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26 janvier 2022
Cour de cassation
Pourvoi n°
19-26.176
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 26 janvier 2022
Rejet non spécialement motivé
Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10080 F
Pourvoi n° V 19-26.176
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 26 JANVIER 2022
La société [W], dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 19-26.176 contre l’arrêt rendu le 28 novembre 2019 par la cour d’appel de Versailles (12e chambre), dans le litige l’opposant à la société La Française des jeux, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La société La Française des jeux a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bellino, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société [W], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société La Française des jeux, et l’avis de M. Douvreleur, avocat général, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s’ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l’audience publique du 30 novembre 2021 où étaient présents Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bellino, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, M. Douvreleur, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation du pourvoi principal annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
3. Il n’y a pas lieu de statuer sur le pourvoi incident éventuel.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi principal ;
Condamne la société [W] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [W] et la condamne à payer à la société La Française des Jeux la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société [W].
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir dit que la seule faute commise par la société La Française des Jeux consistait dans la violation de son obligation de désigner un cessionnaire, d’avoir dit que le préjudice subi par la société [W] s’élevait à la somme de 1.554.834,91 €, d’avoir constaté que la somme de 1.614.523,11 € avait déjà été versée par la société La Française des Jeux au profit de la société [W], d’avoir débouté la société [W] de sa demande en paiement de dommages et intérêts, et d’avoir rejeté les autres demandes de la société [W] ;
Aux motifs que « A titre liminaire, la cour, tenue par le seul dispositif des conclusions, rappelle qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes des parties tendant à « donner acte », « constater », « dire et juger », dans la mesure où elles ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile. (
) Il- Sur les fautes alléguées : (
) Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutés de bonne foi. Les parties s’accordent à considérer que le litige porte sur la mise en oeuvre des dispositions de l’article 10, amendé, du contrat intitulé “Cession du présent contrat” qui régit la procédure de cession et qui est ainsi libellé : “10.1 Le courtier mandataire souhaitant cesser son activité ou céder une partie de celle-ci doit en informer [FDJ] par courrier recommandé avec demande d’avis de réception, avec un préavis d’au moins trois mois et préciser la date souhaitée de la cessation de son activité. [FDJ] doit en informer immédiatement le GIE territorialement compétent qui dispose d’un mois pour proposer à [FDJ], en accord avec le courtier mandataire cédant, un ou plusieurs successeurs, personnes physiques représentant le nouveau courtier mandataire proposé. 10.2 …. 10.3 [modifié par l’avenant du 15 juillet 2003] Après trois refus successifs des candidats présentés, la Française des jeux doit, soit désigner elle-même un cessionnaire au courtier mandataire cédant, soit, si cette solution s’avère impossible, verser au courtier mandataire cédant une indemnité fixée, sous réserve des dispositions de l’article 10.4 ci-après, à une fois, soixante-cinq, la totalité des commissions du courtier mandataire au titre de l’année civile précédente, recalculé sur la base du taux de commission applicable à la date de la cessation d’activité, à savoir : montant des enjeux jeux en temps réel enregistré par les détaillants sur le territoire contractuel du courtier mandataire au titre de l’année N-1 x (taux de commission jeux temps réel en vigueur à la date de cessation d’activité du courtier mandataire cédant) x 1,65 + montant des enjeux jeux de grattage enregistré par les détaillants sur le territoire contractuel du courtier mandataire au titre de l’année N-1 (taux de commission jeux de grattage en vigueur à la date de cessation d’activité du courtier mandataire cédant) x 1.65. 10.4 Toutefois, le montant de l’indemnité ne peut excéder le prix le moins élevé proposé par le candidat cessionnaire présenté par le(s) courtier(s) mandataire(s) cédant(s) dont la candidature n’aura pas été agréée par [FDJ]. [FDJ] est alors libre de conclure un nouveau contrat avec le courtier mandataire de son choix.” – sur le caractère prétendument abusif du refus : (
) Un agrément, prévu contractuellement, peut, par nature, être refusé à condition de ne pas dégénérer en abus de droit. Les parties s’accordent à considérer que la procédure de cession est encadrée par les dispositions de l’article 10 du contrat ainsi que par celles de la lettre du 6 octobre 2003 définissant la politique commerciale de la FDJ à l’égard de ses courtiers mandataires. Des dispositions de l’article 10 du contrat, il se déduit que le courtier-mandataire exprimant le souhait de cesser son activité (soit volontairement, soit par limite d’âge) est autorisé à céder celle-ci. Pour ce faire, il doit proposer, par l’intermédiaire du GIE concerné, des cessionnaires dont la candidature est soumise à l’agrément de la FDJ. En cas de refus de trois propositions par la FDJ, celle-ci doit désigner un cessionnaire. En cas d’impossibilité, la FDJ doit verser l’indemnité contractuellement prévue (art.10.3). Les termes de la politique commerciale sont définis dans une note du 6 octobre 2003 qui présente les principes de sectorisation. “Ces principes doivent servir de cadre au courtage pour élaborer, en concertation avec les responsables régionaux, des propositions permettant d’homogénéiser et d’optimiser la carte de France des secteurs.”. Ces principes s’appuient, notamment, sur la valorisation du métier de courtier par une bonne connaissance de la zone économique supposant un nombre de détaillants maximum ainsi qu’une superficie maximale ; sur l’efficacité par une taille de secteur suffisante ; sur la simplification de l’organisation commerciale : un courtier une commune sauf dans les grandes villes, avec harmonisation des limites avec celles du département si possible ; sur l’homogénéisation des tailles de secteurs ; sur l’atteinte de taille de secteurs “cible”, notamment par rachat de secteurs limitrophes et par recours à la mobilité et répartition du secteur laissé vacant ; sur l’équité entre courtiers en prenant connaissance de l’ensemble des propositions en vue d’une mise en cohérence nationale avec examen en comité commercial, en privilégiant les courtiers présents ayant choisi de poursuivre leur activité et en ne retenant pas l’hypothèse de l’arrivée de nouveaux courtiers ; sur la faveur donnée à un meilleur découpage du territoire avec un chiffre d’affaires annuel maximal de l’ordre de 75 à 80 millions d’euros, un volume annuel de commissions de l’ordre de 1,2 millions d’euros et un nombre de points de vente de 650 à 700. La société [W] affirme que le refus de candidature par la FDJ serait systématique depuis 2010 et, plus particulièrement, depuis le 22 mai 2014 date de résiliation de l’ensemble des contrats de courtiers-mandataires, et ce afin de priver ceux-ci d’un prix de cession négocié de gré à gré et dans le but de reprendre directement l’activité à son compte. La seule production d’un graphique sur la baisse du nombre de courtiers mandataires entre 1994 et 2013 ne suffit pas à démontrer la volonté de la FDJ d’utiliser la procédure de cession à cette seule fin et notamment au cas d’espèce. Par ailleurs les refus de propositions étant intervenus les novembre et 14 décembre 2011, la résiliation générale du 22 mai 2014 ne peut pas être prise en considération. Le GIE Ile-de-France Ouest a proposé dans un premier temps la candidature de M. [P] [I] par lettre du 10 novembre 2011. Celle-ci précise que le candidat cessionnaire exerce la profession d’adjoint courtier jeux hasard” exerçant “depuis près de 16 ans une activité d’adjoint de courtier mandataire auprès de la société [W]”. La FDJ a refusé cette candidature au motif que “notre politique commerciale…, consiste à homogénéiser la taille des secteurs et à réduire leur nombre, de ce fait la candidature extérieure …. ne permet malheureusement pas de répondre à cet objectif” (lettre du 18 novembre 2011). Ainsi, le refus de la FDJ d’agréer la candidature de M. [P] [I] apparaît justifié au regard de la politique commerciale qui exclut l’arrivée de nouveaux courtiers, M. [P] [I] n’ayant pas la qualité de courtier mandataire en activité à la date du dépôt de sa candidature. Deux autres propositions ont été formulées chacune s’appuyant sur la cession de l’activité d’un autre courtier mandataire (secteur de Mme [B] et secteur de la société [W]) de sorte que les propositions ne pouvaient se comprendre et être mises en oeuvre indépendamment l’une de l’autre (lettre du GIE du 2 décembre 2011). L’une des propositions prévoyait la reprise du secteur de la société [W] par deux courtiers mandataires en exercice (M. [D] [K] reprenant les communes de [Localité 7], de [Localité 4] et de [Localité 8] pour un prix de 1.187.333 euros et M. [R] [K] pour les communes de [Localité 11], de [Localité 10], de [Localité 13], de [Localité 6], [Localité 5], de [Localité 3] pour un prix de 942.667 euros avec cession au profit de ce dernier par un autre courtier-mandataire M. [R] [H] du secteur dépendant des communes de [Localité 12] et de [Localité 9] pour un prix de 445.668 euros. M. [R] [H] étant candidat repreneur partiel du secteur de Mme [B]). L’autre proposition prévoyait une resectorisation conjointe des secteurs de la société [W] et de Mme [B] par reprise de ceux-ci par sept courtiers mandataires en activité. Par lettre du 14 décembre 2011, la FDJ a refusé ces deux propositions. Elle a fait valoir, s’agissant de la reprise du secteur de Mme [B] par Mme [O] et M. [R] et du secteur de la société [W] par MM. [K], que si cette proposition permet « un agrandissement de secteurs qui sont limitrophes à celui de Madame [B]. Néanmoins la cartographie proposée ne permet pas une extension suffisamment simple et homogène des secteurs. En outre cette resectorisation est complexe à mettre en oeuvre puisqu’elle entraîne cinq mouvements simultanés de secteurs”. S’agissant de l’autre proposition, la FDJ a motivé son refus en indiquant que : « cette proposition permet certes une extension de plusieurs secteurs du GIE mais elle s’avère complexe à mettre en oeuvre puisque sept secteurs sont concernés. En outre, cette resectorisation opère un éclatement entre sept courtiers mandataires, ce qui entraîne des ajustements à la marge des secteurs sans agrandissements majeurs. ». La FDJ, à l’invitation du GIE de reconsidérer sa position, précise (sa lettre du 23 décembre 2011) “il s’agit donc ici de faire reprendre un secteur libéré par un seul secteur limitrophe dans la mesure où cela est possible parce que cette opération permet d’assurer une meilleure cohérence de gestion entre les deux secteurs C’est pourquoi nous avons privilégié une solution de reprise d’un secteur par un autre secteur, par rapport à votre schéma qui fait intervenir “2 courtiers” pour le secteur de Madame [B] et “3 courtiers” pour le secteur de Madame [W]”. La politique commerciale définissant les principes de resectorisation a privilégié notamment la simplification de la lecture de l’organisation commerciale en insistant, en particulier, sur l’unicité du courtier par commune avec délimitation de secteurs correspondants aux limites départementales si possible de sorte que la proposition conduisant à remplacer un courtier mandataire par deux autres (Mme [O] et M. [R] pour le secteur de Mme [B], et MM [K] pour celui de la société [W]) ou par sept (resectorisation du GIE) dans le cadre d’une opération complexe impliquant la cession de deux secteurs avec cession partielle de secteur entre candidats, ne pouvait correspondre à la politique commerciale de simplification et de cohérence de l’organisation. Il n’est pas contesté par la FDJ que le projet de cession n’a ni fait l’objet d’une concertation entre les responsables régionaux et les GIE, ni d’un examen en comité commercial contrairement à ce que prévoyait la politique commerciale. Toutefois ce principe de concertation vise, selon cette même politique commerciale, à assurer une équité entre courtiers afin d’assurer une cohérence nationale. La société [W] ne rapporte pas la preuve que cette absence de concertation a eu pour conséquence une rupture d’égalité entre courtiers au cas d’espèce alors que la FDJ a écarté l’ensemble des candidatures des courtiers-mandataires au profit de l’une de ses filiales. De ce qui précède, il se déduit que la FDJ qui a refusé les propositions en se fondant sur la politique commerciale, dont les principes n’ont pas été contestés par la société [W] qui, au contraire, en a revendiqué l’application, n’a pas commis d’abus dans l’exercice de son droit d’agréer ou non les candidats à la reprise du secteur d’activité de la société [W]. Le jugement sera confirmé sur ce point. – Sur l’obligation pour la FDJ de désigner un cessionnaire : Selon le contrat, « Après trois refus successifs des candidats présentés, la Française des Jeux doit, soit désigner elle-même un cessionnaire au courtier mandataire cédant, soit, si cette solution s’avère impossible, verser au courtier mandataire cédant, une indemnité ….”. La désignation d’un cessionnaire au cédant permet à ce dernier de négocier de gré à gré le prix de cession qui peut se révéler plus avantageux que l’indemnité contractuelle prévue en cas d’impossibilité de désignation. Il appartient donc à la FDJ de rapporter la preuve que cette désignation était impossible. Des pièces versées aux débats, il convient de constater qu’après avoir refusé les candidatures par lettre des 18 novembre et 14 décembre 2011, la FDJ a notifié à la société [W], le 20 mars 2012, la cessation de son activité au 27 mai 2012 avec reprise de celle-ci par sa filiale, la société Garches Jeux Distribution. Par lettre du 3 mai 2012, la FDJ a informé la société [W] de ce qu’elle l’indemniserait conformément aux dispositions de l’article 10, lui communiquant un “contrat de résiliation”. La FDJ ne soutient pas avoir désigné, ni même recherché, un cessionnaire avant de procéder à la résiliation du contrat de la société [W]. Elle fait valoir qu’il lui était impossible de procéder à cette désignation compte tenu de la réorganisation, initiée depuis 2010 et toujours en cours, de son réseau de distribution devant conduire à la mise en place d’un nouveau protocole entre elle et les courtiers- mandataires (sa lettre du 27 juillet 2011). Or la FDJ ne peut justifier d’une impossibilité de respecter un engagement contractuel, déterminant pour son cocontractant, au seul motif d’une décision unilatérale de modifier sa propre politique commerciale, si nécessaire soit-elle à ses yeux et quand bien même elle en aurait informé la société [W], sauf à procéder à la résiliation de l’ensemble des contrats de courtiers mandataires, décision qu’elle ne prendra que le 22 mai 2014, la mise en place du protocole évoqué précédemment ayant échoué. La cour constate, en outre, que par lettre du 17 février 2012, la FDJ a pris acte du refus des courtiers mandataires d’adhérer à cette nouvelle politique commerciale par la signature de ce protocole, en précisant que « dès lors, nos relations ne sont pas modifiées, votre contrat de courtier mandataire continuant à s’appliquer dans toutes ses dispositions, dont celles de l’avenant de 2003 » ;
la cour observe, enfin, que l’argument d’une nouvelle réorganisation n’a pas été invoqué à l’appui du refus d’agrément, la FDJ ne se fondant que sur les principes de sa politique commerciale définie dans sa note du 6 octobre 2003, établie consécutivement à l’avenant contractuel du 15 juillet 2003. La FDJ ne rapporte pas la preuve d’une impossibilité de désigner un cessionnaire à la société [W]. Elle a donc commis une faute en procédant à la résiliation du contrat de courtier- mandataire sans avoir préalablement désigné un candidat cessionnaire alors qu’elle ne rapporte pas la preuve que cela lui était impossible. Le jugement sera infirmé sur ce point en ce qu’il a dit que la société d’économie mixte Française des jeux avait commis une faute en ne justifiant pas de son obligation contractuelle de rechercher un cessionnaire alors que la faute commise par la FDJ repose sur la violation de son obligation de désigner un cessionnaire et non de le rechercher » ;
Alors 1°) que la cour d’appel a constaté (arrêt attaqué, p. 14, dernier §) que la Française des Jeux ne contestait pas que les trois candidatures de reprise du secteur de la société [W] qui lui avaient été adressées n’avaient pas été débattues avec le GIE IDF Ouest dont dépendait la société et qu’elles n’avaient pas fait l’objet d’un examen en comité commercial, ainsi que le prévoyaient les principes de sectorisation mis en place en 2003 ; que la cour d’appel a toutefois retenu que ce principe de concertation « vise, selon cette même politique commerciale, à assurer une équité entre courtiers afin d’assurer une cohérence nationale » et a considéré que la société [W] ne rapportait pas la preuve « que cette absence de concertation a eu pour conséquence une rupture d’égalité entre courtiers au cas d’espèce alors que la FDJ a écarté l’ensemble des candidatures des courtiers-mandataires au profit de l’une de ses filiales » ; qu’en statuant ainsi, quand il résultait de ses propres constatations (arrêt, p. 14, 3ème et 4ème §) que la politique commerciale définie par la Française des Jeux avait également pour objet « d’homogénéiser et d’optimiser la carte de France des secteurs » et que les principes de sectorisation prévoyaient notamment « un nombre de détaillants maximum ainsi qu’une superficie maximale », ainsi que « la simplification de l’organisation commerciale : un courtier une commune sauf dans les grandes villes avec harmonisation des limites avec celles du département si possible ; sur l’homogénéisation des tailles de secteurs », « en privilégiant les courtiers présents ayant choisi de poursuivre leur activité et en ne retenant pas l’hypothèse de l’arrivée de nouveaux courtiers ; sur la faveur donnée à un meilleur découpage du territoire », de sorte que l’examen des candidatures présentées en concertation avec le GIE, et en comité commercial, aurait pu permettre de modifier ces candidatures afin de les mettre en conformité avec ces critères et d’obtenir l’agrément de la Française des Jeux, la cour d’appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur version applicable en l’espèce (nouveaux articles 1103, 1104 et 1231-1 du code civil) ;
Alors 2°) que tout contrat doit être exécuté de bonne foi ; qu’en l’espèce, la société [W] faisait valoir (ses conclusions d’appel, p. 19 ; p. 28 ) qu’ainsi qu’il résultait d’une note interne du 25 juin 2010 (« Autres principes importants : il ne peut y avoir de cessions de gré à gré »), la Française des Jeux avait décidé de ne plus accepter la moindre cession de gré à gré de contrat de courtier mandataire, afin de reprendre à son propre compte, notamment par le biais de filiales constituées à cet effet et exerçant pour certaines hors du statut de courtier-mandataire, l’exploitation du réseau de distribution des jeux de hasard auprès des détaillants ; qu’elle soulignait que la Française des Jeux n’avait accordé aucun agrément aux courtiers mandataires candidats à l’acquisition d’un secteur laissé vacant entre 2010 et 2013 et faisait ainsi valoir que la mise en oeuvre de la procédure de cession de son contrat de courtier mandataire, prévue à l’article 10 de la convention, était totalement artificielle et illusoire dans la mesure où la Française des Jeux avait d’ores et déjà décidé de ne pas autoriser de cession au profit d’un autre courtier-mandataire, quels que puissent être les mérites des candidatures qui lui seraient proposées, dans le but de s’approprier les secteurs laissés vacants par le biais d’entités créées par elle ; qu’en se bornant à retenir (arrêt, p. 12-13) que « la seule production d’un graphique sur la baisse du nombre de courtiers mandataires entre 1994 et 2013 ne suffit pas à démontrer la volonté de la FDJ d’utiliser la procédure de cession à cette seule fin et notamment au cas d’espèce » et que « par ailleurs les refus de propositions étant intervenus les 17 novembre et 14 décembre 2011, la résiliation générale du 22 mai 2014 ne peut pas être prise en considération », sans rechercher, au regard des autres éléments de preuve versés aux débats par la société [W] (cf. ses pièces 68 à 70 et 120), en particulier la note interne de la Française des Jeux du 25 juin 2010 manifestant la volonté de la Française des Jeux de ne plus donner son agrément aux cessions de contrats de courtier-mandataire, si la Française des Jeux, ayant en réalité décidé de refuser systématiquement toute cession de gré à gré des contrats de courtier-mandataire, n’avait pas mis en oeuvre de mauvaise foi la procédure contractuelle de cession, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur version applicable en l’espèce (nouveaux articles 1103, 1104 et 1231-1 du code civil) ;
Alors 3°) que la société [W] faisait valoir (ses conclusions d’appel, p. 28, 2ème §) que « la FDJ a systématiquement détourné la procédure de cession réglementée par l’article 10 du contrat de courtier mandataire de son objet, afin de satisfaire sa décision de refuser toute cession de contrats, prise en interne dès 2010 et confirmée en 2011 : « Plus de cessions de gré à gré » et « reprise des secteurs venant à échéance » » ; qu’au soutien de ce moyen, elle versait aux débats la note interne de la Française des Jeux du 25 juin 2010, aux termes de laquelle cette dernière manifestait sa volonté de (« Autres principes importants : il ne peut y avoir de cessions de gré à gré ») ; qu’en retenant que « la société [W] affirme que le refus de candidature par la FDJ serait systématique depuis 2010 et, plus particulièrement, depuis le 22 mai 2014 date de résiliation de l’ensemble des contrats de courtiers-mandataires » et que « la seule production d’un graphique sur la baisse du nombre de courtiers-mandataires entre 1994 et 2013 ne suffit pas à démontrer la volonté de la FDJ d’utiliser la procédure de cession à cette seule fin et notamment au cas d’espèce », quand la société [W] faisait valoir que la Française des Jeux avait entre 2010 et 2013 refusé de donner son agrément à toutes les cessions de gré à gré de contrats de courtiers-mandataires, cette volonté de la Française des Jeux étant établie par la note interne du 25 juin 2010 qu’il lui incombait d’analyser, la cour d’appel a dénaturé les conclusions d’appel de la société [W], violant ainsi l’article 4 du code de procédure civile ;
Alors 4°) enfin que les critères d’agrément d’un candidat à l’adhésion à un réseau de distribution doivent être objectifs et non-discriminatoires ; que la société [W] faisait valoir (ses conclusions d’appel, p. 35 ; p. 40-41) que l’invocation par la Française des Jeux des critères définis dans le cadre de sa politique commerciale (choix d’un cessionnaire exerçant dans un secteur limitrophe du secteur cédé, refus de candidatures de personnes ne disposant pas du statut de courtier mandataire, limite de chiffre d’affaires) ne constituait qu’un prétexte dès lors qu’à la suite du refus des candidatures présentées par le GIE, celle-ci avait résilié le contrat de la société [W], sans lui chercher un cessionnaire, puis directement confié le secteur concerné à l’une de ses filiales, la société Garches Jeux Distribution, laquelle ne répondait pas à l’ensemble des critères de sa propre politique de sectorisation, puisqu’elle n’avait pas la qualité de courtier-mandataire, qu’elle exerçait son activité dans plusieurs départements différents, et que son chiffre d’affaires était nettement supérieur au chiffre d’affaires maximal défini par la Française des Jeux dans ses principes de resectorisation ; qu’en jugeant que la Française des Jeux avait légitimement pu rejeter les candidatures de reprise du secteur exploité par la société [W], dans la mesure où celles-ci ne remplissaient pas les critères de sa politique commerciale, telle que définis dans les principes de resectorisation de 2003 (arrêt, p. 13 à 15), sans rechercher si en attribuant le secteur de la société [W] à l’une de ses filiales qui ne respectait pas elle-même ces critères, la Française des Jeux n’avait pas commis une faute dans la procédure de cession, en appliquant de manière discriminatoire les critères de politique commerciale dont elle se prévalait, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur version applicable en l’espèce (nouveaux articles 1103, 1104 et 1231-1 du code civil).
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir dit que le préjudice subi par la société [W] s’élevait à la somme de 1.554.834,91 €, d’avoir constaté que la somme de 1.614.523,11 € avait déjà été versée par la société La Française des Jeux au profit de la société [W], d’avoir débouté la société [W] de sa demande en paiement de dommages et intérêts, et d’avoir rejeté les autres demandes de la société [W] ;
Aux motifs que « Sur le préjudice : La FDJ ayant commis un manquement à son obligation contractuelle, il lui appartient de réparer l’éventuel préjudice directement consécutif à celui-ci sous réserve pour la société [W] d’en démontrer l’existence. ( ) Sur ce, Aux termes des articles 1142 et 1149 anciens du code civil, toute inexécution contractuelle se résout par l’allocation aux créanciers de dommages et intérêts qui sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé. La seule désignation d’un cessionnaire par la FDJ, à supposer que celle-ci ait respecté cette obligation, n’assurait pas la société [W] de sceller un accord de cession avec le cessionnaire présenté et d’obtenir un prix plus avantageux que la seule indemnité contractuelle, les candidatures proposées par la société [W] avec lesquelles elle avait signé un accord de cession, sous condition suspensive d’agrément, ayant été refusées légitimement par la FDJ. Il s’en déduit que l’appréciation du préjudice doit être conduite selon la règle de la perte de chance, définie comme la disparition actuelle et certaine d’une éventualité favorable, et non celle du gain manqué. L’indemnisation recherchée exclut toute demande à la hauteur de la totalité du gain manqué et doit se limiter à une somme correspondant à la seule chance perdue sans référence à l’indemnité contractuelle laquelle n’est applicable que lorsque la désignation d’un cessionnaire s’avère impossible ce qui n’est pas démontré au cas présent. En l’espèce, l’absence de toute désignation d’un cessionnaire par la FDJ conduit la cour à considérer que la perte de chance est actuelle et certaine, le bénéfice de la désignation, dont la société [W] a été privée, constituant une éventualité favorable à la cession de son contrat de courtier-mandataire. La cour estime que la probabilité de conclure un accord de cession avec le cessionnaire s’il avait été désigné par la FDJ, était élevée (70%) dans la mesure où la FDJ aurait présenté, sauf à être de mauvaise foi, un candidat conforme à sa politique commerciale d’alors, l’éventuelle difficulté à se conformer à celle-ci ne la dispensant pas de respecter son obligation de désignation. Toutefois, la cour ne considérera pas cette probabilité comme forte (90%) afin d’intégrer l’aléa de toute négociation commerciale et financière inhérent à la reprise d’une activité. Il appartient à la cour de déterminer l’assiette correspondant à la valeur de cession de l’activité sur laquelle doit s’appliquer ce pourcentage de 70%. La société [W] retient la valeur de l’entreprise (3 827 495,34€) alors que la FDJ expose que l’indemnisation à hauteur d’un coefficient de 1,65 fois les commissions de l’année précédente (conduisant à l’indemnité contractuelle déjà versée de 1.614.523,11 euros HT) est la seule applicable en l’espèce. La cour retiendra la méthode de valorisation par application d’un coefficient appliqué au montant des commissions encaissées l’année précédente, cette méthode ayant été convenue entre les parties. La cour ne retiendra cependant pas le coefficient de 1,65 qui ne s’applique que lorsque la FDJ rapporte la preuve de l’impossibilité de désigner un cessionnaire ce qui n’est pas le cas en l’espèce ainsi qu’il a été dit précédemment. Il convient de déterminer le coefficient applicable au montant de 978 499 € correspondant au montant des commissions encaissés l’année précédant la cession (2011) et qui n’est pas contesté. La cour retiendra un coefficient pondéré d’égal montant entre (i) les offres des candidatures présentées à la société [W] reflétant la particularité du marché local (lle de France Ouest) et (ii) la valeur des cessions sur l’ensemble du territoire reflétant la multiplicité des cessions au niveau national. S’agissant du premier élément, la cour retiendra les éléments chiffrés ayant présidé aux propositions de cession de l’activité de la société [W] comme correspondant davantage à la réalité de l’activité dont la cession était envisagée, la FDJ affirmant, sans le démontrer, qu’il s’agit de propositions relevant de la “mascarade”. La cour exclut toutefois la proposition de M. [P] [I] plus subjective compte tenu du lien de filiation. La cour ne s’appuiera pas sur les éléments chiffrés de la troisième offre (sectorisation du GIE) qui ne permet pas d’identifier le prix de cession pour le seul secteur de la société [W]. La cour écartera également toute référence à la valeur du fonds de commerce ou à un multiple d’une indemnité de rupture, proposée par la société [W], comme non pertinente s’agissant d’évaluer la seule perte de chance de cession du contrat de courtier-mandataire. Ainsi la cour retiendra un coefficient de 2,17 correspondant au rapport entre la proposition de MM. [K] de 2.130.000 euros et le montant des commissions retenues 978 499 € (2 130 000/978 499 = 2,17). S’agissant du second élément, le coefficient proposé par la FDJ, établi sur la période 1998 à 2002, ne peut être retenu car trop ancien au regard de la cession envisagée de 2012 alors qu’un inventaire des cessions entre 2003 et 2011 a été établi par la FDJ mais sans indication des valeurs (pièce107 société [W]). Le coefficient de 2,57 proposé par la société [W] correspondant aux offres d’achat formulées par les candidats repreneurs en 2012 pour les 13 secteurs qui se libéraient du fait du départ à la retraite de courtiers-mandataires pour une reprise directe du contrat, sera retenu. La cour retiendra également le coefficient de 2,18 pour les cessions intervenues pendant la même période sous forme d’acquisition d’actions qui sont significatives du mode de transmission du contrat puisqu’elles concernent six cessions sur quatorze. La FDJ considère ces offres comme fictives au motif que leur financement n’était pas assuré ce qu’elle ne prouve pas alors que cette condition ne figure pas au titre des conditions de dépôt d’une candidature. La cour retiendra le coefficient pondéré de 2,37 également pour ces deux coefficients (2,37= (2,57 x 0,5) + (2,18 x 0,5)). Ainsi le coefficient, pondéré de même valeur (0,5), sera fixé à 2,27 (2,17 x 0,5 + 2,37 x 0, 5). La valeur de la cession s’élève à 978 499 euros x 2,27 = 2.221.192,73 euros. La perte de chance est donc évaluée à 2.221 192,73 x 523,11 euros déjà effectué qui restera acquise à la société [W]. La société [W] n’a donc subi aucun préjudice. Le jugement sera infirmé sur ce point » ;
Alors 1°) que le préjudice résultant de la résiliation irrégulière d’un mandat d’intérêt commun consiste dans la perte du contrat en cause ; qu’en jugeant que le préjudice causé à la société [W] par la faute commise par la Française des Jeux pour ne pas avoir recherché de cessionnaire pour le secteur qu’il exploitait, après le rejet des candidatures de reprise proposées par le GIE IDF Ouest, s’analysait uniquement en une perte de chance de céder le contrat de courtier-mandataire au courtier repreneur choisi par la Française des Jeux, quand il résultait de ses constatations que cette dernière avait résilié de manière irrégulière le contrat dont était titulaire la société [W], en y mettant unilatéralement un terme sans avoir désigné de cessionnaire, de sorte que cette dernière devait être indemnisée à hauteur de la perte ainsi subie, la cour d’appel a violé les articles 1134 et 1147 (devenus 1103, 1104 et 1231-1) du code civil, ensemble les articles 1150 et 1151 (devenus 1231-3 et 1231-4) du même code, ensemble l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, et le principe de réparation intégrale du préjudice ;
Alors 2°) en tout état de cause, que le préjudice tenant à une perte de chance doit être évalué en déterminant la probabilité de survenance de l’événement favorable, ou de non-survenance de l’événement défavorable, si le fait générateur de responsabilité ne s’était pas produit ; qu’en l’espèce, après avoir retenu que le préjudice subi par la société [W] du fait de la faute commise par la Française des Jeux, pour ne pas avoir désigné un cessionnaire après le rejet des trois candidatures qui lui avaient été présentées par la GIE IDF Ouest, s’analysait en la perte de chance de bénéficier de la désignation d’un cessionnaire (arrêt, p. 17, 5ème §), qu’elle a évaluée à 70% (p. 17, 6ème §), la cour d’appel a évalué la perte de chance subie par la société [W] pour ne pas avoir pu céder son contrat à la somme de 2.221.192,73 x 0,70 = 1.554.834,91 € et a considéré que, dès lors que la société [W] avait perçu une indemnité de 1.614.523,11 € de la part de la Française des Jeux, elle n’avait subi aucun préjudice ; qu’en statuant de la sorte, quand le préjudice subi par la société [W] du fait de l’absence de désignation par la Française des Jeux d’un cessionnaire consistait dans la perte de chance, non pas seulement de céder son contrat au successeur qu’aurait dû désigner la Française des Jeux, mais de céder son contrat à un autre courtier-mandataire, pour un prix supérieur à l’indemnité de résiliation versée par la Française des Jeux, la cour d’appel a méconnu les articles 1134 et 1147 (devenus 1103, 1104 et 1231-1) du code civil, ensemble les articles 1150 et 1151 (devenus 1231-3 et 1231-4) du même code, et le principe de réparation intégrale du préjudice ;
Alors 3°) encore que le préjudice tenant à une perte de chance doit être évalué en déterminant la probabilité de survenance de l’événement favorable, ou de non-survenance de l’événement défavorable, si le fait générateur de responsabilité ne s’était pas produit ; qu’en l’espèce, après avoir retenu que le contrat de la société [W] pouvait être évalué à la somme de 2.221.192,73 € (arrêt, p. 19, 3ème §), la cour d’appel a évalué la perte de chance subie par la société [W] pour ne pas avoir pu céder son contrat à la somme de 2.221.192,73 x 0,70 = 1.554.834,91 € et a considéré que, dès lors que la société [W] avait perçu une indemnité de 1.614.523,11 € de la part de la Française des Jeux, elle n’avait subi aucun préjudice ; qu’en statuant ainsi, quand l’événement favorable dont la réalisation avait été empêchée par la faute commise par la Française des Jeux consistait dans la cession par la société [W] de son contrat à un repreneur, moyennant un prix supérieur au montant de l’indemnité de résiliation versée par la Française des Jeux, de sorte qu’il lui incombait de calculer le montant de ce préjudice en appliquant le pourcentage de perte de chance retenu (70%) à la différence entre le prix de marché du contrat de la société [W] et le montant de l’indemnité de résiliation payée par la Française des Jeux, non à la valeur retenue du contrat de la société [W], la cour d’appel a encore violé les articles 1134 et 1147 (devenus 1103, 1104 et 1231-1) du code civil, ensemble les articles 1150 et 1151 (devenus 1231-3 et 1231-4) du même code, et le principe de réparation intégrale du préjudice. Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société La Française des jeux.
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR dit que la faute commise par la société FDJ était caractérisée par la violation de son obligation de désigner un cessionnaire et D’AVOIR dit que le préjudice de la société [W] s’élevait à la somme de 1.554.834,91 €
AUX MOTIFS QUE
« – sur l’obligation pour la FDJ de désigner un cessionnaire
Selon le contrat “Après trois refus successifs des candidats présentés, la Française des jeux doit, soit désigner elle-même un cessionnaire au courtier mandataire cédant, soit, si cette solution s’avère impossible, verser au courtier mandataire cédant, une indemnité ….”.
La désignation d’un cessionnaire au cédant permet à ce dernier de négocier de gré à gré le prix de cession qui peut se révéler plus avantageux que l’indemnité contractuelle prévue en cas d’impossibilité de désignation.
Il appartient donc à la FDJ de rapporter la preuve que cette désignation était impossible.
Des pièces versées aux débats, il convient de constater qu’après avoir refusé les candidatures par lettre des 18 novembre et 14 décembre 2011, la FDJ a notifié à la société [W], le 20 mars 2012, la cessation de son activité au 27 mai 2012 avec reprise de celle-ci par sa filiale, la société Garches Jeux Distribution. Par lettre du 3 mai 2012, la FDJ a informé la société [W] de ce qu’elle l’indemniserait conformément aux dispositions de l’article 10, lui communiquant un “contrat de résiliation”.
La FDJ ne soutient pas avoir désigné, ni même recherché, un cessionnaire avant de procéder à la résiliation du contrat de la société [W]. Elle fait valoir qu’il lui était impossible de procéder à cette désignation compte tenu de la réorganisation, initiée depuis 2010 et toujours en cours, de son réseau de distribution devant conduire à la mise en place d’un nouveau protocole entre elle et les courtiers-mandataires (sa lettre du 27 juillet 2011).
Or la FDJ ne peut justifier d’une impossibilité de respecter un engagement contractuel, déterminant pour son cocontractant, au seul motif d’une décision unilatérale de modifier sa propre politique commerciale, si nécessaire soit-elle à ses yeux et quand bien même elle en aurait informé la société [W], sauf à procéder à la résiliation de l’ensemble des contrats de courtiers-mandataires, décision qu’elle ne prendra que le 22 mai 2014, la mise en place du protocole évoqué précédemment ayant échoué.
La cour constate, en outre, que par lettre du 17 février 2012, la FDJ a pris acte du refus des courtiers mandataires d’adhérer à cette nouvelle politique commerciale par la signature de ce protocole, en précisant que “dès lors, nos relations ne sont pas modifiées, votre contrat de courtier mandataire continuant à s’appliquer dans toutes ses dispositions, dont celles de l’avenant de 2003”.
La cour observe, enfin, que l’argument d’une nouvelle réorganisation n’a pas été invoqué à l’appui du refus d’agrément, la FDJ ne se fondant que sur les principes de sa politique commerciale définie dans sa note du 6 octobre 2003, établie consécutivement à l’avenant contractuel du 15 juillet 2003.
La FDJ ne rapporte pas la preuve d’une impossibilité de désigner un cessionnaire à la société [W]. Elle a donc commis une faute en procédant à la résiliation du contrat de courtier-mandataire sans avoir préalablement désigné un candidat cessionnaire alors qu’elle ne rapporte pas la preuve que cela lui était impossible.
Le jugement sera infirmé sur ce point en ce qu’il a dit que la société d’économie mixte Française des jeux avait commis une faute en ne justifiant pas de son obligation contractuelle de rechercher un cessionnaire alors que la faute commise par la FDJ repose sur la violation de son obligation de désigner un cessionnaire et non de le rechercher » ;
1°) ALORS QU’ un opérateur économique est libre de choisir le mode de distribution de ses produits et de modifier, dans le cadre de sa nouvelle politique commerciale, son réseau de distribution sans que ses cocontractants ne bénéficient d’un droit acquis au maintien de leur situation; qu’en retenant que la modification par la société FDJ de sa politique commerciale, aussi nécessaire soit-elle, ne pouvait justifier une impossibilité de respecter un engagement contractuel déterminant pour son cocontractant et la résiliation du contrat de courtier-mandataire de la société [W] moyennant l’indemnité contractuellement prévue, la cour d’appel a violé les articles 1134, 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les principes de liberté contractuelle et de liberté du commerce et de l’industrie ;
2°) ALORS QUE la société FDJ a fait valoir dans ses conclusions d’appel que l’un des objectifs fondamentaux des principes de resectorisation définis dans la note du 6 octobre 2003 était d’assurer la « pérennité » du courtage par la mise en place de « secteurs propres à assurer la viabilité du courtage à court et moyen terme », la gestion des resectorisations devant ainsi « contribuer à l’objectif de doter chaque courtier de la capacité optimale à mettre en oeuvre la politique commerciale de l’entreprise » ; que la société FDJ a expliqué que la réorganisation globale de son réseau de courtage entreprise pour répondre aux exigences de l’Etat d’en réduire les coûts impliquait une redéfinition des modalités de distribution ayant abouti, faute d’accord avec la profession sur la mise en place d’un nouveau mode de distribution, à la résiliation de la totalité des contrats de courtier mandataire en cours en 2014 si bien qu’au moment où la société Bertin a cessé son activité en juin 2012, il lui était impossible de garantir à un éventuel cessionnaire, conformément aux principes présidant à la resectorisation de son réseau, la pérennité et la viabilité d’un contrat de courtage acquis moyennant d’importants investissements financiers ; qu’en affirmant que la société FDJ ne rapportait pas la preuve d’une impossibilité de désigner un cessionnaire à la société [W] sans aucunement s’expliquer, comme elle était invitée à le faire, sur les conséquences, à court terme, de la réorganisation de son réseau sur la pérennité du contrat de courtier-mandataire qui aurait été cédé moyennant un lourd investissement financier pour le cessionnaire désigné, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les principes de liberté contractuelle et de liberté du commerce et de l’industrie ;
3°) ALORS QUE les juges doivent répondre aux conclusions opérantes dont ils sont saisis ; que dans ses conclusions d’appel (p.61 et 62), la société FDJ soutenait, preuve à l’appui, qu’outre la réorganisation de son réseau de distribution, l’impossibilité de désigner un cessionnaire était justifiée par l’absence de courtiers-mandataires répondant aux critères de resectorisation dans les secteurs limitrophes de celui de la société [W] ; qu’en s’abstenant de répondre à ces chefs déterminants des conclusions d’appel de la société FDJ, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile.