Investissements atypiques (et déficitaires) en oeuvres d’art : comment se faire rembourser ?
Investissements atypiques (et déficitaires) en oeuvres d’art : comment se faire rembourser ?
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Pour obtenir le remboursement d’investissements atypiques (et déficitaires) en oeuvre d’art, plaidez la violation de l’obligation de conseil et d’information du professionnel. Attention à agir vite, la prescription quinquennale est applicable.

Y compris dans le domaine du conseil, les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature. Le débiteur de cette obligation d’information peut être condamné à des dommages-intérêts à raison de l’inexécution de son obligation toutes les fois qu’il ne justifie pas que celle-ci provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée.

________________________________________________________________________________

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

ARRÊT DU DOUZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX

ARRÊT N° 365/2022

N° RG 21/00522 – N° Portalis DBVI-V-B7F-N6PR

***

APPELANTS

Monsieur Y-AB E

[…]

[…]

Représenté par Me Loïc ALRAN de la SCP PERES RENIER ALRAN, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur L Z

[…]

[…]

Représenté par Me Loïc ALRAN de la SCP PERES RENIER ALRAN, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame M N épouse Z

[…]

[…]

Représentée par Me Loïc ALRAN de la SCP PERES RENIER ALRAN, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur O A

[…]

[…]

Représenté par Me Loïc ALRAN de la SCP PERES RENIER ALRAN, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame M P épouse A

[…]

[…]

Représentée par Me Loïc ALRAN de la SCP PERES RENIER ALRAN, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉS Monsieur Q B

[…]

81290 VIVIERS-LES-MONTAGNES

Représenté par Me Sophie CREPIN de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Anne-sophie PIA de la SELEURL AWKIS, avocat plaidant au barreau de PARIS

S.A. I AA COMPANY (EUROPE) S.A.

prise en la personne de son représentant légal en France domiciliée en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Alexandra J, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Céline LEMOUX de la SELEURL CL AVOCAT, avocat plaidant au barreau de PARIS

S.A.R.L. G

[…]

82370 LABASTIDE SAINT AE

Représentée par Me Laurent MASCARAS de l’ASSOCIATION ASSOCIATION D’AVOCATS MASCARAS CERESIANI – LES AVOCATS ASSOC IES, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A. MMA IARD

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Emmanuelle DESSART de la SCP DESSART-DEVIERS, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Arnaud PERICARD de la SELARL ARMA, avocat plaidant au barreau de PARIS

S.A. I AA COMPANY LIMITED

prise en la personne de son représentant légal en France domiciliée en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Alexandra J, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Céline LEMOUX de la SELEURL CL AVOCAT, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTERVENANTE FORCÉE S.A. W AA AD

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Sophie CREPIN de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Anne-sophie PIA de la SELEURL AWKIS, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 23 Février 2022 en audience publique, devant la Cour composée de :

C. AI-AJ, président

O. STIENNE, conseiller

E.VET, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M. AG

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par C. AI-AJ, président, et par M. AG, greffier de chambre.

La SAS Aristophil, spécialisée dans le marché de lettres autographes et manuscrits anciens, proposait la commercialisation de certains produits financiers.

M. Q B, assuré auprès de la SA W AA AD, est courtier indépendant en opérations de banque et services de paiement courtier en assurance, gestion de patrimoine, démarchage bancaire et financiers, négociant en métaux précieux.

Il est également agent commercial auprès de la SARL G suivant contrat du 3 novembre 2010, d’une durée d’un an, tacitement renouvelé depuis sa signature.

La SARL G a commercialisé des produits d’investissements Aristophil

consistant à acquérir en pleine propriété ou en indivision des collections de lettres et manuscrits anciens.

M. B a souscrit différentes conventions :

‘ le 18 février 2012 avec M. Y-AB E, une convention Amadeus, lui permettant d’acquérir une collection d”uvres d’art pour un investissement total de 50’000 €, cette convention étant assortie d’une autre, dite de garde et de conservation par laquelle la société Aristophil s’engageait à conserver la collection pendant cinq ans,

‘ le 18 février 2012 avec M. O A et Mme M P épouse A, une convention Amadeus, dans laquelle ils ont investi 40’000 €,

‘ le 11 avril 2013 avec M. L Z et Mme M N épouse Z un contrat de vente de parts en indivision dénommé Coralys’Prestige, M. Z ayant investi 45’000 € et Mme Z U’000 €, cette convention étant aussi assortie d’une convention de garde et de conservation.

Le 5 mars 2015, le dirigeant de la SAS Aristophil, M. V K était mis en examen pour abus de confiance, blanchiment et escroquerie en bande organisée et le 5 août 2015 la SAS Aristophil était placée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Paris.

Par acte du 11 septembre 2018, M. Y-AB E, M. L Z et Mme M N épouse Z et M. O A et Mme M P épouse A ont fait assigner M. Q B devant le Tribunal de Grande Instance de Castres pour obtenir le constat que M. B a commis plusieurs fautes professionnelles à l’origine du préjudice qu’ils ont subi résultant de la perte de leurs investissements, obtenir sa condamnation au paiement de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice économique, outre 10 000 € en réparation de leur préjudice moral, et 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 27 mars 2019, M. B a fait assigner en intervention forcée et en garantie la SARL G et son assureur la SA MMA Iard.

Par acte du 17 septembre 2019, la SA G a fait assigner en intervention forcée la SA I AA Company Limited en qualité d’assureur responsabilité civile professionnelle de la SAS Aristophil. La SA I AA Company (Europe) est intervenue volontairement en cette qualité.

Par jugement contradictoire du 14 janvier 2021, le Tribunal judiciaire de Castres a :

– constaté l’intervention volontaire de la SA W AA,

– déclaré l’action de M. Y-AB E, M. L Z, Mme M N épouse Z, M. O A et Mme M P épouse A, prescrite, avant tout examen au fond,

– rejeté les demandes au titre de l’article 700 du CPC,

– condamné in solidum M. Y-AB E, M. L Z, Mme M N épouse Z, M. O A et Mme M P épouse A aux entiers dépens, distraits au profit de Me Boonstoppel intervenant pour les SA I AA Company et I AA Company Limited.

Par acte en date du 2 février 2021, M. E, M. et Mme Z et M. et Mme A ont interjeté appel de la décision en ce qu’elle a :

– déclaré l’action de M. Y-AB E, M. L Z, Mme M N épouse Z, M. O A et Mme M P épouse A, prescrite, avant tout examen au fond,

– condamné in solidum M. Y-AB E, M. L Z, Mme M N épouse Z, M. O A et Mme M P épouse A aux entiers dépens.

Par acte du 27 juillet 2021, SA W AA AD, assureur responsabilité civil de M. B, a été assignée en intervention forcée par la SA I AA Company(Europe), les appelants n’ayant pas interjeté appel à l’encontre de cette société.

Par dernières conclusions du 16 février 2022, M. E , M. et Mme Z et M. et Mme A demandent à la cour au visa des articles 1135 et 1147 dans leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016, 2224 du code civil, L 550-1, L 541-1, L 533-12, L 541-8-1 du Code monétaire et financier, 325-3 et suivants du Règlement général de l’Autorité des Marchés Financiers, et L. 111-1 du code de la consommation, de :

– réformer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

Et, statuant à nouveau :

– déclarer recevable l’action engagée par les concluants,

Sur le fond,

– dire et juger que la société Aristophil a engagé sa responsabilité en proposant des produits d’investissement défaillants,

– condamner en conséquence son assureur, I AA ou W AA, à payer aux concluants les sommes de :

M. Y-AB E 50.000 €

M. O A 40.000 €

Mme M A 40.000 €

M. L Z 45.000 €

Mme M Z U.000 €

– dire et juger que M. B et la SARL G ont commis plusieurs fautes professionnelles au regard des textes susvisés,

– dire et juger que ces fautes professionnelles sont à l’origine du préjudice subi par les requérants du fait de la perte de leurs investissements dans les produits proposés par la société Aristophil,

– condamner en conséquence, M. Q B, la SARL G et son assureur MMA, solidairement avec I AA ou W AA au paiement des dommages-et-intérêts suivants en réparation de leur préjudice économique :

– 45.000 € au profit de M. Y-AB E,

– 36.000 € au profit de M. O A,

– 36.000 € au profit de Mme M A,

– 40.500 € au profit de M. L Z,

– 54.000 € au profit de Mme M Z.

– dire et juger que ces condamnations seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la souscription des divers contrats soit le 18 février 2012 pour M. E et les époux A, et le 11 avril 2013 pour M. et Mme Z,

– condamner solidairement les défendeurs au paiement de la somme de 10.000 € au profit de chacun des concluants à titre de dommages-et-intérêts en réparation du préjudice moral qu’ils ont subi,

– les condamner solidairement au paiement de la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens dont distraction au profit de l’avocat soussigné.

Par dernières écritures du 17 février 2022, M. B et la SA W AA AD, demandent à la cour au visa des articles L.548-8-1 et L. 533-12 du code monétaire et financier et 325-5 et suivant du Règlement Général de l’AMF, 2224 du Code civil, L. 121-1, L.121-4 et L. 124-5 du Code des assurances, de :

Confirmer le jugement du 14 janvier 2021 en ce qu’il a :

déclaré irrecevable comme prescrite l’action des consorts E, Z et A,

A titre subsidiaire, en cas d’infirmation,

– prendre acte de l’intervention de W AA AD,

– constater l’absence de faute de M. B,

– constater l’absence de préjudice et de lien de causalité,

En conséquence,

– débouter M. E, les époux Z et les époux A de toutes leurs demandes, fins et prétentions à l’encontre de M. B et W AA AD,

A titre très subsidiaire,

– condamner in solidum G, la MMA Iard et I à relever et garantir M. B et W AA AD de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre eux en principal, intérêts et frais,

A titre infiniment subsidiaire,

– faire application des limites de garantie de W AA AD et notamment sa franchise contractuelle de 2.500 € par sinistre, soit pour chacun des quatre investisseurs,

– juger que la part contributive de W AA AD sera limitée aux prescriptions de l’article L.121-4 du Code des assurances relatives au cumul d’assurances,

En tout état de cause,

– condamner in solidum M. E, les époux Z et les époux A à verser à M. B et à W AA AD 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner in solidum M. E, les époux Z et les époux A aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par dernières écritures du 17 février 2022, la SARL G demande à la cour au visa des articles 1134, 1147, et 2224 du Code Civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, L.550-1 et L.211-1 du Code Monétaire et Financier, de :

– confirmer le jugement rendu le 14 janvier 2021 par le Tribunal Judiciaire de Castres ;

A titre subsidiaire : si la Cour infirmait le jugement dont appel et jugeait l’action et les demandes de M. E, des époux Z et/ou des époux F recevables car non frappées par la prescription

– débouter M. E, les époux Z et les époux F ainsi que M. Q B de toutes leurs demandes, fins et moyens à l’encontre de la SARLFanisam ;

A titre infiniment subsidiaire : si la juridiction estimait acquis le principe de la responsabilité :

– cantonner le montant du préjudice indemnisable par la SARL G à hauteur de 5 % des sommes demandées ;

– condamner M. B, la SA MMA Iard et la I AA à relever et garantir solidairement la société G ;

– débouter M. E, les époux Z et les époux F ainsi que M. Q B de toutes leurs demandes, fins et moyens à l’encontre de la SARLFanisam ;

– condamner solidairement M. E, les époux Z et les époux F ainsi que M. Q B et la SA MMA Iard et la I AA à verser à la SARL G 6.000 € chacun au titre de l’article 700 Code de Procédure Civile ;

– condamner solidairement M. E, les époux Z et les époux F ainsi que M. Q B et la SA MMA Iard et la SA I AA aux entiers dépens.

Par dernières écritures du 4 février 2022, la SA MMA Iard demande à la cour au visa des articles 122 et 700 du Code de procédure civile,1134 et 1147 (anciens), 2224 du Code civil, de :

A titre principal,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit l’action engagée par les consorts E, A et Z irrecevable car prescrite,

– débouter en conséquence les consorts E, A et Z de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

A titre subsidiaire,

– juger que M. B et G n’ont pas commis de faute dans l’exercice de leurs fonctions,

– juger que les consorts E, A et Z ne rapportent pas la preuve de l’existence d’un préjudice, ni du lien de causalité entre ce préjudice et les fautes alléguées,

– débouter en conséquence les consorts E, A et Z de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

A titre très subsidiaire.

– juger que seul M. B serait responsable des préjudices réclamés par les consorts H, A et Z,

En conséquence,

– condamner M. B, I et W AA AD in solidum à relever indemne G et MMA de toute condamnation qui serait prononcée à leur encontre.

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la Cour devait faire droit aux demandes indemnitaires des consorts E, A et Z,

– juger que la garantie de MMA Iard sera mobilisable dans la limite de la franchise mise à la charge de la société G aux termes de son contrat d’assurance,

En tout état de cause,

– condamner tout succombant à payer à MMA la somme de 10.000 € au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Par dernières écritures du 14 février 2022, la SA I AA Company Limited et la SA I AA Company (Europe) demandent à la cour de :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré irrecevables comme prescrites l’action des consorts E, A et Z ;

A titre liminaire :

– juger l’appel en garantie formulée à l’encontre de la société I AA Company Limited irrecevable ;

A titre principal :

– juger qu’aucune garantie n’est due par la société I AA Company (Europe) au titre au titre de la police n°2078 à raison de la responsabilité de la société Aristophil ;

– juger qu’aucune garantie n’est due par la société I AA Company (Europe) au titre de la police n° FN 4325 à raison des demandes formulées à l’encontre de M. B ;

– juger qu’aucune garantie n’est due par la SA I AA Company (Europe) au titre des polices n° FN 4709 et n° FN 1925 à raison des demandes formulées à l’encontre de M. B et de la société G ;

– débouter en conséquence M. E, les consorts A, les consorts Z, M. B, la société W AA AD, la société G et la société MMA Iard de toute leurs prétentions à l’encontre de la société I AA Company (Europe) ;

A titre subsidiaire :

– juger l’action des demandeurs prescrite ;

– débouter les demandeurs de leurs prétentions à l’encontre de la I AA Company (Europe) ;

A titre très subsidiaire :

– juger que la société G et M. B ont pleinement exécuté leurs obligations d’information et de conseil de moyens ;

– débouter les demandeurs de toutes leurs prétentions ;

A titre infiniment subsidiaire,

– juger que les demandeurs échouent à démontrer subir un préjudice réparable ;

– débouter les demandeurs de toutes leurs prétentions ;

A titre plus infiniment subsidiaire encore,

‘ s’il venait à être jugé que la SA I AA Company (Europe) doit garantir, au titre de la police n° FN 1925, la responsabilité que la société G ou M. B auraient engagée:

– juger que la société I AA Company (Europe) ne saurait être tenue à garantir la société G et M. B au-delà des termes de la police n° FN 1925 souscrite auprès d’elle ;

– juger que l’ensemble des réclamations formées par les personnes ayant investi dans des collections constituées par la société Aristophil par l’intermédiaire de la société Art Courtage ou de ses mandataires, assurés par la police n° FN 1925, constituent un seul et même sinistre, soumis au plafond de garantie par sinistre prévu à la police n° FN 1925 de 2.000.000 € ;

– juger, par conséquent, que la condamnation à garantir la société G et M. B qui viendrait à être prononcée ne pourra excéder le plafond de garantie de 2.000.000 € par sinistre prévu par la police n° FN 1925 après déduction des sommes que la société I AA Company (Europe) aura déjà versées au titre du sinistre dit sériel ;

ou,

– désigner tel séquestre qu’il plaira à la Cour avec pour mission de conserver les fonds dans l’attente des décisions définitives tranchant les différentes réclamations formées par les personnes ayant investi dans des collections constituées par la société Aristophil par l’intermédiaire de la société Art Courtage ou de ses mandataires, assurés par la police n° FN 1925 ;

– si la qualification de sinistre sériel est écartée, juger que la condamnation à garantir la société G et M. B qui viendrait à être prononcée ne pourra excéder le plafond de garantie de 2.000.000 € par période d’assurance prévu par la police n° FN 1925 après déduction :

*des sommes que la société I AA Company (Europe) aura déjà versées au titre des autres réclamations formulées pendant la période subséquente ou, dans l’hypothèse où la résiliation de la police n° FN 1925 à effet du 31 décembre 2014 serait jugée inopposable, au titre des réclamations formulées au cours de la période d’assurance écoulée entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2018 ;

*de la franchise de 3.000 € par sinistre prévue par les conditions particulières de la police n° FN 1925 applicable une fois par demandeur, les réclamations qu’ils formulent chacun de leur côté constituant, dans cette hypothèse, un sinistre distinct

ou,

– désigner tel séquestre qu’il plaira à la Cour avec pour mission de conserver les fonds dans l’attente des décisions définitives tranchant les différentes réclamations formées à l’encontre des assurés au titre de la police n° FN 1925 se rattachant à la même période d’assurance, en l’occurrence la période subséquente ou, dans l’hypothèse où la résiliation de la police n° FN 1935 à effet du 31 décembre 2014 serait jugée inopposable, au cours de la période d’assurance écoulée entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2018, et procéder à une répartition au marc l’euro des fonds séquestrés ;

‘ s’il venait à être jugé que la société I AA Company (Europe) doit garantir, au titre de la police n° FN 4709, la responsabilité que M. B et/ou la société G aurait engagée :

– juger que la société I AA Company (Europe) ne saurait être tenue à garantir M. B et/ou la société G au-delà des termes de la police n° FN 4709 souscrite auprès d’elle ;

En conséquence,

– juger que la société I AA Company (Europe) ne pourra être condamnée à garantir les condamnations qui viendraient à être prononcées contre M. B et/ou la société G au-delà du plafond de garantie par période d’assurance de 100.000 € ;

‘ s’il venait à être jugé que la société I AA Company (Europe) doit garantir, au titre de la police n° FN 4325, la responsabilité que M. B aurait engagée

– juger que la société I AA Company (Europe) ne saurait être tenue à garantir M. B au-delà des termes de la police n° FN 4325 souscrite auprès d’elle ;

En conséquence,

– si le caractère sinistre du sériel est retenu, juger que la société I AA Company (Europe) ne pourra être condamnée à garantir les condamnations qui viendraient à être prononcées contre M. B qu’après déduction d’une franchise de 3.000 € ;

– si le caractère sériel du sinistre venait à être écarté, juger que la SA I AA Company ne pourra être condamnée à garantir les condamnations qui viendraient à être prononcées au profit des demandeurs qu’après déduction d’une franchise de 3.000 € par demandeur ;

‘ s’il venait à être jugé que la société I AA Company (Europe) doit garantir, au titre de la police n° FN 2078, la responsabilité que la société Aristophil aurait engagée :

– juger que la société I AA Company (Europe) ne saurait être tenue à garantir la responsabilité de la société Aristophilphil au-delà des termes de la police n° FN 2078 souscrite auprès d’elle ;

En conséquence,

– si le caractère sinistre du sériel est retenu, juger que la société I AA Company (Europe) ne pourra être condamnée à garantir les condamnations qui viendraient à être prononcées au profit de l’ensemble des demandeurs qu’après déduction d’une franchise de 25.000 € ;

– si le caractère sériel du sinistre venait être écarté, juger que la société I AA Company ne pourra être condamnée à garantir les condamnations qui viendraient à être prononcées au profit des demandeurs qu’après déduction d’une franchise de 25.000 € par demandeur ;

– juger, dans l’hypothèse où la Cour viendrait à retenir la société I AA Company (Europe) doit sa garantie au titre de l’une ou l’autre des polices dont le bénéfice est recherché, que la part contributive de la société I AA Company (Europe) sera limitée conformément aux prescriptions de l’article L.121-4 du Code des Assurances ;

En tout état de cause,

– condamner toute partie succombante à payer à la société I AA Company (Europe) une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 CPC, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance dont distraction au profit de Maître J en application de l’article 699 du CPC.

L’ordonnance de clôture a été reportée au 18 février 2022.

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence au jugement entrepris ainsi qu’aux dernières conclusions déposées.

MOTIFS:

Sur la prescription de l’action :

Les appelants font valoir qu’ils n’ont pu avoir conscience au moment de la souscription de leur contrat des manquements de leur cocontractant à ses obligations d’information et de conseil qui les ont empêchés de prendre conscience de la portée de leurs engagements.

Ils expliquent s’être engagés dans ces investissements parce que M. B agissant comme mandataire de la SARL G le leur a conseillé alors que tous les deux auraient dû être alertés par les informations déjà publiées. Ils soulignent que M. B n’a fourni aucune information sur le fonctionnement réel du contrat qui était ambigu ni sur la surévaluation manifeste des ‘uvres qui ne s’est révélée à eux que bien plus tard.

Ils estiment qu’il ressortait du contrat qu’une sortie était toujours possible après deux ans d’investissement et que ce n’est qu’à la lecture de décisions de justice rendues dans le même cadre qu’ils ont compris qu’il n’existait qu’une possibilité de rachat par la société Aristophil, ils ont donc bien été trompés sur la nature de l’investissement auquel ils ont souscrit et en tout état de cause n’ont pas été mis en garde sur les informations publiques dont le courtier était censé avoir connaissance au moment de la souscription et qui ne résultaient pas de la seule lecture du contrat.

Ils considèrent au regard de ces éléments qu’ils n’ont pu être informés des agissements délictueux du dirigeant de la société Aristophil et de leurs conséquences sur leurs investissements avant la liquidation judiciaire de la société le 5 août 2015 ou au jour où ils ont été invités à déclarer leur créance et en tout état de cause postérieurement à l’année 2013 où M. B les a pleinement rassurés lorsqu’ils lui ont soumis leurs inquiétudes.

M. B et son assureur la SA W AA AD, qui considèrent que les contrats étaient parfaitement clairs, opposent qu’ils ont été souscrits les 18 février 2012 et 11 avril 2013 et que l’assignation ayant été délivrée le 11 septembre 2018, soit de plus de cinq ans après elle est donc prescrite dès lors que le manquement à l’obligation de mise en garde reproché à M. B qui aurait entraîné la perte de chance de ne pas avoir contracté des appelants s’apprécie au jour de la signature du contrat.

Ils considèrent qu’il ne peut être reproché à M. B de ne pas avoir anticipé la déconfiture de la société Aristophil alors qu’ils étaient informés du risque de défaillance de cette dernière qui est inhérent à tout investissement et que la surévaluation des ‘uvres d’art qui n’est pas démontrée et qui est étrangère à sa compétence ou la prétendue ambiguïté des documents contractuels ne pourrait justifier un report du point de départ de la prescription.

En tout état de cause, ils font valoir que la faillite de la société Atistophil est indépendante de la question du mécanisme juridique régissant les relations contractuelles avec les acheteurs des manuscrits.

Enfin, ils soulignent que quand bien même les appelants n’auraient pas été en mesure de connaître les risques inhérents à leur investissement au jour de la conclusion du contrat ils n’établissent pas à quelle date ils ont eu connaissance de la possibilité d’exercer leurs droits, la liquidation de la société étant un élément extérieur au grief qu’ils formulent à son encontre.

La SARL G rappelle qu’en matière d’obligation de conseil en gestion de portefeuille, qui constitue une obligation de moyens, l’action en responsabilité intentée pour manquement à l’obligation d’information et de conseil se prescrit par cinq ans à compter de la conclusion du contrat car le préjudice résulte de la perte de chance de ne pas contracter qui se manifeste nécessairement au jour de la conclusion du contrat.

Elle relève qu’en l’espèce, il est largement mentionné dans les documents précontractuels signés par les appelants que l’investissement réalisé était susceptible d’une perte de capital soit par un retournement du marché de l’art soit en raison du défaut de la société Aristophil, cette dernière hypothèse s’étant réalisée suite à la liquidation judiciaire dont elle a fait l’objet.

La SA MMA Iard, assureur de la SARL G considère que le point de départ de la prescription ne peut être reporté à la date de la liquidation judiciaire d’Aristophil puisque le dommage résultant d’un manquement à l’obligation d’information prive d’une chance le client de mieux investir ses capitaux le dommage résultant étant distinct du préjudice matériel qui pourrait ultérieurement résulter des opérations effectivement réalisées et s’établit dès la conclusion du contrat.

D’ailleurs, elle relève que les acheteurs demandent à être indemnisés du préjudice résultant de la perte de chance de ne pas investir dans les contrats litigieux et de la perte de chance de vendre leurs droits en 2013 lorsqu’ils ont été alertés par des articles parus dans la presse. Or, si le dommage résultant de la perte de capital des appelants ne s’est révélé que postérieurement à la conclusion du contrat, la perte de chance de mieux investir s’est manifestée dès sa conclusion.

Elle relève que les appelants ont été parfaitement informés du risque lié à la défaillance d’Aristophil et considère que les acheteurs se réfèrent à des informations extérieures pour tenter de reporter le point de départ de la prescription sans démontrer que le caractère malhonnête du montage était avéré lors de la souscription du contrat.

Enfin, elle constate que les appelants indiquent avoir été informés dès le 13 avril 2013 des doutes sur le caractère prétendument malhonnête du produit Aristophil que l’assignation ayant été délivré le 11 septembre 2018, même un report du point de départ de la prescription à cette date ne remettrait pas en cause la prescription de l’action.

La I AA Company Limited et la SA I AA Company Limited Europe expliquent que la première ayant été radiée du RCS en octobre 2020, l’appel dirigé contre elle est irrecevable et que la seconde a selon acte du 4 décembre 2018, repris l’ensemble des contrats responsabilité civils professionnels de la société Aristophil.

La SA I AA Company Limited Europe soulève la prescription frappant l’action des demandeurs.

Ainsi, les parties s’accordent sur l’application de l’article 2224 du Code civil selon lequel : «Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

Elles s’opposent sur le point de départ du délai de prescription de l’action des souscripteurs.

Il est constant que le dommage résultant d’un manquement à une obligation d’information, de mise en garde et /ou de conseil consistant en la perte d’une chance de ne pas contracter ou de contracter dans de meilleures conditions se réalise en principe lors de la conclusion du contrat.

Cependant, le délai de prescription de l’action en responsabilité intentée contre l’auteur d’un tel manquement est reporté au jour où le dommage s’est révélé ou aurait dû être révélé au contractant lorsque ce dernier ne pouvait en avoir connaissance à la souscription de l’opération litigieuse.

Les appelants fondent leur action sur le manquement de M. B agissant sous mandat de la SARL G à son obligation de conseil et d’information telle qu’elle résulte de l’article 1135 du Code civil dans sa rédaction applicable en l’espèce selon laquelle les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature et sur l’article 1147 du même code dans sa rédaction applicable qui prévoit la condamnation du débiteur à des dommages-intérêts à raison de l’inexécution de son obligation toutes les fois qu’il ne justifie pas que celle-ci provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée.

Ainsi qu’il a été dit, les appelants ont souscrit le 18 février 2012 et le 11 avril 2013, par l’intermédiaire de M. B agissant pour le compte de la SARL G, des produits financiers permettant une optimisation fiscale proposés par la SAS Aristophil.

Comme le relèvent les appelants, au stade de la prescription, il convient de rechercher non pas si M. B était informé des manquements de la SAS Aristophil au moment de la conclusion des contrats mais de rechercher à quelle date ils ont été connus ou auraient dû connaître les risques des placements litigieux.

Il résulte des pièces versées que les appelants ont tous signé un document mentionnant expressément les mises en garde suivantes :

‘ risque de retournement du marché de l’art,

‘ risque de défaut de la société (capital non garanti si défaut).

Cet avertissement est clair en ce qu’il ne lie aucunement le risque de défaut de la société au retournement du marché de l’art, dont il est constant qu’il ne présente pas de garantie de stabilité. Ces deux risques étant en tout état de cause indépendants l’un de l’autre.

Les appelants affirment qu’ils se sont dirigés vers les investissements objets du litige en raison des conseils de M. B qui aurait dû être alerté à l’époque par des publications de mise en garde et les informer sur le caractère ambigu des contrats alors qu’au contraire il a minimisé les informations qu’ils lui ont eux-mêmes fournies en 2013.

Ils expliquent qu’en 2013 les doutes entourant les investissements proposés par la société Aristophil étaient de notoriété publique et que d’ailleurs ils en ont fait part à M. B qui les a rassurés par un message du 13 avril 2013.

Force est de constater qu’ils n’ont pas estimé utile de produire leur message, seule la réponse de M. B étant versée, qui fait référence à un article de L’Express et à un autre de la revue Que choisir qui avaient inquiété les appelants et au sujet desquels il tentait de les rassurer.

Les appelants ne produisent qu’un article de l’Express daté du 16 mai 2013, postérieur à la réponse de M. B qui révèle les procédures pénales dont faisait l’objet la SAS Aristophil, relatant la vie de M. K, dirigeant de cette société, et précisant que rien n’obligeait la société à racheter les parts des indivisaires.

Bien qu’ils le produisent, il n’est pas démontré que les appelants ont eu connaissance de la teneur de cet article lors de sa parution.

Cependant, ainsi qu’il a été dit M. B fait référence dans sa réponse à la revue Que choisir et les appelants produisent un article du 31 mars 2011 selon lequel en 2007 l’autorité des marchés financiers a publié un communiqué appelant les particuliers à la vigilance à propos de la société Aristophil, relevant l’achat par la société de documents bien au-dessus des estimations les plus hautes et relatant que le dirigeant de la société s’était trouvé au c’ur d’un scandale financier dans les années 1990 alors qu’il plaçait auprès des particuliers des timbres de Monaco devant se valoriser ce qui n’avait pas été le cas.

L’article reprend les termes de M. Y-AE AF président de la compagnie des conseillers en gestion de patrimoine indépendant selon lequel « V K fait le marché tout seul. Les retours sur investissement que fait miroiter Aristophil sont irréalistes. Du 8 % annuels sans risque, soit près de 50 % sur cinq ans ça n’existe pas. Nous déconseillons formellement à nos adhérents de travailler avec cette société.».

Surtout, la légèreté de ton de la réponse M. B le 13 avril 2013 à 0h56, qui débute son message par « je rentre de week-end, et je lis votre message ainsi que l’article du juge de l’Express, je dis bien juge et pas journaliste car les journalistes sont censés rapporter des faits, mais à la lecture de cet article, ce n’est pas un rapport mais un procès à charge et il y a plus à penser qu’il règle ses comptes’ », démontre l’absence totale de recherche sérieuse de celui-ci face aux inquiétudes de ses clients auxquels il s’est contenté d’adresser un lien renvoyant vers un autre article sans doute flatteur, réponse qui ne pouvait pas pleinement les rassurer.

Ce message rédigé visiblement rapidement ne présente aucun argument sérieux et concret de nature à caractériser le respect par M. B de son obligation d’information et de renseignements alors qu’il évoque un « procès à charge » ce qui suggère, bien que cet article ne soit pas produit, une particulière sévérité de nature à inquiéter les investisseurs.

M. B évoquait d’ailleurs la possibilité d’une plainte contre les rédacteurs de l’article de L’Express et de la revue Que choisir.

Il poursuit en évoquant la possibilité pour les appelants d’agir en justice « pour affabulations et propos mensongers», affirmant que les clients de la société Aristophil sont tous les jours remboursés et qu’il n’existait aucune plainte. Il évoque enfin une envie de scandale des journalistes et termine par une comparaison avec les systèmes bancaire, immobilier, automobile ou du marché de l’art dont il reconnaît qu’ils ne sont pas à l’abri d’un arrêt brutal mais conclut « la différence entre eux, est que, si demain tout le monde peut retirer son épargne de la banque, et bien c’est impossible, car l’argent est virtuel, et ce cas engendrerait une crise de système alors que la détention de manuscrits reste un marché qui repose sur du matériel.

Il n’est pas question d’y placer l’ensemble de l’épargne d’un client, que cela rentre dans une logique de diversification et que ce marché est aussi respectable dans son modèle que d’hypothétiques calculs financiers sur une hausse ou une baisse d’un marché boursier.».

Ainsi qu’il a été dit, lorsqu’ils ont conclu les appelants ont été informés des risques encourus par un retournement du marché de l’art et le défaut de la société Aristophil.

La réponse du 13 avril 2013 à leurs légitimes inquiétudes au regard des montants importants investis et basées sur les articles de deux revues de notoriété nationale visiblement particulièrement critiques au vu des termes employés par M. B, ne peut les avoir satisfaits au regard de son caractère général qui ne reprend pas précisément les termes des contrats souscrits et n’évoque aucune garantie de rachat de la part de la société Aristophil qui aurait été seule de nature à rassurer pleinement des investisseurs normalement diligents.

En conséquence, il doit être considéré que c’est au plus tard le 13 avril 2013 que les appelants ont connu ou auraient dû connaître les faits leur permettant d’exercer leur action en manquement à leur obligation de conseil à l’encontre de M. B et de la SARL G.

Or, ils n’ont engagé leur action que le 11 septembre 2018.

Celle-ci doit en conséquence être déclarée prescrite par confirmation du jugement déféré.

L’équité commande de rejeter l’ensemble des demandes présentées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les appelants qui succombent seront condamnés aux dépens.

PAR CES MOTIFS:

La cour,

Statuant dans les limites de sa saisine :

Confirme le jugement déféré,

Rejette les demandes présentées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. Y-AB E, M. L Z et Mme M N épouse Z et M. O A et Mme M P épouse A aux dépens avec distraction au profit de Maître J en application de l’article 699 du CPC.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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