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13 juillet 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
21/05749
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE – SECTION B
————————–
ARRÊT DU : 13 juillet 2023
PRUD’HOMMES
N° RG 21/05749 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-MLZK
S.A.S. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT COMMERCIAL BORDELAISE
c/
Monsieur [K] [M]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée aux avocats le :
à :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 septembre 2021 (R.G. n°F20/01131) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section activités diverses, suivant déclaration d’appel du 19 octobre 2021.
APPELANTE :
S.A.S. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT COMMERCIAL BORDELAISE agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 1]
Représentée par Me GAUTHIER substituant Me Alain LAWLESS de la SELARL ART LEYES, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉ :
[K] [M]
né le 09 Août 1963 à [Localité 3]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]
Représenté par Me LEBBE substituant Me Laëtitia SCHOUARTZ de la SELARL SCHOUARTZ AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 05 avril 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Eric Veyssière, président,
Madame Sophie Lésineau, conseillère,
Madame Cybèle Ordoqui, conseillère,
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Mme Sylvaine Déchamps,
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
Le délibéré a été prorogé en raison de la charge de travail de la Cour.
EXPOSE DU LITIGE
M. [T] a engagé M. [M], en qualité d’attaché commercial, par un contrat de travail à durée indéterminée en date du 1er juillet 2000.
Le 3 octobre 2016, le contrat de travail de M. [M] a été transféré à la société de Développement Commercial Bordelaise.
A compter du 14 juin 2018, M. [M] a fait l’objet d’un arrêt de maladie pour dépression sévère et burn out.
Le 16 mars 2020, le médecin du travail a déclaré M. [M] inapte et a précisé que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
Le 27 mars 2020, la société de Développement Commercial Bordelaise a informé M. [M] de l’impossibilité de le reclasser.
Par courrier en date du 30 mars 2020, la société de Développement Commercial Bordelaise a convoqué M. [M] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 9 avril 2020 reporté au 24 avril 2020.
Le 28 avril 2020, M. [M] a été licencié pour inaptitude d’origine non professionnelle.
Le 4 août 2020, M. [M] a saisi le conseil de prud’hommes de Bordeaux aux fins de :
– voir juger que son licenciement est nul et de nul effet et, à titre subsidiaire, sans cause réelle et sérieuse,
– voir juger que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité,
– voir condamner la société de Développement Commercial Bordelaise au paiement de diverses sommes :
– à titre de dommages intérêts pour licenciement nul et, à titre subsidiaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents,
– au titre du solde de l’indemnité spéciale de licenciement,
– à titre de dommages intérêts pour réparation du préjudice subi,
– au titre du solde de l’indemnité de congés payés,
– sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, y compris ceux d’exécution,
– voir prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir dans sa totalité.
Par demande reconventionnelle, la société de Développement Commercial Bordelaise a sollicité du conseil de prud’hommes qu’il condamne M. [M] au paiement de diverses sommes au titre du remboursement de l’avance sur frais datant du 4 octobre 2016 et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 17 septembre 2021, le conseil de prud’hommes de Bordeaux a :
– dit que le licenciement de M. [M] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– dit que la société de Développement Commercial Bordelaise, prise en son représentant légal, à verser à M. [M] les sommes suivantes :
– 33 658,25 euros à titre d’indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 4 343 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 434,30 euros bruts de congés payés y afférents,
– 11 309,90 euros à titre de solde de l’indemnité spéciale de licenciement,
– 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire d’une partie des condamnations à hauteur de 15 500 euros,
– mis la totalité des dépens à la charge du défendeur, ainsi que les éventuels frais d’huissier en cas d’exécution forcée par voie extrajudiciaire,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes et demandes reconventionnelles.
Par déclaration du 19 octobre 2021, la société de Développement Commercial Bordelaise a relevé appel du jugement.
Par ses dernières conclusions enregistrées le 28 février 2023, la société de Développement Commercial Bordelaise sollicite de la Cour qu’elle :
– juge recevable et fondé l’appel qu’elle a diligenté,
– juge à titre principal que le licenciement de M. [M] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
– juge que la société de Développement Commercial Bordelaise n’a pas manqué à son obligation de sécurité et de santé,
– juge que l’inaptitude de M. [M] est d’origine non professionnelle,
En conséquence,
– infirme le jugement déféré en ce qu’il a :
– dit que le licenciement de M. [M] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– dit que la société de Développement Commercial Bordelaise avait manqué à son obligation de sécurité,
– condamné la société de Développement Commercial Bordelaise à verser à M. [M] :
– 33 658,25 euros brut au titre d’indemnités de licenciement pour la rupture sans cause réelle et sérieuse,
– 4 343 euros brut au titre d’indemnités compensatrices de préavis,
– 434.2 euros brut au titre d’indemnités compensatrices de congés payés,
– 11 309.90 euros au titre de solde de l’indemnité spéciale de licenciement,
– 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– confirme pour le surplus le jugement déféré,
– ordonne la confirmation du rejet de l’ensemble des demandes de M. [M] de dommages et intérêts au titre du préjudice subi,
– le déboute de ses demandes incidentes,
– condamne M. [M] aux entiers dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions enregistrées le 6 mars 2023, M. [M] demande à la Cour de :
– juger recevable mais mal fondé l’appel interjeté par la société de Développement Commercial Bordelaise à l’encontre du jugement déféré
En conséquence,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
– jugé que le licenciement de M. [M] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– jugé que la société de Développement Commercial Bordelaise avait manqué à son obligation de sécurité,
– condamné la société à lui verser une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents, au solde de l’indemnité spéciale de licenciement ainsi qu’à l’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens,
Sur appel incident,
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté M. [M] de sa demande de dommages intérêts pour réparation du préjudice subi et augmenter le quantum des dommages intérêts pour licenciement abusif,
– si par extraordinaire la cour d’appel ne devait pas confirmer le caractère abusif du licenciement de M. [M], réformer le jugement rendu en ce qu`il a débouté M. [M] de sa demande de nullité du licenciement,
En conséquence,
A titre principal,
– juger que ce licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
– condamner la société de Développement Commercial Bordelaise à lui verser 43 430 euros au titre des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
A titre subsidiaire,
– juger que le licenciement de M. [M] est nul et de nul effet,
– condamner de Développement Commercial Bordelaise à lui verser 43 430 euros au titre des dommages intérêts pour licenciement nul,
En tout état de cause
– juger que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité,
En conséquence,
– condamner la société de Développement Commercial Bordelaise à lui verser les sommes suivantes :
– 4 343 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
– 434,30 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférente,
– 11 309,90 euros au titre du solde de l’indemnité spéciale de licenciement,
– 10 000 euros au titre des dommages intérêts pour réparation du préjudice subi,
– 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens et frais éventuels d’exécution.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.
L’affaire a été fixée au 5 avril pour être plaidée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’exécution du contrat de travail
Sur l’obligation de sécurité
L’employeur est tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dont il lui appartient d’assurer l’effectivité. Cette obligation lui impose de prendre toutes les mesures de prévention visées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, mais également toutes les mesures propres à faire cesser les agissements mettant en péril la santé ou la sécurité des salariés.
Aux termes de l’article L.6321-1 du code du travail l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail.
Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.
Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme, notamment des actions d’évaluation et de formation permettant l’accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.
Les actions de formations mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de développement des compétences mentionné au 1° de l’article L. 6321-1. Elles peuvent permettre d’obtenir une partie identifiée de certification professionnelle, classée au sein du répertoire national des certifications professionnelles et visant à l’acquisition d’un bloc de compétences.
Au soutien de ses prétentions la société de développement commercial Bordelaise fait valoir, en substance, que M. [U] a agi dans le cadre de son pouvoir de direction et est un professionnel reconnu par la Française des jeux, les salariés et les clients.
Elle ajoute que le salarié ne démontre pas que des faits susceptibles d’altérer sa santé se soient déroulés au sein de la société ni que le management au sein de l’entreprise, par M. [U], directeur de l’agence, ait été néfaste pour le salarié.
Elle affirme avoir respecté son obligation d’adaptation et de formation du salarié suite à la mise en place de nouvelles méthodes de travail par M. [U] en 2016, nouvelles méthodes auxquelles le salarié ne s’est pas adapté d’où son conflit relationnel avec son supérieur hiérarchique.
Elle conclut que le salarié a travaillé dans un lien de subordination mais n’a pas su s’adapter aux nouvelles méthodes de travail et qu’elle a veillé à maintenir un équilibre entre son pouvoir de direction et la protection physique et mentale de ses salariés.
Il convient de préciser que la société de développement commercial Bordelaise a pour objet principal le développement de l’activité commerciale de la Française des jeux par la vente de jeux de hasard et d’argent, principalement auprès des débitants de tabac de la Gironde.
Elle a repris l’activité de courtier mandataire sur le département de la Gironde et la Française des jeux est le donneur d’ordre unique de la société.
La Cour relève que M. [M] avait plus de dix neuf ans d’ancienneté sans aucun passé disciplinaire et était un salarié qui donnait satisfaction à son employeur y compris sous la direction de M. [U] jusqu’en 2016, année à partir de laquelle ce dernier est devenu son supérieur direct car positionné par la Française des jeux à la tête du secteur Girondin.
L’attestation du Président de la Française des jeux de 2000 à 2014, versée aux débats par l’employeur, témoigne de la réforme de la distribution commerciale de la Française des jeux, caractérisée par la suppression du courtage et le redécoupage des secteurs dans le sens d’une plus grande efficacité au motif que le secteur des Girondins avait de très mauvais résultats commerciaux.
M. [U], à la demande du Président de la Française des jeux a repris le secteur des Girondins.
A la lecture des pièces versées aux débats et singulièrement des attestations produites par le salarié, il est constant que le changement de direction a entraîné une rupture dans les conditions de travail de M. [M] ; les témoignages des salariés (Attestations de M. [I] et Mme [C]) attestent d’un bouleversement de leurs fonctions du fait de la mise en place de nouvelles méthodes de travail et d’un management anxiogène et agressif de M. [U] à l’égard de l’ensemble de l’équipe et plus particulièrement de M. [M], peu formé aux nouvelles technologies et aux techniques commerciales.
Les pièces versées aux débats et plus particulièrement les échanges de courriels révèlent un management peu adapté, des propos agressifs et parfois humiliants de M. [U] à l’égard de ses collaborateurs (Attestations M. [I] et Mme [C]), des convocations à des réunions générales et ‘disciplinées’, des systèmes de surveillance et de traçage par le biais de rapports quotidiens, des journées de travail au delà du cadre légal, des départs professionnels imposés pendant les périodes de congés .
Les difficultés d’adaptation de M. [M] à la distribution directe étaient connues de sa hiérarchie comme en atteste M. [Y], coordinateur qui témoigne du fait de l’avoir ‘souvent reçu dans mon bureau pour le recadrer mais surtout l’encourager car il ne se sentait pas d’être à la hauteur de ses collègues exerçant la même activité et sur sa capacité de travail. Il disait souvent je n’y arriverai jamais. Il avait un réel problème d’adaptation et l’arrivée de la distribution directe lui faisait peur.’
Pour autant les résultats de M. [M] pour l’année 2017 étaient satisfaisants. Si M. [S] atteste du fait que M. [M] a bénéficié, tout comme l’ensemble des collaborateurs de la société de développement commercial Bordelaise, d’une formation à la distribution intermédiée du 10 au 21 octobre 2016, l’employeur ne démontre pas, cependant, que le salarié a bénéficié d’une formation l’accompagnant dans son adaptation à un nouvel environnement professionnel afin de lui permettre de continuer à exercer son emploi dans de bonnes conditions dans un contexte de changement radical des méthodes de travail qui lui étaient imposées.
Il apparaît dès lors que tant le management inadapté de M. [U] que l’absence de toute réelle formation appropriée du salarié caractérisent le manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité à laquelle il est tenu afin de veiller à la santé et à la protection de ses salariés.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a dit que la société de développement commercial Bordelaise a manqué à son obligation de sécurité.
M. [M] sollicite des dommages intérêts afin de réparer le préjudice moral subi du fait du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
En l’espèce, la Cour dispose de suffisamment d’éléments pour apprécier son préjudice et lui allouer à titre de dommages intérêts la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a débouté M. [M] de sa demande de dommages intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
Sur la rupture du contrat de travail
Sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse
A titre liminaire, il convient de rappeler que lorsque l’inaptitude du salarié trouve son origine dans le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité le licenciement prononcé pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Les règles protectrices relatives aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée et invoquée, a, au moins partiellement pour origine cet accident ou cette maladie et que l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement; cette application n’est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse d’assurance maladie du caractère professionnel d’un accident.
Aux termes de l’article L. 1235-3 du code du travail si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés.
Le cadre légal indique que pour un salarié qui a 20 ans d’ancienneté l’indemnité doit être comprise entre 3 et 15,5 mois de salaires.
La société de développement commercial Bordelaise fait valoir que la caisse primaire d’assurance maladie a refusé de prendre en charge la maladie de M. [M] au titre d’une maladie professionnelle et qu’il ne démontre aucunement l’origine professionnelle de son inaptitude.
En l’espèce, il résulte des énonciations susmentionnées que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité.
La cour relève que M. [M] a toujours travaillé et qu’il ne résulte d’aucun des éléments du dossier qu’il présentait un état pathologique antérieur.
Par ailleurs, sont versés aux débats :
– un courriel du 14 juin 2018 adressé à l’employeur par le salarié lui indiquant consulter son médecin traitant au motif que la pression quotidienne de M. [U] s’intensifiait chaque jour,
– une lettre recommandée adressée par le salarié à son employeur et reçue le 4 juillet 2018 par laquelle le salarié refuse toute proposition de rupture conventionnelle en indiquant que son arrêt de travail du 15 juin 2018 est en lien direct avec ses conditions de travail insupportables liées à sa politique de management,
– l’avis consultatif du Docteur [H], psychiatre, suite à la demande de maladie professionnelle hors tableau par le certificat du Docteur [D], en date du 15 juin 2018, qui conclut à un état dépressif caractérisé qui pourrait justifier d’un taux d’IP prévisionnelle de 15% en référence au barème indicatif d’invalidité des maladies professionnelles et relate les déclarations du salarié quant à son mal être lié à ses conditions de travail et une pression professionnelle de tous les instants,
– la notification de la décision de la commission de recours amiable en date du 22 mai 2019 ne prenant pas en charge la maladie de M. [M] au titre d’une maladie professionnelle au motif qu’il ne remplit pas la condition médicale d’un taux d’incapacité permanente au moins égal à 25%.
– l’avis d’inaptitude de M. [M] en date du 16 mars 2020 précisant que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi,
– un certificat médical du Docteur [D] en date du 23 juin 2020 attestant de la prise en charge de M. [M] depuis le 14 juin 2018 avec une prolongation de ses arrêts de travail pour dépression sévère et burn out.
Ces éléments concordants établissent que l’inaptitude de M.[M] trouve sa cause directe dans l’altération de son état psychique du fait de la dégradation de ses conditions de travail et du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité peu important que la caisse n’ait pas reconnu l’origine professionnelle de la maladie de M. [M] au motif qu’il ne remplit pas la condition médicale d’un taux d’incapacité permanente au moins égal à 25%.
En conséquence il y a lieu de confirmer le jugement déféré de ce chef et de dire que le licenciement pour inaptitude M. [M] est sans cause réelle et sérieuse.
Sur la base de son salaire brut (2 171,50 euros), d’une ancienneté de plus de 20 ans et de son âge il convient de confirmer le jugement déféré qui a alloué à M. [M] la somme de 33 658,25 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sèrieuse.
Sur l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents
Aux termes de l’article L. 1234-5 du code du travail lorsque le salarié n’exécute pas son préavis, il a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.
L’article 1234-1 du code du travail dispose que pour un salarié justifiant d’une ancienneté d’au moins deux ans la durée de préavis est de 2 mois.
En l’espèce, M. [M] a été licencié au motif de son inaptitude le 28 avril 2020, le privant de son préavis.
Il se déduit de son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, qu’il est fondé à obtenir le paiement d’une indemnité compensatrice de préavis et d’une indemnité de congés payés sur préavis.
L’ancienneté du salarié étant supèrieure à deux ans et son salaire brut s’élevant à
2 171,50 euros il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il lui a alloué une indemnité compensatrice de préavis de 4 343 euros et 434, 30 euros au titre des congés payés y afférent.
Sur l’indemnité spéciale de licenciement
Aux termes de l’article L.1226-14 du code du travail si le licenciement pour inaptitude a une origine professionnelle, alors l’indemnité spéciale de licenciement versée au salarié doit être égale au double de l’indemnité légale de licenciement.
En l’espèce, il ressort des éléments sus mentionnés que M. [M] est bien victime d’une maladie constatée médicalement et dont l’origine est professionnelle.
La Cour retient que M. [M] doit en conséquence bénéficier d’une indemnité spéciale de licenciement.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a alloué une indemnité spéciale de licenciement au salarié à hauteur de 11 309, 90 euros sur la base de l’indemnité de licenciement mentionnée sur son bulletin de salaire du mois d’avril 2020 d’un même montant.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La société de développement commercial Bordelaise, qui succombe, doit supporter les dépens de première instance et les dépens d’appel, au paiement desquels elle sera condamnée, le jugement déféré étant confirmé en conséquence.
L’équité commande de ne pas laisser à M. [M] la charge des frais non compris dans les dépens exposés à hauteur d’appel. En application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la société de développement commercial Bordelaise sera condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros. La société de développement commercial Bordelaise sera déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
CONFIRME le jugement entrepris sauf dans ses dispositions qui déboutent M. [M] de sa demande de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral, du fait du manquement de la société de développement commercial Bordelaise à son obligation de sécurité;
Statuant et y ajoutant,
CONDAMNE la société de développement commercial Bordelaise à verser à M. [M] la somme de 3 000 euros à titre de domages intérêts en réparation de son préjudice moral du fait du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité;
CONDAMNE la société de développement commercial Bordelaise à verser à M. [M] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et déboute la société de développement commercial Bordelaise de sa demande à ce titre;
CONDAMNE la société de développement Bordelaise aux dépens d’appel.
Signé par monsieur Eric Veyssière, président, et par madame Sylvaine Déchamps, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
S. Déchamps E. Veyssière