La créatrice du fermoir tournant Louis Vuitton obtient 830 000 euros
La créatrice du fermoir tournant Louis Vuitton obtient 830 000 euros
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Le groupe Louis Vuitton a été condamné à payer plus de 830 000 euros à l’une de ses stylistes (prestataire) pour exploitation non autorisée du fermoir Louis Vuitton « LV tournant ».

Aux termes des contrats de cession de droits conclus dans les années 80, la styliste devait percevoir un supplément de rémunération pour toute nouvelle exploitation du «LV tournant» y compris pour les lignes de sac non créés par elle. Le fermoir pouvait toutefois être utilisé sur de nouveaux modèles de sacs de ville ou sacs de voyage et de loisir à l’exclusion des produits (exploités par la société Louis Vuitton de façon fautive) tels que les portefeuilles, bracelets, chaussures, ceintures et porte-clés. La styliste a ainsi obtenu la somme de 700.000 euros pour l’utilisation sans autorisation du «LV tournant» sur des portefeuilles, bracelets, chaussures, ceintures et porte-clés.

La juridiction a eu l’opportunité de préciser qu’il n’était pas dans les usages professionnels de mentionner le nom du créateur directement sur les supports. De surcroît, la styliste n’était pas la créatrice des chaussures, des bijoux, des portefeuilles et des porte-clés vendus, contrairement à la première ligne de bouclerie et de sacs de 1987 et 1988 mais seulement d’un accessoire.

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRÊT DU 11 MARS 2022

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 20/08972 – n° Portalis 35L7-V-B7E-CCAD4

Décision déférée à la Cour : jugement du 12 juin 2020 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre 3ème section – RG n°15/10854

APPELANTES AU PRINCIPAL et INTIMEES INCIDENTES

S.A.R.L. C X, agissant en la personne de sa gérante, Mme E X, domiciliée en cette qualité au siège social situé

[…]

[…]

Immatriculée au rcs de Tarascon sous le numéro 060 803 160

Mme E X, agissant tant à titre personnel qu’en sa qualité de gérante de la société C X

Née le […] à Marseille

De nationalité française

Exerçant la profession de designer

[…]

Représentées par Me Jean-Philippe HUGOT, avocat au barreau de PARIS, toque C 2501

INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE

S.A. H I J, prise en la personne de son directeur général en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé

[…]

[…]

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 318 571 064

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque L 0018

Assistée de Me Patrice DE CANDE plaidant pour la SELARL DE CANDE – BLANCHARD – DUCAMP, avocat au barreau de PARIS, toque P 265

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 6 janvier 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport

Mme Laurence LEHMANN a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Brigitte CHOKRON, Présidente

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Agnès MARCADE, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Brigitte CHOKRON, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire rendu le 12 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Paris,

Vu l’appel interjeté le 9 juillet 2020 par Mme E X et la société C X,

Vu l’ordonnance sur incident du 4 novembre 2021 rendue par le conseiller de la mise en état,

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 25 novembre 2021 par Mme X et la société C X, appelantes au principal et intimées à titre incident,

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 19 novembre 2021 par la société H I J (LVM), intimée au principal et appelante à titre incident,

Vu l’ordonnance de clôture du 25 novembre 2021.

SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

La société LVM, a pour objet la création, la fabrication et la commercialisation d’articles de maroquinerie, de bagagerie, de prêt-à- porter et d’accessoires de mode de luxe.

Mme X, designer free-lance, a conçu en 1988 un fermoir «LV tournant» reprenant le logotype de la société LVM. Elle est la gérante de la société SARL C X immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Tarascon.

La société LVM et Mme X ont conclu le 18 juin 1987 un «contrat de concession de savoir-faire» portant collaboration pour la création d’une ligne de sacs et fixant une rémunération fixe de 100.0000 francs et des redevances au taux de 3% sur le prix de vente hors taxe de chaque sac vendu en France ou à l’étranger pendant toute la durée de commercialisation avec une avance de 100.000 francs dès le commencement des ventes.

Elles ont conclu, dans le courant de l’année 1988, un autre contrat portant sur une collection de bouclerie ainsi que sur une ligne de sacs de voyages et de loisirs avec une rémunération forfaitaire pour l’exécution de la mission et la cession des droits.

Dans le prolongement de ces deux contrats, la société LVM et Mme X agissant tant en son nom personnel qu’en celui de la société C X ont conclu, le 30 juillet 1992, un contrat (ci-après la Convention), objet de la présente procédure.

Le préambule de ladite Convention rappelle l’existence des deux contrats précédents de 1987 et 1988 «aux termes desquels LVM confiait à J. X la création d’une collection d’une ligne de sacs de ville pour le premier, et d’une collection de bouclerie ainsi que d’une ligne de sacs de voyage et de loisir pour le second» et l’existence d’une rémunération fixée en pourcentage des ventes prévue au premier de ces contrats et précise que la société LVM «souhaite à présent racheter à J. X, cette redevance sous la forme d’une somme fixe, représentant l’ensemble des droits de propriété et de jouissance pleins et entiers, attachés aux huit modèles de sacs de ville, d’une part, et au concept de fermeture du «LV tournant» en cas de réutilisation dudit concept par LVM, d’autre part, ci-après définis en annexe et dénommés respectivement «la Ligne de sacs» et le « LV tournant».

Les 4 articles de la Convention stipulent :

Article 1

«Le présent rachat de tous droits de propriété attachés à la Ligne de sacs sur l’Annexe ci-jointe, est consenti et accepté aux conditions suivantes :

1.1. J. AMBERT cède et transfère par la présente, à LVM qui accepte, l’intégralité des droits cessibles de propriété incorporelle et de jouissance, sans exception, ni réserve, qu’elle détient sur la Ligne de sacs.

LVM jouira rétroactivement à compter du 1er Janvier 1992, de tous droits attachés à ladite ligne de sacs, et ce pour le monde entier, notamment la totalité des droits de reproduction, la totalité des droits de représentation et la totalité des droits qui sont ou seront reconnus et attribués aux auteurs, sur leur création pour les dispositions législatives et/ou réglementaires actuelles ou futures, en vue de la fabrication et de la commercialisation de ladite Ligne de sacs.

1.2. En contrepartie de la présente cession, LVM versera à FX, une somme de 3.857.000 francs hors taxes, soit 4.574.402 francs T.T.C. Le règlement s’effectuera en trois versements égaux, le premier tiers, au jour de la signature du présent acte, le solde restant, les deux mois suivants, à la date anniversaire du contrat.

Il est expressément convenu que ce paiement se substitue et annule toutes redevances futures à valoir au titre de l’Article 5 du contrat de concession de savoir-faire du 18 Juin 1987, en ce qui concerne les modèles figurant sur l’Annexe ci-jointe.

1.3. En conséquence de tout ce qui précède, LVM est seule subrogée dans tous les droits patrimoniaux exclusifs de J. X, découlant de ladite Ligne de sacs créée par cette dernière, pour ce qui concerne les modèles commercialisés par LVM.».

Article 2

«En cas de réutilisation par LVM du concept de fermeture du « LV tournant » sur de nouveaux modèles de sacs de ville ou sacs de voyage et de loisirs, le rachat par LVM des droits de propriété attachés à ce concept est d’ores et déjà consenti et accepté aux conditions suivantes :

2.1. En contrepartie de la réutilisation dudit concept de la fermeture, LVM s’engage à verser à J. X, le trentième jour du premier mois qui suivra la commercialisation par LVM, d’un nouveau produit utilisant le « LV tournant » (« date de commercialisation »), une somme de 436.500 francs hors taxes, soit 517.689 francs T.T.C.

Il est convenu que cette somme correspond à une rémunération globale et forfaitaire pour tous droits actuels et futurs de LVM sur le concept « LV tournant ».

2.2. Il est expressément convenu qu’à compter de la date de commercialisation, J. X cèdera et transférera à LVM tous droits de propriété et de jouissance, sans exception, ni réserve, qu’elle détient sur le « LV tournant » et ce, pour le monde entier, notamment la totalité des droits de reproduction, la totalité des droits de représentation et la totalité des droits qui sont ou seront reconnus et attribués aux auteurs, sur leur création pour les dispositions législatives et/ou réglementaires actuelles ou futures, en vue de la fabrication et de la commercialisation des produits utilisant le « LV tournant ».

2.3. J. X s’interdit d’ores et déjà de céder à des tiers tout ou partie des droits patrimoniaux, attachés à ce concept.».

Article 3

‘3.1. En conséquence de la présente cession, LVM pourra exploiter et adapter tant ladite Ligne de sacs que le concept de fermeture, comme bon lui semblera.

3.2. J. X s’interdit directement ou indirectement toute fabrication, reproduction, imitation ou toute version modifiée, de la ligne de sacs et du concept de fermeture du « LV tournant » faisant l’objet du présent contrat’.

Article 4

‘4.1. Le présent contrat est soumis au droit français.

4.2. Tout différend né entre les parties de l’interprétation et / ou de l’exécution du présent contrat sera soumis, à défaut d’accord amiable, au tribunal de grande instance de Paris’.

Une annexe était jointe à la Convention mentionnant les 8 références de sacs concernées, M80150, M80153, M80155, M80157, M80160, Z, A et B et décrivant le système de fermeture «LV Tournant» en précisant que ce système de fermeture était présent sur 3 références M80150, M80160 et B.

Mme X précise avoir découvert en novembre 2014 que la société LVM avait commercialisé une nouvelle gamme de sacs dénommée TWIST utilisant le «LV tournant» qu’elle avait créé. Elle a alors contacté la société LVM par courrier du 28 novembre 2014.

Puis, le conseil de Mme X a, par un premier courrier du 15 décembre 2014, sollicité l’application de l’article 2 du contrat du 30 juillet 1992 précité et par un second courrier du 18 décembre 2014 précisé le montant de la demande en paiement à la somme de 111.575,11 euros TTC représentant selon lui la conversion en euros de la somme de 517.689 francs augmentée en raison de l’érosion monétaire.

Entretemps, la société LVM avait répondu à Mle X par un courrier du 12 décembre 2014 qu’elle acceptait de régler la somme de 78.922 euros correspondant à celle de 517.689 francs.

Elle adressait ensuite, le 16 janvier 2015, un chèque libellé à l’ordre de C X de 79.853 euros indiquant payer une facture émise par cette société.

Le nouvel avocat des appelantes retournait le 8 février 2015 le chèque à la société LVM faisant valoir que la société C X n’avait jamais émis de facture et invoquant la nullité de la Convention. Par courrier du 10 février 2015, l’avocat de la société LVM s’opposait à la nullité alléguée et maintenait l’offre de règlement à hauteur de 79.853 euros.

Le 31 mars 2015, Mme X faisait établir un constat sur internet par un huissier de justice qui faisait ressortir l’existence de deux gammes de sacs TWIST et GO reprenant le «LV Tournant» ainsi que des portefeuilles de la gamme TWIST.

C’est dans ces circonstances, que Mme X et la société C X ont, par acte du 17 juillet 2015, fait assigner la société LVM devant le tribunal de grande instance de Paris pour voir notamment prononcer la nullité de l’article 2 de la Convention et juger qu’en apposant le «LV tournant» sur d’autres articles que ceux visés dans la Convention et en ne mentionnant pas le nom de l’auteur, la société LVM avait commis des actes de contrefaçon et violé leurs droits patrimoniaux et moraux.

La société C X indiquait être dans la cause car elle avait été destinataire d’un chèque en paiement de la société LVM pour l’utilisation du fermoir en 2014 qu’elle a refusé de porter à l’encaissement.

Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 11 janvier 2016, Mme X et la société C X ont saisi le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris d’une demande de communications de diverses pièces notamment comptables qu’elles estimaient utiles à la fixation de leurs préjudices qui leur était refusé par une ordonnance rendue le 12 février 2016.

En mars 2017, faisant état d’une évolution du litige, Mme X et la société C X indiquant avoir découvert en cours de procédure la commercialisation d’autres produits reproduisant le «LV Tournant», à savoir des bracelets en juillet 2015, des chaussures et des porte-clés en octobre 2016 et des ceintures en novembre 2016, ont formé devant le juge de la mise en état une nouvelle demande de communication d’informations.

Le juge de la mise en état, par une ordonnance du 23 juin 2017, a cette fois ordonné la communication par la société LVM de «la liste exhaustive des références utilisant le fermoir (‘) reprenant leur date de première commercialisation et leur prix» ainsi que de «tout document établissant par catégorie de produits – bracelets, portefeuilles, chaussures, porte-clés – le chiffre d’affaires HT réalisé par la vente des articles comportant le fermoir dit «LV Tournant» depuis le 17 juillet 2010 et jusqu’au premier trimestre 2017». Cette décision motivée par la découverte en cours de procédure de l’utilisation du fermoir sur d’autres articles que des sacs était assortie d’une astreinte suivant ordonnance du juge de la mise en état du 9 novembre 2018.

Par un arrêt du 26 janvier 2018, la Cour d’appel a déclaré irrecevable l’appel qui avait été formé par la société LVM de la décision du 23 juin 2017.

Le 14 novembre 2018, la société LVM a communiqué les informations sollicitées au terme de l’ordonnance du 23 juin 2017, établissant sur huit pages une liste de références commercialisées sur la période demandée avec leur prix HT et précisant que les ventes des produits correspondants à ces référence avaient généré un chiffre d’affaires total de 3.457.928 euros HT entre le 17 juillet 2010 et le 1er trimestre 2017 se décomposant comme suit :

– bracelets : 42.292 euros

– portefeuilles : 1.952.637 euros

– chaussures : 288.649 euros

– ceintures : 1.952.637 euros

– porte-clés : 72.143 euros.

Suivant une nouvelle ordonnance du juge de la mise en état du 13 septembre 2019, la demande complémentaire d’informations formée par les demanderesses a été rejetée.

Le jugement du tribunal judiciaire du 12 juin 2020 dont appel a :

Sur la nullité de la cession de droits de propriété intellectuelle

– dit que l’action de Mme X ne se heurte pas au principe de non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle,

– déclaré prescrite l’action en nullité de l’article 2 de la convention du 20 juillet 1992, formée par Mme X,

Sur la demande subsidiaire en révision du prix

– dit non prescrite l’action en révision du prix formée par Mme X et l’a déclarée recevable en son action,

– déclaré en conséquence sans objet les questions de la recevabilité à agir de la société C X et du désistement de celle-ci,

– rejeté l’action en révision du prix formée par Mme X,

– constaté l’engagement de la société LVM de payer à Mme X, la somme de 79.853 euros en exécution de l’article 2 du contrat,

Sur les demandes au titre de la contrefaçon

– déclaré la société LVM recevable à contester l’originalité du fermoir « LV tournant »,

– dit que le fermoir est original et éligible à la protection des droits d’auteur,

– rejeté l’action en contrefaçon de droit d’auteur formée par Mme X et les prétentions qui y sont accessoires,

– débouté Mme X de ses prétentions, au titre de l’atteinte à son droit moral (droit à la paternité, droit à l’intégrité de l’oeuvre),

Sur la nullité des marques françaises

– rejeté la demande en nullité des marques françaises n°4108655 et n°418646, dont la société LVM est titulaire,

Sur les autres demandes

– dit que la communication tardive par la société LVM des pièces telle qu’exigée par l’ordonnance du juge de la mise en état du 23 juin 2017, est constitutive de réticence abusive,

– condamné la société LVM à payer à Mme X la somme de 8.000 euros en réparation du préjudice en résultant,

– débouté la société LVM de sa demande en dommages et intérêts,

– dit n’y avoir lieu à publication judiciaire de la décision,

– condamné Mme X et la société C X aux dépens avec distraction conformément à l’article 699 du code de procédure civile et à payer à la société LVM la somme de 60.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire.

Mme X et la société C X ont relevé appel de cette décision.

Par conclusions d’incident du 22 septembre 2021, les appelantes ont saisi le conseiller de la mise en état d’une demande visant à la communication du montant du chiffre d’affaires mondial réalisé par la société LVM ou ses filiales, partenaires ou autres, par la vente des sacs et également des produits, bracelets, portefeuilles, chaussures, ceintures, porte-clés, ou tout autre accessoire, utilisant ou reproduisant la création de Mme X, à compter de leur date de première commercialisation jusqu’au jour de la demande.

Le conseiller de la mise en état, par une ordonnance sur incident rendue le 4 novembre 2021, a rejeté ladite demande, estimant que cette question, successivement rejetée par le juge de la mise en état lors de l’instruction de la procédure de première instance et par le jugement du 12 juin 2020, excédait sa compétence et devait, le cas échéant, être tranchée par la cour.

La cour observe que la fin de non-recevoir fondée sur le principe de non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle qui avait été soutenue en première instance par la société LVM ne fait pas l’objet d’un appel incident. Il en est de même de la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action s’agissant de la demande subsidiaire en révision du forfait présentée par Mme X en application de l’article L.131-5 du code de la propriété intellectuelle.

De plus, la société LVM dans ses dernières écritures précise qu’elle ne discute plus devant la cour d’appel ni de l’originalité du fermoir LV tournant, ni de la qualité d’auteur de Mme X G en cela sa demande relative à la qualification d’oeuvre collective.

Le jugement qui a rejeté ces deux fins de non-recevoir est irrévocable de ces chefs.

Le rejet de la demande qui avait été formée par la société LVM fondée sur un abus de procédure n’a pas fait non plus l’objet d’un appel incident et le jugement est également irrévocable quant à ce rejet.

Par ailleurs, la cour observe que Mme X et la société C X reprennent une demande avant dire droit afin que soit ordonné «aux fins de trancher la demande de révision du prix fondée sur l’article L.131-5 du code de la propriété intellectuelle et d’apprécier le préjudice subi par Mme X au titre de la contrefaçon, à la société H I J, la communication des informations relatives aux résultats d’exploitation des produits reproduisant la Création, à savoir la liste exhaustive des références correspondant aux produits commercialisés, en France et dans le monde, utilisant le système de fermoir dit « LV tournant » jouant sur l’homothétie entre les lettres « L » et « V » reprenant leur date de première commercialisation et leur prix au jour de la clôture, ainsi que le montant global du chiffre d’affaires mondial hors taxes réalisé par la vente desdits produits au jour de l’arrêt qui sera rendu’», mais constate que des questions de recevabilité et de fond doivent être jugées avant de s’interroger sur l’opportunité de la demande de communication.

Sur la qualité à agir de Mme X et de la société C X relativement aux droits patrimoniaux sur le fermoir

Les appelantes forment à titre principal des demandes en nullité de la Convention, en éventuelle révision du forfait, en paiement au titre de la Convention ou encore en condamnations pécuniaires au titre d’actes de contrefaçon au profit de Mme X. Ce n’est qu’à titre subsidiaire que ces demandes sont reprises au nom de la société C X.

La société LVM conteste l’intérêt à agir de Mme X au motif qu’elle aurait cédé ses droits d’exploitation à la société C X et la recevabilité de cette société au motif d’un désistement d’instance et d’action intervenu dans le cadre de la première instance.

Comme ci-dessus rappelé, il n’est pas contesté par la société LVM que Mme X est l’auteur du fermoir litigieux et partie contractante de la Convention.

La cession de droits de Mme X au profit de la société C X alléguée n’est justifiée par aucun élément versé au débat par la société LVM qui a la charge de ce qu’elle allègue alors que les appelantes réfutent toute cession.

Ainsi, comme jugé par le tribunal, la qualité à agir de Mme X doit être retenue et dès lors la question subsidiaire de la recevabilité de la société C X n’a pas lieu d’être examinée.

Sur les demandes principales formées par les appelantes en contrefaçon du fait de la nullité de la cession de droits prévue par l’article 2 de la Convention

Les appelantes, à titre principal, soutiennent que l’article 2 de la Convention ci-dessus rappelée doit s’analyser comme une promesse unilatérale de cession de droits de propriété intellectuelle qui n’a été concrétisée qu’en 2014 et qui viole les dispositions de l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle et dès lors serait nulle.

Elles déduisent de cette nullité, la société LVM a commis des actes de contrefaçon en exploitant le fermoir créé par Mme X sur les nouveaux produits commercialisés à compter de 2014 et en sollicitent réparation.

La société LVM demande la confirmation du jugement qui a déclaré prescrite l’action en nullité de la Convention.

Le jugement par de justes motifs que la cour adopte a retenu que l’article 2 du contrat litigieux ne constituait pas une offre unilatérale de cession mais bien un transfert immédiat de propriété du concept de fermeture du « LV tournant » en cas de réutilisation sur de nouveaux modèles de sacs de ville ou sacs de voyage et de loisirs. Cet article qui ne nécessite pas d’interprétation prend soin de préciser que le rachat par LVM des droits de propriété est «d’ores et déjà consenti et accepté» et en précise ensuite les modalités financières avec un paiement différé.

La prescription de la nullité alléguée du dit article 2 au regard de l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle est dès lors régie par l’article 1304 du code civil dans sa version antérieure à la loi du 17 juin 2008. S’agissant d’une nullité inhérente au contrat et non à un vice du consentement la prescription établie par cet article est de 5 ans et a pour point de départ la date de la conclusion du contrat contesté.

Dès lors la prescription de l’action en nullité intentée par les appelants à titre principal, et non comme moyen d’exception, a été acquise au 30 juillet 1997, soit à une date bien antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 qui n’a donc pas à s’appliquer.

De même, il ne doit pas être fait application de l’article 2257 du code civil, devenu depuis la loi du 17 juin 2008 l’article 2233, pour différer le point de départ de la prescription dès lors qu’il s’agit d’une demande de nullité de la clause de fixation du prix et non d’une action en paiement.

Il n’y a pas non plus lieu de différer le point de départ de la prescription relativement à une supposée méconnaissance de ses droits au regard de l’actuel article 2224 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008, inapplicable à l’espèce, étant en outre observé que la rémunération au forfait avait été acceptée par Mme X dans le cadre de l’article 1 du contrat litigieux et jamais remis en cause.

Ainsi le jugement sera confirmé en ce qu’il a déclaré prescrite l’action en nullité de l’article 2 de la Convention du 20 juillet 1992.

Sur la demande subsidiaire de révision du prix

Les appelantes sollicitent à titre subsidiaire l’infirmation du jugement en ce qu’il n’a pas ordonné la révision du prix forfaitaire fixé au contrat litigieux en application de l’article L.131-5 du code de la propriété intellectuelle. Elles demandent à la cour de juger l’action de Mme X en révision de prix recevable et non prescrite et, infirmant le jugement, de dire que le montant du forfait est lésionnaire ou insuffisant pour Mme X en considération de la commercialisation par la société H I J de a minima 240 références de sacs, depuis 7 ans, ce qui a nécessairement conduit à un chiffre d’affaires hors taxes supérieur à la somme de 3.512.033 euros correspondant au seuil lésionnaire des 7/12ème.

Mme X demande en conséquence la condamnation de la société LVM à lui verser un complément de rémunération correspondant à l’écart entre le forfait stipulé dans le contrat du 30 juillet 1992 et le « juste prix » et de :

– prononcer une condamnation provisionnelle de 66.544 euros par référence de sacs utilisant le système de fermoir dit «LV tournant» jouant sur l’homothétie entre les lettres «L» et «V» s’il est fait droit à la demande présentée de communication de pièces,

– à défaut d’injonction de communication, de prononcer une condamnation à hauteur de 1.5970.560 euros au titre du supplément de rémunération correspondant à l’écart entre le forfait stipulé dans le contrat du 30 juillet 1992 et le « juste prix ».

Le jugement a jugé recevable Mme X en son action de révision de prix et a jugé non prescrite ladite action en ce qu’elle est exercée sur le fondement de «l’insuffisance de prévision», cette action ayant été introduite en 2015, soit moins de cinq ans après les usages contestés.

La société LVM ne critique pas le jugement de ces chefs et en demande la confirmation en ce qu’il a déclaré mal fondée la dite action et l’a rejetée.

L’article L.131-5 du code de la propriété intellectuelle, en sa version applicable à la procédure, dispose que :

«En cas de cession du droit d’exploitation, lorsque l’auteur aura subi un préjudice de plus de sept douzièmes dû à une lésion ou à une prévision insuffisante des produits de l’oeuvre, il pourra provoquer la révision des conditions de prix du contrat.

Cette demande ne pourra être formée que dans le cas où l’oeuvre aura été cédée moyennant une rémunération forfaitaire.

La lésion sera appréciée en considération de l’ensemble de l’exploitation par le cessionnaire des oeuvres de l’auteur qui se prétend lésé».

L’imprévision visée par l’article sus-cité, sur laquelle le jugement s’est prononcé n’est pas le fait d’un contrat déséquilibré à sa conclusion mais celui d’une prévision insuffisante des produits générés par l’oeuvre, à l’inverse de la lésion des 7/12 ème qui doit s’apprécier à la conclusion du contrat et se trouve prescrite.

Avant d’appréhender la prétendue insuffisance de prévision, il est nécessaire de trancher sur deux points de désaccord des parties quant à la portée de l’article 2 de la Convention litigieux :

– d’une part sur le périmètre de la cession opérée : les appelantes soutiennent que l’article 2 du contrat litigieux ne porte que sur la possibilité d’utilisation du «LV tournant» sur des modèles de sacs de ville ou sacs de voyage et de loisirs et dès lors ne permet pas l’utilisation pour d’autres produits, alors que la société intimée considère que la cession prévue à l’article 2 n’est pas limité à certains produits,

– d’autre part, les appelantes considèrent que la somme de 517.689 francs T.T.C fixée doit être versée pour chaque nouvelle utilisation sur un produit du «LV tournant» alors que l’intimée considère qu’un seul paiement de ce montant est dû pour permettre toutes nouvelles utilisations.

La cour constate que l’article 2 mentionne en préambule «’En cas de réutilisation par LVM du concept de fermeture du « LV tournant » sur de nouveaux modèles de sacs de ville ou sacs de voyage et de loisirs, le rachat par LVM des droits de propriété attachés à ce concept est d’ores et déjà consenti et accepté aux conditions suivantes :’».

Il est ainsi expressément précisé que les énonciations qui suivent, annoncées par la ponctuation «’:’», s’appliquent en cas de réutilisation du « LV tournant » sur des sacs de villes ou de voyages et de loisirs et non sur tous produits.

Dès lors, il importe peu que dans les trois paragraphes suivants la précision relative aux produits visés ne soit pas reproduite, les mentions qui y sont contenues n’ont pas vocation à s’appliquer hors l’utilisation sur de nouveaux sacs.

Par ailleurs, la cour retient, s’agissant de la rémunération forfaitaire fixée à l’alinéa 2-1, qu’il est mentionné qu’elle sera versée «le trentième jour du premier mois qui suivra la commercialisation par LVM, d’un nouveau produit utilisant le « LV tournant » (« date de commercialisation »),une somme de 436.500 francs hors taxes, soit 517.689 francs T.T.C.».

La précision «d’un nouveau produit» doit s’entendre d’une nouvelle référence ou gamme de sac mise sur le marché et la somme de 517.689 francs T.T.C. est due au trentième jour du premier mois suivant la commercialisation. Les appelantes ne peuvent en effet être suivies lorsqu’elles indiquent que nouveau produit devrait être compris non pas comme une ligne de sac mais comme chaque référence de la gamme.

Le premier alinéa de l’article 3 de la Convention qui utilisant des termes plus généraux stipule «LVM pourra exploiter et adapter tant ladite Ligne de sacs que le concept de fermeture, comme bon lui semblera»’doit se lire au regard de la première partie de l’alinéa qui annonce « En conséquence de la présente cession» et limite ainsi sa portée à celle des deux premiers articles de la Convention.

Quant au second alinéa de cet article s’il interdit à Mme X et à sa société «toute fabrication, reproduction, imitation ou toute version modifiée, de la ligne de sacs et du concept de fermeture du « LV tournant » faisant l’objet du présent contrat», il ne dit rien sur une cession au profit de la société LVM.

Enfin, contrairement aux allégations de la société LVM la lettre précontractuelle du 12 juin 1992 ne dit pas autre chose en annonçant que pour tenir compte de l’intérêt éventuel et de l’originalité du « LV tournant » qui concerne les références M80150, M80160 et B, nous acceptons de vous verser en cas de réalisation sur un nouveau modèle de ce concept de fermeture (…) un montant de 463.500 F, par (sic) le rachat intégral de tous droits concernant ce concept» (souligné par la cour).

Dès lors, il appartient à Mme X qui est en droit de percevoir pour toute nouvelle ligne de sac de ville ou de voyage la somme de 463.500 francs convertie en euros de justifier que cette somme relève d’une prévision insuffisante des produits de l’oeuvre.

Pour ce faire, il convient de rappeler qu’il s’agit d’un supplément de rémunération pour une nouvelle exploitation du «LV tournant» sur des lignes de sac non créés par Mme X et alors que ce LV tournant avait déjà été intégré et donc rémunéré dans le cadre des contrats de concessions de savoir- faire et de l’article 1 de la Convention.

La possibilité pour la société LVM d’utiliser le fermoir litigieux sur d’autres sacs avait été expressément prévue, possibilité utilisée en 2014 pour deux lignes de sacs TWIST et GO, et il n’est pas justifié par les appelantes ni que cette réutilisation n’était pas prévisible en 1992 alors même qu’elle était expressément stipulée, ni que les produits aient connu un volume d’exploitation et un succès qui n’avaient pu être prévus lors de la conclusion du contrat.

La cour précise que le seul fait de la réutilisation du «LV tournant» se soit produite plus de 20 ans après la conclusion du contrat, alors même qu’aucun délai n’était prévu, ne suffit pas à établir d’une imprévisibilité des produits de l’oeuvre alors qu’il n’est pas justifié d’une évolution des conditions économiques ayant affecté l’économie du contrat sauf bien sûr à convertir les montants fixés en francs en euros.

Ainsi, les appelantes échouent à apporter la preuve qui leur incombe de ce que la rémunération prévue à l’article 2 de la Convention relevait d’une prévision insuffisante.

Le jugement qui a rejeté la demande subsidiaire en révision fondée sur l’article L.131-5 du code de la propriété intellectuelle sera confirmé de ce chef.

Sur la demande en paiement relative à l’utilisation contrefaisante du «LV tournant» sur des sacs

Il ressort des éléments versés au débat que la société LVM a en 2014 lancé deux lignes de sacs TWIST et GO munis du fermoir «LV tournant» sans verser ce qui était dû à Mme X au titre de l’article 2 de la Convention.

La somme de 436.500 francs HT fixée à l’article 2 de la Convention correspond, selon la conversion du franc en euro, à une somme HT de 66.544 euros.

Dès lors, et s’agissant des sacs TWIST et GO la société LVM sera condamnée à payer à Mme X la somme de 133.088 euros Hors Taxes.

Sur l’utilisation contrefaisante du «LV tournant» sur d’autres produits que des sacs

La cour rappelle que seule la cession des droits sur le fermoir « LV tournant » pour être utilisé sur de nouveaux modèles de sacs de ville ou sacs de voyage et de loisir était prévue et autorisée par la Convention.

Dès lors, toute autre utilisation telle que constatée par les pièces apportées au débat par les appelantes et reconnue par la société LVM sur des portefeuilles, bracelets, chaussures, ceintures et porte-clés est contrefaisante comme effectuée sans l’accord de l’auteur.

L’article L.331-1-3 du code de la propriété intellectuelle dans sa version applicable à compter du 13 mars 2014 dispose :

«Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° Les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;

3° Et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l’atteinte aux droits.

Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée».

Mme X ne sollicite pas l’octroi d’une somme forfaitaire et c’est dès lors en vertu de la première branche de l’alternative de ce texte qu’il convient de fixer les dommages et intérêts dus.

Le manque à gagner de Mme X ne peut être calculé en fonction d’une éventuelle exploitation par elle ou cession à un tiers dès lors qu’il a été retenu qu’en vertu de l’article 3 de la Convention, elle s’interdisait à réaliser ‘directement ou indirectement toute fabrication, reproduction, imitation ou toute version modifiée (…)du concept de fermeture du “LV tournant’ (‘).

La convention prévoyait une somme de 436.500 francs, soit 66.544 euros, hors taxes par nouvelle utilisation dans le sens ci-dessus précisé.

Aucun élément n’est produit au débat par les appelantes, qui en ont la charge, pour montrer le bénéfice réalisé par la société LVM par l’utilisation de cet accessoire intégré à des produits achetés par le consommateur attiré essentiellement, comme allégué par la société LVM, par la marque H I, la qualité et le design des produits.

A cet égard la demande présentée par les appelantes de voir enjoindre la communication de nouvelles pièces à la société LVM «relatives aux résultats d’exploitation des produits reproduisant la Création, à savoir la liste exhaustive des références correspondant aux produits commercialisés, en France et dans le monde, utilisant le système de fermoir dit « LV tournant » jouant sur l’homothétie entre les lettres « L » et « V » reprenant leur date de première commercialisation et leur prix au jour de la clôture, ainsi que le montant global du chiffre d’affaires mondial hors taxes réalisé par la vente desdits produits au jour de l’arrêt qui sera rendu» n’est pas nécessaire à l’appréciation du préjudice et sera rejetée.

En revanche, l’utilisation sur de nombreux produits autres que des sacs, non prévus ni organisés par la Convention de 1992, et sans qu’il y ait eu d’information préalable de l’auteur, ni négociation de la rémunération due pour ces nouvelles utilisations du «LV tournant» cause à Mme X un préjudice moral certain.

Au vu de l’ensemble de ces éléments et des pièces produites par les parties, la cour est à même et sans qu’il ait nécessité de recourir à communications complémentaires, de fixer la réparation intégrale du préjudice subi par Mme X à la somme de 700.000 euros pour l’utilisation sans autorisation du «LV tournant» sur des portefeuilles, bracelets, chaussures, ceintures et porte-clés.

Sur les atteintes alléguées au droit moral de l’auteur

L’article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

«L’auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre.

Ce droit est attaché à sa personne.

Il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible.

Il est transmissible à cause de mort aux héritiers de l’auteur.

L’exercice peut être conféré à un tiers en vertu de dispositions testamentaires».

Mme X soutient qu’il a été porté atteinte à son droit de paternité et que son oeuvre, intégrée à des chaussures, des bijoux, des portefeuilles et des porte-clés a été dénaturée.

Pour autant, comme justement allégué par la société LVM, Mme X n’est pas la créatrice des chaussures, des bijoux, des portefeuilles et des porte-clés vendus, contrairement à la première ligne de bouclerie et de sacs de 1987 et 1988 mais seulement d’un accessoire et il n’est pas dans les usages professionnels de mentionner le nom du créateur dans ces circonstances.

Par ailleurs, Mme X qui ne peut se prévaloir d’une évaluation totalement subjective de la qualité des produits sur lesquels le mécanisme a été adjoint n’apporte pas à suffisance la preuve que son fermoir a été dénaturé et dégradé, en étant utilisé sur d’autres articles que des sacs.

Le jugement qui a débouté Mme X au titre d’une atteinte à son droit moral au sens de l’article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle sera confirmé.

Les appelantes seront ainsi également déboutées de leur demande de publication «du jugement»(sic) formée au titre de l’atteinte au droit moral non retenu et le jugement confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de publication judiciaire.

Sur la nullité alléguée des marques françaises n°4108655 et n°4108655 de la société LVM

La société LMV est titulaire des deux marques françaises figuratives en deux dimensions déposées le 28 juillet 2014 suivantes :

– la marque n°4108655 LV représentant un L et un V entrelacés,

– la marque n°4108656 V représentant un V. Mme X considère que ces deux marques sont constituées du «LV tournant» sur lequel elle détient des droits d’auteur et demande leur annulation au regard des dispositions des articles L.711-4 et L.714-3 du code de la propriété intellectuelle.

Pour autant, l’originalité du «LV tournant» réside essentiellement dans la mobilité des lettres permettant l’ouverture et la fermeture par un pivotement des lettres.

Cette contribution de Mme X n’apparaît nullement dans les dépôts n°4108655 et n°4108646.

De plus, il est démontré que les lettres L et V font incontestablement partie du patrimoine incorporel de la société LVM et ce bien antérieurement à la création de Mme X. De nombreuses marques avaient d’ailleurs été antérieurement déposées par l’intimée notamment en 1987 et 1988 avec les lettres L et V. L’oeuvre de Mme X ne réside pas dans la seule figuration d’un L et d’un V constituant déjà une marque de la société LVM.

Ainsi, le coeur de l’oeuvre est une marque préexistante appartenant à la société LVM et portant les initiales L et V de son fondateur, ce que d’ailleurs reconnaissent les appelantes dans leurs écritures puisqu’elles précisent que la «création permet la représentation de la marque par la présence des lettres L et V tout en assurant la qualité du système de fermeture et (‘) permet de mettre en avant la marque de la société LVM et de l’identifier clairement à travers une caractéristique fonctionnelle essentielle d’un sac» (page 52 des conclusions X).

Le contrat de 1988, dont le contrat du 30 juillet 1992 est le prolongement, précisait expressément que la ligne de bouclerie, dont le LV tournant est le point de départ, a vocation à être utilisée sur «divers lignes de produits, afin de constituer des signes de reconnaissance pour la clientèle de LVM» c’est-à-dire pour exercer la fonction de signe distinctif.

Les dépôts n°4108655 et n°4108646 ne constituent donc pas une atteinte aux droits d’auteur de Mme X au sens de l’article L.711-4 du code de la propriété intellectuelle.

Le jugement qui a rejeté la demande d’annulation de ces deux marques sera confirmé de ce chef.

Sur la demande relative aux marques internationales n°4108655 et n°4108655 de la société LVM

Les appelantes ont devant les premiers juges abandonné leurs prétentions relatives à la nullité des marques internationales qui ne visaient pas la France.

Elles demandent à la cour de désigner Mme X «comme la partie en charge d’effectuer les démarches permettant l’annulation des marques internationales n°1241672 et n°1241670 auprès de l’Institut national de la propriété intellectuelle».

Pour autant, il n’appartient pas de la compétence de la cour de statuer de ce chef dès lors que, comme reconnu par les appelantes, les marques internationales litigieuses ne visent pas la France.

Les demandes relatives à ces marques seront dès lors rejetées.

Sur la condamnation liée à la rétention abusive de pièces par la société LVM

Les premiers juges ont retenu à juste titre que la société LVM n’a fait aucun cas de l’ordonnance du juge de la mise en état du 23 juin 2017, lui enjoignant la communication de pièces et n’a effectivement transmis celles-ci que tardivement et selon les modalités qu’elle a adoptées unilatéralement (transmission préalable à un huissier) et que ce comportement au mépris de la décision judiciaire, est fautif et justifie que soit allouée à Mme X, la somme de 8.000 euros, en réparation du préjudice résultant de la résistance abusive de la société LVM.

Le jugement sera confirmé de ce chef et les appelantes seront déboutées de leur demande non justifiée de voir porter à 30.000 euros le montant de cette condamnation.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le sens de l’arrêt conduit à infirmer les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

La société LVM sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

Elle sera également condamnée à verser à Mme X la somme de 70.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais engagés en première instance et en appel, incluant les frais de constats et la somme de 10.000 euros à la société C X.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de l’appel principal et de l’appel incident,

Confirme le jugement en ce qu’il a :

– déclaré prescrite l’action en nullité de l’article 2 de la convention du 20 juillet 1992, formée par Mme X,

– dit non prescrite l’action en révision du prix formée par Mme X et la déclarée recevable en son action,

– déclaré en conséquence sans objet les questions de la recevabilité à agir de la société C X et du désistement de celle-ci,

– rejeté l’action en révision du prix formée par Mme X,

– débouté Mme X de ses prétentions, au titre de l’atteinte à son droit moral (droit à la paternité, droit à l’intégrité de l’oeuvre),

– rejeté la demande en nullité des marques françaises n°4108655 et n°418646, dont la société H I J est titulaire,

– dit que la communication tardive par la société H I J des pièces telle qu’exigée par l’ordonnance du juge de la mise en état du 23 juin 2017, est constitutive de réticence abusive et condamné la société LVM à payer à E X la somme de 8.000 euros en réparation du préjudice en résultant,

– dit n’y avoir lieu à publication judiciaire de la décision,

L’infirmant pour le surplus et y ajoutant :

– déboute Mme X de sa demande relative aux marques internationales n°4108655 et n°4108655,

– condamne la société H I J à payer à Mme X la somme de 133.088 euros Hors Taxes en application du contrat en date du 30 juillet 1992 pour la commercialisation des sacs TWIST et GO munis du fermoir «LV tournant»,

– condamne la société H I J à payer à Mme X la somme de 700.000 euros à titre de dommages et intérêts pour l’utilisation sans autorisation du «LV tournant» sur des portefeuilles, des bracelets, des chaussures, des ceintures et des porte-clés,

– condamne la société H I J à payer à Mme X la somme de 70.000 euros et à la société C X celle de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, incluant les frais de constats,

– condamne la société H I J aux dépens de première instance et d’appel avec distraction conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente


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