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11 octobre 2006
Cour de cassation
Pourvoi n°
06-82.367
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze octobre deux mille six, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller DESGRANGE, les observations de la société civile professionnelle THOMAS-RAQUIN et BENABENT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général DAVENAS ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
– LA SOCIETE LA FRANCAISE DES JEUX, partie civile,
contre l’arrêt de la cour d’appel de RIOM, chambre correctionnelle, en date du 1er mars 2006, qui, après condamnation définitive de Jean X…, pour abus de confiance, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 314-1, 314-10 du code pénal, 475-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué, confirmant le jugement entrepris, a rejeté la constitution de partie civile de La Française des Jeux, la déboutant purement et simplement de ses demandes de dommages-intérêts ;
“aux motifs propres que, pour justifier de son préjudice, La Française des Jeux présente un décompte qui considère comme acquises par elle les mises fictives qui ont permis à Jean X… de dégager des gains ; or, en l’espèce, l’abus de confiance a consisté en l’utilisation à des fins personnelles du terminal de jeu qui lui avait été confié, ce qui constitue un détournement au sens de l’article 314-1 du code pénal ; que la valeur du détournement est en conséquence limitée aux gains produits par cette utilisation non conforme au contrat de mandat ; que le raisonnement de La Française des Jeux ne pourrait trouver d’application que dans le cas où des fonds destinés aux jeux n’auraient pas été affectés à ceux-ci ; que La Française des Jeux est mal fondée à présenter un compte incluant des mises inexistantes au titre des ” mises encaissées ” et même des ” commissions ” ; qu’elle ne rapporte par ailleurs pas la preuve de ce que Jean X… n’aurait pas remboursé tous les ” gains ” obtenus frauduleusement ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté La Française des Jeux de sa demande en paiement de la somme de 119 963,98 euros ” ;
“et aux motifs adoptés que ” Jean X… a simplement manipulé le terminal de jeux sans verser de mises ; qu’en faisant des mises fictives, il n’a pas détourné une somme équivalente à ces mises mais aux gains ainsi obtenus ; que La Française des Jeux ne peut donc prétendre subir un préjudice équivalant au montant des mises ; qu’il a reversé ses gains à La Française des Jeux ; qu’ayant été remboursée des gains frauduleusement obtenus par Jean X…, La Française des Jeux ne démontre pas subir un préjudice financier du fait des agissements de son dépositaire ” ;
“alors que l’existence d’un préjudice réparable souffert par la partie civile, victime d’un abus de confiance, se trouve incluse dans la constatation du détournement d’une chose visée par l’article 314-1 du code pénal ; qu’il appartient dès lors aux juridictions du fond de réparer le préjudice subi par la partie civile correspondant pour elle au détournement dont elle a ainsi été victime ; que l’exploitant dépositaire d’un terminal de jeux à lui confié par La Française des Jeux doit, en sa qualité de mandataire de celle-ci, encaisser les mises des joueurs et reverser à La Française des Jeux le montant de ces mises après déduction des gains dus aux joueurs et d’une commission à lui due ; qu’en retenant en l’espèce qu’en utilisant à des fins personnelles le terminal de jeux qui lui avait été ainsi confié sans verser de mises, Jean X… n’a pas détourné une somme équivalente à ces mises mais seulement aux gains obtenus, et que Jean X…, ayant remboursé tous les gains obtenus frauduleusement, La Française des Jeux ne pouvait prétendre à un préjudice équivalant au montant des mises non versées par Jean X…, la cour d’appel a violé les textes susvisés” ;
Vu les articles 2 du code de procédure pénale et 314-1 du code pénal ;
Attendu qu’il appartient aux juridictions du fond de réparer, dans les limites des conclusions des parties, l’intégralité du préjudice dont elles reconnaissent le principe ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que Jean X…, exploitant un débit de tabac, était dépositaire d’un terminal de jeux de la société La Française des Jeux sur lequel il a reconnu avoir effectué des mises fictives lui ayant permis de percevoir des gains ; que le montant des sommes détournées a été évalué à 189 748,74 euros et qu’il a reversé 69 786,74 euros, correspondant aux gains indûment perçus ;
Attendu qu’après avoir déclaré le prévenu coupable d’abus de confiance, pour avoir utilisé le terminal de jeux à des fins autres que celles pour lesquelles il lui avait été confié, l’arrêt énonce, pour rejeter la demande de la partie civile qui sollicitait l’allocation de 119 963,98 euros, que la valeur du détournement est limitée aux gains produits par l’utilisation non conforme au contrat de mandat, que La Française des Jeux est mal fondée à présenter un compte incluant des mises inexistantes et qu’elle ne rapporte pas la preuve de ce que le prévenu n’aurait pas remboursé tous les gains obtenus frauduleusement ;