La cession du droit à l’image de l’artiste-interprète en CDD

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La cession du droit à l’image de l’artiste-interprète en CDD
Ce point juridique est utile ?

La cession du droit à l’image de l’artiste-interprète doit être encadrée et formalisée par le CDD d’usage conclu.

En application de l’article 9 du code civil, le droit au respect de la vie privée permet à toute personne, fût-elle artiste du spectacle, de s’opposer à la diffusion, sans son autorisation expresse, de son image, attribut de sa personnalité.

En l’espèce, l’image du salarié a été utilisée sur le site internet du cirque ‘une journée au cirque’, le salarié n’ayant pas consenti au droit à l’image. En outre, le fait qu’une autre salariée danseuse, affirme avoir été sollicitée pour donner son accord à l’utilisation de son image ne permet pas davantage d’établir que le salarié a donné ce consentement.

Le salarié a subi un préjudice moral du fait de la persistance de l’exposition de son image, alors même qu’il avait quitté la société, qu’il convient d’évaluer à la somme de 1 500 euros.

M. [E] [U] a été engagé par la société Savanah en tant que danseur sous un contrat à durée déterminée du 19 septembre 2019 au 30 juin 2020. Il a signalé à son employeur, par courriel du 5 février 2020, qu’il n’avait pas reçu de planning de travail. Le 12 février 2020, la société a mis fin à son contrat sans préavis. Contestant cette rupture, M. [U] a saisi lLa cession du droit à l’image de l’artiste-interprète en CDD

La cession du droit à l’image de l’artiste-interprète doit être encadrée et formalisés par son CCD.

En application de l’article 9 du code civil, le droit au respect de la vie privée permet à toute personne, fût-elle artiste du spectacle, de s’opposer à la diffusion, sans son autorisation expresse, de son image, attribut de sa personnalité.

En l’espèce, l’image du salarié a été utilisée sur le site internet du cirque ‘une journée au cirque’, le salarié n’ayant pas consenti au droit à l’image, les seules déclarations de M. [D] contredites par le salarié étant insuffisantes à établir ce consentement. En outre, le fait que Mme [T], danseuse, affirme avoir été sollicitée pour donner son accord à l’utilisation de son image ne permet pas davantage d’établir que le salarié a donné ce consentement.

Le salarié a subi un préjudice moral du fait de la persistance de l’exposition de son image, alors même qu’il avait quitté la société, qu’il convient d’évaluer à la somme de 1 500 euros.e conseil de prud’hommes de Nanterre le 22 décembre 2020 pour obtenir des dommages et intérêts. Le jugement du 16 septembre 2022 a condamné Savanah à verser plusieurs sommes à M. [U] et à lui remettre des bulletins de paie pour des répétitions non réglées, tout en déboutant M. [U] de certaines demandes. Savanah a interjeté appel le 6 janvier 2023, demandant l’infirmation du jugement et la reconnaissance d’une faute grave justifiant la rupture. M. [U] a également déposé des conclusions le 14 avril 2023 pour confirmer le jugement et contester certains aspects relatifs aux bulletins de paie et aux intérêts. L’instruction a été clôturée le 7 mai 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

5 septembre 2024
Cour d’appel de Versailles
RG n°
23/00083
COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 05 SEPTEMBRE 2024

N° RG 23/00083

N° Portalis DBV3-V-B7H-VTRU

AFFAIRE :

S.A.R.L. SAVANAH

C/

[E] [U]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Septembre 2022 par le Conseil de Prud’hommes Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : AD

N° RG : 20/02804

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Agnès MENOUVRIER

Me Mélisande FELTON

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.R.L. SAVANAH

N° SIRET : 493 940 027

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Agnès MENOUVRIER de la SCP LE METAYER ET ASSOCIES, Constitué/Plaidant, avocat au barreau d’ORLEANS, vestiaire : 63 – substitué par Me Alexia LAKABI avocat au barreau d’ORLEANS

APPELANTE

Monsieur [E] [U]

né le 23 Janvier 1985 à [Localité 5] (ITALIE)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Mélisande FELTON, Plaidant / Constitué, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 24 Mai 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseillère chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseillère,

Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,

Greffier lors du prononcé : Madame Anne REBOULEAU,

EXPOSE DU LITIGE

M. [E] [U] a été engagé par la société Savanah suivant un contrat de travail à durée déterminée à compter du 19 septembre 2019 jusqu’au 30 juin 2020 en qualité de danseur, sous le régime d’intermittent du spectacle.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles.

Se plaignant de ne pas avoir reçu de planning de travail, par courriel du 5 février 2020, M. [U] a écrit à son employeur pour reprendre son travail.

Par lettre du 12 février 2020, la société Savanah a mis fin au contrat de travail du salarié sans octroi de préavis.

Contestant la rupture de son contrat de travail, le 22 décembre 2020, M. [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre afin d’obtenir la condamnation de la société Savanah au paiement de dommages et intérêts au titre de la rupture anticipée et de diverses sommes au titre de l’exécution et la rupture du contrat de travail.

Par jugement en date du 16 septembre 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a :

– condamné la société Savanah à régler à M. [U] les sommes suivantes :

* 2 530 euros à titre d’indemnité de rupture anticipée du contrat de travail,

* 3 000 euros nets au titre de la perte de chance de cotiser,

* 1 000 euros nets au titre du préjudice moral pour non-respect de la procédure de rupture,

* 855,50 euros bruts au titre des services de répétitions,

* 1 500 euros nets à titre de dommages et intérêts pour utilisation abusive de son image,

* 950 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Savanah à remettre à M. [U] les bulletins de paie et l’attestation pôle emploi correspondants aux 16 répétitions non réglées sur la base de 5,47 euros bruts par service de 4 heures,

– débouté M. [U] du surplus de ses demandes,

– débouté la société Savanah de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Savanah aux entiers dépens.

Le 6 janvier 2023, la société Savanah a interjeté appel à l’encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 27 juin 2023, la société Savanah demande à la cour de :

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à régler à M. [U] les sommes suivantes :

* 2 530 euros à titre d’indemnité de rupture anticipé du contrat de travail,

* 3 000 euros au titre de la perte de chance de cotiser,

* 1 000 euros au titre du préjudice moral pour non-respect de la procédure de rupture,

* 855,50 euros au titre des services de répétition,

* 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour utilisation abusive de son image,

* 950 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la société Savanah de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Savanah aux entiers dépens,

– confirmer le jugement pour le surplus,

– statuant à nouveau, juger que la rupture anticipée du contrat de travail de M. [U] repose sur une faute grave et est, par conséquent, justifiée,

– débouter M. [U] de toutes ses demandes, fins ou conclusions contraires,

– y ajoutant, condamner M. [U] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [U] aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 14 avril 2023, M. [U] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Savanah à lui verser les sommes suivantes :

* 2 530 euros nets à titre d’indemnité de rupture anticipé du contrat de travail,

* 3 000 euros nets au titre de la perte de chance de cotiser,

* 1 000 euros nets au titre du préjudice moral pour non-respect de la procédure de rupture,

* 855,50 euros bruts au titre des services de répétition,

* 1 500 euros nets à titre de dommages et intérêts pour utilisation abusive de son image,

* 950 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

* entiers dépens,

– à titre incident, infirmer le jugement en ce qu’il a jugé dans son dispositif au titre de la remise de bulletins de paie et attestation pôle emploi conformes concernant les répétitions la base brute était de 5,47 euros bruts pour 4 heures de service de répétition et alors qu’il s’agit de 53,47 euros bruts,

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande visant à assortir les condamnations de l’intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes,

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande de capitalisation des intérêts,

– et statuant à nouveau, ordonner à la société Savanah de lui remettre les bulletins de paie et attestations pôle emploi correspondants aux 16 répétitions non réglées sur la base de 53,47 euros bruts par service de répétition,

– assortir toutes les condamnations de l’intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes et de l’intérêt au taux légal majoré à compter de l’expiration d’un délai de deux mois suivant la date du jugement,

– ordonner la capitalisation des intérêts,

– condamner la Sarl Savanah à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L’ordonnance de clôture de l’instruction est intervenue le 7 mai 2024.

MOTIVATION

Sur la rupture anticipée du contrat à durée déterminée et ses conséquences

La lettre de rupture, qui fixe les limites, du litige est libellée comme suit :

« Suite à notre entretien préalable du mercredi 4 décembre 2019 dans nos bureaux, nous avons pris la décision d’arrêter avec vous notre collaboration comme danseur au statut intermittent du spectacle au sein de notre entreprise.

A plusieurs reprises nous avons constaté que votre comportement ne respectait pas les règles de discipline obligatoire durant les activités de cirque, en n’assurant pas la sécurité des personnes durant ses activités.

De plus, durant les chorégraphies du spectacle vous avez provoqué plusieurs désaccords qui ont entrainé de véritables perturbations au sein de l’équipe de l’entreprise.

Enfin, suite à votre demande d’annulation de plusieurs dates de travail durant la période de haute saison pour notre entreprise (décembre) et ne pouvons pas compter sur vous pour nos spectacles, nous sommes à chaque fois dans l’obligation de prendre un dossier danseur remplaçant à votre poste.

La réception de ce courrier mettra donc fin à notre contrat. Votre statut d’intermittent n’engageant aucun préavis de part et d’autre.

Veuillez agréer Monsieur, nos respectueuses salutations. »

L’employeur expose que la lettre de rupture du contrat de travail n’a pas expressément à mentionner une faute grave mais que l’absence de préavis implique que la rupture anticipée est intervenue en raison d’une faute grave. Il soutient que la rupture repose bien sur une faute grave caractérisée basée sur des griefs précis et des faits résultant des attestations produites et corroborant ces griefs.

Le salarié soutient que les faits fautifs invoqués ne sont pas datés ou contextualisés, qu’aucun élément n’est fourni sur la date de ces faits de sorte qu’il convient de les considérer comme manifestement prescrits. Il ajoute que la notification de la rupture n’a pas été faite dans le délai d’un mois, quand bien même la tenue d’un entretien préalable est contestée. Il fait valoir que le motif de faute grave ne figure pas dans la lettre de rupture et, qu’en tout état de cause, la motivation imprécise et vague et l’allusion à un comportement qui ne répondrait pas aux attentes ne sauraient caractériser une faute grave.

Aux termes de l’article L. 1332-4 du code du travail, ‘aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.’

Aux termes de l’article L. 1243-1 alinéa 1 du code du travail, ‘sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l’échéance du terme qu’en cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail.’

En l’espèce, la lettre de rupture reproche en substance au salarié : des comportements non-conformes aux règles de sécurité, des désaccords au titre des chorégraphies ayant eu des retentissements au sein de l’équipe, des demandes d’annulation de dates de travail.

Sur la prescription des faits fautifs

Sur les comportements non-conformes aux règles de sécurité, la lettre de licenciement et les précisions ultérieures apportées par l’employeur font mention d’une part, le 26 novembre 2019, d’un enfant tombé alors qu’il était sous la surveillance du salarié car il n’avait pas été sécurisé, d’autre part, courant novembre, du fait que le salarié se tenait debout sur le trapèze en incitant le public à faire de même.

Si l’absence de convocation à un entretien préalable constitue une irrégularité de la procédure de rupture du contrat de travail à durée déterminée, elle n’affecte pas le bien-fondé de cette mesure. Toutefois, en l’absence de preuve d’une convovation à un entretien préalable et de tout entretien préalable que le salarié conteste, l’employeur ne démontre pas avoir engagé la procédure de licenciement dans les deux mois de sa connaissance des faits fautifs invoqués. Par conséquent, les faits fautifs invoqués à l’appui de ce grief sont prescrits.

Sur les désaccords au titre des chorégraphies ayant eu des retentissements au sein de l’équipe, l’employeur soutient que ces comportements ont été systématiques et donc qu’ils ont perduré.

Cependant, l’employeur ne produit que l’attestation de M. [D], en charge des ateliers, du 13 février 2021 faisant part de manière vague, de l’agressivité et de l’absence de respect du salarié face à la direction et lui-même lors d’échanges en groupe outre l’attestation de Mme [T], chorégraphe et danseuse, du 16 février 2021 relatant de manière imprécise une ambiance dégradée et des jeux de pouvoirs à l’égard du salarié.

En l’absence de preuve d’une convocation à un entretien préalable et de tout entretien préalable que le salarié conteste, et en l’absence de précision suffisante sur des faits découverts ayant perduré dans le délai de prescription, les faits fautifs invoqués sont prescrits.

Sur l’annulation de dates de travail, l’employeur tient rigueur au salarié d’avoir annulé plusieurs dates en décembre 2019. L’employeur ayant mis fin au contrat de travail le 12 février 2020, soit dans les deux mois des faits fautifs, ces faits ne doivent pas être considérés comme prescrits.

Sur le fond

Il se déduit des termes de la lettre de rupture que le motif de celle-ci est de nature disciplinaire

Il résulte des dispositions précitées que la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée dont le motif est à caractère disciplinaire, doit être fondée sur une faute grave.

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et implique son éviction immédiate

La preuve de la faute grave incombe à l’employeur.

Sur l’annulation de dates de travail, l’employeur ne produit aucun élément à l’appui de ses allégations. Ce grief ne peut donc être considéré comme établi.

Il résulte de ces éléments que la rupture du contrat de travail du salarié n’est pas fondée sur une faute grave.

En application des dispositions de l’article L. 1243-4 du code du travail, si l’employeur rompt un contrat à durée déterminée avant l’échéance du terme, en dehors d’un cas de force majeure ou d’une faute grave, le salarié a droit à des dommages-intérêts d’un montant égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat. La loi imposant une réparation forfaitaire minimum, celle-ci ne peut subir aucune réduction.

En l’espèce, le contrat de travail a été rompu à l’initiative de l’employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude. Par conséquent, le salarié a droit à des dommages et intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat.

Le salarié justifie qu’il a travaillé sur un total de 23 dates suivant les plannings transmis par l’employeur, soit sur la base de 110 euros brut par jour de travail en cachet, pour un montant total de 2 530 euros brut.

L’employeur soutient que la somme n’est pas justifiée puisqu’en raison de la crise sanitaire, le salarié aurait perçu une indemnisation au titre du chômage partiel à compter de la cessation d’activité dès mars 2020. Cependant, la loi prévoyant une réparation forfaitaire minimale, celle-ci ne peut subir aucune réduction.

Par conséquent, le jugement du conseil de prud’hommes doit être confirmé en ce qu’il a condamné la société Savanah à payer à M. [U] la somme de 2 530 euros à titre d’indemnité de rupture anticipée du contrat de travail, sauf à préciser qu’il s’agit d’une indemnité nette.

Sur la perte de chance de cotiser

Le salarié sollicite une somme de 3 000 euros de dommages et intérêts résultant d’une perte de chance de cotiser à l’assurance chômage, à l’assurance maladie ou à la retraite.

L’employeur conclut au débouté de la demande. Il fait valoir que le salarié ne prouve pas l’existence d’un préjudice direct et certain, alors qu’il ne produit pas d’élément sur sa situation professionnelle postérieure, qu’il ne démontre pas l’existence d’un préjudice distinct de celui relatif à la perte de salaire déjà indemnisée, qu’il ne chiffre pas précisément la perte de chance.

Le salarié justifie avoir perçu des allocations d’aide au retour à l’emploi en septembre 2020 d’un montant de 378,56 euros.

Il ne produit pas d’éléments sur sa situation professionnelle postérieure à la rupture du contrat de travail.

Par conséquent, l’existence d’une perte de chance de cotiser aux assurances chômage, maladie et à la retraite n’est pas caractérisée, ni dans son principe, ni dans son quantum.

Le jugement du conseil de prud’hommes doit être infirmé en ce qu’il a condamné la société Savanah à payer à M. [U] la somme de 3 000 euros au titre de la perte de chance de cotiser et M. [U] doit être débouté de sa demande à ce titre.

Sur le respect de la procédure de licenciement

Le salarié sollicite des dommages et intérêts d’un montant de 1 000 euros pour préjudice moral au titre de la rupture brutale de son contrat de travail, sans avoir pu s’expliquer avec l’employeur, la rupture étant intervenue au vu d’un seul courrier de quelques lignes.

L’employeur fait valoir que la rupture est intervenue après convocation à un entretien préalable, fut-ce par voie orale, qu’au surplus, le salarié ne démontre pas l’existence du préjudice invoqué.

En application des dispositions de l’article L. 1243-4 du code du travail, l’attribution d’une indemnisation complémentaire, fût-ce au titre d’un préjudice moral, relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.

En l’espèce, l’employeur ne rapporte pas la preuve de la convocation à entretien préalable, le salarié contestant que cet entretien se soit tenu.

Par conséquent, le salarié a subi un préjudice moral résultant de la brutalité de la rupture intervenue au vu d’un seul courrier qu’il convient d’évaluer à la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera donc confirmé en ce qu’il a condamné la société Savanah à payer à M. [U] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Sur les services de répétition du 16 septembre 2019 au 3 janvier 2020

Le salarié sollicite une somme de 855,5 euros bruts au titre des répétitions non rémunérées sur le fondement d’un cachet de répétition prévu par la convention collective.

L’employeur conclut au débouté de la demande. Il fait valoir que les répétitions du salarié ont toutes été rémunérées par le biais des cachets perçus qui rémunèrent une journée de travail.

En application de l’article XIV 2.1 de la convention collective applicable sur le temps de travail collectif, le temps de répétition est considéré comme temps de travail effectif du danseur.

En application de l’accord du 31 janvier 2019 relatif aux salaires minima pour l’année 2019 applicable, le montant du cachet de répétition est de 53,47 euros brut.

En application notamment de l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences légales et réglementaires.

Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce, le salarié verse aux débats un planning de travail du 6 octobre 2019 au 10 janvier 2020, des échanges ‘Whatsapp’ du 15 septembre 2019 au 9 octobre 2019 faisant état de répétitions les 16 septembre 2019, 1, 2, 3, 15 octobre 2019. Il indique que techniquement et artistiquement un spectacle doit faire l’objet de répétition, que les répétitions se sont tenues en dehors des jours de spectacle et de cachet, que les répétitions n’ont pas été rémunérées.

Il produit également ses bulletins de paie sur la période considérée ne faisant pas mention d’un cachet de répétition.

Il évalue un nombre de 16 services de répétitions sur la période considérée, pour un coût de

53,47 euros brut, soit un montant total de 855,5 euros bruts.

Il s’en déduit que le salarié présente des éléments suffisamment précis quant aux heures de répétition non rémunérées qu’il considère avoir accomplies de sorte que l’employeur est en mesure d’y répondre.

L’employeur ne produit pas d’éléments propres de contrôle des heures de répétition et se borne à critiquer le décompte produit par le salarié, faisant valoir que les répétitions ont toutes été rémunérées par les cachets reçus au titre de la journée de travail, que les plannings produits sont à titre prévisionnel et ne permettent pas de démontrer le nombre réel de répétitions tenues, que le nombre de répétition sollicité est arbitraire, le salarié ne détaillant pas la période sur laquelle aurait eu lieu ces services. Cependant, les services revendiqués correspondent à la période du 16 septembre 2019 au 3 janvier 2020 et les échanges de messages produits confirment la tenue de répétitions en dehors des jours de spectacle et de cachet.

Après analyse des éléments produits par chacune des parties, la cour a la conviction que le salarié a effectué des services de répétition qu’elle évalue à la somme de 534,7 euros sur la période du 16 septembre 2019 au 3 janvier 2020. Le jugement du conseil de prud’hommes sera infirmé sur le quantum alloué et la société Savanah sera condamnée à payer à M. [U] la somme de

534,7 euros bruts au titre des services de répétition.

Sur le droit à l’image

Le salarié sollicite des dommages et intérêts à hauteur de 1500 euros au titre du préjudice subi du fait d’une utilisation abusive de son image. Il indique qu’une photographie a été réalisée pour le site internet du cirque, qu’aucun droit à l’image n’a été signé et qu’il n’a perçu aucune contrepartie à l’utilisation de son image, l’employeur ayant mis plus de deux ans après la rupture du contrat de travail pour établir qu’il n’utilisait plus son image.

L’employeur indique que le salarié a donné son autorisation pour l’utilisation de son image à l’oral, qu’il a pris la pose pour la photographie en connaissance de cause. Il soutient que le salarié ne produit aucun élément pour étayer ses propos et qu’il s’est mis d’accord avec Mme [C] pour soutenir mutuellement leur demande. Il relève que le salarié ne justifie pas du préjudice moral invoqué ni dans son principe, ni dans son quantum.

En application de l’article 9 du code civil, le droit au respect de la vie privée permet à toute personne, fût-elle artiste du spectacle, de s’opposer à la diffusion, sans son autorisation expresse, de son image, attribut de sa personnalité.

En l’espèce, l’image du salarié a été utilisée sur le site internet du cirque ‘une journée au cirque’, le salarié n’ayant pas consenti au droit à l’image, les seules déclarations de M. [D] contredites par le salarié étant insuffisantes à établir ce consentement. En outre, le fait que Mme [T], danseuse, affirme avoir été sollicitée pour donner son accord à l’utilisation de son image ne permet pas davantage d’établir que le salarié a donné ce consentement.

Le salarié a subi un préjudice moral du fait de la persistance de l’exposition de son image, alors même qu’il avait quitté la société, qu’il convient d’évaluer à la somme de 1 500 euros.

Par conséquent, le jugement du conseil de prud’hommes sera confirmé en ce qu’il a condamné la société Savanah à payer à M. [U] la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour utilisation abusive de son image.

Sur la remise des documents de fin de contrat

Il convient d’ordonner la remise par la société Savanah à M. [U] des bulletins de paie et des attestations Pôle emploi devenu France Travail correspondants aux 10 répétitions non réglées sur la base de 53,47 euros bruts par service de répétition.

Sur le cours des intérêts

En application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt. Il n’y a pas lieu de faire courir le point de départ des intérêts à une date antérieure comme sollicité.

Il n’y pas lieu de faire droit à la demande d’intérêt au taux légal majoré à compter de l’expiration d’un délai de deux mois suivant la date du jugement.

La capitalisation des intérêts échus au moins pour une année entière sera ordonnée.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Savanah succombant à la présente instance, en supportera les dépens d’appel. Elle devra régler à M. [U] une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel. L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Savanah en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a :

– condamné la société Savanah à payer à M. [E] [U] les sommes suivantes:

2 530 euros à titre d’indemnité de rupture anticipée du contrat de travail, sauf à préciser qu’il s’agit d’une indemnité nette,

1 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

1 500 euros nets à titre de dommages et intérêts pour utilisation abusive de son image,

– condamné la société Savanah à payer à M. [E] [U] la somme de 950 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la société Savanah de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Savanah aux entiers dépens,

L’infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Déboute M. [E] [U] de sa demande au titre de la perte de chance de cotiser,

Condamne la société Savanah à payer à M. [E] [U] la somme de 534,7 euros bruts au titre des services de répétition,

Dit que les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus au moins pour une année entière,

Ordonne la remise par la société Savanah à M. [E] [U] des bulletins de paie et des attestations Pôle emploi devenu France Travail correspondants aux 10 répétitions non réglées sur la base de 53,47 euros bruts par service de répétition,

Condamne la société Savanah aux dépens d’appel,

Condamne la société Savanah à payer à M. [E] [U] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 au profit de la société Savanah en cause d’appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président et par Madame Anne REBOULEAU, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


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