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9 décembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n°
19-82.543
N° P 19-82.543 F-D
N° 2517
CK
9 DÉCEMBRE 2020
REJET
CASSATION PARTIELLE
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 9 DÉCEMBRE 2020
Mme B… P… et M. W… E… ont formé des pourvois contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, chambre 5-12, en date du 26 mars 2019, qui a condamné la première pour escroqueries, faux et usage, et abus de confiance à deux ans d’emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l’épreuve, et cinq ans d’interdiction professionnelle, et le second pour recel et non justification de ressources à dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve, et 4 000 euros d’amende, a prononcé des mesures de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de Mme B… P…, M. W… E…, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Crystal TO, des sociétés […] (DPS44), […] (DPS69), […] (DPS84), […] (DPS94), et les conclusions de Mme Moracchini, avocat général, après débats en l’audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Guichard, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Mme B… P… était employée en qualité de comptable de sociétés du groupe […], à savoir les sociétés […] (DPS 94), […] (DPS 44), […] (DPS 69) et […] (DPS 84). Elle était également trésorière du comité d’entreprise de la société DPS 94.
3. À partir de mai 2011, elle a été employée en qualité de comptable de la société Crystal To.
4. À la suite d’une plainte du directeur administratif du groupe […], une enquête et une information judiciaire ont révélé que Mme P… s’était livrée entre 2002 et 2011 à des détournements au préjudice des sociétés du groupe […], ou de son comité d’entreprise, notamment par des virements à destination de ses comptes bancaires personnels, ceux de son compagnon ou de ceux de ses enfants, ou encore des dépôts de chèques sur les comptes familiaux.
5. La dirigeante de la société Crystal To a également dénoncé des détournements par virements ou encaissement de chèques imputés à Mme P….
6. L’enquête a montré par ailleurs que Mme P… et son compagnon M. E… avaient un train de vie ne correspondant pas à leurs ressources déclarées, et que notamment, outre la rénovation complète de leur maison, ils avaient pu financer l’achat de véhicules de luxe, de vêtements, ainsi que des spectacles, voyages et séjours en France ou à l’étranger.
7. Mme P… a été renvoyée devant le tribunal correctionnel pour faux et usage, escroqueries et tentative au préjudice des sociétés […], Crystal To et Next Events Travel, et abus de confiance au préjudice du groupe […]. M. E… a été quant à lui poursuivi pour recel et non justification de ressources.
8. Par jugement du 15 février 2018, le tribunal correctionnel de Créteil a déclaré les prévenus coupables des délits reprochés, a condamné Mme P… à deux ans d’emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l’épreuve, et cinq ans d’interdiction professionnelle, M. E… à dix-huit mois d’emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l’épreuve, et 5 000 euros d’amende. Le tribunal a en outre prononcé la confiscation de la maison d’habitation du couple et des comptes bancaires saisis pendant l’information judiciaire. Enfin, sur l’action civile, le tribunal a reçu les constitutions de partie civile des sociétés DPS 94, 44, 69, de M. H… M…, de la société Crystal To, et de BNP Paribas, et a condamné les prévenus à leurs payer divers dommages-intérêts.
9. Les prévenus et le ministère public ont fait appel de ce jugement.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième, troisième, septième et huitième moyens
10. Ils ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le quatrième moyen, pris en ses deux premières branches
Énoncé du moyen
11. Le moyen est pris de la violation du principe ne bis in idem, de l’article 4 du septième protocole additionnel à la Convention des droits de l’homme, des articles 321-1 et 321-6 du code pénal, 388 et 593 du code de procédure pénale.
12. Le moyen, en ses deux premières branches, critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré M. E… coupable de recel d’abus de confiance, de recel d’escroquerie et de non justification de ressources, l’a condamné à une peine de dix-huit mois d’emprisonnement assortie d’un sursis d’un an avec mise à l’épreuve pour une durée de trois ans ainsi qu’à une peine d’amende de 4 000 euros, a prononcé à son encontre une peine complémentaire de confiscation portant sur 40 % des parts indivises d’un bien immobilier situé à […] et a prononcé sur les intérêts civils alors :
« 1°/ que nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement plusieurs fois à raison des mêmes faits ; que le fait de bénéficier de dépenses financées par le produit d’une infraction ne peut être qualifié à la fois de recel et de non justification de ressources ; qu’ayant constaté que le recel était constitué par le fait d”avoir bénéficié des dépenses financées par le produit des infractions reprochées à Mme P… et portant sur l’acquisition ou la location de véhicules haut de gamme, la réalisation de travaux de rénovation du domicile, le paiement de séjour de vacances et de places de spectacles et de pertes de jeux, la cour d’appel, en retenant que l’absence de justification des ressources correspondant au train de vie constitué, selon les motifs du premier juge, de ces mêmes dépenses constituait par ailleurs le délit de non justification de ressources, a méconnu le principe ne bis in idem ;
2°/ qu’en ne précisant pas les éléments du train de vie distincts des dépenses au regard desquelles le prévenu a été déclaré coupable de recel, la cour d’appel s’est prononcée par des motifs qui ne permettent pas à la Cour de cassation d’exercer son contrôle quant au point de savoir si le prévenu n’a pas été condamné deux fois pour le même fait et n’a pas légalement justifié sa décision. »