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La photographie d’Alberto Korda « Guérillero Héroïco » (5 mars 1960, Cuba) n’est pas tombée dans le domaine public. La France ayant ratifié la Convention de Berne du 9 septembre 1886 pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, de même que la République de Cuba et Chypre, respectivement pour ces deux pays le 20 février 1997 et le 24 février 1964, il convient de faire application, en présence d’un litige présentant plusieurs éléments d’extranéité, de ladite Convention afin de déterminer la loi applicable.
A cet égard, l’article 7 de la Convention de Berne relatif à la durée de la protection accordée par celle-ci, stipule que « dans tous les cas, la durée sera réglée par la loi du pays où la protection sera réclamée. Toutefois, à moins que la législation de ce dernier pays n’en décide autrement, elle n’excédera pas la durée fixée dans le pays d’origine de l’oeuvre ».
Appliquée au cas d’espèce, la durée de la protection de la photographie ne relevait pas de la loi cubaine, mais de la loi française. Or, l’article L. 123-12 du code de la propriété intellectuelle dispose cependant que « lorsque le pays d’origine de l’œuvre, au sens de l’acte de Paris ou de la Convention de Berne, est un pays tiers à la Communauté européenne, la durée de protection est celle accordée dans le pays d’origine de l’œuvre ». La loi française renvoie ainsi à une nécessaire comparaison avec la durée accordée par le pays d’origine sans prévoir de dérogation à la limitation instaurée par l’article 7 (« à moins que la législation [du pays où la protection est réclamée] n’en décide autrement »). Ainsi, si la loi française est applicable en l’espèce, la durée de la protection de la photographie d’Alberto Korda ne peut excéder la durée de la protection accordée par référence par la loi Cubaine. Afin de déterminer la durée de protection applicable en vertu de la loi française, il convient de se placer à la date à laquelle l’acte qui a provoqué la mise en oeuvre de la protection légale prévue par la loi française a été accompli (la date des agissements de contrefaçon allégués). La durée de protection de l’oeuvre est, selon la loi française, de 70 ans après le décès de l’auteur en application de l’article L. 123-1 du code de la propriété intellectuelle.
S’agissant de la durée prévue par la loi Cubaine, celle-ci doit être déterminée en fonction du droit applicable à Cuba, et non en fonction des critères dégagés par la jurisprudence de la Cour de cassation française dans le cadre d’un litige portant sur l’application de la loi française dans le temps.
Au moment de la création de l’œuvre et de sa divulgation, la durée de protection était régie par la loi espagnole du 10 janvier 1879 applicable à Cuba dont l’article 6 fixait celle-ci à 80 ans après la mort de l’auteur. Cette loi a été modifiée par l’entrée en vigueur de la loi n°14/77 du 28 décembre 1977 prévoyant en son article 47, pour les œuvres photographiques, une durée de protection de 10 ans après « l’utilisation de l’œuvre », délai qui a été ensuite augmenté à 25 ans aux termes d’un décret-loi n°156/94 du 28 septembre 1994. En conséquence, la photographie n’est pas tombée dans le domaine public pour être régie par la loi de 1879.
Ni la loi n°17/77, ni le décret-loi n°156/94 ne contiennent de disposition transitoire quant à la durée de protection des droits d’auteur, mais s’appuyant sur le principe de non rétroactivité de la loi qui émane de l’article 61 de la Loi fondamentale de Cuba et de l’article 7 du Code civil cubain, les juges en ont déduit que le décret-loi de 1994 n’a pas vocation à s’appliquer à l’œuvre de Korda, qui au jour de sa création était régie par la loi de 1879 (et le demeure). A noter que les autorités administratives cubaines considèrent aussi que cette œuvre n’est pas tombée dans le domaine public (exploitation de l’œuvre par une filiale du fonds cubain des biens culturels de la Province de Granma).
En conclusion, par application de l’article 7 (8) de la Convention de Berne, combiné avec l’article L. 123-12 du code de la propriété intellectuelle, la durée de protection de l’œuvre de Korda est de 70 ans après la mort de l’auteur. Alberto Korda étant décédé en 2001, cette œuvre ne tombera dans le domaine public qu’en 2071.
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