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28 mai 2020
Cour de cassation
Pourvoi n°
19-14.932
CIV. 2
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 mai 2020
Rejet non spécialement motivé
M. PRÉTOT, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10291 F
Pourvoi n° Y 19-14.932
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2020
La caisse primaire centrale d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° Y 19-14.932 contre l’arrêt rendu le 8 février 2019 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (chambre 4-6), dans le litige l’opposant à M. R… P…, domicilié […] , pris en qualité de représentant légal de V… P…, enfant mineure née le […] , défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Fischer, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la caisse primaire centrale d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. P…, ès qualités, et l’avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l’audience publique du 4 mars 2020 où étaient présents M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Fischer, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vieillard, conseiller, et Mme Szirek, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la CPCAM des Bouches-du-Rhône aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la CPCAM des Bouches-du-Rhône et la condamne à payer à M. P…, ès qualités, la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille vingt, et signé par lui et Mme Vieillard, conseiller, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure publique, et par Mme Caratini, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la CPCAM des Bouches-du-Rhône.
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR infirmé la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse primaire centrale d’assurance maladie des Bouches du Rhône, d’AVOIR dit que le décès de Madame X… D… survenu le … est un accident du travail et que la Caisse primaire centrale d’assurance maladie des Bouches du Rhône devra en tirer toutes les conséquences et d’AVOIR condamné la Caisse primaire centrale d’assurance maladie des Bouches du Rhône à payer à Monsieur R… P…, agissant en qualité de représentant légal de sa fille mineure V… P…, la somme de 2.500 euros par application de l’article 700 du Code de procédure civile
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Les ayants droits soutiennent que lorsque l’accident a eu lieu, aucune mise à pied n’était effective et que le contrat de travail n’était pas suspendu. Selon eux, Madame D… avait été seulement, le jour même, interdite du site de la Française des Jeux, mais pas des autres sites sur lesquels elle travaillait et elle n’était donc pas dans une situation de mise à pied.
Il résulte du témoignage de Madame E…, secrétaire élue du CHSCT de l’entreprise ONET que le …, vers 11 heures, Madame X… D… l’a contactée et l’a informée de ce qu’elle venait d’être mise à pied pour trois jours par son responsable pour s’être servie d’un téléphone du client de la Française des Jeux.
Madame E… lui a alors proposé de venir à l’agence ONET de […] vers 15h30 pour obtenir des informations.
Dans le cadre de l’enquête administrative qui a fait suite au décès, * Monsieur I…, directeur de l’agence ONET, déclarait à propos de la chronologie des évènements du […] : ‘
Il y a eu un mail interne de la Française des Jeux et sécurité qui précisait que Madame D… n’aurait plus accès au site à compter du lendemain. Monsieur W… Y… J… a donc téléphoné à Madame D… pour lui […] la Française des Jeux, donc le lendemain, le temps qu’une enquête se poursuive. Madame D… a téléphoné à Madame E…, celle-ci lui a précisé qu’elle allait essayé d’avoir la direction et que si elle ne l’avait pas, ils iraient à l’agence l’après midi.
Sans avoir averti la direction, ils se sont rendus sur l’agence l’après midi mais la direction n’était pas présente.’
* Monsieur W… Y… J…, responsable d’exploitation déclarait :
‘J’ai reçu une communication téléphonique de la Française des Jeux me précisant que Madame D… ne devait pas se rendre sur le site le lendemain. J’ai averti le chef d’équipe de Madame D… pour qu’elle lui téléphone et lui dise de ne pas se rendre le lendemain sur son lieu de travail.
Madame D… m’a téléphoné, énervée, en me précisant qu’elle n’avait rien fait, je lui ai dit ne pas aller à la Française des Jeux jusqu’à nouvel ordre et je te rappelle ce soir.’
Il résulte ainsi des éléments factuels et concordants recueillis, que ni le responsable d’exploitation, ni le directeur de l’agence ONET n’ont parlé à Madame D… d’une quelconque mise à pied.
Enfin, d’après le compte rendu de la réunion du 2 mars 2010 organisée sur le site de la Française des Jeux pour retracer la chronologie des faits, Monsieur S…, responsable de la Française des Jeux explique qu’à 9h46 la société ONET a été informée de la décision suivante ‘exclusion temporaire du site de Madame D… le temps d’une enquête’ et qu’à 15heures, le jour même Monsieur S… a téléphoné à ONET pour dire que K… D… pouvait se présenter sur son lieu de travail à la Française des Jeux dès le 25 février au matin.’
Ces éléments confirment que Madame D… n’avait pas été ‘mise à pied’ par son employeur. Au surplus, il ressort d’une attestation rédigée par une collègue de travail, Madame C… H… qu’à cette époque là, Madame D… ne travaillait pas exclusivement sur le site de la Française des Jeux mais également sur le site du ‘cinéma de Marignane tous les jours sauf le mardi.’ Il en résulte qu’une interdiction de se présenter sur le seul site de la Française des Jeux ne saurait être analysée comme une mise à pied, quand bien même Madame D… l’aurait interprété de la sorte.
Le téléphone portable de Madame D… a reçu un appel le … à 15h33 de Madame CAZORLA ‘URGENT rappelez moi dès que vous pouvez.’
Monsieur P… déclarait ‘quand mon épouse est rentrée à la maison, elle m’a expliqué que la Française des Jeux l’accusait de s’être servie d’un téléphone. Elle était très contrariée car ce n’était pas la vérité. A midi elle m’a annoncé qu’elle devait se rendre chez son employeur. Je ne sais pas si c’est suite à un coup de téléphone.’
Il est incontestable, au regard de l’ensemble de ces témoignages, que Madame D… s’est rendue au siège de la société ONET de […], sur la suggestion de Madame E…, dans le seul but de tenter d’avoir des explication auprès de la direction, grâce à l’aide de la secrétaire du CHSTC, sur ce qui lui était reproché dans l’exécution de son contrat de travail, sur le site de la Française des Jeux.
Aussi, la venue de Madame D… dans les locaux de l’entreprise qui l’emploie, alors que le contrat de travail n’était pas suspendu et pour des raisons strictement professionnelles en rapport avec une difficulté survenue quelques heures plus tôt dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail, répondait bien à la nécessité d’éclaircir au plus vite avec l’employeur l’incident survenu dans le cadre de l’exécution de son travail sur le site de la Française des Jeux.
L’accident de Madame D… répond bien à la définition de l’accident du travail de l’article L.411-1 du code de la sécurité sociale.
La circonstance selon laquelle Madame D… ne répondait pas à une convocation de son employeur mais seulement à l’invitation d’une secrétaire du CHSTC pour rencontrer l’employeur au regard de ces circonstances, insuffisantes à renverser la présomption d’imputabilité de l’article .411-1 du code de la sécurité sociale.
La CPCAM ne démontre pas que l’accident mortel à une cause totalement étrangère au travail.
Son caractère professionnel est donc reconnu.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé et la CPCAM condamnée à verser la somme de 2500 euros à Monsieur P… en qualité de représentant légal de sa fille mineure V… P…, ayant droit de Madame D…. »
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Monsieur P… justifie par l’Accusé de Réception de la Lettre Recommandée reçue par la CPCAM le 28 juillet 2010 qu’elle a saisi la Commission de Recours Amiable moins de 2 mois après la notification de la décision de refus en date du 31 mai 2010;
que pour refuser le caractère professionnel de l’accident mortel dont a été victime Madame D… la caisse a estimé que celui-ci a eu lieu alors qu’elle n’était plus sous la subordination de son employeur ;
en fait, que l’accident a eu lieu à 15h45 alors que Madame D… travaillait sur le site de « la Française des Jeux » de 5 à 7h ;
cependant, que suite à une décision de son chef d’exploitation de la mettre à pied, Madame D… a contacté la secrétaire élue du CHSCT de cette entreprise, Madame O… E…, qui lui a proposé de venir à l’agence ONET de […] pour examiner cette situation compte tenu de son état d’énervement;
Que l’accident s’est produit alors qu’elle montait les escaliers de l’agence ;
Que le certificat médical du Docteur B… du 9 février 2010 est ainsi rédigé: « Je soussigné Docteur B… U…, Docteur en médecine, médecin anesthésiste réanimateur, certifie être intervenu le … à 16 heures pour un arrêt cardiaque sans prodomes sur Madame D… X…, née le […] à Marignane.
L’intervention se situait à la Société ONET, […] . Madame D… était venue à la société ONET pour explications avec sa direction suite à un différend qui a eu lieu le matin à la Société « la Française des Jeux » à […]. Madame D… a fait un arrêt cardia-circulatoire et respiratoire vers 15h40 sans prodomes, qui a entrainé une réanimation cardiopulmonaire pendant 60 minutes. Madame D… est décédée à 17h de mort naturelle, non traumatique. A l’interrogatoire, Madame D… ne présentait aucune pathologie et ne prenait aucun médicament. » ;
Qu’il ressort des éléments ainsi recueillis des présomptions favorables suffisantes pour retenir le caractère professionnel de l’accident ;
Qu’en effet, c’est bien dans le cadre de son activité professionnelle que Madame D… s’est rendue au siège de la Société ONET où s’est produit l’accident, et alors que la caisse ne démontre pas, sans le prétendre d’ailleurs, que la cause du décès aurait une cause totalement étrangère au travail ;
Que le recours de Monsieur P… sera accueilli et la décision de la CRA infirmée ;
Qu’en l’absence de justification qu’il a engagé des frais irrépétibles supérieurs à la somme de 800€ c’est cette somme qui lui sera allouée sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile. »
ALORS QUE ne constitue pas un accident du travail l’accident survenu à un salarié lorsque celui-ci ne se trouve plus sous la subordination de son employeur et cela quand bien même cet accident se produit lorsque ce salarié revient dans les locaux de l’entreprise pour y accomplir, de sa propre initiative, un acte qu’aucune injonction de son employeur ni la nécessité de son service ne lui imposent ; qu’en retenant le contraire pour condamner la Caisse primaire centrale d’assurance maladie des Bouches du Rhône a prendre en charge à titre professionnel le décès de X… D… survenu le … à un moment où elle retournait dans les locaux de son employeur pour rencontrer la secrétaire élue du CHSCT et discuter d’une difficulté surgie dans le cadre de l’exécution de son travail, la cour d’appel a violé par fausse application l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale.