par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY
Madame [F] [S] [H] épouse [L]
née le [Date naissance 4] 1959 à [Localité 8] (Congo), domiciliée [Adresse 6]
Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY
S.A. BNP PARIBAS
société anonyme SIRET 662042449, [Adresse 1] agissant poursuites et diligences de ses représentants en exercice ayant élu domicile dans l’inscription de privilège de prêteur de deniers et d’hypothèque conventionnelle publiée au Service de la Publicité Foncière de [Localité 10] le 08/10/2003 volume 5404P01 2003 V N°4347 en l’Etude de Maître [M] [O], notaire à [Localité 10], office notarial LES ALERIONS, [Adresse 7]
Non représentée bien que la déclaration d’appel et la date d’audience lui ait été régulièrement signifiées à personne habilitée par acte de Me [Y] [U], commissaire de justice à [Localité 10] en date du 21 mars 2024 – autorisation d’assigner à jour fixe par ordonnance du 18 mars 2024
TRESOR PUBLIC représenté par Monsieur le trésorier
ayant élu domicile dans l’inscription d’hypothèque légale publiée au Service de la Publicité Foncière de NANCY le 07/04/2021 volume 5404p01 2021 V N° 1664 dans les bureaux du
SIP [Localité 12] [Adresse 2]
Non représentée bien que la déclaration d’appel et la date d’audience lui ait été régulièrement signifiées à personne habilitée par acte de Me [Y] [U], commissaire de justice à [Localité 10] en date du 21 mars 2024 – autorisation d’assigner à jour fixe par ordonnance du 18 mars 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 26 Septembre 2024, en audience publique devant la cour composée de :
Monsieur Francis MARTIN, président de chambre,
Madame Nathalie ABEL, conseillère,
Madame Fabienne GIRARDOT, conseillère, chargée du rapport
qui en ont délibéré ;
Greffier, lors des débats : Mme Christelle CLABAUX-DUWIQUET ;
ARRÊT : réputé contradictoire, prononcé publiquement le 17 octobre 2024 date indiquée à l’issue des débats, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre, et par Madame Christelle CLABAUX-DUWIQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
EXPOSE DU LITIGE
Par un acte notarié reçu le 26 novembre 2014, réitérant une offre de prêt signée le 6 novembre 2014, la SA MY MONEY BANK anciennement dénommée GE MONEY BANK a consenti à M. [J] [L] et Mme [F] [S] [H] épouse [L] (ci-après les époux [L]) un prêt d’un montant de 183 859,15 euros correspondant à un rachat de crédits, remboursable sur une durée de 240 mensualités à un taux variable, garanti par une hypothèque conventionnelle inscrite au service de la publicité foncière de [Localité 10] le 9 décembre 2014 volume 2014 V n°4926, sur leur bien immobilier sis à [Adresse 6].
Par courriers recommandés avec demande d’avis de réception en date du 24 novembre 2021, la SA MY MONEY BANK a mis les époux [L] en demeure de s’acquitter de huit échéances impayées entre le 1er septembre 2018 et le 1er novembre 2021 à hauteur de 10 493,68 euros dans le délai de quinze jours, sous peine de déchéance du terme.
Par courriers recommandés du 17 décembre 2021 avec avis de réception retournés signés les 20 et 27 décembre 2021, la SA MY MONEY BANK a respectivement notifié aux époux [L] la déchéance du terme du prêt.
Par actes d’huissier en date du 25 février 2022, la SA MY MONEY BANK a fait délivrer aux époux [L] un commandement de payer valant saisie immobilière du bien sis à [Adresse 6], cadastré section AE n°[Cadastre 5], pour une contenance de 8 ares 48 centiares, pour avoir paiement de la somme de 142 233,10 euros (selon décompte arrêté au 17 décembre 2021). Ce commandement a été publié au service de la publicité foncière de [Localité 10] 1 le 14 avril 2022 volume 2022 S n°22.
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Par acte d’huissier délivré le 30 mai 2022, la SA MY MONEY BANK a fait assigner les époux [L] à l’audience d’orientation du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nancy statuant en matière de saisie immobilière afin de voir fixer le montant de sa créance à hauteur de 149 757,44 euros, ou subsidiairement 104 064,64 euros, outre les frais et intérêts au taux légal postérieurs au 14 septembre 2023, et de voir ordonner la vente judiciaire des biens saisis sur la mise à prix de 80 000 euros.
La dénonciation du commandement valant assignation à comparaître a été délivrée au Trésor Public et à la SA BNP Paribas, créanciers inscrits, respectivement les 2 et 3 juin 2022, qui n’ont pas déclaré de créance.
Les époux [L] ont conclu à la forclusion de l’action aux fins de saisie, puis à la nullité du commandement de payer et à sa caducité, et ont sollicité la mainlevée de la saisie. Subsidiairement, ils se sont prévalus de l’absence de créance liquide et exigible en raison de la nullité de la déchéance du terme et d’un décompte erroné, et de la déchéance de la SA MY MONEY BANK de son droit aux intérêts pour manquement du prêteur à ses obligations précontractuelles de vérification de leur solvabilité et de consultation du FICP ainsi qu’à son devoir de conseil et d’information relatif à la possibilité de souscrire une assurance auprès de l’assureur de son choix et lié à la remise d’une notice comprenant les conditions générales de l’assurance proposée, avec levée de leur inscription au FICP sous astreinte. Très subsidiairement, ils ont demandé la fixation de la mise à prix à 300 000 euros et l’autorisation de vendre amiablement leur bien au prix plancher de 340 000 euros. Ils ont sollicité des dommages et intérêts pour procédure abusive.
Par jugement en date du 8 février 2024, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nancy statuant en matière de saisie immobilière a :
– rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la créance,
– déclaré irrecevable l’exception de nullité du commandement de payer valant saisie immobilière,
– rejeté l’exception de caducité du commandement de payer valant saisie immobilière,
– prononcé la déchéance de la SA MY MONEY BANK de son droit aux intérêts stipulés au contrat de prêt du 26 novembre 2014,
– constaté que la SA MY MONEY BANK ne dispose pas d’une créance liquide et exigible à la date de délivrance du commandement de saisie immobilière du 25 février 2022,
En conséquence,
– débouté la SA MY MONEY BANK de sa demande de saisie immobilière du bien sis à [Adresse 6], cadastré section AE n°[Cadastre 5], pour une contenance de 08 a 48 ca,
– ordonné la mainlevée de la présente procédure de saisie immobilière immobilière et la radiation du commandement de payer valant saisie immobilière en date du 25 février 2022, publié au service de la publicité foncière de [Localité 10] 1 le 14 avril 2022 volume 2022 S n°22,
– dit qu’il n’appartient pas à la présente juridiction d’enjoindre à la SA MY MONEY BANK de procéder à la désinscription des époux [L] du FICP,
– débouté les époux [L] de leur demande de mainlevée de l’hypothèque conventionnelle inscrite par le créancier poursuivant sur le bien immobilier sis à [Adresse 6], cadastré section AE n°[Cadastre 5], pour une contenance de 08 a 48 ca,
– débouté les époux [L] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– constaté que le Trésor Public et la SA BNP Paribas, créanciers inscrits, n’ont pas déclaré de créance,
– condamné la SA MY MONEY BANK à payer aux époux [L] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté la SA MY MONEY BANK de sa demande formée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SA MY MONEY BANK aux frais et dépens.
Le juge a retenu que le point de départ du délai de forclusion biennale de l’article L. 311-52 ancien du code de la consommation ne courait pas à compter du premier incident de paiement non régularisé, mais à compter de la résiliation du contrat, soit à compter de la réception de la notification de la déchéance du terme du contrat de prêt, soit à compter du 20 décembre 2021 à l’égard de M. [J] [L], et à compter du 27 décembre 2021 à l’égard de Mme [F] [S] [H] épouse [L], et a jugé que le commandement avait été délivré avant l’expiration du délai de forclusion.
Il a jugé que la SA MY MONEY BANK disposait d’un titre exécutoire en ce que les défauts de forme que l’article 1318 ancien du code civil sanctionne par la perte du caractère authentique, et partant, exécutoire de l’acte, s’entendaient de l’inobservation des formalités requises pour l’authentification par l’article 41 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971, et que l’inobservation de l’obligation pour le notaire de faire figurer les procurations en annexe de l’acte authentique ou de les déposer au rang des minutes (article 21 dudit décret) ne faisait pas perdre à l’acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire, au même titre que les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d’une partie à un acte notarié (article 14 dudit décret lié au paraphe des feuilles par le notaire) qui sont sanctionnées par la nullité relative de l’acte accompli pour le compte de la partie représentée, qui seule peut la demander.
Le juge a déclaré les époux [L] irrecevables à contester la régularité du commandement après avoir soulevé la fin de non recevoir tirée de la forclusion de l’action, puis l’absence de titre exécutoire, en ce qu’il s’agit d’une exception de procédure soulevée après l’assignation par le créancier poursuivant qui devait être évoquée in limine litis.
Il a relevé que la SA MY MONEY BANK justifiait de la publication du commandement de payer valant saisie dans les deux mois de sa délivrance, et a rejeté l’incident d’instance tiré de la caducité dudit commandement.
Il a constaté que la SA MY MONEY BANK avait produit une fiche de dialogue et la FIPEN signées par les époux [L] le 6 novembre 2014, ainsi que le document d’information portant sur l’opération de regroupement de crédits signée par les époux [L], et avait justifié de la consultation du FICP le 4 novembre 2014, ainsi que de l’information donnée aux emprunteurs de la possibilité de souscrire une assurance de leur choix. Il a néanmoins jugé que la SA MY MONEY BANK n’apportait pas d’éléments complémentaires de nature à corroborer la remise de la notice d’assurance groupe proposée, attestée dans le cadre d’une clause, tel que jugé par la cour d’appel de Nancy dans un arrêt rendu le 11 mai 2023 dans le cadre d’une procédure en saisie des rémunérations, ayant pour conséquence la déchéance du droit aux intérêts de la SA MY MONEY BANK.
Le juge a relevé que la déchéance du droit aux intérêts s’appliquait depuis la première échéance de remboursement du 1er janvier 2015, et que les époux [L] s’étaient acquittés des intérêts prévus au contrat depuis cette date pour un montant de 20 520 euros, de sorte qu’ils n’étaient pas redevables de la somme de 10 493,68 euros au jour de la mise en demeure préalable à la déchéance du terme, justifiant l’annulation de la déchéance du terme.
Au regard de la poursuite du contrat comportant la garantie acceptée par les époux [L], le juge a rejeté la demande de mainlevée de l’hypothèque du poursuivant.
Il a constaté qu’à la date de la délivrance du commandement de payer, aucune juridiction ne s’était prononcée sur la déchéance du droit aux intérêts de la SA MY MONEY BANK, de sorte qu’aucun caractère fautif de l’action en recouvrement ne pouvait en résulter.
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Le 12 mars 2024, la SA MY MONEY BANK a formé appel du jugement tendant à son annulation ou sa réformation en ce qu’il a :
– prononcé la déchéance de la SA MY MONEY BANK de son droit aux intérêts stipulés au contrat de prêt du 26 novembre 2014,
– constaté que la SA MY MONEY BANK ne dispose pas d’une créance liquide et exigible à la date de délivrance des commandements de saisie immobilière du 25 février 2022,
– débouté la SA MY MONEY BANK de sa demande de saisie immobilière du bien sis à [Adresse 6], cadastré section AE n°[Cadastre 5], pour une contenance de 08 a 48 ca,
– ordonné la mainlevée de la présente procédure de saisie immobilière immobilière et la radiation du commandement de payer valant saisie immobilière en date du 25 février 2022, publié au service de la publicité foncière de [Localité 10] 1 le 14 avril 2022 volume 2022 S n°22,
– condamné la SA MY MONEY BANK à payer aux époux [L] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté la SA MY MONEY BANK de sa demande formée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance en date du 18 mars 2024, le président de la chambre de l’exécution a autorisé la SA MY MONEY BANK à assigner à jour fixe les époux [L], ainsi que la SA BNP Paribas et le Trésor Public à l’audience de plaidoiries de la chambre de l’exécution de la cour d’appel du 23 mai 2024, date à laquelle le renvoi à la mise en état a été ordonné.
Dans ses dernières conclusions transmises le 25 juillet 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA MY MONEY BANK, appelante, demande à la cour sur le fondement des articles 1344 du code civil et L. 311-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction à la date de conclusion du contrat :
A titre principal,
– d’infirmer le jugement du 8 février 2024 du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nancy en ce qu’il a :
* prononcé la déchéance de la SA MY MONEY BANK de son droit aux intérêts stipulés au contrat de prêt du 26 novembre 2014,
* constaté que la SA MY MONEY BANK ne dispose pas d’une créance liquide et exigible à la date de délivrance du commandement de saisie immobilière du 25 février 2022,
* débouté la SA MY MONEY BANK de sa demande de saisie immobilière du bien sis à [Adresse 6], cadastré section AE n°[Cadastre 5], pour une contenance de 08 a 48 ca,
* ordonné la mainlevée de la présente procédure de saisie immobilière immobilière et la radiation du commandement de payer valant saisie immobilière en date du 25 février 2022, publié au service de la publicité foncière de [Localité 10] 1 le 14 avril 2022 volume 2022 S n°22,
* condamné la SA MY MONEY BANK à payer aux époux [L] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
* débouté la SA MY MONEY BANK de sa demande formée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– de confirmer le jugement pour le surplus,
– de fixer sa créance à la somme de 149 757,44 euros, outre les frais et intérêts postérieurs au 14 septembre 2023,
A titre subsidiaire,
– de fixer sa créance à la somme de 104 064,64 euros outre les frais et intérêts au taux légal postérieurs au 14 septembre 2023,
En tout état de cause,
– d’ordonner la vente judiciaire des biens ci-après, sur la mise à prix de 80 000 euros, à savoir : une maison à usage d’habitation sise à [Adresse 6], les fonds et terrains en dépendant, figurant au cadastre section AE n°[Cadastre 5] pour une contenance de 8 a 48 ca,
– d’ordonner le renvoi des parties devant le juge de l’exécution pour fixation d’une nouvelle date d’adjudication,
– en cas de réévaluation de la mise à prix, d’ordonner qu’en cas de carence d’enchère sur la mise à prix initiale, le bien sera remis en vente sur baisses successives jusqu’au montant de la mise à prix fixée au cahier des conditions de vente,
– en cas de vente amiable, de renvoyer les parties devant le juge de l’exécution pour taxation des frais de poursuite et fixation de l’audience de rappel,
– de débouter les époux [L] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
– de condamner les époux [L] solidairement et à défaut in solidum, au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, la SA MY MONEY BANK fait valoir en substance :
– que la déchéance du droit aux intérêts n’est pas encourue en ce que, la banque n’étant que tiers bénéficiaire du contrat d’assurance facultatif, elle ne peut se voir reprocher un quelconque manquement à son obligation d’information et de ne pas avoir transmis les conditions générales de l’assurance dont elle ne disposait pas ; que la déchéance du droit aux intérêts peut être modérée par le juge sur le fondement de l’article L. 311-48 du code de la consommation, dans sa version applicable à la date de l’offre, en cas de non respect de l’obligation de remise de la notice d’assurance ; que la sanction doit revêtir un caractère proportionné notamment dans la mesure où le contrat de restructuration offrait la possibilité aux emprunteurs d’apurer leur situation financière ; que l’erreur du prêteur ne peut être sanctionnée que par la responsabilité de droit commun supposant la preuve d’une faute et d’un préjudice en lien de causalité avec cette faute, et que les époux [L] ne rapportent la preuve d’aucun préjudice ;
– que la déchéance du droit aux intérêts n’a pas d’effet rétroactif ; que le montant des intérêts payés aurait dû être imputé sur le capital restant dû à la date où le juge de l’exécution a statué ; qu’au jour du prononcé de la déchéance du terme et de la signification du commandement aux fins de saisie immobilière, la déchéance du droit aux intérêts n’avait pas été prononcée, et la créance de la banque au titre des échéances échues et impayées et du capital restant dû était exigible ;
– qu’elle justifie d’une créance liquide et exigible ; que le compte des époux [L] était largement débiteur à la date de la mise en demeure du 24 novembre 2021 et à la date de déchéance du terme le 17 décembre 2021 selon l’historique des remboursements depuis l’origine, le journal des règlements de retard et le tableau d’amortissement ;
– qu’il appartient à la cour de statuer sur le caractère certain, liquide et exigible de la créance de MY MONEY BANK et sur la validité de la procédure de saisie immobilière à la date où il statue ; que l’autorité de la chose jugée de l’arrêt de la cour d’appel de Nancy du 11 mai 2023 n’a lieu qu’à l’égard de l’objet de l’arrêt, à savoir le rejet de la requête aux fins de saisie des rémunérations ; que la cour a considéré, sans le reprendre dans son dispositif, que la déchéance du droit aux intérêts ne concernait que le quantum de l’action en recouvrement dont il était saisi, c’est-à-dire les échéances impayées, et en particulier la part d’intérêts desdites échéances ;
– que le caractère exécutoire de l’acte de prêt notarié en vertu duquel la procédure de saisie immobilière est engagée n’est pas valablement remis en cause ; que l’inobservation de l’obligation pour le notaire de faire figurer les procurations en annexe de l’acte authentique, de sa copie exécutoire ou de les déposer au rang de ses minutes, ne fait pas perdre à l’acte son caractère authentique et, partant, son caractère exécutoire ; que les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d’une partie à un acte notarié ne relèvent pas des défauts de forme que l’article 1318 du code civil sanctionne par la perte du caractère authentique ; que ces irrégularités, qu’elles tiennent en une nullité du mandat, un dépassement ou une absence de pouvoir, sont sanctionnées par la nullité relative de l’acte accompli pour le compte de la partie représentée, qui seule peut la demander, à savoir la société MY MONEY BANK s’agissant de l’absence d’annexion de la délégation de pouvoir au profit de Mme [R] [D] qui la représentait lors de la signature de l’acte de prêt ; que l’inobservation des dispositions de l’article 14 du décret du 26 novembre 1971 n’a pas pour effet de priver l’acte de son caractère exécutoire sur le fondement de l’article 1318 du code civil (sanctionnant l’inobservation des formalités requises à l’article 41 du décret précité) ;
– que le commandement de payer valant saisie qui ne contient pas un décompte détaillé des sommes réclamées est affecté d’une irrégularité de forme, et que les époux [L], qui connaissaient la ventilation des sommes réclamées par la reprise du décompte des sommes dues au commandement, conformément à l’article R. 321-3 du code des procédures civiles d’exécution, ne démontrent pas l’existence d’un grief ; que la nullité n’est pas encourue au motif que les sommes réclamées sont supérieures à celles dues au créancier ; que l’annexion du tableau d’amortissement n’est pas une condition de validité du commandement ;
– que la contestation portant sur une prétendue imprécision dans la désignation du bien saisi est irrecevable à défaut d’avoir été soulevée in limine litis ; que sur le fond, les dispositions de l’article R. 321-3 dudit code ont été respectées et aucun grief n’est justifié ;
– que la publication du commandement valant saisie et l’assignation ont été réalisées dans les délais requis aux articles R. 321-6 et R. 322-4 dudit code ;
– que la saisie pratiquée par la banque n’est ni abusive ni disproportionnée ; qu’elle détient une créance à hauteur de 149 757,44 euros depuis le 14 septembre 2023 ;
– que la forclusion n’est pas acquise ; que l’arrêt de la cour d’appel de Nancy du 11 mai 2023 rendu en matière de saisie des rémunérations a rejeté l’exception d’irrecevabilité de la demande aux fins de saisie des rémunérations tirée de la prescription ; que le premier incident de paiement non régularisé date du 1er septembre 2018 et que le délai de forclusion de deux ans a été interrompu par des commandements de payer valant saisie-vente délivrés les 29 mars 2019, 1er octobre 2020 et 24 septembre 2022 ;
– qu’elle n’est pas tenue à un devoir de mise en garde lors de l’octroi d’un prêt destiné à un regroupement de crédits à des conditions moins onéreuses (taux d’endettement ramené de 66,59% à 30,33%) ; qu’elle a procédé aux vérifications de solvabilité imposées par le code de la consommation (fiche de dialogue, pièces justificatives, consultation du FICP le 4 novembre 2014) ; qu’aucun manquement à son obligation d’information ne peut lui être reproché ;
– que l’inscription des époux [L] au FICP n’a été faite de façon abusive ou déloyale, et qu’elle n’est pas désintéressée après déchéance du terme ;
– que la mise à prix à hauteur de 80 000 euros est parfaitement justifiée au regard du cahier des conditions de vente et du procès-verbal de description de l’immeuble ; qu’en cas de mise à prix insuffisante, le bien sera remis en vente sur baisses successives jusqu’au montant de la mise à prix initiale ;
– qu’elle s’en rapporte sur l’autorisation de vente amiable en relevant que les époux [L] ne justifient d’aucun compromis de vente, voire de mandat donné à une agence immobilière ou notaire ou d’autre démarche en vue de la mise en vente de l’immeuble, et qu’il leur incombe de produire des justificatifs concrets pour justifier de leur bonne foi et de la réalité des démarches entreprises.
Dans leurs dernières conclusions transmises le 2 juillet 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les époux [L], intimés et appelants à titre incident, demandent à la cour :
– de débouter la SA MY MONEY BANK de son recours et de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– de les recevoir en leur appel incident et y faisant droit,
– d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il a rejeté leurs demandes afin de nullité et caducité,
Et statuant à nouveau,
In limine litis,
– de dire et juger que les commandements de payer valant saisie immobilière délivrés le 25 février 2022 sont entachés de nullité et par voie de conséquence l’ensemble des actes subséquents, en ce compris l’assignation qui leur a été délivrée en date du 30 mai 2022, est également entachée de nullité,
– de prononcer la nullité des commandements de payer valant saisie immobilière du 25 février 2022,
– de constater la caducité des commandements de payer valant saisie immobilière du 25 février 2022,
– de dire et juger caducs les commandements de payer valant saisie immobilière du 25 février 2022,
Subsidairement au fond,
– de constater et déclarer forclose l’action aux fins de saisie de la SA MY MONEY BANK depuis le 1er septembre 2020,
– de dire et juger l’action de la SA MY MONEY BANK irrecevable,
– d’ordonner la mainlevée de l’hypothèque pratiquée par la SA MY MONEY BANK sur l’immeuble leur appartenant et la radiation de la publication des commandements de payer valant saisie immobilière du 25 février 2022 au service de la publicité foncière,
Plus subsidiairement,
– de constater l’absence de titre exécutoire de la SA MY MONEY BANK,
– de dire et juger que les conditions pour procéder à une saisie immobilière ne sont pas réunies,
– de confirmer le jugement dont appel en ce qu’i1 a :
* prononcé la déchéance de la SA MY MONEY BANK de son droit aux intérêts stipulés au contrat de prêt du 26 novembre 2014,
* constaté que la SA MY MONEY BANK ne dispose pas d’une créance liquide et exigible à la date de délivrance du commandement de saisie immobilière du 25 février 2022,
* débouté la SA MY MONEY BANK de sa demande de saisie immobilière du bien sis à [Adresse 6], cadastré section AE n°[Cadastre 5], pour une contenance de 08 a 48 ca,
* ordonné la mainlevée de la présente procédure de saisie immobilière immobilière et la radiation du commandement de payer valant saisie immobilière en date du 25 février 2022, publié au service de la publicité foncière de [Localité 10] 1 le 14 avril 2022 volume 2022 S n°22,
* condamné la SA MY MONEY BANK à payer aux époux [L] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
* débouté la SA MY MONEY BANK de sa demande formée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
* condamné la SA MY MONEY BANK aux frais et dépens,
– de constater l’absence d’impayés exigibles devant une juridiction et la déchéance de la SA MY MONEY BANK de son droit à des intérêts sur l’ensemble du prêt,
– de dire et juger nulle la déchéance du terme pratiquée par la SA MY MONEY BANK ainsi que la mise en demeure du 14 novembre 2021,
– de dire et juger que la SA MY MONEY BANK ne pouvait pas prononcer la déchéance du terme du prêt sur le fondement de cette créance,
– de dire et juger que la SA MY MONEY BANK ne justifie pas de sa créance, décompte erroné tant sur le principal, échéances prétendument impayées, que sur les intérêts,
– de dire et juger que la SA MY MONEY BANK a manqué à son devoir de conseil en ce qui concerne l’adéquation du prêt à leur situation personnelle,
– de dire et juger que la SA MY MONEY BANK a manqué à ses obligations précontractuelles de consultation du FICP et n’a pas fourni aux emprunteurs l’information qu’ils pourront contracter une assurance pour le prêt auprès d’un assureur de leur choix ni la notice comprenant les conditions générales de l’assurance,
– de supprimer l’indemnité de défaillance non prévue contractuellement,
– d’enjoindre à la SA MY MONEY BANK de procéder sans délai et sous astreinte de 50 euros par jour de retard à la mainlevée de l’inscription au FICP réalisée abusivement à l’encontre de M. [L],
A titre infiniment subsidiaire et si par extraordinaire la vente forcée était ordonnée,
– de dire et juger la mise à prix insuffisante,
– de fixer la mise à prix à la somme de 300 000 euros conformément aux dispositions de l’article L. 322-6 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution,
– de débouter la SA MY MONEY BANK de sa demande de voir fixer la mise à prix à 80 000 euros,
– d’autoriser la vente amiable du bien au prix plancher de 340 000 euros,
En tout état de cause,
– de dire et juger que la procédure est abusive,
– de dire et juger que la procédure de saisie leur a causé un préjudice que la SA MY MONEY BANK doit indemniser,
– de condamner la SA MY MONEY BANK à 35 000 euros pour procédure abusive à titre de dommages et intérêts,
– de condamner la SA MY MONEY BANK au paiement de la somme de 7 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Au soutien de leurs demandes, les époux [L] font valoir en substance :
– que du fait de la déchéance de son droit aux intérêts sur tout le prêt et vu les sommes au titre des intérêts déjà encaissées depuis le 1er janvier 2015, date de la première échéance, la SA MY MONEY BANK ne justifie pas de sommes exigibles pouvant justifier sa procédure ni les commandements de payer valant saisie immobilière ; que la SA MY MONEY BANK au moment de la souscription de l’assurance emprunteur, n’a pas fourni la notice comprenant les conditions générales de l’assurance contractée, et ne justifie pas avoir exécuté ses obligations précontractuelles d’information et de recherche de solvabilité ; qu’un jugement du 17 juin 2022 confirmé à hauteur de cour le 11 mai 2023, qui a l’autorité de la chose jugée, ayant pour objet de voir ordonner la saisie de leurs rémunérations sur le même acte de prêt, a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la SA MY MONEY BANK du fait de ses multiples manquements à ses obligations précontractuelles ; que la SA MY MONEY BANK leur est redevable d’intérêts indûment prélevés qui doivent subsidiairement être déduits de la créance ;
– que la déchéance du terme a été appliquée par la SA MY MONEY BANK alors que les sommes au soutien de la mise en demeure étaient frappées de forclusion ou indues du fait du manquement du prêteur à ses obligations envers les emprunteurs ; que l’effet rétroactif de la déchéance des intérêts sur la totalité du prêt, qui a acquis l’autorité de la chose jugée, prive de fondement la déchéance du terme dès lors que les sommes prélevées à ce titre n’étaient pas dues et étaient supérieures aux prétendues échéances impayées qui comportent elles-mêmes des intérêts indus ; que dès lors la sanction de la déchéance du terme du prêt ne peut être légalement effective ni appliquée ;
– que le prêt consenti est expressément soumis aux dispositions du code de la consommation régissant les crédits à la consommation prévues aux articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation dans leur version applicable ; que le premier incident non régularisé remonte au 1er septembre 2018, de sorte que l’action introduite le 30 mai 2022 est atteinte de forclusion ;
– que la SA MY MONEY BANK ne justifie pas d’un titre exécutoire ; que la créance dont se prévaut la SA MY MONEY BANK n’est ni déterminée ni déterminable, ni liquide, ni exigible ; que le tableau d’amortissement contractuel, qui constitue une information indispensable pour que l’acte puisse constituer un titre exécutoire, n’a pas été annexé à l’acte authentique ; que la délégation de pouvoir au bénéfice de Mme [R] [D] en date du 2 mai 2014 n’est pas annexée au titre exécutoire litigieux ; que l’inobservation de l’obligation de faire figurer par le notaire les procurations de l’acte authentique en annexe de l’acte fait perdre à l’acte son caractère authentique et exécutoire ; que les pages de l’offre préalable de prêt, le document d’information sur 1’opération de regroupement de crédits, les informations précontractuelles européennes en matière de crédit aux consommateurs, la fiche de dialogue, les conditions particulières annexées à la copie exécutoire de l’acte fondant les poursuites, ne comportent pas le paraphe du notaire ; qu’à défaut, l’acte est privé de son caractère exécutoire et ne peut valoir que comme écriture sous-seing privée ;
– que le commandement de payer délivré le 25 février 2022 est nul en ce qu’il n’intègre pas un tableau d’amortissement actualisé et complet, ainsi que le détail des échéances impayées ayant entraîné la déchéance du terme, de même que les intérêts échus, s’agissant de mentions prescrites à l’article R. 321-3 du code des procédures civiles d’exécution ; qu’il existe un doute sur la désignation du bien, de sorte qu’au jour de la délivrance du commandement, ils ne pouvaient pas déterminer les biens visés par la saisie, ce qui leur cause grief ;
– que le commandement de payer est caduc du fait de la forclusion de la créance ; que le prêteur ne justifie pas de la publication du commandement de payer dans les deux mois suivant suivant sa signification, ni de la délivrance de l’assignation dans les deux mois de ladite publication, ni du respect du délai de huit jours donné aux débiteurs pour régler leur dette ;
– que la voie d’exécution choisie présente un caractère disproportionné et abusif qui sera sanctionné par la nullité de la saisie pratiquée et la condamnation à des dommages et intérêts ; que les créances sont frappées de forclusion ou que les créances ne sont pas liquides et exigibles, et que la SA MY MONEY BANK a saisi le JEX en saisie des rémunérations le 11 février 2021, a obtenu leur inscription au FICP (bloquant leur projet de rachat de crédits) et a entrepris cette procédure de saisie immobilière manifestement inutile sur des décomptes erronés et sans incidents de paiement (l’échéance du 1er novembre 2021 étant payée) ; que la mauvaise foi et l’intention de nuire du prêteur sont caractérisées, et que la saisie immobilière portant sur de prétendues échéances impayées est disproportionnée ;
– qu’ils disposent de l’évaluation de leur bien par une agence immobilière à hauteur de 340 000 euros.
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La SA BNP Paribas et le Trésor public, régulièrement convoqués par actes de commissaire de justice remis à personnes se déclarant habilitées à les recevoir le 21 mars 2024, n’ont pas constitué avocat.
Sur la forclusion de la créance et la perte du caractère exécutoire du titre
L’article L. 311-52 du code de la consommation, dans sa version applicable issue de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, dispose que ‘ les actions en paiement engagées (…) à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par : (…) – le premier incident de paiement non régularisé.’
Or, l’article 2244 du code de procédure civile énonce que ‘ le délai de prescription ou le délai de forclusion est également interrompu par une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d’exécution ou un acte d’exécution forcée. ‘
Aussi, le commandement aux fins de saisie-vente, sans être un acte d’exécution forcée, engage la mesure d’exécution forcée, de sorte qu’il interrompt la forclusion de la créance qu’il tend à recouvrer.
En l’espèce, la date du premier incident de paiement non régularisé est fixée au 1er septembre 2018 par les deux parties, s’agissant du point de départ du délai de forclusion.
En outre, la SA MY MONEY BANK justifie de la délivrance aux époux [L] de commandements de payer aux fins de saisie-vente les 29 mars 2019, 1er octobre 2020 et 24 septembre 2022, tendant à recouvrer la créance litigieuse.
Il en résulte que lesdits commandements de payer ont eu pour effet d’interrompre le délai de forclusion de deux ans et de faire courir un nouveau délai.
Dans ces conditions, les commandements aux fins de saisie immobilière ont été délivrés le 25 février 2022, avant l’expiration du délai de forclusion.
Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l’acquisition de la forclusion biennale.
Sur l’existence d’un titre exécutoire
L’article L. 311-2 du code des procédures civiles d’exécution dispose que ‘ tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière dans les conditions fixées par le présent livre et par les dispositions qui ne lui sont pas contraires du livre Ier. ‘
Au préalable, le premier juge a justement constaté que l’acte notarié du 26 novembre 2014 était revêtu de la formule exécutoire, conformément à l’article L. 111-3, 4°, dudit code.
En outre, l’article 1318 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, énonce que l’acte qui n’est point authentique par l’incompétence ou l’incapacité de l’officier, ou par un défaut de forme, vaut comme écriture privée, s’il a été signé des parties.
Or, les défauts de forme visés à cet article s’entendent de l’inobservation des formalités requises pour l’authentification par l’article 41 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971, au rang desquels ne figurent pas l’inobservation de l’obligation pour le notaire de faire figurer les procurations en annexe de l’acte authentique ou de les déposer au rang des minutes prévue à l’article 21 dudit décret, de même que les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d’une partie à l’acte notarié, au même titre que l’absence de paraphe par le notaire des pages de l’offre préalable de prêt et des pièces s’y rapportant prévue à l’article 14 dudit décret (fiche d’information sur le regroupement de crédis, FIPEN, fiche de dialogue et conditions particulières du prêt), contrairement à ce que soutiennent les époux [L].
Aussi, le premier juge a retenu à juste titre que les défauts de forme allégués par les époux [L] étaient sans incidence sur le caractère authentique de l’acte notarié du 26 novembre 2014 fondant les poursuites de saisie immobilière.
De même, il a énoncé justement que les moyens soutenus par les époux [L] tirés de l’absence de liquidité ou d’exigibilité de la créance, ou du caractère déterminé ou déterminable du montant de la créance, ainsi que de l’absence de tableau d’amortissement en annexe du commandement, étaient sans emport sur la qualité de titre exécutoire.
Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a rejeté le moyen tiré de l’absence de titre exécutoire.
Sur la nullité des commandements de payer valant saisie
Les contestations de la validité du commandement de payer valant saisie soulevées par les débiteurs saisis après l’assignation par le créancier poursuivant constituent des exceptions de procédure qui doivent être soulevées, à peine d’irrecevabilité, simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, sur le fondement de l’article 74 du code de procédure civile.
En l’espèce, les époux [L] ont contesté la régularité des commandements de payer valant saisie sur le fondement de l’article R. 321-3 du code des procédures civiles d’exécution (pour absence de détail des sommes réclamées, d’avertissement de paiement dans un délai de huit jours et de désignation du bien saisi) après avoir soulevé la forclusion de la créance, puis l’absence de titre exécutoire, tel que retenu par le premier juge qui a déclaré l’exception de nullité irrecevable.
En outre, il y a lieu de constater que contrairement à ce que soutiennent les époux [L], les commandements valant saisie font état de la mention relative à l’avertissement des emprunteurs qu’ils doivent payer les sommes dues dans un délai de huit jours.
De même, l’exception de nullité des commandements valant saisie, maintenue à hauteur de cour, est fondée sur l’irrégularité de la mention relative à la désignation du bien selon l’article R. 321-3, 5° du code des procédures civiles d’exécution et sur l’irrégularité du décompte des sommes dues selon l’article R. 321-3, 3°dudit code.
Aussi, il s’agit d’irrégularités de forme qui peuvent être régularisées avant que le premier juge se prononce sur le litige, selon les dispositions combinées des articles 115 et 121 du code de procédure civile.
Pour autant, cette exception de nullité des commandements n’a pas été présentée avant toute fin de non-recevoir ou défense au fond en première instance, et aucune régularisation des conclusions n’est intervenue avant que le premier juge statue.
Il en résulte que cette exception de nullité ne peut être reprise en appel dans le cadre de conclusions régularisées.
Dans ces conditions, les contestations portant sur la validité des commandements de payer valant saisie sont irrecevables.
Dès lors, le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur la caducité des commandements de payer valant saisie
L’article R. 311-11 du code des procédures civiles d’exécution prévoit que les délais prévus par les articles R. 321-1, R. 321-6, R. 322-6, R. 322-10 et R. 322-31, ainsi que les délais de deux et trois mois prévus par l’article R. 322-4, sont prescrits à peine de caducité du commandement de payer valant saisie.
L’article R. 321-6 du code des procédures civiles d’exécution dispose que le commandement de payer valant saisie est publié au fichier immobilier dans un délai de deux mois à compter de sa signification.
En l’espèce, la publication des commandements valant saisie délivrés le 25 février 2022 est intervenue le 14 avril 2022, dans les délais requis.
En outre, l’article R. 322-4 dudit code énonce que dans les deux mois qui suivent la publication au fichier immobilier du commandement de payer valant saisie, le créancier poursuivant assigne le débiteur saisi à comparaître devant le juge de l’exécution à une audience d’orientation.
En l’espèce, l’assignation a été délivrée le 30 mai 2022, soit dans le délai de deux mois de la publication des commandements valant saisie du 14 avril 2022.
Dans ces conditions, la caducité des commandements valant saisie n’est pas encourue sur le fondement de l’article R. 311-11 dudit code.
Dès lors, le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur l’existence d’une créance liquide et exigible
Selon l’article L. 111-6 du code des procédures civiles d’exécution, la créance est liquide lorsqu’elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation.
En l’espèce, l’acte notarié reprend les conditions particulières du prêt figurant en annexe correspondant à l’octroi d’un crédit amortissable à taux variable d’un montant de 183 859,15 euros, remboursable au 1er de chaque mois sur une durée de 240 mois, divisé en une première période de douze mois pendant laquelle le taux fixe est de 5% l’an, suivie d’une seconde période à compter du treizième mois au cours de laquelle le taux variera tous les mois en fonction de l’évolution de l’EURIBOR 1 mois (disponible sur le site internet de la
Banque de France et dont la définition figure à l’acte), avec des mesures de plafonnement des
majorations d’échéances en fonction de l’indice des prix à la consommation, ce qui correspond à un TAEG de 5,01%, soit un taux de période de 0,41%, et à un montant total dû de 255 166,80 euros.
Aussi, l’acte comprend les modalités de fonctionnement du crédit et de calcul des intérêts.
En outre, l’acte notarié renvoie aux conditions générales du prêt figurant en annexe indiquant que ‘l’emprunteur peut demander au prêteur de lui adresser un tableau d’amortissement prévisionnel à tout moment et sans frais, et que compte tenu de la variation du taux d’intérêt et de la révision des échéances, ce tableau sera établi à titre prévisionnel sur l’hypothèse du taux d’intérêt connu au jour de l’émission dudit tableau.’
Il en résulte que, bien que non évalué en argent, le montant des échéances mensuelles est déterminable en ce que l’acte notarié contient tous les éléments permettant son évaluation.
Par ailleurs, par courriers recommandés du 24 novembre 2021 avec avis de réception retournés signés le 26 novembre 2021, la SA MY MONEY BANK a mis les époux [L] en demeure de s’acquitter de huit échéances échues et impayées dans le délai de quinze jours, sous peine de déchéance du terme.
Or, le relevé de compte produit par la SA MY MONEY BANK atteste desdites échéances échues et impayées visées aux courriers de mise en demeure préalable à la déchéance du terme, et les époux [L] n’apportent pas la preuve de versements supplémentaires qui n’auraient pas été pris en compte par le prêteur.
Par suite, la SA MY MONEY BANK a régulièrement notifié aux époux [L] la déchéance du terme du contrat de prêt, par courriers recommandés avec demande d’avis de réception du 17 décembre 2021, en l’absence de régularisation de la somme due au titre des échéances impayées dans le délai imparti à la mise en demeure préalable.
En effet, si les époux [L] se sont acquittés de l’échéance de décembre 2021, en revanche, son paiement était insuffisant à régulariser la totalité des sommes dues au titre des huit échéances échues et impayées.
Dans ces conditions, la SA MY MONEY BANK peut se prévaloir de l’exigibilité de sa créance au titre du prêt consenti aux époux [L] le 26 novembre 2014.
Dès lors, la SA MY MONEY BANK détient un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, et le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
Sur les manquements de la SA MY MONEY BANK à ses obligations et la déchéance de son droit aux intérêts
Au préalable, il y a lieu de préciser que l’autorité de la chose jugée ressortant de l’arrêt de la cour d’appel de Nancy du 11 mai 2023 rendu en matière de saisie des rémunérations entre les mêmes parties et en vertu d’un même titre exécutoire est limitée à son dispositif ayant déclaré la demande de saisie des rémunérations des époux [L] irrecevable, au motif que la SA MY MONEY BANK, qui ne se prévalait pas d’une déchéance du terme, ne produisait pas de décompte de sa créance correspondant aux échéances appelées et aux paiements intervenus sur la période du 1er janvier 2015 au 1er novembre 2021, ce qui ne permettait pas à la cour de déterminer l’existence d’une créance détenue à l’encontre des époux [L] au regard de la déchéance du droit aux intérêts du prêteur retenue.
En outre, le dispositif de cet arrêt n’a pas prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la SA MY MONEY BANK.
Aussi, le moyen non revêtu de l’autorité de la chose jugée est recevable.
Les époux [L] soutiennent que la SA MY MONEY BANK, au moment de la souscription de l’assurance emprunteur, n’a pas fourni la notice comprenant les conditions générales de l’assurance contractée, et ne justifie pas avoir exécuté ses obligations précontractuelles d’information et de recherche de solvabilité.
Au contraire, la SA MY MONEY BANK indique que la déchéance du droit aux intérêts n’est pas encourue en ce que, la banque n’étant que tiers bénéficiaire du contrat d’assurance facultatif, elle ne pouvait se voir reprocher un quelconque manquement à son obligation d’information et de ne pas avoir transmis les conditions générales de l’assurance dont elle ne disposait pas.
L’article L. 311-9 du code de la consommation, dans sa version applicable antérieure à l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, dispose que, ‘ avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l’article L. 333-4, dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné à l’article L. 333-5, sauf dans le cas d’une opération mentionnée au 1 de l’article L. 511-6 ou au 1 du I de l’article L. 511-7 du code monétaire et financier. ‘
L’article L. 311-6 prévoit la remise à l’emprunteur d’une fiche d’informations préalablement à la conclusion du contrat de crédit, permettant la comparaison de différentes offres et d’appréhender clairement l’étendue de son engagement compte tenu de ses préférences.
En l’espèce, la SA MY MONEY BANK a produit une fiche de dialogue comportant notamment les revenus et charges des emprunteurs, ainsi que les caractéristiques des prêts rachetés, signée par les époux [L] le 6 novembre 2014 (avec en annexe les avis d’imposition sur le revenu 2012, 2013 et 2014, les bulletins de paie des emprunteurs de juillet 2014 et décembre 2013, ainsi que les bulletins de salaire de novembre 2011, 2012 et 2013 pour Mme [L], outre leurs relevés bancaires de mai à septembre 2014), de même que la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées (FIPEN) signée et paraphée par les époux [L] le même jour, ainsi qu’un document d’information sur l’opération de regroupement de crédits paraphée et signée par les époux [L] ledit jour.
De même, la SA MY MONEY BANK justifie de la consultation du FICP le 4 novembre 2014, soit antérieurement à la réitération de l’offre préalable par acte authentique le 26 novembre 2014, en précisant que la clé correspond à la date de naissance des emprunteurs suivie des cinq premières lettres de leur nom (230257[L] à 18 heures 50 et 260259[B] à 18 heures 51).
En outre, l’article L. 311-19 dudit code énonce que ‘ lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus. Si l’assurance est exigée par le prêteur pour obtenir le financement, la fiche d’informations mentionnée à l’article L. 311-6 et l’offre de contrat de crédit rappellent que l’emprunteur peut souscrire une assurance équivalente auprès de l’assureur de son choix. Si l’assurance est facultative, l’offre de contrat de crédit rappelle les modalités suivant lesquelles l’emprunteur peut ne pas y adhérer. ‘
En l’espèce, l’offre de prêt acceptée prévoit que l’emprunteur a la possibilité d’adhérer au contrat d’assurance-groupe, selon les conditions d’ouverture en cas de sinistre prévues dans la notice d’assurance, et qu’il peut également souscrire une assurance équivalente auprès de l’assureur de son choix.
En outre, l’offre acceptée par les époux [L] le 6 novembre 2014 comprend la mention pré-imprimée selon laquelle ‘ l’emprunteur déclare et reconnaît avoir reçu un exemplaire de la notice d’assurance comportant les extraits des conditions générales de l’assurance-groupe au cas où l’emprunteur déciderait de souscrire cette assurance ‘.
Pour autant, les époux [L] contestent la remise de la notice de l’assurance-groupe proposée.
Or, la SA MY MONEY BANK ne justifie pas d’éléments venant corroborer l’indice caractérisé par la mention figurant à l’offre de prêt reconnaissant cette remise, étant précisé qu’aucune notice d’assurance comportant le paraphe ou la signature des époux [L] n’est versée en procédure.
Aussi, l’article L. 311-48 alinéa 1er dudit code, dans sa version applicable à la date du contrat, dispose que le prêteur qui accorde un crédit (…) sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-11, L. 311-12, L. 311-16, L. 311-18, L. 311-19, L. 311-29, le dernier alinéa de l’article L. 311-17 et les articles L. 311-43 et L. 311-46, est déchu du droit aux intérêts. (…) L’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu (…) ‘.
Il convient de relever que ce premier alinéa a expressément prévu la déchéance du droit aux intérêts dans sa totalité, à la différence du second alinéa laissant au juge le pouvoir d’apprécier sa proportionnalité en cas de non respect des obligations prévues aux articles L. 311-8 et L. 311-9 dudit code, de sorte que le manquement de la SA MY MONEY BANK est sanctionné par la déchéance totale du droit aux intérêts pour non respect des dispositions de l’article L. 311-19 dudit code.
Or, compte tenu de la déchéance du terme prononcée le 17 décembre 2021, les époux [L] sont tenus du remboursement du capital emprunté devenu exigible, après déduction de tous les paiements effectués au titre du contrat de prêt.
En l’espèce, il ressort de l’acte de prêt et de l’historique de compte que les époux [L] ont versé une somme totale de 92 558,64 euros en remboursement du capital emprunté à hauteur de 183 859,15 euros.
Par ailleurs, la SA MY MONEY BANK étant déchue de son droit aux intérêts, elle ne peut prétendre au paiement d’une indemnité conventionnelle forfaitaire.
Aussi, il en résulte que le montant de la créance de la SA MY MONEY BANK détenue à l’encontre des époux [L] au titre du prêt consenti le 26 novembre 2014 doit être fixé comme suit :
principal : 91 300,51 euros,
– intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2021 : mémoire.
Néanmoins, afin de garantir l’effectivité des règles de protection des consomma-teurs prévues par la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs, il incombe au juge de réduire d’office, dans une proportion constituant une sanction effective et dissuasive du manquement du prêteur à son obligation légale d’information, le taux légal résultant de l’application de l’article L. 341-2 du code de la consommation (en ce que la déchéance du droit aux intérêts conventionnels ne dispense pas l’emprunteur du paiement des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure), lorsque celui-ci est supérieur ou équivalent au taux conventionnel.
Il y a lieu de constater que le taux légal au second semestre 2024 s’élève à 4,92%, alors que le taux contractuel prévu est de 3,234 %.
Aussi, il en résulte que le taux légal est supérieur au taux conventionnel, de sorte que la sanction de déchéance du droit aux intérêts ayant pour conséquence le paiement des intérêts au taux légal n’est pas effective et dissuasive.
Dans ces conditions, afin d’assurer une sanction effective et dissuasive du manquement du prêteur à son obligation légale, il convient de réduire d’office le taux légal des intérêts courant sur les sommes dues au titre du prêt à hauteur de 1 % l’an à compter du 17 décembre 2021, date de la mise en demeure de payer les sommes exigibles suite à la déchéance du terme du contrat de prêt, et d’interdire la majoration du taux prévue à l’article L. 313-3 du code monétaire et financier.
Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la SA MY MONEY BANK et débouté les époux [L] de leur demande de mainlevée de l’hypothèque conventionnelle inscrite par la SA MY MONEY BANK sur le bien saisi, et infirmé en ce qu’il a prononcé l’annulation de la déchéance du terme du 17 décembre 2021 (en l’absence de sommes exigibles lors de la délivrance des mises en demeure du 24 novembre 2021suite à la déchéance du droit aux intérêts), débouté la SA MY MONEY BANK de sa demande d’exécution, ordonné la mainlevée de la procédure de saisie immobilière et ordonné la radiation du commandement de payer valant saisie immobilière en date du 25 février 2022.
Sur la radiation de l’inscription des époux [L] au FICP
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a dit qu’il n’appartenait pas au juge de l’exécution statuant en matière de saisie immobilière d’ordonner la radiation du FICP, étant ajouté au surplus que la SA MY MONEY BANK n’a pas été désintéressée de sa créance.
Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive
Au préalable, il y a lieu de constater que les époux [L] qui font état d’un manquement de la SA MY MONEY BANK à son devoir de mise en garde, ne présentent aucune demande à ce titre.
Il ressort des articles L. 111-7 du code des procédures civiles d’exécution et 1315 du code civil que, le créancier ayant le choix des mesures propres à assurer l’exécution de sa créance, il appartient au débiteur qui en poursuit la mainlevée d’établir qu’elles excèdent ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation.
Les époux [L] soutiennent que la voie d’exécution choisie présente un caractère disproportionné et abusif qui sera sanctionné par la nullité de la saisie pratiquée.
Il y a lieu de relever que la procédure de saisie qui tend au recouvrement de la dette des époux [L] par la SA MY MONEY BANK n’est pas inutile, étant rappelé que la déchéance du terme a été prononcée régulièrement en présence d’échéances échues et impayées non régularisées, et que la déchéance du droit aux intérêts de la SA MY MONEY BANK n’a pas privé le créancier poursuivant d’une créance évaluée au principal à hauteur de 91 300,51 euros, résultant de l’exigibilité du capital emprunté.
En outre, le cahier des conditions de vente a prévu une mise à prix à hauteur de 80 000 euros induisant une proportionnalité de la saisie avec la valeur du bien saisi.
Par ailleurs, les époux [L] n’ont effectué aucun paiement auprès de la SA MY MONEY BANK depuis la déchéance du terme du contrat de prêt.
Au surplus, la requête en saisie des rémunérations des époux [L] a été déclarée irrecevable à défaut de justifier de l’existence d’une créance, en l’absence de déchéance du terme et compte tenu de la déchéance du droit aux intérêts du prêteur.
Dans ces conditions, les époux [L] ne rapportent pas la preuve du caractère fautif et excessif de la mesure d’exécution, et ne peuvent prétendre à l’allocation de dommages et intérêts.
Dès lors, le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur la vente amiable
Les époux [L] sollicitent l’autorisation de vendre amiablement le bien saisi au prix plancher de 340 000 euros.
Sur le fond, l’article R. 322-15 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution dispose que lorsqu’il autorise la vente amiable, le juge s’assure qu’elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.
En l’espèce, les époux [L] ont produit à hauteur de cour une estimation de la valeur du prix du marché moyen concernant le bien saisi, réalisée le 13 juin 2022 par l’agence immobilière Causeret Immobilier, dans une fourchette située entre 330 000 euros et 340 000 euros.
En outre, le procès-verbal descriptif des lieux dressé le 9 mars 2022 indique que le bien saisi correspond à une maison mitoyenne à toit terrasse pourvue d’une grande allée et d’un grand jardin, comportant un grand rez-de-chaussée et un premier étage (avec cinq chambres et un garage), située à [Localité 13] sur une parcelle clôturée.
Aussi, ces éléments déterminent que la vente peut être conclue dans des conditions satisfaisantes.
Dans ces conditions, il convient d’autoriser la vente amiable du bien saisi.
Il convient de rappeler que la vente amiable devra intervenir dans les conditions prévues à l’article R. 322-21 du code des procédures civiles d’exécution, à savoir que l’affaire doit être rappelée à une audience du juge de l’exécution dans un délai qui ne peut excéder quatre mois, et qu’à cette audience, le juge de l’exécution pourra accorder aux débiteurs saisis un délai supplémentaire ne pouvant excéder trois mois, si les époux [L] justifient d’un engagement écrit d’acquisition et ce afin de permettre la rédaction et la conclusion de l’acte authentique de vente.
Il y a lieu de rappeler aux débiteurs qu’ils doivent accomplir les diligences nécessaires à la conclusion de cette vente amiable, et qu’ils doivent rendre compte au créancier poursuivant qui le demande des démarches accomplies, leur carence pouvant justifier la reprise de la procédure sur vente forcée, notamment à l’issue du délai légal de quatre mois maximum imparti pour parvenir à la rédaction et conclusion de l’acte authentique de cette vente, sauf délai supplémentaire de trois mois susceptible d’être accordé dans les conditions susvisées à l’article R. 322-21 du code des procédures civiles d’exécution.
Sur la fixation de la date d’audience
L’article R. 322-21 alinéa 3 du code des procédures civiles d’exécution dispose que le juge de l’exécution fixe la date de l’audience à laquelle l’affaire sera rappelée dans un délai qui ne peut excéder quatre mois.
Dans ces conditions, il y a lieu de fixer cette audience à la première audience utile du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nancy, statuant en matière de saisie immobilière, afin de poursuivre la procédure selon les dispositions de l’article R. 322-21 alinéa 4 du code des procédures civiles d’exécution.
Au surplus, il y a lieu de rappeler que le juge de l’exécution a le pouvoir de modifier cette date en cas de besoin.
Sur le montant du prix plancher
L’article R. 322-21 du code des procédures civiles d’exécution énonce qu’il incombe au juge qui autorise la vente amiable de fixer le montant du prix en deçà duquel l’immeuble ne peut être vendu eu égard aux conditions économiques du marché ainsi que, le cas échéant, les conditions particulières de la vente.
Le prix plancher tient compte du fait que les acquéreurs potentiels devront ajouter au prix de vente strict les frais de poursuite taxés.
Les époux [L] proposent de fixer le montant du prix plancher de la vente amiable à la somme de 340 000 euros.
Au regard de l’avis de valeur produit par les époux [L], il convient de fixer le montant du prix plancher à hauteur de 340 000 euros, correspondant aux conditions économiques du marché, s’agissant du prix en deçà duquel l’immeuble saisi ne pourra être vendu.
En vertu de l’article R. 322-24 du code des procédures civiles d’exécution, les frais de poursuite à taxer seront versés directement par l’acquéreur en sus du prix de vente.
Sur la mise à prix en cas de vente forcée
L’article L. 322-6 du code des procédures civiles d’exécution dispose que le montant de la mise à prix est fixé par le créancier poursuivant. A défaut d’enchère, celui-ci est déclaré adjudicataire d’office à ce montant. Le débiteur peut, en cas d’insuffisance manifeste du montant de la mise à prix, saisir le juge afin de voir fixer une mise à prix en rapport avec la valeur vénale de l’immeuble et les conditions du marché. Toutefois, à défaut d’enchère, le poursuivant ne peut être déclaré adjudicataire que pour la mise à prix initiale.
Il convient de rappeler que la mise à prix ne doit pas être fixée à la valeur vénale elle-même, mais qu’elle doit être suffisamment attractive pour attirer le plus grand nombre d’enchérisseurs possibles, sous réserve cependant de ne pas être manifestement insuffisante au regard de cette valeur vénale.
En l’espèce, le créancier poursuivant a fixé la mise à prix à 80 000 euros.
Or, tel que rappelé plus avant, les époux [L] ont produit à hauteur de cour une estimation de la valeur du bien saisi dans une fourchette de 330 000 euros à 340 000 euros, afin de déterminer la valeur vénale du bien et les conditions du marché.
De même, le procés-verbal descriptif des lieux constate que le bien saisi correspond à une maison d’habitation mitoyenne d’un étage, avec un garage et un grand jardin, apparaissant de construction récente.
De même, il y a lieu de constater que cette maison est située dans un quartier résidentiel proche de [Localité 10].
Aussi, les époux [L] justifient de l’insuffisance manifeste du montant de la mise à prix justifiant d’être porté à 100 000 euros (correspondant à près de 30% de la valeur vénale résultant de l’estimation haute du prix du bien).
Dans ces conditions, il y a lieu de fixer le montant de la mise à prix à 100 000 euros.
Au surplus, il convient de rappeler que le montant de la mise à prix initiale auquel le bien est adjugé au créancier poursuivant en l’absence d’enchère est, en application des articles L. 322-6, R. 322-10 et R. 322-47 du code des procédures civiles d’exécution, celui fixé par le créancier poursuivant dans le cahier des conditions de vente, et non le montant de la mise à prix modifié par le jugement d’orientation ou l’arrêt y afférent.
Sur les demandes accessoires
Le jugement déféré sera infirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Les époux [L] qui succombent en leurs prétentions à hauteur de cour supporteront la charge des dépens de première instance et d’appel, et seront déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles.
Eu égard à la situation respective des parties, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de proécdure civile en première instance et à hauteur de cour.
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
INFIRME partiellement le jugement déféré et, statuant à nouveau,
CONSTATE que la SA MY MONEY BANK détient un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible,
CONSTATE que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du code des procédures civiles d’exécution sont réunies,
RETIENT que le montant de la créance de la SA MY MONEY BANK, créancier poursuivant, détenue à l’encontre de M. [J] [L] et Mme [F] [S] [H] épouse [L] au titre du prêt consenti le 26 novembre 2014, s’élève à la somme au principal de 91 300,51 euros, augmentée des intérêts au taux réduit de 1% l’an à compter du 17 décembre 2021,
ECARTE l’application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier,
VALIDE les commandements de payer valant saisie immobilière à hauteur de la somme de 91 300,51 euros, outre les intérêts au taux de 1 % l’an postérieurs au 17 décembre 2021,
AUTORISE la vente amiable des biens et droits immobiliers dépendant de l’ensemble immobilier sis à [Adresse 6], cadastré section AE n°[Cadastre 5], pour une contenance de 8 ares 48 centiares,
FIXE à la somme de 340 000 euros le prix en deçà duquel l’immeuble ne pourra être vendu,
DIT que les frais de poursuite qui seront taxés par le juge de l’exécution devront être versés directement par l’acquéreur en sus du prix de vente,
DIT que les conditions du cahier des conditions de vente devront être respectées en ce compris les clauses relatives au séquestre et à l’avocat répartiteur,
RAPPELLE que le prix de vente de l’immeuble ainsi que toute somme acquittée par l’acquéreur à quelque titre que ce soit sont consignés et acquis aux créanciers participant à la distribution, ainsi que le cas échéant, aux débiteurs, pour leur être distribués,
RAPPELLE que la présente décision qui fait droit à la demande d’autorisation de vente amiable suspend le cours de la procédure de saisie immobilière,
RAPPELLE aux débiteurs qu’ils doivent accomplir les diligences nécessaires à la conclusion de la vente amiable ainsi autorisée, et qu’ils doivent rendre compte au créancier poursuivant qui le demande des démarches accomplies à cette fin, leur carence pouvant justifier la reprise de la procédure sur vente forcée,
DIT qu’il sera procédé à la poursuite de la procédure à la première audience utile devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nancy, à charge pour le greffe dudit juge de préciser par voie de convocation les date et lieu de l’audience,
INVITE M. [J] [L] et Mme [F] [S] [H] épouse [L] à justifier le cas échéant pour ladite audience de :
– l’acte de vente intervenu,
– la consignation du prix, des frais de vente ainsi que du paiement des frais taxés,
RAPPELLE qu’à cette audience de renvoi, le juge de l’exécution ne peut accorder un délai supplémentaire d’une durée maximale de trois mois que si le demandeur justifie d’un engagement écrit d’acquisition,
FIXE le montant de la nouvelle mise à prix à la somme de 100 000 euros en cas de vente forcée,
RAPPELLE que selon les dispositions de l’article R. 322-47 du code des procédures civiles d’exécution, à défaut d’enchère et lorsque le montant de la mise à prix a été modifié par le juge, le bien est immédiatement remis en vente sur baisses successives de ce montant, le cas échéant jusqu’au montant de la mise à prix initiale,
DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. [J] [L] et Mme [F] [S] [H] épouse [L] in solidum aux dépens,
CONFIRME le jugement déféré pour le surplus en ses dispositions ayant rejeté la fin de non recevoir tirée de la forclusion, ayant déclaré irrecevable l’exception de nullité du commandement, ayant rejeté l’exception de caducité du commandement, ayant prononcé la déchéance de la SA MY MONEY BANK de son droit aux intérêts, ayant relevé son incompétence à ordonner la radiation du FICP, ayant rejeté la demande de mainlevée de l’hypothèque conventionnelle, ayant débouté les époux [L] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, et ayant constaté que la SA BNP Paribas et le Trésor Public, créanciers inscrits, n’avaient pas déclaré de créance,
Y ajoutant,
RENVOIE la cause et les parties devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nancy statuant en matière de saisie immobilière pour poursuite de la procédure,
DEBOUTE M. [J] [L] et Mme [F] [S] [H] épouse [L] de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. [J] [L] et Mme [F] [S] [H] épouse [L] in solidum aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur MARTIN, président de chambre à la Cour d’Appel de NANCY, et par Madame Christelle CLABAUX-DUWIQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Minute en vingt-six pages.