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En 2013, un lotissement a été créé à [Localité 6], comprenant 9 lots de terrains. Un compteur général a été installé par la S.A.S.U. des eaux de Corse (S.E.D.C.) au nom de monsieur [X] [T]. En 2015, une association syndicale libre (A.S.L.) a été formée, présidée par monsieur [X] [T]. En octobre 2018, la S.E.D.C. a mis en demeure monsieur [X] [T] de payer 5 824,03 € pour des factures d’eau impayées. La S.E.D.C. a ensuite assigné monsieur [X] [T] et l’A.S.L. devant le tribunal judiciaire de Bastia, demandant le paiement de 6 004,03 € et des dommages-intérêts. Un expert a été désigné pour évaluer une surconsommation d’eau. Le tribunal a rendu un jugement en septembre 2022, déclarant le rapport d’expertise opposable à la S.E.D.C., déboutant cette dernière de ses demandes et lui ordonnant de payer 1 500 € à monsieur [X] [T] et à l’A.S.L. en vertu de l’article 700 du code de procédure civile. La S.E.D.C. a interjeté appel, contestando plusieurs points du jugement. En mai 2024, les parties ont présenté leurs conclusions, et l’affaire a été fixée à plaider en juin 2024. Le 16 octobre 2024, la cour a déclaré l’appel recevable, a confirmé certaines décisions du tribunal, mais a également condamné l’A.S.L. et monsieur [X] [T] à payer des sommes à la S.E.D.C. pour des frais irrépétibles et des dépens.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Section 1
ARRÊT N°
du
16 OCTOBRE 2024
N° RG 22/640
N° Portalis DBVE-V-B7G-CE7G EZ-C
Décision déférée à la cour :
Jugement, origine TJ de BASTIA, décision attaquée du 8 septembre 2022, enregistrée sous le n° 18-000598
S.A.S.U. SOCIÉTÉ DES EAUX DE CORSE
C/
[T]
Association ASL
‘I PERRE SANT’ANDRIA’
Copies exécutoires délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU
SEIZE OCTOBRE DEUX-MILLE-VINGT-QUATRE
APPELANTE :
S.A.S.U. SOCIÉTÉ DES EAUX DE CORSE
immatriculée au RCS d’Ajaccio sous le n°514 709 211,
agissant poursuites et diligences de son président en exercice, M. [C] [M], domicilié ès qualités audit siège
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Me Frédérique CAMPANA, avocate au barreau d’AJACCIO
INTIMÉS :
M. [X] [T]
né le 5 octobre 1971 à [Localité 4] (Bouches-du-Rhône)
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représenté par Me Anne Christine LECCIA, avocate au barreau de BASTIA
Association syndicale libre ASL ‘[Adresse 2]’
siège social sis [Adresse 3]’,
[Adresse 3] [Localité 7],
représentée par son Président en exercice, M. [X] [T], domicilié ès qualités audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentée par Me Anne Christine LECCIA, avocate au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 10 juin 2024, devant Emmanuelle ZAMO, conseillère, chargée du rapport, les avocats ne s’y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Thierry JOUVE, président de chambre
Marie-Ange BETTELANI, conseillère
Emmanuelle ZAMO, conseillère
Mesdames [E] [A] et [K] [V], auditrices de justice, ont siégé en surnombre et participé avec voix consultatives au délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS :
Vykhanda CHENG
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 octobre 2024
ARRÊT :
Contradictoire.
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Thierry JOUVE, président de chambre, et Vykhanda CHENG, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le 7 janvier 2013, un compteur général a été installé par la S.A.S.U. des eaux de Corse (S.E.D.C.) sous le n° D12UG111937 au titre d’un contrat n° 7231346P souscrit au nom de monsieur [X] [T].
Le 8 avril 2015 a été créée l’association syndicale libre (A.S.L.) du lotissement dont le président en exercice est monsieur [X] [T].
La S.A.S.U. des eaux de Corse (S.E.D.C.) a décerné à monsieur [X] [T] mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 octobre 2018 d’avoir à payer la somme de 5 824,03 € pour des facturations de consommation d’eau alléguées comme restées impayées du 1er semestre 2014 au second semestre 2018.
Par acte d’huissier du 26 décembre 2018, la S.E.D.C. a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Bastia monsieur [X] [T] et l’association syndicale libre I Perre Sant Andria (A.S.L.) et sollicité leur condamnation à lui payer la somme de 6 004,03 € avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 13 octobre 2018, outre la somme de 1 000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive en réparation du préjudice subi et, celle de 1 200 € en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Par ordonnance du 17 avril 2019 et sur assignation délivrée les 21,23 et 27 novembre 2018 à la diligence de monsieur [X] [T] et de l’association syndicale libre I Perre Sant Andria alléguant une surconsommation anormale, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bastia a ordonné une expertise technique confiée à monsieur [G] [O].
L’expert a établi son rapport le 30 juin 2020.
Par jugement contradictoire du 8 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Bastia a :
– déclaré le rapport d’expertise [F] opposable à la société des eaux de Corse,
– débouté la société des eaux de Corse de toutes ses demandes,
– dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande de complément d’expertise,
– condamné la société des eaux de Corse à payer à monsieur [X] [T] et l’association syndicale libre [Adresse 2], la somme de 1500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamné la société des eaux de Corse aux entiers dépens comprenant les frais de l’expertise judiciaire,
– rappelé que le présent jugement est exécutoire de plein droit.
Par déclaration au greffe du 11 octobre 2022 enregistrée le 12 octobre 2022, la S.A.S.U. société des eaux de Corse a interjeté appel limité aux chefs de jugement du 8 septembre 2022 expressément critiqués en ce qu’il a :
– déclaré le rapport de monsieur [F] opposable à la Société des Eaux de Corse,
– débouté la Société des eaux de Corse de toutes ses demandes notamment :
. la demande principale formée par la S.E.D.C. à l’effet d’obtenir condamnation in solidum de monsieur [T] et de l’A.S.L. [Adresse 2] à régler à la S.E.D.C. la somme de 7 166,02 € arrêtée au 20 septembre 2021 avec intérêts de droit à compter du 26 décembre 2018 ;
. la demande formée par la S.E.D.C. à titre subsidiaire à l’effet d’obtenir condamnation de l’A.S.L. [Adresse 2] prise la personne de ses représentants légaux à régler à la S.E.D.C. la somme de 7 166,02 € arrêtée au 20 septembre 2021 avec intérêts de droit à compter du 26 décembre 2018 outre ;
. la demande formée par la S.E.D.C. à l’effet d’obtenir la condamnation,de l’A.S.L. I Perre Sant Andria et monsieur [T] au règlement d’une somme de 4 000 €, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’en tous les dépens incluant la totalité des frais d’expertise,
– condamné la société des eaux de Corse à payer à monsieur [X] [T] et l’association syndicale libre [Adresse 2] la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société des eaux de Corse aux entiers dépens comprenant les frais de l’expertise judiciaire.
Aux termes des dernières écritures de conseil notifiées le 7 mai 2024, la S.A.S.U des eaux de Corse, demande à la cour de voir :
– juger la société des eaux de Corse recevable et bien fondée en son appel,
– infirmer le jugement du tribunal judiciaire de BASTIA en date du 8 septembre 2022 en ce qu’il a :
.déclaré le rapport de monsieur [F] opposable à la société des Eaux de Corse,
.débouté la société des eaux de Corse de toutes ses demandes.
.condamné la société des eaux de Corse à payer à monsieur [X] [T] et l’Association Syndicale Libre [Adresse 2] la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
.condamné la société des eaux de Corse aux entiers dépens comprenant les frais de l’expertise judiciaire ;
Et statuant à nouveau,
– juger inopposable à la société des eaux de Corse le rapport de monsieur [F],
– ordonner que ledit rapport soit écarté des débats,
– condamner l’A.S.L. [Adresse 2] dont le siège est sis [Adresse 3], [Localité 7], prise en la personne de son président monsieur [X] [T] domicilié en cette qualité audit siège et monsieur [X] [T] in solidum à régler à la S.E.D.C. la somme de 7 166,02 € arrêtée au 20 septembre 2021 avec intérêts de droit à compter du 26 décembre 2018,
– condamner l’A.S.L. [Adresse 2] dont le siège est sis [Adresse 3], [Localité 7] prise en la personne de son président monsieur [X] [T] domicilié en cette qualité audit siège et monsieur [X] [T] sous la même solidarité, à régler à la S.E.D.C. la somme de 4 000 € en application des dispositions de l’article 700 au titre de la procédure de première instance, outre les dépens de première instance en ce compris les frais d’expertise,
– condamner monsieur [X] [T] et l’A.S.L. [Adresse 2] au règlement d’une somme de 3 500 € en application de l’article 700 au titre de la procédure d’appel outre les dépens d’appel incluant la totalité des frais d’expertise,
– juger irrecevable la demande de monsieur [T] visant à obtenir sa mise hors de cause, demande formulée pour la première fois en cause d’appel, en tout état de cause, l’en débouter,
– débouter monsieur [X] [T] et l’A.S.L. [Adresse 2] de toutes leurs demandes fins et conclusions en cause d’appel en ce compris la demande d’expertise complémentaire,
A titre subsidiaire et si la Cour estimait devoir ordonner cette mesure ;
– condamner monsieur [X] [T] et l’A.S.L. [Adresse 2] à en assumer la charge ;
Enfin, et à titre subsidiaire encore, si la cour déchargeait monsieur [T] de toute obligation à paiement et/ou prononçait sa mise hors de cause ;
– condamner l’A.S.L. [Adresse 2] prise en la personne de son président monsieur [X] [T] domicilié en cette qualité audit siège à régler à la S.E.D.C. la somme de 7 166,02 € au 20 septembre 2021 avec intérêts de droit à compter du 26 décembre 2018,
– condamner l’A.S.L. [Adresse 2] dont le siège pris en la personne de son président monsieur [X] [T] domicilié en cette qualité audit siège à régler à la S.E.D.C. la somme de 4 000 € en application des dispositions de l’article 700 au titre de la procédure de première instance, outre les dépens de première instance en ce compris les frais d’expertise,
– débouter monsieur [X] [T] des demandes qu’il formule au titre de l’article 700, dépens et de toute autre surabondante.
Selon les dernières écritures de son conseil notifiées le 30 avril 2024, monsieur [X] [T] et l’A.S.L. [Adresse 2] demandent à la cour de voir :
– déclarer l’appel interjeté par la société des eaux de Corse (S.D.E.C) recevable, mais mal fondé,
– confirmer le jugement en date du 8 septembre 2022, rendu par la chambre civile 3 du tribunal judiciaire de Bastia, sous le RG N°11-18-000598, en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu’il a débouté la société des eaux de Corse (S.D.E.C) de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions, ainsi que suit :
– déclaré le rapport d’expertise [F] opposable à la société des eaux de Corse,
– débouté la société des eaux de Corse de toutes ses demandes,
– dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande de complément d’expertise,
– condamné la société des eaux de Corse à payer à monsieur [X] [T] et l’association syndicale libre [Adresse 2], la somme de 1 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamné la société des eaux de Corse aux entiers dépens comprenant les frais de l’expertise judiciaire,
– rappelé que le présent jugement est exécutoire de plein droit.
Y faisant droit, statuant à nouveau, et y ajoutant,
– débouter la société des eaux de Corse (S.D.E.C) de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions d’appel,
– condamner la société des eaux de Corse (S.D.E.C) à verser à monsieur [X] [T], à titre personnel, la somme de 4 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en ce qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles auxquels il a été injustement exposé,
– condamner la société des eaux de Corse (S.D.E.C) à verser à l’A.S.L du lotissement «[Adresse 2]”, dûment représentée par son président en exercice, la somme de 4 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en ce qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles auxquels l’A.S.L. a été injustement exposée,
– condamner la société des eaux de Corse (S.D.E.C) aux entiers dépens de première instance et d’appel, outre la totalité des frais d’expertise.
A titre subsidiaire,
– juger opposable à la société des eaux de corse (S.D.E.C) le rapport de monsieur [F],
– mettre hors de cause monsieur [X] [T], à titre personnel, lequel a été attrait en procédure par la société des Eaux de Corse (S.D.E.C), depuis l’origine, tout simplement car à tort elle a laissé le compteur général au nom de celui-ci au lieu de basculer au nom de l’A.S.L. du lotissement «[Adresse 2]” dès sa création, en refusant en sus de faire droit aux maintes demandes écrites qui lui avaient pourtant été adressées à cet effet,
– débouter la société des eaux de Corse (S.D.E.C) de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions d’appel,
– débouter en tout état de cause la société des eaux de Corse (S.D.E.C) de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions d’appel dirigées contre monsieur [T], à titre personnel,
– condamner la société des eaux de Corse (S.D.E.C) à verser à monsieur [X] [T], à titre personnel, la somme de 4 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en ce qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles auxquels il a été injustement exposé,
– condamner la société des eaux de Corse (S.D.E.C) à verser à l’A.S.L du lotissement «[Adresse 2]”, dûment représentée par son président en exercice, la somme de 4 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en ce qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles auxquels l’A.S.L. a été injustement exposée,
-condamner la société des eaux de Corse (S.D.E.C) aux entiers dépens, de premier instance et d’appel, outre la totalité des frais d’expertise,
A titre infiniment subsidiaire,
Si la cour ne s’estimait pas suffisamment éclairée par les éléments versés au dossier,
– ordonner un complément d’expertise afin d’éclairer la juridiction et désigner tel expert qu’il plaira en ce sens à la Cour, afin de répondre aux chefs de missions visés «sans objet»
par Monsieur [O], alors que ces damiers n’étaient pas sans importance dans le présent litige, et notamment vérifier le fonctionnement du compteur général et tous les compteurs individuels comme cela est sollicité depuis l’origine, ainsi que l’ensemble des installations, avec KYRNOLIA et au besoin par le biais d’un organisme agréé,
– dire que l’expert mandaté devra répondre explicitement et précisément, dans le cadre de ces chefs de mission, aux dires des parties, après leur avoir adressé une note de synthèse (ou pré-rapport) et leur avoir imparti un délai pour présenter leurs dires, délai qui ne pourra être inférieur à un mois,
– mettre à la charge de la S.D.E.C le coût afférent au complément d’expertise eu égard à ses erreurs de facturation amplement démontré, et manque de bonne foi dans le cadre de la présente procédure, compte tenu des frais déjà engagés par l’A.S.L et monsieur [T],
En tout état de cause,
– condamner la société des eaux de Corse (S.D.E.C) à verser à monsieur [X] [T], à titre personnel, la somme de 4 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en ce qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles auxquels il a été injustement exposé,
– condamner la société des eaux de Corse (S.D.E.C) à verser à l’A.S.L du lotissement «[Adresse 2] ”, représentée par son président en exercice, la somme de 4 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en ce qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles auxquels l’A.S.L. a été injustement exposée,
– condamner la société des eaux de Corse (S.D.E.C) aux entiers dépens, de première instance et d’appel, outre la totalité des frais d’expertise.
L’ordonnance de clôture du 15 mai 2024 a fixé l’affaire à plaider au 10 juin 2024.
Après délibéré, le présent arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe le 16 octobre 2024.
SUR LA FORME
Sur la recevabilité de l’appel
L’appel interjeté selon déclaration au greffe du 11 octobre 2022 enregistrée le 12 octobre 2022 par la S.A.S.U. société des eaux de Corse d’un jugement contradictoire rendu le 8 septembre 2022 dont la copie exécutoire a été établie le 9 septembre 2022 est déclaré, au regard de l’absence de critique des parties de ce chef, recevable.
SUR LE FOND
Sur l’opposabilité de l’expertise extra-judiciaire unilatérale de monsieur [F]
Aux termes de l’article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
En l’espèce, il est constant que le rapport critique du 1er novembre 2021 rédigé par monsieur [R] [F] est un rapport extra-judiciaire unilatéralement établi à la demande du président de l’A.S.L [Adresse 2] qui a été régulièrement versé aux débats du premier juge mais aussi de la cour.
Dans cette hypothèse, il est admis, d’une part qu’un rapport extra-judiciaire régulièrement versé aux débats et soumis à la discussion contradictoire des parties constitue un mode de preuve admissible et le juge ne peut donc l’écarter au seul motif que la mesure n’a pas été réalisée contradictoirement, d’autre part que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande d’une seule partie sauf à ce qu’elle soit corroborée par d’autres pièces régulièrement versées au contradictoire des parties.
Comme le premier juge, la cour observe que le rapport de monsieur [F], outre qu’il est circonstancié, motivé et émane d’un expert honoraire auprès des tribunaux, certes critique à l’endroit de l’expertise judiciaire de monsieur [O] mais qui est selon les bordereaux des 79 pièces versées aux débats de la cour par les intimés accompagné de, notamment un procès-verbal de constat des 14 et 15 décembre 2017 et 3 tableaux d’analyse de consommation moyenne des compteurs d’eau en litige, éléments techniques de nature à venir corroborer les conclusions exportables.
Par conséquent et comme le premier juge qui est confirmé de ce chef, la cour estime que l’expertise dont l’inopposabilité est sollicitée est corroborée par d’autres éléments de preuve sur lesquels la cour doit se prononcer et confirme ainsi la décision déférée en ce qu’elle a déclaré le rapport d’expertise [F] opposable à la société des eaux de Corse.
Sur la demande de mise hors de cause de monsieur [X] [T]
Selon l’article 564 du code de procédure civile, à, peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
Mais les articles 565 et 566 du même code précisent que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
En l’espèce la cour observe,comme le soutient l’appelante, que cette demande n’a pas été présentée devant le premier juge dont la décision est querellée et, que, l’ensemble des procédures et expertise ont donné lieu de la part de monsieur [X] [T] et de l’A.S.L. dont il est le président à des demandes conjointes et concordantes et ce d’autant que le compteur général n°D12UG111937 au titre d’un contrat n°7231346P a été souscrit le 7 janvier 2013 au nom de monsieur [X] [T] et le reste.
Par application des articles 564, 565 et 566 précités, la cour déclare par conséquent irrecevable la demande de mise hors de cause présentée par monsieur [X] [T] pour la première fois en cause d’appel.
Sur la demande en paiement des facturations d’eau
Selon les articles 1101, 1103 et 1104 du code civil, le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations.
Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Cette disposition est d’ordre public.
Et aux termes de l’article 1353 du même code, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
D’un contrat de fourniture d’eau, il se déduit que l’eau fournie à l’usager doit être payée à celui qui la fournit.
Il est admis qu’il incombe au prestataire, en sa qualité de demandeur, d’établir le montant de sa créance et, à cet effet, de fournir les éléments permettant de fixer ce montant et au défendeur d’apporter la preuve des faits qu’il incombe à titre d’exception.
Sur les exceptions tenant à la défectuosité technique des installations
La cour estime, en dépit de la critique soutenue par les intimés quant à l’objectivité et la méthodologie de l’expert judiciaire, alors que cette critique ne s’est pas traduite juridiquement par une demande d’annulation du rapport d’expertise, que les seules assertions soutenues par l’expert privé reprises par les intimés et d’ailleurs contestées par l’appelante sur ce point doivent être écartées.
De la lecture et l’analyse des deux rapports d’expertise [O] et [F] non contraires sur ces points et corroborés par les constatations réalisées les 14 et 15 décembre 2017 par huissier de justice à la demande de l’A.S.L., il résulte que :
– la pose et l’état actuel du compteur général du lotissement ne sont atteints ni de vice ni de désordre de nature à provoquer un dysfonctionnement ayant une incidence sur la qualité du comptage,
– le compteur général fonctionne correctement et ne pénalise pas la copropriété,
– le niveau de précision de ce compteur général est conforme aux normes avec un niveau d’exactitude situé entre 2 et 5 % suivant le débit,
– l’installation et le fonctionnement du compteur général sont normaux,
– le compteur général permet un décompte correct de la consommation en eau potable du lotissement.
De plus l’expert judiciaire note que :
– aucune fuite n’existe entre le compteur général et les compteurs individuels,
– aucune fuite ou perte n’existe sur le réseau du lotissement, l’expert judiciaire ayant installé “un enregistreur de type vista + de chez Hydreka entre le 1er et le 18 octobre 2019 avec un enregistrement en continu des volumes passant par le compteur”, moyen d’investigation que l’expert privé estime insuffisant en proposant un autre que l’expert judiciaire a écarté car il ne les possède pas sur la région et nécessite le démontage d’une partie des raccords des canalisations, le coupage de l’eau et la désinfection du réseau après contrôle ;
De ces éléments objectifs, la cour déduit :
– d’une part que le compteur général non plus que le réseau de la copropriété ne sont pas atteints d’un vice technique ou de fuites susceptibles d’expliquer des consommations d’eau non imputables à la copropriété,
– d’autre part que la demande d’expertise complémentaire sollicitée par les intimés sur ce point, outre qu’elle est de nature à suppléer la carence des intimés dans la charge de la preuve d’une défectuosité du compteur en litige, n’est donc pas justifiée,
De ce chef, la cour estime donc que cet élément n’est pas de nature à décharger l’A.S.L du paiement des consommations d’eau enregistrées au compteur général.,
De la lecture et de l’analyse de ces mêmes rapports, il résulte qu’est notée par les deux experts une difficulté tenant, à l’implantation du poteau incendie du lotissement à l’aval du compteur général donc ‘privé’, les éventuelles consommations sur ce poteau par des tiers (service incendie, municipalité…) étant ainsi comptabilisées sur ce compteur général dont la copropriété devient redevable sans que des démarches effectives aient été entreprises par elle pour en voir changer l’implantation erronée dès son origine et qui n’incombe pas, ainsi que cela est valablement conclu, à la S.D.E.C qui n’a pas procédé à cette installation et qui est seule appelée en la cause,
De ce chef aussi, la cour estime que cet élément n’est pas de nature à décharger l’A.S.L du paiement des consommations d’eau enregistrées au compteur général.
De la lecture et de l’analyse du rapport d’expertise judiciaire, la cour retient néanmoins qu’il subsiste un différentiel persistant entre les consommations relevées aux compteurs individuels et celles relevées sur le compteur principal qui en est le réceptacle.
Ce différenciel persistant entre 60 m3 et 30 m3 par trimestre conduit l’expert à conclure qu’une explication plausible est, en l’absence de toute fuite, qu’une partie de l’eau comptabilisée au compteur général est utilisée à l’aval de ce compteur seulement recouvert d’une trappe métallique non condamnée à clefs laissant ainsi la possibilité d’un accès non sécurisé et sans être comptabilisée au niveau des compteurs individuels des 11 copropriétaires et ce alors que selon les constatations des deux experts les compteurs ne sont pas munis de bagues anti-fraude et de robinets avec serrure de sorte que la sécurisation des compteurs n’est pas totalement garantie.
A cet égard, l’expert judiciaire émet l’hypothèse éventuelle d’un branchement pirate qu’il n’a pu déceler et dont la cour se doit de rappeler, qu’en l’état d’un réseau du lotissement privé, la responsabilité de la recherche d’un tel branchement frauduleux demeure celle de la copropriété valablement constituée en association syndicale libre.
De ce chef, la cour estime donc que cet élément n’est pas de nature à décharger l’A.S.L du paiement des consommations d’eau enregistrées au compteur général.
Sur les facturations
Selon les factures et avoirs produits aux débats, la S.D.E.C. démontre avoir fourni selon relevé au compteur général de la copropriété : 1er semestre 2014 : 36 m3 d’eau, 2d semestre 2014 : 45 m3 d’eau, 1er semestre 2015 : 28 m3 d’eau, 2d semestre 2015 : 84 m3 d’eau, 1er semestre 2016 : 229 m3 d’eau, 2d semestre 2016 : 282 m3 d’eau, 1er semestre 2017 : 130 m3 d’eau, 2d semestre 2017 : 129 m3 d’eau, 1er semestre 2018 : 0 m3 d’eau, 2d semestre 2018 : 20 m3 d’eau soit un total de 983 m3.
Cette fourniture d’eau, abonnement, collecte et dépollution des eaux usées et pénalités de retard compris donnent droit à paiement de la somme de 355,60 €, de la somme de 399,21 €, de la somme de 339,93 €, de la somme de 510,33 €, de la somme de 1 039,25 €, de la somme de 1 213,27 €, de la somme de 703,68 €, de la somme de 697,77 €, de la somme de 247,19 € et de la somme de 317,80 € soit une somme totale de 5 824,03 € TTC.
S’y ajoutent :
– la facture de consommation de 62 m3 du 1er semestre 2019 donnant droit à paiement de la somme de 475,84 € TTC sur laquelle ont été ultérieurement imputés des avoirs selon factures du 26 juillet 2019 pour 70 m3 et pour la somme de 246,72 €, 27 m3 pour la somme de 95,01 €, 23 m3 pour la somme de 79,96 €, 36 m3 pour la somme de 124,45 € portant le total exigible à la somme de 5 753,73 € ;
– la facture de consommation de 31 m3 du 2ième semestre 2019 donnant droit à paiement de la somme de 367,68 € TTC portant le total exigible à la somme de 6 121,41 € TTC ;
– la facture de consommation de 594 m3 du 1er semestre 2020 portée par erreur de logiciel à 1 188 m3 et ayant donc donné lieu à avoirs du 28 mai 2020 de 1 188 m3 pour une somme de 4 482,93 € et du 28 mai 2020 de 30 m3 pour la somme de 105,16 € (portant ainsi valablement à 186 m3 le total des avoirs comme exigé par l’expert sur les consommations de 2014 à 2019) donne droit à paiement de la somme ainsi que calculée comme suit par la cour : consommation totale exigée pour le semestre : 4 736,37 € – avoir consommation erronée de 1 188 m3, 4 482,93 € TTC – avoir fraction total 186 m3, 105,16 € = 148,28 € TTC portant ainsi le total exigible (6 121,41 € TTC + 148,28 €) à la somme de 6 269,69 € ;
– la facture de consommation de 666 m3 du 2ième semestre 2020 donnant droit à paiement de la somme de 2 754,59 € TTC sur laquelle a été pratiquée un avoir du 29 octobre 2020 pour une somme de 2 525,15 € portant ainsi la somme due au titre des consommations du second semestre 2020 à la somme de 229,44 € et le total exigible à la somme de 6 499,13 € TTC ;
– la facture de consommation de 25 m3 du 1er semestre 2021 donnant droit à paiement de la somme de 336,14 € TTC portant le total exigible à la somme de 6835,27 € TTC ;
– la facture de consommation de 27 m3 du 2d semestre 2021 donnant droit à paiement de la somme de 330,75 € TTC portant le totale exigible à la somme de 7 166,02 € exigible par la S.D.E.C. au titre du contrat souscrit le 7 janvier 2013 par monsieur [X] [T].
La cour considère que la preuve d’une créance certaine, liquide est ainsi rapportée par le créancier de l’obligation en paiement ce qui la conduit, par voie d’infirmation et statuant à nouveau à condamner solidairement au titre du contrat souscrit monsieur [X] [T] et l’A.S.L. à payer à la société des eaux de Corse (S.D.E.C) la somme de 7 166,02 € au titre des consommations d’eau restées impayées avec intérêts de droit à compter de l’assignation du 26 décembre 2018.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
En équité et au titre des frais irrépétibles de première instance, il est alloué à la S.D.E.C une somme de 2 500 € que la cour condamne solidairement monsieur [X] [T] et l’A.S.L à lui payer.
En équité et au titre des frais irrépétibles d’appel, il est alloué à la S.D.E.C une somme de 3 500 € que la cour condamne solidairement monsieur [X] [T] et l’A.S.L à lui payer.
Monsieur [X] [T] et l’A.S.L sont solidairement condamnés aux dépens de première instance et d’appel.
La cour, publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,
– déclare l’appel interjeté par la société des eaux de Corse recevable
– déclare irrecevable la demande nouvelle de voir prononcer la mise hors de cause de monsieur [X] [T]
– confirme la décision déférée en ce qu’elle a déclaré le rapport d’expertise [F] opposable à la société des eaux de Corse
– l’infirme pour le surplus,
Et statuant à nouveau,
– condamne l’A.S.L. [Adresse 2], dont le siège est sis [Adresse 3] [Localité 7] prise en la personne de son président monsieur [X] [T] domicilié en cette qualité audit siège et monsieur [X] [T] in solidum à régler à la S.E.D.C. la somme de 7 166,02 € arrêtée au 20 septembre 2021 avec intérêts de droit à compter du 26 décembre 2018
– condamne l’A.S.L. [Adresse 2] dont le siège est sis [Adresse 3] [Localité 7], prise en la personne de son président monsieur [X] [T] domicilié en cette qualité audit siège et monsieur [X] [T] in solidum à régler à la S.E.D.C.la somme de 2 500 € au titre des frais irrépétibles de première instance
– condamne l’A.S.L. [Adresse 2] dont le siège est sis [Adresse 3] [Localité 7] prise en la personne de son président monsieur [X] [T] domicilié en cette qualité audit siège et monsieur [X] [T] in solidum aux dépens de première instance
– déboute les parties du surplus de leurs demandes plus amples et contraires
Y ajoutant,
– condamne l’A.S.L. [Adresse 2] dont le siège est sis [Adresse 3] [Localité 7] prise en la personne de son président monsieur [X] [T] domicilié en cette qualité audit siège et monsieur [X] [T] in solidum à régler à la S.E.D.C.la somme de 3 500 € au titre des frais irrépétibles d’appel
– condamne l’A.S.L. [Adresse 2] dont le siège est sis [Adresse 3] [Localité 7] prise en la personne de son président monsieur [X] [T] domicilié en cette qualité audit siège et monsieur [X] [T] in solidum aux dépens d’appel.
LA GREFFIÈRE
LE PRÉSIDENT