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21 octobre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n°
19-14.203
SOC.
SG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 octobre 2020
Rejet non spécialement motivé
M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10842 F
Pourvoi n° F 19-14.203
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 OCTOBRE 2020
La société Erige sécurité, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° F 19-14.203 contre l’arrêt rendu le 24 janvier 2019 par la cour d’appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. D… R…, domicilié […] ,
2°/ à Pôle emploi, dont le siège est […] ,
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations écrites de Me Le Prado, avocat de la société Erige sécurité, après débats en l’audience publique du 9 septembre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, M. Rouchayrole, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Erige sécurité aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Erige sécurité ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Erige sécurité
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué :
D’AVOIR requalifié en temps complet le contrat de travail de M. R… signé le 29 juillet 2005 avec la société Erige Sécurité et en conséquence, condamné cette dernière à lui verser les sommes de 14 385,85 euros le rappel de salaire sur requalification, outre 1 438,58 euros au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE « M. R… reproche au contrat de travail de n’avoir pas mentionné ses horaires de travail alors qu’il était embauché pour réaliser 115 heures par mois et que des heures complémentaires pouvaient être effectuées, aucune répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois n’était mentionnée et au contraire, il lui était demandé de n’être lié à aucune société et avoir quitté son précédent emploi libre de tout engagement. La SARL Erige Sécurité expose que la méconnaissance des dispositions relatives à la répartition de la durée du travail n’entraîne pas automatiquement la requalification en temps plein puisqu’elle justifie que le salarié connaissait par avance ses heures de travail et ne se tenait pas en permanence à sa disposition et verse pour en justifier les plannings établis pour M. R… entre mars 2006 et décembre 2008 tandis que le salarié produit les dits plannings pour les mois de février à avril 2009. La cour relève qu’effectivement le contrat de travail signé le 12 juillet 2005 par les parties est muet sur les horaires de travail de M. R… qui était embauché à temps partiel alors que l’article L. 3123-14 prévoit que le contrat de travail doit mentionner la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; à défaut de justifier que le salarié connaissait ses horaires de travail plus de 7 jours à l’avance et pouvait refuser certaines missions, puisque les plannings de juillet 2005 à février 2006 ne sont pas versés, pas plus que celui de janvier 2009 et que contrairement à ce que prétend la SARL Erige Sécurité, lorsque M. R… lui donnait ses disponibilités (pièces 11 ou 14 par exemple), celle-ci ne respectait pas ses demandes et lui notifiait des horaires différents aux disponibilités annoncées et alors que l’employeur avait introduit dans le contrat de travail la mention selon laquelle le salarié n’était lié à aucun autre employeur, et que chaque mois le salarié accomplissait un nombre d’heures de travail différent du précédent, ces éléments conduisent la cour à constater que le salarié était placé dans l’impossibilité de connaître à l’avance à quel rythme il devait travailler; il devait en conséquence se tenir constamment à la disposition de son employeur, de sorte qu’il convient de faire droit à la demande de requalification. En conséquence, compte tenu du montant du salaire horaire de M. R…, la cour condamne la SARL Erige Sécurité à lui régler la somme de 14 385,85 euros outre les congés payés y afférents sur la période de travail exécutée. Il convient d’ordonner à la SARL Erige Sécurité de remettre à M. R… dans le mois du prononcé de l’arrêt, un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées » ;
ALORS QUE le non-respect du délai de prévenance prévu par l’article L. 3123-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige aux termes duquel toute modification de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois est notifiée au salarié sept jours au moins avant la date à laquelle elle doit avoir lieu, n’entraîne pas automatiquement la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein et que seul le constat effectif d’une variation constante des horaires de travail permet une telle requalification ; que pour requalifier le contrat de travail à temps partiel du salarié en contrat de travail à temps plein, la cour d’appel s’est bornée à relever que l’employeur n’avait pas respecté le délai de prévenance de sept jours et que le contrat de travail prévoyait que chaque mois le salarié accomplirait un nombre différent d’heures de travail; qu’en statuant ainsi, sans constater une variation effective constante des horaires du salarié et alors que le non-respect du délai de prévenance ne pouvait pas entrainer, à lui seul, la requalification de la relation de travail, la cour d’appel a violé les articles L. 3123-1 et L. 3123-6 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué :
D’AVOIR dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement et, en conséquence, condamné la société Erige Sécurité à verser au salarié les sommes de 1 672,91 euros à titre de rappel d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents et de 8 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ordonné le remboursement par l’employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage ;
AUX MOTIFS QUE « le 15 mai 2009, la SARL Erige Sécurité licenciait M. R… pour cause réelle et sérieuse pour avoir, dans la nuit du 2 au 3 mars 2009, dormi sur son lieu de travail, tout comme lors de sa vacation du 5 mars 2009, tandis que les 22 et 28 avril 2009, elle lui reproche d’avoir pris ses services avec 30 mn de retard. Elle lui reproche encore d’avoir été en absence injustifiée le 3 mai 2009 de sorte qu’elle l’a convoqué à un entretien préalable fixé au 12 mai 2009. Le salarié ayant exposé qu’il n’avait pas reçu dans les temps la lettre de convocation, l’employeur a accepté le 15 mai de repousser le rendez-vous au 25 mai en lui notifiant, par remise en main propre, le courrier de convocation le mettant de plus à pied de façon conservatoire.
Enfin, comme il avait refusé ladite remise, l’employeur annulait la convocation pour le 25 mai 2009 et lui notifiait sur le champ son licenciement. M. R… reproche à l’employeur de motiver son licenciement sur des faits qui ont déjà été sanctionnés préalablement, à savoir un avertissement le 19 mars 2009 pour les faits du 2 et 5 mars 2009, un avertissement le 27 avril 2009 pour les faits du 22 avril 2009 et un avertissement le 28 avril 2009 pour les faits du 28 avril 2009. En effet, l’employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire par l’envoi des avertissements sur ces différents faits et ne peut que rappeler les différentes procédures, sans pouvoir notifier une autre sanction plus lourde pour ces faits déjà sanctionnés. Seuls restent alors les faits des 3 et 15 mai 2009. Faits du 3 mai 2009 : la SARL Erige Sécurité ne verse aucune pièce probante venant corroborer l’absence de M. R… ce jour-là alors même que l’agent chargé de sa formation le 4 mai 2009 n’en parle pas (pièce 10 de l’employeur)
et que le planning de travail de M. R… n’est pas versé aux débats pour le mois de mai 2009. Dès lors, cette faute n’est pas démontrée. faits du 15 mai 2009 : la SARL Erige Sécurité reproche à M. R… son comportement consistant en son refus de recevoir en main propre la convocation à l’entretien préalable devant avoir lieu le 25 mai 2009 contenant sa mise à pied conservatoire jusqu’à cette date et donc son refus de quitter le site de la Française des jeux de Boulogne-Billancourt où il devait accomplir sa vacation de sécurité. L’employeur verse le compte-rendu rédigé par M. Q…, responsable d’exploitation, qui relate des faits commis le samedi 16 mai 2009, donc différents de ceux mentionnés dans la lettre de licenciement du 15 mai 2009 et qui ne peuvent être pris en considération. Il verse alors le compte rendu rédigé par M. B…, responsable du service exploitation, qui expose que le 15 mai 2009, peu avant sa prise de service à 7h du matin, M. R… a refusé de prendre le courrier de convocation à un entretien avec la direction prévu pour le 25 mai suivant que voulait lui remettre M. B…, son supérieur, et qu’il a refusé de quitter son poste de travail comme le lui demandait le dit supérieur ; or, si la remise en main propre n’est pas une obligation, le salarié verse en pièce 27 ladite convocation datée du 14 mai 2009 dont il est mentionnée qu’elle est envoyée en L.R.A.R au salarié et ainsi, l’employeur ne justifie pas de la nécessité d’obtenir la signature de M. R… dès le 15 mai 2009 à sa prise de service à 7h du matin sur la dite convocation et sa mise à pied avant même d’avoir reçu la lettre recommandée avec accusé de réception de notification de la mesure conservatoire; de ce fait, la faute unique reprochée au salarié n’est pas suffisamment sérieuse pour justifier son licenciement sur le champ et avant tout entretien préalable; la cour en conclut que le licenciement de M. R… est sans cause réelle et sérieuse. Compte tenu de cet élément, et en application de l’article L. 1235-2 du code du travail, il convient de débouter M. R… de sa demande d’indemnité pour irrégularité de procédure. sur le rappel de l’indemnité de préavis : compte tenu du salaire mensuel moyen de M. R… en raison de la requalification du contrat de travail en temps complet, et vu la convention collective qui fixe ledit préavis à 2 mois de salaire, il convient de condamner la SARL Erige Sécurité à lui verser un complément d’indemnité d’un montant de 1 672,91 euros outre les congés payés y afférents. Sur la réparation du licenciement sans cause réelle et sérieuse : alors que M. R… était âgé de 30 ans lors de la rupture et percevait un salaire mensuel moyen de 1 415,08 euros, il avait 4 ans d’ancienneté dans l’entreprise, il ne donne à la cour aucun renseignement concernant sa situation personnelle et professionnelle à la suite de cette rupture, de sorte que la cour évalue son préjudice à la somme de 8 500 euros. En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de six mois d’indemnités ; Il convient d’ordonner à la SARL Erige Sécurité de remettre à M. R… dans le mois du prononcé de l’arrêt, une attestation Pôle emploi rectifiée » ;
1.ALORS QUE si en principe un même fait fautif ne peut être doublement sanctionné par l’employeur, la réitération par le salarié de son comportement fautif permet à l’employeur de se prévaloir de faits déjà sanctionnés ; que la cour d’appel a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse en refusant de prendre en compte les faits du 2 et 5 mars 2009, du 22 et du 28 avril 2009 aux motifs que ces faits avaient été sanctionnés par trois avertissements et en considérant que la faute unique commise par le salarié n’était pas suffisamment sérieuse pour justifier un licenciement ; qu’en statuant ainsi, alors qu’elle constatait que l’employeur reprochait au salarié d’avoir persisté dans son comportement fautif les 3 et 15 mai 2009, ce dont il résultait qu’il était fondé à se prévaloir, à l’appui du licenciement, de faits antérieurs déjà sanctionnés, la cour d’appel a violé l’article L. 1331-1 du code du travail et l’article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction en vigueur ;
2. ALORS, en toute hypothèse, QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige et que le juge a l’obligation d’examiner tous les griefs invoqués par l’employeur dans la lettre de licenciement ; que pour juger le licenciement abusif, la cour d’appel a considéré que la faute unique reprochée au salarié tirée de son refus de prendre en main propre la lettre de convocation à un nouvel entretien préalable à son éventuel licenciement et de quitter les lieux n’était pas suffisamment sérieuse ; que cependant, dans la lettre de licenciement, l’employeur reprochait également au salarié d’avoir eu le 15 mai 2009, une « attitude provocante, insolente voire insultante » à l’égard de ses supérieurs hiérarchiques et du délégué syndical de l’entreprise, obligés de se déplacer sur les lieux pour tenter de le calmer et le fait que le client de l’entreprise menaçait de lui retirer le contrat de prestations conclu en raison du comportement du salarié, griefs précis et matériellement vérifiables qu’il appartenait à la cour d’appel d’analyser; qu’en s’abstenant de le faire, la cour d’appel a violé l’article L 1232-6 du code du travail dans sa rédaction en vigueur.