La garantie des vices cachés et de conformité en matières de vente de chiots

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La garantie des vices cachés et de conformité en matières de vente de chiots
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Mme [Y] [U] épouse [S] a acheté un chiot pour 850 euros auprès de l’élevage « la Croisade des Loups » le 26 janvier 2019. Un vétérinaire a diagnostiqué une dysplasie bilatérale des hanches chez le chiot le 7 mai 2019. Après le refus de l’élevage d’annuler la vente, Mme [S] a saisi le tribunal judiciaire de Thionville le 18 juin 2019, demandant la résolution de la vente et des indemnités pour les frais vétérinaires et le préjudice moral. Le tribunal a condamné l’élevage à verser des sommes à Mme [S] par jugement du 14 septembre 2021. L’élevage a interjeté appel le 14 octobre 2021.

Le conseiller de la mise en état a déclaré l’appel recevable et a statué sur certaines demandes. Dans leurs conclusions du 14 mars 2024, les appelants ont demandé la nullité de l’acte introductif d’instance, arguant que l’entité SCC/FCI la Croisade des Loups n’existait pas et que le jugement était nul. Ils ont également contesté le fond de l’affaire, affirmant que la dysplasie ne pouvait pas être diagnostiquée à un si jeune âge et que les frais vétérinaires n’étaient pas justifiés.

Mme [S] a demandé la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, soutenant que l’intervention de M. [W] avait régularisé la procédure. L’intimée a contesté la demande de nullité et a présenté des preuves de la dysplasie du chiot.

La cour a finalement débouté M. [W] de sa demande de nullité, annulé le jugement précédent, déclaré recevables les prétentions de Mme [S], rejeté la demande d’expertise, et condamné M. [W] à verser des sommes à Mme [S] ainsi qu’à payer les dépens.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

12 septembre 2024
Cour d’appel de Metz
RG n°
21/02520
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 21/02520 – N° Portalis DBVS-V-B7F-FTGS

Minute n° 24/00241

[W], S.C. LA CROISADE DES LOUPS – SCC/FCI

C/

[U]

Jugement Au fond, origine TJ de THIONVILLE, décision attaquée en date du 14 Septembre 2021, enregistrée sous le n° 11-19-654

COUR D’APPEL DE METZ

3ème CHAMBRE – TI

ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2024

APPELANTS :

Monsieur [P] [W]

[Adresse 2]

Représenté par Me Armelle BETTENFELD, avocat au barreau de METZ

SCC/SCI LA CROISADE DES LOUPS représentée par Monsieur [P] [W]

[Adresse 2]

Représentée par Me Armelle BETTENFELD, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

Madame [Y] [U] épouse [S]

[Adresse 1]

Représentée par Me Jean-luc HENAFF, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés devant Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries.

A l’issue des débats, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2024, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre

ASSESSEURS : M. MICHEL, Conseiller

M. KOEHL, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme BAJEUX, Greffier

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme BAJEUX, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Par contrat du 26 janvier 2019, Mme [Y] [U] épouse [S] a acquis auprès de l’élevage canin «’la Croisade des Loups’» un chiot pour un montant de 850 euros. Le 7 mai 2019, un vétérinaire a diagnostiqué chez l’animal une dysplasie bilatérale des hanches de grade supérieur.

Suite au refus de l’élevage d’annuler la vente, par requête du 18 juin 2019, Mme [S] a fait convoquer la SCC/FCI la Croisade des Loups représentée par M. [P] [W] devant le tribunal judiciaire de Thionville et au dernier état de la procédure, elle a demandé au tribunal de prononcer la résolution de la vente et condamner la SCC/FCI la Croisade des Loups représentée par M. [W] à lui verser les sommes de 850 euros au titre du prix de vente, de 1.108,73 euros pour les frais vétérinaires et 1.000 euros pour préjudice moral outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La SCC/FCI la Croisade des Loups s’est opposée à ces prétentions et a sollicité une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 14 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Thionville a condamné la SCC/FCI la Croisade des Loups à payer à Mme [S] les sommes de 1.108,73 euros, de 300 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du jugement et de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, débouté la SCC/FCI la Croisade des Loups de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamnée aux dépens.

Par déclaration déposée au greffe de la cour le 14 octobre 2021, la SCC/FCI la Croisade des Loups représentée par M. [P] [W] et M. [P] [W] en tant que personne physique ont interjeté appel de l’ensemble des dispositions du jugement.

Par ordonnance d’incident du 12 octobre 2023, le conseiller de la mise en état :

– a déclaré recevable l’appel formé le 14 octobre 2021 contre le jugement du 14 septembre 2021

– s’est déclarée compétent pour statuer sur l’irrecevabilité des demandes de Mme [S] comme étant nouvelles

– a déclaré recevables les demandes de Mme [S] formées en appel contre M. [W]

– s’est déclarée incompétent pour statuer sur l’irrecevabilité des demandes de Mme [S] comme étant prescrites

– a débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civil et condamné M. [W] aux dépens de l’incident.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 14 mars 2024, la SCC/FCI la Croisade des Loups et M. [W] demandent à la cour de’:

– prononcer la nullité de l’acte introductif d’instance et du jugement subséquent et dire n’y avoir lieu à effet dévolutif de l’appel

– subsidiairement infirmer le jugement

– déclarer Mme [S] irrecevable en ses demandes tendant à ‘donner acte à M. [W] de son intervention volontaire et après avoir constaté la régularisation de la procédure en découlant, dire que les condamnations prononcées en 1ère instance le sont à l’encontre de M. [W], condamner M. [W] à verser à Mme [S] les sommes de 1.108,73 euros et 300 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement, condamner M. [W] à payer à Mme [S] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 pour la procédure d’instance et condamner M. [W] en tous les frais et dépens d’instance’

– déclarer Mme [S] irrecevable et subsidiairement mal fondée en ses demandes

– en tant que de besoin ordonner une expertise vétérinaire sur pièces aux frais avancés de Mme [S]

– en tout état de cause condamner Mme [S] aux dépens d’instance et d’appel et à verser à la SCC/FCI la Croisade des Loups et à M. [W] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur la nullité de l’acte introductif d’instance et du jugement, les appelants font valoir que l’entité SCC/FCI la Croisade des Loups n’existe pas, M. [W] ayant toujours exploité son élevage en nom propre, que l’acte introductif d’instance dirigé contre une société qui n’existe pas est nul, qu’il s’agit d’une irrégularité de fond qui ne peut être couverte en cours d’instance et qui entraîne la nullité du jugement. Elle précise que le fait que M. [W] soit intervenu comme représentant de la SCC/FCI la Croisade des Loups n’y change rien, la personnalité d’une partie ne se confondant pas avec celle de l’organe qui la représente, que M. [W] n’est intervenu à titre personnel qu’à hauteur de cour et que cette intervention n’est pas de nature à régulariser l’action. Ils soutiennent que le jugement est également nul au motif que le juge a statué sur les demandes en invoquant d’office les dispositions du code de la consommation relatives à la garantie légale de conformité, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties, précisant que ce moyen est recevable dès lors qu’il complète la demande de nullité du jugement soulevée dans les premières conclusions d’appel.

Ils exposent que dans ses premières conclusions du 28 mars 2022, Mme [S] s’est contentée de solliciter la confirmation du jugement, sans saisir la cour de demandes, de sorte que les prétentions figurant au dispositif des conclusions du 28 juin 2022, notamment en ce qu’elles tendent à voir constater la régularisation de la procédure, sont irrecevables en application de l’article 910-4 du code de procédure civile et que les demandes visant à constater ou dire ne saisissent pas la cour. Ils ajoutent que les demandes présentées à l’encontre de M. [W] sont irrecevables pour être présentées pour la première fois en cause d’appel et comme étant prescrites, l’action fondée sur les vices cachés devant être engagée dans les deux ans à compter de la découverte du vice et celle fondée sur la garantie de conformité se prescrivant par deux ans à compter de la délivrance du bien, qu’en l’espèce la délivrance du chiot est intervenue le 26 janvier 2019, que la dysplasie était connue dès le 7 mai 2019’et que la demande contre M. [W] à titre personnel n’a été présentée que par conclusions du 28 mars 2022.

Sur le fond, les appelants font valoir que le premier juge s’est fondé exclusivement sur les constats effectués par les vétérinaires mandatés et rétribués par l’intimée, qu’il est impossible de déterminer si un chiot âgé de 5 mois et demi est atteint ou non d’une dysplasie laquelle ne peut être établie qu’à l’âge de 12 mois et confirmée à 15 mois, que les parents de l’animal n’étaient pas atteints de cette pathologie et que l’intimée a fait euthanasier le chiot pour ne pas avoir à réaliser l’opération qu’elle estimait trop chère. Ils soulignent qu’elle ne produit aucune pièce probante, ni aucune expertise contradictoire permettant de démontrer l’existence du désordre invoqué et que la nécessité de l’euthanasie est contredite par un mail de l’intimée. Subsidiairement, en cas de résolution du contrat, ils exposent que seul le prix de vente doit être restitué faute par Mme [S] d’établir que les frais de vétérinaires étaient nécessaires, a fortiori une euthanasie et une inhumation et qu’elle ne justifie d’aucun préjudice moral.

Aux termes de ses dernières conclusions du 5 avril 2024, Mme [S] demande à la cour de’:

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions

– donner acte à M. [W] de son intervention volontaire, constater la régularisation de la procédure en découlant et dire que les condamnations prononcées en première instance le sont à l’encontre de M. [W]

– condamner M. [W] à lui verser les sommes de 1.108,73 euros et 300 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement

– le condamner aux entiers dépens et à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel et 500 euros pour la procédure de première instance.

Elle expose que la désignation du défendeur par l’enseigne sous laquelle il exerce son activité constitue un vice de forme susceptible d’être régularisé par l’intervention de la personne physique, que M. [W] qui a expressément reconnu dans ses conclusions être le propriétaire de l’élevage «’la croisade des loups’», est volontairement intervenu à la procédure ce qui a régularisé l’acte introductif d’instance avec effet rétroactif et qu’en conséquence les demandes formées en première instance l’ont été contre M. [W] de même que les condamnations prononcées. Elle précise que dans ses premières conclusions du 28 mars 2022, elle a sollicité la confirmation du jugement et la condamnation de M. [W], qu’il ne s’agit pas de prétentions nouvelles et que le conseiller de la mise en état a statué en ce sens par ordonnance du 12 octobre 2023. Elle ajoute que ses demandes ne sont pas prescrites puisque la vente est intervenue le 26 janvier 2019 et que sa requête daté du 18 juin 2019.

L’intimée soutient que la demande de nullité tirée de l’application d’office par le premier juge des dispositions du code de la consommation relatives à la garantie légale de conformité est irrecevable faute d’avoir été présentée dans le délai de trois mois suivant l’acte d’appel, que cette prétention ne vient pas au soutien de la demande de nullité de l’acte introductif d’instance et que si le jugement est annulé l’effet dévolutif de l’appel permet à la cour de statuer sur le fond du litige.

Sur le fond, elle expose que les pièces produites démontrent que le chiot âgé de 5 mois et demi présentait une dysplasie bilatérale des hanches de grade supérieur avec un changement arthrosique, qu’en raison de la crainte de morsures l’euthanasie a été préconisée et conteste la valeur probante des pièces adverses, ajoutant que l’arbre généalogique de l’animal ne permet pas d’écarter une cause congénitale. Elle conclut à la confirmation des sommes allouées en première instance, précisant avoir dû régler la somme de 428 euros au titre de frais vétérinaires et subir un préjudice moral pour avoir vu souffrir l’animal et avoir dû le faire euthanasier.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 15 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité de l’acte introductif d’instance et du jugement

L’article 114 du code civil dispose qu’aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

Le prononcé de la nullité pour vice de forme est subordonné à la preuve par l’adversaire du grief que lui cause l’irrégularité.

L’article 115 du même code précise que la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.

En l’espèce, la SCC/FCI la Croisade des Loups désignée en qualité de défendeur dans la requête initiale, n’a ni existence, ni personnalité juridique puisqu’elle correspond au nom de l’élevage que M. [W] exploite en qualité d’éleveur à titre individuel. Si en première instance les demandes n’étaient dirigées que contre la SCC/FCI la Croisade des Loups’représentée par M. [W], la désignation du défendeur par l’enseigne sous laquelle il exerce son activité constitue un vice de forme susceptible d’être régularisé et il ressort de la déclaration d’appel que M. [W] a interjeté appel en qualité de représentant de la SCC/FCI la Croisade des Loups mais également à titre personnel. Il en découle que le vice de forme tiré de la dénomination du défendeur a été régularisé en cours de procédure et il n’est ni justifié, ni même allégué que la régularisation aurait laissé subsister un grief. En conséquence la demande de nullité de l’acte introductif d’instance est rejetée, ainsi que celle subséquente du jugement.

Sur le respect du principe du contradictoire, si l’intimée invoque dans ses conclusions l’irrecevabilité de la demande de nullité du jugement, il est constaté que le dispositif de ses conclusions ne contient aucune prétention de ce chef, de sorte qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile la cour n’a pas à statuer sur la recevabilité de la demande de nullité.

Il ressort des termes du jugement qu’après avoir écarté l’application des dispositions du code civil et du code rural invoquées par Mme [S], le premier juge a estimé devoir analyser les demandes au regard des dispositions d’ordre public du code de la consommation relatives à la garantie légale de conformité, au visa de l’article 12 du code de procédure civile. Toutefois, il ne ressort ni des termes du jugement, ni des pièces de la procédure qu’il a invité les parties à présenter leurs observations sur l’application de ces dispositions, de sorte qu’en raison du non respect du principe du contradictoire, le jugement doit être annulé. En vertu de l’effet dévolutif de l’appel, il appartient à la cour de statuer sur le fond du litige.

Sur la recevabilité des demandes

Sur l’irrecevabilité des demandes comme étant nouvelles, le conseiller de la mise en état a déjà statué sur cette demande par ordonnance du 12 octobre 2023 en déclarant recevables les demandes de Mme [S] formées en appel contre M. [W].

Il est relevé que dès ses conclusions du 28 mars 2022, Mme [S] a sollicité la condamnation de M. [W] à lui payer les sommes de 1.108,73 euros et 300 euros outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, de sorte que ces prétentions n’encourent aucune irrecevabilité sur le fondement de l’article 910-4 du code de procédure civile. Il n’y pas lieu non plus de déclarer irrecevables, ni même de statuer sur les demandes de l’intimée tendant à «’donner acte’» ou «’dire’», qui n’ont pas pour objet la reconnaissance d’un droit et ne constituent pas une prétention au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile.

Sur la prescription biennale des actions en garantie des vices cachés et de conformité, il résulte de l’article 2241 alinéa 2 du code civil que l’acte de saisine d’une juridiction, même entaché d’un vice de procédure, interrompt les délais de prescription comme de forclusion et il ressort de ce qui précède que le vice de forme tiré de la dénomination du défendeur entachant l’acte introductif d’instance a été régularisé. Par voie de conséquence, la requête initiale du 18 juin 2019 a interrompu le délai de prescription des actions en garantie des vices cachés et de conformité moins de deux ans après l’événement qui leur a donné naissance, en l’espèce la remise de l’animal le 26 janvier 2019. En conséquence les demandes de l’intimée sont recevables.

Sur l’expertise

L’article 144 du code de procédure civile dispose que les mesures d’instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d’éléments suffisants pour statuer.

Au regard des pièces, notamment les certificats et comptes rendus établis par les différents vétérinaires ainsi que les clichés radiographiques, la cour s’estime suffisamment informée sur le litige, en particulier sur le défaut de conformité allégué, de sorte que la demande d’expertise judiciaire est rejetée.

Sur les demandes en paiement

Il résulte de l’ancien article L.217-4 du code de la consommation applicable au litige, que le vendeur doit livrer un bien conforme et réponds des défauts de conformité existant lors de la délivrance. Selon l’ancien article L.217-7 du même code, les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de 24 mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance du bien, sauf preuve contraire. L’ancien article L.217-9 précise qu’en cas de défaut de conformité du bien au contrat, l’acheteur choisit entre la réparation et le remplacement du bien.

Ces dispositions sont applicables aux ventes d’animaux conclues entre un vendeur agissant au titre de son activité professionnelle ou commerciale et un acheteur agissant en qualité de consommateur.

En l’espèce, il résulte du compte rendu vétérinaire du 11 mai 2019 qu’un examen radiologique effectué quelques jours auparavant, a révélé que le chien vendu par l’appelant, éleveur professionnel, présentait notamment une dysplasie bilatérale des hanches de grade supérieur avec début de changement arthrosique, alors qu’il était âgé de 6 mois et demi. Ce diagnostic a été confirmé par un professeur vétérinaire qui a constaté une dysplasie sévère après un nouvel examen radiographique le22 juillet 2019 et par un troisième vétérinaire qui a euthanasié l’animal le 11 septembre 2019. Si ces trois praticiens sont intervenus à la demande de l’intimée, la valeur probante de leurs conclusions n’est pas pour autant sujette à caution. Outre le fait qu’il n’est justifié d’aucun élément de nature à remettre en cause leur objectivité, les constatations unanimes de ces différents praticiens s’appuient sur un examen physique de l’animal et également sur les clichés radiographiques qui les étayent et dont certains sont versés aux débats. Si les appelants soutiennent que la pathologie ne peut être diagnostiquée de manière certaine avant l’âge de 12 mois, cette allégation ne repose que sur des documents de doctrine médicale ou une attestation de vétérinaires qui n’ont pas examiné l’animal, ni analysé les clichés radiographiques, étant observé que M. [W] ne prouve aucunement que son vétérinaire n’a constaté aucune trace d’arthrose sur les radios comme il le soutient. Il est relevé que le diagnostic des trois vétérinaires procède d’examens qui se sont répétés dans le temps à des mois d’intervalle, traduisant une confirmation de la réalité la dysplasie successivement qualifiée de «’grave supérieur’», puis de «’sévère’» et enfin de «’grave’». Il n’est par ailleurs pas démontré que les parents du chiot n’étaient pas atteints de dysplasie et qu’il n’était pas prédestiné à connaître un tel trouble, dès lors que la pièce produite à cet effet, retraçant la généalogie de l’animal, ne comporte aucune mention de dépistage de cette malformation pour sa mère.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il est établi que le chien vendu n’était pas propre à l’usage habituellement attendu au sens de l’article L.217-4 du code de la consommation et que le vendeur, qui ne justifie par aucun élément objectif que les causes de la dysplasie apparue dans les 24 mois de la remise du chiot seraient postérieures à cette délivrance, a failli à son obligation de conformité. Il est également démontré que ce manquement a directement engendré la nécessité d’euthanasier l’animal. Il résulte en effet de l’attestation du vétérinaire que «’les douleurs (du chiot), de plus en plus rapprochées, inquiètent les propriétaires. Le chien a tendance à se retourner pour mordre’». Au regard des précédents constats, les souffrances de l’animal ont duré des mois et il n’est établi par aucune pièce qu’une opération était de nature à y mettre un terme, ni même qu’elle a été proposée à l’intimée.

En conséquence il convient de condamner M. [W] à rembourser à Mme [S] le prix d’acquisition du chiot et le montant des dépenses générées par la dysplasie, correspondant au coût des radiographies et consultations et de l’euthanasie, soit un total de 1.108,73 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt.

Sur le préjudice moral, il ressort des pièces produites que l’intimée justifie avoir subi un préjudice constitué par le fait d’avoir vu souffrir durant plusieurs mois le chiot auquel elle était attachée et avoir dû le faire euthanasier. Il convient de lui allouer la somme de 300 euros de dommages et intérêts.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

M. [W], partie perdante, devra supporter les dépens de première instance et d’appel et il est équitable qu’il soit condamné à verser à l’intimée au titre des frais irrépétibles la somme de 500 euros pour la procédure de première instance et celle de 1.500 euros en appel, soit la somme globale de 2.000 euros. Il convient en outre de le débouter de sa propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

DEBOUTE M. [P] [W] de sa demande de nullité de l’acte introductif d’instance’;

ANNULE le jugement déféré ;

DECLARE recevables les prétentions de Mme [Y] [U] épouse [S]’;

REJETTE la demande d’expertise ;

CONDAMNE M. [P] [W] à payer à Mme [Y] [U] épouse [S] la somme de 1.108,73 euros au titre du remboursement du prix de vente et des frais annexes et celle de 300 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt’;

CONDAMNE M. [P] [W] aux dépens de première instance et d’appel’;

CONDAMNE M. [P] [W] à payer à Mme [Y] [U] épouse [S] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile’;

DEBOUTE M. [P] [W] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


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