Jeux et Paris > Litiges : 23 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 19/02757

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Jeux et Paris > Litiges : 23 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 19/02757
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23 mars 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
19/02757

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 MARS 2023

N° RG 19/02757 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TJUS

AFFAIRE :

SAS ORACLE FRANCE

C/

[F] [W] épouse [L]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Juin 2019 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : 17/02346

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Flore ASSELINEAU de la SELAS ASSELINEAU & ASSOCIES

Me Marie-Cécile DE LA CHAPELLE de la SELARL DDLC

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SAS ORACLE FRANCE

N° SIRET : 335 092 318

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Flore ASSELINEAU de la SELAS ASSELINEAU & ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0563

APPELANTE

****************

Madame [F] [W] épouse [L]

née le 13 Juillet 1975 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Marie-Cécile DE LA CHAPELLE de la SELARL DDLC, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G393

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 01 Février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier en pré-affectation lors des débats : Madame Juliette DUPONT,

Greffier lors du prononcé : Madame Sophie RIVIERE

Par contrat de travail à durée indéterminée du 2 juin 2015, Madame [F] [L] a été engagée par la société Oracle en qualité d’ingénieur d’affaires, à compter du 15 juin 2015.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective Syntec.

Par courrier recommandé du 26 avril 2017, la société a convoqué la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 11 mai 2017.

Par courrier du 18 mai 2017, la société a notifié à Madame [L] son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Par requête du 6 septembre 2017 Madame [L] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre afin de contester la légitimité de son licenciement et d’obtenir le versement de diverses sommes.

Par jugement du 12 juin 2019, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil des prud’hommes de Nanterre a’:

Dit et jugé que licenciement pour insuffisance professionnelle de Madame [L] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence, condamne la société Oracle Franc à verser à Madame [L]:

* La somme de 34.000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l’articleL.l235-3 du code du travail.

* La somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamné la société Oracle France à verser à Madame [L] la somme de 942,36 euros (brut) à titre de rappel de commissions.

Débouté Madame [L] du surplus de ses demandes.

Débouté la société Oracle France de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Mis les dépens à la charge de la société Oracle France.

Par déclaration au greffe du 1er juillet 2019, la SAS Oracle interjetait appel limité à certains chefs du jugement rendu le 12 juin 2019.

Par conclusions n°1 remises au greffe et notifiées par Rpva le 28 août 2019, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la SAS Oracle France, appelante et intimée à titre incident demande à la cour de :

– Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que le licenciement pour insuffisance professionnelle de Madame [L] était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la Société Oracle à verser à la salariée la somme de 34.000 euros à titre dédommages et intérêts pour licenciement cause réelle et sérieuse, ainsi que la somme de1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau :

– Fixer le salaire mensuel brut de référence de Madame [L] à hauteur de11.246,36 euros,

– Dire et juger que le licenciement pour motif personnel notifié à Madame [L] est justifié et n’est pas abusif,

– Débouter en conséquence Madame [L] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

– Condamner Madame [L] à verser à la Société Oracle France la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner Madame [L] aux entiers dépens.

Par conclusions n°1 remises au greffe et notifiées par Rpva le 8 novembre 2019, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, Madame [L], intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de :

– Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre du 12 juin 2019 en ce qu’il a déclaré le licenciement de Madame [F] [L] dénué de cause réelle et sérieuse.

– Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre du 12 juin 2019 en ce qu’il a :

– limité le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 34.000 euros

– Débouté Madame [F] [L] de sa demande au titre du harcèlement moral.

Statuant à nouveau, condamner la société Oracle à verser à Madame [F] [L] les sommes suivantes :

– Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 86.112. euros nets (8 mois)

– Dommages et intérêts pour harcèlement moral: 53.820 euros nets,

– article 700 du code de procédure civile : 5.000 euros

Condamnation aux dépens.

Par conclusions n°2 remises au greffe et notifiées par Rpva le 29 avril 2020, la société Oracle France, appelante répondait à l’appel incident formé par Madame [L].

Par conclusions d’incident remises au greffe et notifiées par RPVA le 22 juin 2020, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, Madame [L], intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de déclarer irrecevables les conclusions n°2 de la société Oracle France pour la partie répondant à l’appel incident formé par Madame [F] [L].

Par une ordonnance d’incident du 24 novembre 2021, le magistrat chargé de la mise en état de la 15ème chambre sociale a déclaré irrecevables les conclusions n°2 de la société Oracle France prises le 29 avril 2020, en raison de l’expiration du délai de 3 mois prévus à l’article 910 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 4 janvier 2023.

SUR CE,

Sur l’exécution du contrat de travail’:

Madame [L] forme une demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Selon l’article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ;

Selon l’article L.1152-3 du même code, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ;

Vu les articles L1152-1 et L1254-1 du code du travail,

Il résulte de ces textes que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral ; dans l’affirmative, il appartient à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

En l’espèce, Madame [L] invoque le fait que son manager a adopté une attitude totalement inappropriée en mettant une pression exacerbée sur elle comme sur certains membres de l’équipe en la contrôlant étroitement, ce qui l’a conduit à se sentir dévalorisée ;

Pour étayer ses affirmations, elle produit notamment un courriel de Monsieur [D] du 4 décembre 2016 prévoyant de faire un point tous les jours avec elle à 10 heures et à 18 heures ; un courriel de Monsieur [D] du 16 février 2017 lui demandant de changer de place de travail en s’installant « sur le plateau acs sales afin que tu puisses être dans une dynamique collective et que nous puissions échanger en temps réel », une newsletter d’une représentante du personnel faisant état de critiques remontées par les commerciaux, ainsi que des pièces en lien avec sa situation de santé (attestation CPAM de paiement d’indemnités journalières en lien avec des « maladie » au cours de mars 2017 et mai 2017 et certificat d’un médecin généraliste du 7 mars 2019 faisant état de son « état de stress et d’anxiété très importants ») ;

Il est rappelé que le harcèlement moral ne se confond pas avec l’exercice du pouvoir général d’organisation de la direction de l’entreprise ni avec des tensions dans le travail quand bien même des conditions de travail peuvent être vécues comme tendues ou stressantes par le salarié et que le seul fait de donner des ordres et consignes, nonobstant l’autonomie dont un salarié bénéficie dans l’exercice de ses fonctions, ne caractérise pas un harcèlement moral ;

Si les courriels adressés par Monsieur [D] pouvaient recourir à un ton ferme et direct, ils ne font toutefois pas ressortir d’agressivité à l’encontre de la salariée, en ce compris le courriel du 1er mars 2017 qui s’inscrivait dans un rapport hiérarchique normal ;

Le fait que son manager demande à Madame [L] de rejoindre, comme les autres membres de l’équipe, le plateau des ingénieurs d’affaires, s’inscrivait lui-même dans le cadre d’une dynamique de travail collective au sein de l’équipe à vocation commerciale, sans remettre en cause la vocation de la salariée à assurer des rendez-vous client à l’extérieur pendant une autre partie de son temps de travail ;

De même les points quotidiens s’inscrivaient dans ce contexte de travail collectif et de contrôle hiérarchique par le responsable du service ;

Par ailleurs la newsletter d’une représentante du personnel fait état de critiques remontées par les commerciaux de manière générale et impersonnelle ;

L’unique certificat médical produit par Madame [L] émanant d’un médecin généraliste et daté du 7 mars 2019 soit près de 2 ans après la rupture du contrat de travail ne permet pas d’établir un lien avec ses énonciations sur l’état de santé de Madame [L] et ses conditions de travail ni, particulièrement, le comportement de son manager à son égard ;

En l’état des explications et des pièces fournies, la matérialité d’éléments de fait précis et concordants laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral n’est pas établie ;

La demande de dommages et intérêts relatives au harcèlement moral sera par conséquent rejetée ;

Le jugement est confirmé à cet égard ;

Sur la rupture du contrat de travail’:

Sur le licenciement

En application de l’article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ;

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ;

L’insuffisance professionnelle constitue un motif de licenciement dès lors qu’elle repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables au regard des responsabilités du salarié ;

En l’espèce, la société Oracle reproche à Madame [L] son insuffisance professionnelle, en développant les cinq reproches suivants dans la lettre de licenciement’: un manque d’autonomie et de réactivité dans l’exercice de ses fonctions, une absence totale de chasse, une méconnaissance des clients et de leur écosystème, un non-respect des politiques internes, un défaut de « back-up » à son départ en congés’;

S’agissant d’un manque d’autonomie et de réactivité, la demande initiale faite à la salariée de produire un plan prévisionnel de « chasse » a été formulée initialement le 14 décembre 2016, alors que Madame [L] partait en formation les 15 et 16 décembre 2016 et à l’approche des vacances de Noël ; l’appelante conteste à la fois que ce plan corresponde en un simple « reporting » tout en indiquant qu’il s’agissait finalement d’une simple mise à jour de données précédentes et non la création d’un nouveau document ; elle justifie de plusieurs relances ; le plan prévisionnel a été effectivement présenté le 1er février 2017 et sa première version transmise le 3 février 2017 ; la salariée est ensuite partie en congés ; une seconde version a été produite le 13 avril 2017, à la suite de demandes complémentaires du manager’et au lendemain de la relance de sa part du 12 avril 2017 ;

L’intimée justifie que les demandes se rapportant à ce plan sont aussi intervenues en phase de conclusion d’un important contrat avec le client Capgemini, des négociateurs venant d’Inde, qui a représenté une charge importante pour elle, ce que corrobore notamment ses courriels en date des 24 et 25 janvier 2017 et est de nature à expliquer, comme l’ont justement retenu les premiers juges, le retard dans la production du plan prévisionnel de « chasse » ;

A cet égard, il est avéré que le renouvellement du contrat avec Capgemini est intervenu dans le délai de l’échéance prévue au plan prévisionnel, et le fait que le directeur de Madame [L] ait rencontré le négociateur venu d’Inde ne saurait suffire à établir, comme allégué par l’appelant, que le directeur ait « sauvé » le chiffre d’affaires correspondant, étant d’ailleurs observé que la lettre de licenciement indique plutôt que son manager l’a alors « secondé[e] » ; au demeurant, la présence ponctuelle du directeur, utilement informé en urgence par Madame [L] de cette venue et des contraintes de rendez-vous de son interlocuteur, qui constituaient un élément nouveau, au regard de l’importance du contrat en cause et des circonstances de la négociation, n’apparaissent pas anormales et ne sauraient caractériser le manque d’autonomie et d’anticipation allégués ; l’intimée justifie au contraire avoir été félicitée par courriel de Monsieur [D] le 29 janvier 2017 lequel soulignait cette « belle victoire » et la « super relation avec l’acheteuse » ;

En ce qui concerne « l’absence totale de chasse » reprochée, il ressort des éléments produits aux débats que la salariée justifie cependant avoir entrepris sur la période litigieuse nombre d’actions de chasse et ouvert de nouveaux comptes clients ; si certains des courriels qu’elle produit se rapportent à l’année fiscale antérieure, d’autres concernent bien l’année FY 17 débutée en juin 2016, comme par exemple, ceux des 3 juin 2016, 14 juin 2016 ou 7 octobre 2016, et avec de nouveaux comptes ou entités clientes tels que, à titre d’ exemple, Sopra RH ou XPO ;

Au titre de la méconnaissance des clients et de leur écosystème reprochées, il est observé que l’employeur se réfère à un unique exemple relatif à l’envoi d’une convocation à un événement client adressée à l’ancien directeur des systèmes d’information DSI d’un client, ce qui s’expliquait toutefois par une réorganisation intervenue chez ce dernier, lequel n’avait pas alors encore nommé le nouveau DSI’en remplacement de celui ayant quitté ses fonctions ; Madame [L] indique qu’elle n’avait pas connaissance au moment de l’envoi des invitations du nom du nouveau DSI et justifie avoir ensuite communiqué le 3 février 2017 le nom du salarié assurant l’intérim chez le client ; cette simple erreur initiale est ainsi intervenue dans ce contexte particulier et est demeurée isolée ; elle ne caractérise pas une réelle insuffisance ou manquement de Madame [L] ;

La société Oracle reproche encore à la salariée un non-respect des politiques internes ;

A ce titre, elle justifie d’abord d’un simple et unique retard précis dans la transmission d’une note de frais de la salariée ;

Concernant le travail occasionnel à domicile (TOAE), la société Oracle se réfère à deux journées travaillées à domicile sans accord préalable de son manager, rappelant les règles internes prévues sur ce point et soulignant celle ; il ressort des échanges de courriels produits aux débats que le manager a néanmoins été informé dans l’après-midi du 6 janvier 2017 par Madame [L] de son travail à domicile au regard de problèmes de santé de sa fille, étant souligné qu’il est constant en outre que la situation d’un enfant malade faisait partie des cas exceptionnels de recours au TOAE, et qu’un rendez-vous client avait lieu pour une partie de la journée de TOAD du 1er mars 2017, à l’issu duquel la salariée a poursuivi son travail les quelques heures restantes depuis chez elle ; il convient de tenir compte de ces circonstances et les premiers juges ont justement retenu que là encore ces deux événements apparaissent isolés, d’autant plus que Madame [L], ingénieur d’affaires et cadre en forfait jours, devait normalement jouir d’une certaine autonomie dans l’organisation de son travail ;

En ce qui concerne enfin le reproche de défaut de « back-up » au départ en congés, si la société Oracle se réfère aux congés pris par la salariée du 6 au 10 février 2017 et à une situation de « risque » relativement à des contrats avec la Française des Jeux et la Banque de France, il demeure qu’elle ne justifie pas d’un préjudice effectif, étant d’ailleurs observé à cet égard que Madame [L] justifie que dans son précédant courriel du 22 décembre 2016 elle avait fourni des informations sur ces deux mêmes clients et précisé alors le nom de son « back-up » chez Oracle travaillant sur ces dossiers ;

La lettre de licenciement ajoute in fine que « votre manque d’autonomie et de chasse vous ont conduit à un résultat nettement au-dessous de la moyenne d’atteinte des objectifs de l’ensemble de l’équipe », mentionnant en particulier « une décroissance de 30% de votre objectif annuel » ;

L’appelante produit aux débats le plan de commissionnement personnalisé FY 17 comprenant les objectifs assignés à la salariée ainsi qu’un tableau synthétisant les résultats de l’équipe de Monsieur [D] pour la même année fiscale ;

Au cours de cette année fiscale, Madame [L] a réalisé un chiffre d’affaires de 2 516 000 euros, correspondant à 74 % de ses objectifs ;

La moyenne des membres de l’équipe n’ a elle-même pas atteint 100% de ses objectifs pour cet exercice (96%), avec un chiffre d’affaires inférieur de près de 10 % à l’année précédente (-9%) ; Madame [L], dont le chiffre d’affaires a baissé de 28% par rapport à son propre chiffre au titre de l’exercice 2016, se situait cette année là à la 4ème place parmi les 6 membres de l’équipe figurant sur le tableau de synthèse, après s’être située au 2ème rang sur 6 au cours de l’exercice précédent’; la lettre de licenciement mentionne que l’année fiscale 2017 s’est inscrite « dans un contexte business difficile » ;

La société Oracle rappelle elle-même que l’objectif de Madame [L] avait été revu à la hausse pour l’exercice 2017 compte tenu des bonnes performances de la salariée au titre de l’année fiscale précédente ;

Il ressort de fait de l’entretien annuel d’évaluation de la salariée daté du 29 juin 2016 qu’il comprenait des commentaires élogieux et mentionnait en particulier que les objectifs qui lui étaient assignés sur la période du 15 juin 2015 au 31 mai 2016 avaient donné lieu à des évaluations « objectifs atteints » ou « objectifs dépassés » ; il donnait lieu à une notation de 3 correspondant à des « attentes pleinement satisfaites » ;

Il convient de tenir compte de cette base de référence, résultant de la qualité de son travail ;

Au demeurant, Madame [L] relève à juste titre que la procédure envisagée de licenciement a été initiée par un courrier recommandé du 26 avril 2017 de convocation de la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement tandis que ses objectifs annuels couvraient la période du 1er juin 2016 au 31 mai 2017 non encore parvenue à son terme ;

Par ailleurs, il n’est pas justifié d’avertissement ou d’alerte formelles précédant la sanction du licenciement ;

Compte tenu de ces éléments, la cour estime que les reproches formulés, qui ne sont établis que très partiellement et dans des circonstances ponctuelles’ne caractérisent pas une insuffisance professionnelle susceptible de justifier une sanction à hauteur d’un licenciement ;

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a dit que le licenciement de Madame [L] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Sur les conséquences financières

S’agissant de l’indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, Madame [L] qui, à la date du licenciement, comptait moins de deux ans d’ancienneté dans l’entreprise a droit, en application de l’article L. 1235-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, à une indemnité correspondant au préjudice subi ;

Compte-tenu de son âge au moment du licenciement, de son ancienneté de presque deux ans dans l’entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi eu égard à son expérience professionnelle, les premiers juges ont fait une exacte appréciation de la situation en estimant que son préjudice serait réparé par l’allocation de la somme de 34 000 euros ; le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur les autres demandes

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens d’appel seront mis à la charge de la société Oracle ;

La demande formée par Madame [L] au titre des frais irrépétibles en cause d’appel sera accueillie, à hauteur de 2 000 euros ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme, dans les limites de l’appel, le jugement entrepris,

Condamne la SAS Oracle France aux dépens d’appel,

Condamne la SAS Oracle France à payer à Madame [F] [L] la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


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