Interprétation des clauses d’assurance et responsabilité en cas d’accident aérien

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Interprétation des clauses d’assurance et responsabilité en cas d’accident aérien

Contrat de location de l’aéronef

Selon un contrat daté du 1er février 2018, M. [X] [W] est le locataire d’un aéronef de marque CESSNA, modèle 172, immatriculé [Immatriculation 8].

Police d’assurance souscrite

Le 17 mai 2021, M. [W] a souscrit une police d’assurance dommages aux corps d’aéronefs et responsabilité civile n° 2021/10310, effective à partir du 16 mai 2021, auprès d’un groupement de cinq compagnies d’assurance, via le groupement d’intérêt économique La Réunion Aérienne et Spatiale (LRA).

Accident de l’aéronef

Le 7 juillet 2021, l’aéronef a été impliqué dans un accident lors du décollage de l’aéroport de [Localité 10]. M. [W] était assis à l’avant droit, tandis que M. [M] occupait la place avant gauche. M. [H] [F] [O], un passager, a subi une fracture du coude nécessitant une opération et des séances de rééducation. L’aéronef a également subi des dommages matériels importants.

Déclaration du sinistre

Le 9 juillet 2021, M. [W] a déclaré le sinistre par l’intermédiaire de son courtier, mentionnant les dommages matériels et la blessure de M. [F] [O].

Refus de garantie par le groupement LRA

Le 27 juillet 2021, le groupement LRA a estimé que les conditions de garantie de la police d’assurance n’étaient pas remplies et a également refusé la garantie à M. [F] [O] le 6 août 2021.

Assignation en justice

Le 6 décembre 2022, M. [W] a assigné le groupement LRA devant le tribunal judiciaire de Paris, demandant le paiement de 38 500 euros, correspondant à la valeur assurée de l’aéronef après déduction de la franchise.

Intervention de M. [F] [O]

M. [F] [O] est intervenu volontairement dans l’instance par des conclusions datées du 27 janvier 2023.

Décision du juge de la mise en état

Le 6 septembre 2023, le juge de la mise en état a débouté M. [F] [O] de ses demandes d’expertise et de provision, en raison d’une contestation sérieuse sur la mise en jeu de la garantie du groupement LRA.

Demandes de M. [W]

Dans ses conclusions du 18 janvier 2024, M. [W] demande au tribunal de constater la nullité de la clause d’exclusion de garantie, arguant qu’elle n’est pas en caractères apparents. Subsidiairement, il soutient avoir conservé la qualité de pilote lors de l’accident et réclame 38 500 euros, plus des intérêts.

Demandes de M. [F] [O]

M. [F] [O] demande au tribunal de débouter le groupement LRA et de lui accorder 30 000 euros pour son préjudice, ainsi que 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il sollicite également la désignation d’un expert pour évaluer son préjudice corporel.

Demandes du groupement LRA

Le groupement LRA, dans ses conclusions du 1er mars 2024, demande le déboutement de M. [W] et M. [F] [O] et la condamnation de chacun à lui verser 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Motivations du tribunal

Le tribunal a examiné les conditions de mobilisation de la garantie, la validité des clauses d’identification des pilotes, et a conclu que la garantie n’était pas applicable car M. [J] [M], le pilote lors de l’accident, n’était pas désigné dans les conditions particulières de la police d’assurance.

Demande d’indemnisation de M. [F] [O]

M. [F] [O] a formé une action directe contre le groupement LRA pour obtenir une indemnisation, mais le tribunal a rejeté sa demande, considérant que la garantie n’était pas mobilisable.

Demande subsidiaire de M. [F] [O]

M. [F] [O] a également demandé la condamnation de M. [W] à l’indemniser, mais le tribunal a estimé qu’il n’y avait pas de preuve que M. [W] ait eu la qualité de pilote lors de l’accident.

Demande d’expertise et de provision

Le tribunal a rejeté la demande d’expertise et de provision de M. [F] [O], considérant que la garantie du groupement LRA n’était pas mobilisable.

Frais du procès et exécution provisoire

M. [W] et M. [F] [O] ont été condamnés aux dépens, et le tribunal a ordonné le paiement de 2 000 euros chacun au groupement LRA au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire du jugement a été déclarée de droit.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG
22/14627
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

1/1/1 resp profess du drt

N° RG 22/14627 – N° Portalis 352J-W-B7G-CYOF6

N° MINUTE :

Assignation du :
06 Décembre 2022

JUGEMENT
rendu le 06 Novembre 2024
DEMANDEUR

Monsieur [X] [W]
[Adresse 2]
[Localité 5]

Représenté par Maître Samuel m. FITOUSSI de la SELARL de la Grange et Fitoussi Avocats, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0112

DÉFENDERESSE

G.I.E. LA REUNION AERIENNE
[Adresse 7]
[Localité 4]

Représentée par Me Vonnick LE GUILLOU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0235

PARTIE INTERVENANTE

Monsieur [H] [F] [O]
[Adresse 3]
[Localité 6]

Représenté par Me Alexandre SUTER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2113

Décision du 06 Novembre 2024
[Adresse 1]
N° RG 22/14627 – N° Portalis 352J-W-B7G-CYOF6

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Benoit CHAMOUARD, Premier vice-président adjoint
Président de formation,

Madame Cécile VITON, Première vice-présidente adjointe
Madame Marjolaine GUIBERT, Vice-présidente
Assesseurs,

assistés de Madame Marion CHARRIER, Greffier

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSE DES FAITS

Selon contrat du 1er février 2018, M. [X] [W] est locataire d’un aéronef de marque CESSNA type 172, comprenant 4 places et immatriculé [Immatriculation 8].

Le 17 mai 2021, M. [W] a souscrit une police d’assurance dommages aux corps d’aéronefs et responsabilité civile n° 2021/10310 à effet du 16 mai 2021 auprès d’une coassurance composée de 5 compagnies. Cette police a été conclue par l’intermédiaire du groupement d’intérêt économique La Réunion Aérienne et Spatiale, ci-après le groupement LRA.

Le 7 juillet 2021, l’aéronef a subi un accident alors qu’il décollait de l’aéroport de [Localité 10]. M. [W] se trouvait sur la place avant droite de l’aéronef. La place avant gauche était occupée par M. [M]. M. [H] [F] [O], passager, a été blessé lors de l’accident. Victime d’une fracture du coude, il a dû être opéré le 10 juillet 2021, et a suivi ensuite des séances de rééducation.
Par ailleurs, l’aéronef a subi d’importants dommages matériels.

Le 9 juillet 2021, M. [W] a déclaré le sinistre par l’intermédiaire de son courtier, en faisant état des dommages matériels de l’aéronef et de la blessure de M. [F] [O].

Saisi par M. [W], le groupement LRA a estimé le 27 juillet 2021 que les conditions de garantie de la police d’assurance n’étaient pas réunies.

Le 6 août 2021, il a également adressé un refus de garantie à M. [F] [O].

Par acte d’huissier du 6 décembre 2022, M. [W] a fait assigner le groupement LRA devant le tribunal judiciaire de Paris aux d’obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 38 500 euros correspondant à la valeur assurée de l’aéronef impliqué dans l’accident du 7 juillet 2021, après déduction de la franchise.

M. [F] [O] est intervenu volontairement à l’instance par conclusions du 27 janvier 2023.

Par ordonnance du 6 septembre 2023, le juge de la mise en état statuant sur l’incident formé par M. [F] [O] a débouté celui-ci de ses demandes d’expertise et de provision en présence d’une contestation sérieuse quant à la mise en jeu de la garantie du groupement LRA.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 18 janvier 2024, M. [X] [W] demande au tribunal à titre principal de constater que la clause d’exclusion sur laquelle se fonde le groupement LRA pour dénier sa garantie ne figure pas en caractère apparent, qu’elle exige une interprétation et de prononcer en conséquence la nullité de la clause.
Subsidiairement, si le tribunal ne retenait pas la nullité de cette clause, il demande au tribunal de constater qu’il a conservé la qualité de pilote / commandant de bord lors de l’accident, ce qui rendrai la clause d’exclusion inapplicable, et de condamner en conséquence le groupement LRA à lui payer la somme de 38 500 euros, soit la valeur assurée de l’aéronef après déduction de la franchise, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la signification de l’assignation, avec capitalisation des intérêts.

Sur la demande subsidiaire de M. [O] à son égard, il demande que le tribunal la déclare irrecevable comme prescrite et qu’il déboute subsidiairement M. [O] de ses prétentions.

En tout état de cause, il sollicite la condamnation du groupement LRA à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, avec recouvrement dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 22 janvier 2024, M. [H] [F] [O] demande au tribunal de débouter le groupement LRA de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice, outre la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens, sous le bénéfice de l’exécution provisoire.

A titre subsidiaire, il forme les mêmes demandes à l’encontre de M. [W].

En tout état de cause, il sollicite qu’un expert spécialisé en chirurgie orthopédique soit désigné aux fins d’évaluer son préjudice corporel, que le groupement LRA soit condamné à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de provision sur l’indemnisation de son préjudice ainsi qu’à prendre en charge les frais d’expertise.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 1er mars 2024, le groupement LRA demande au tribunal de débouter M. [W] et M. [F] [O] de leurs demandes et de les condamner à lui payer chacun la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures, dans les conditions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 mars 2024 et les parties ont accepté une procédure sans audience. Chaque partie a déposé son dossier de plaidoiries et l’affaire a été mise en délibéré au 6 novembre 2024.

MOTIVATION

Sur les conditions de mobilisation de la garantie

– Sur la demande d’indemnisation formée par M. [W]

– Sur la validité des clauses  » identification des pilotes  »

En application de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L’article L. 112-4 du code des assurances dispose que les clauses des polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents, En application de l’article L. 113-1 du même code, ces clauses doivent être suffisamment claires et précises pour permettre à l’assuré de connaître exactement l’étendue de la garantie.

En l’espèce, les articles II-1-1.I et II-2-1. des conditions générales de la police souscrite par M. [W] conditionnent la mise en œuvre de la police d’assurance, tant pour la garantie corps d’aéronefs que pour la garantie responsabilité civile, à la circonstance que l’accident se réalise  » lorsque l’aéronef est exclusivement utilisé par le ou les pilotes mentionnés aux conditions particulières  » (pages 8 et 12 sur 36 des conditions générales, pièce en défense n° 1).

Aux termes des conditions particulières communes aux garanties souscrites versées aux débats, seules deux catégories de personnes peuvent piloter l’aéronef (page 3 sur 5 des conditions particulières, pièce en défense n° 2) :

– Les pilotes désignés expressément, en l’espèce [X] [W], [R] [Z], [D] [B] et [S] [U] ;

– Les pilotes non désignés, s’ils sont agréés par le souscripteur et titulaires d’au moins 500 heures de vol sur un avion à piston.

M. [X] [W] considère que ces articles correspondent à des clauses d’exclusion de garantie devant être annulées en raison de leur caractère peu apparent et peu clair.

Une condition de garantie a pour objet de définir le périmètre et l’objet de la police d’assurance, alors qu’une exclusion de garantie a pour objet de priver l’assuré du bénéfice des garanties en considération de circonstances particulières de réalisation du risque. Lorsque la stipulation subordonne l’application de la couverture au respect de conditions générales devant être honorées de façon permanente, il s’agit d’une condition de garantie. Au contraire, si elle écarte la mise en œuvre du contrat au regard de circonstances particulières au sinistre, il s’agit d’une clause d’exclusion.

En l’espèce, les conditions particulières de la police ci-dessus rappelées ont pour finalité de définir l’objet du contrat et identifient à ce titre notamment les personnes autorisées à piloter l’aéronef pour permettre la mobilisation de la garantie. La clause relative aux pilotes autorisés à manœuvrer l’appareil participe donc de la définition du périmètre des garanties et s’applique de façon permanente, indépendamment des circonstances du sinistre.

Dans ces conditions, les clauses litigieuses visent à délimiter le périmètre des garanties d’assurance en définissant le champ d’application de la garantie en le limitant aux seuls pilotes répondant aux conditions prévues par les conditions particulières du contrat conclu et ne peuvent dès lors pas être qualifiées de clauses d’exclusion ou de déchéance de garantie. Le moyen contraire est rejeté.

M. [W] fait encore grief à ces clauses de ne pas figurer au début du titre II des conditions générales du contrat et d’ajouter des conditions supplémentaires aux exigences légales ou réglementaires.
Pour autant, aucun texte n’impose à l’assureur d’insérer les conditions de garantie en début des conditions générales du contrat. En l’espèce, ces clauses figurent de manière apparente tant dans les conditions particulières que dans les conditions générales du contrat, en caractères parfaitement lisibles.
Par ailleurs, l’insertion de conditions de garantie relève de la seule liberté contractuelle et aucune disposition légale n’interdit aux assureurs d’ajouter des conditions de garanties supplémentaires à celles prévues par les textes de loi ou les règlements.

En tout état de cause, ces clauses figurant à l’article II-1-1.I et à l’article II-2-1 des conditions générales et explicitées dans les conditions particulières, dépourvues d’ambiguïté et détaillées, permettaient en l’espèce à M. [W] de connaître précisément l’étendue de la garantie souscrite.

Aucun motif ne justifie par conséquent d’annuler ces clauses, qui font la loi des parties et s’imposent à elles, et les moyens contraires de M. [W] doivent être rejetés.

– Sur la qualité de pilote de l’aéronef lors de l’accident

Il résulte clairement de la combinaison des clauses précitées que la garantie  » dommages aux corps d’aéronefs  » dont M. [W] sollicite la mobilisation n’est pas applicable dès lors que le pilote utilisant l’aéronef n’est pas expressément mentionné dans lesdites conditions particulières ou n’est pas titulaire du nombre d’heures de vol requises.

Or, il est constant que, lors du vol entre [Localité 10] et [Localité 11] au cours duquel l’accident est survenu, M. [J] [M] était installé en place avant gauche, que M. [W] s’est lui-même assis en place avant droite, et que deux personnes, dont M. [F] [O], étaient en place passagers arrières.

Dès lors que les articles II-1-1.I et II-2-1 des conditions générales de la police souscrite conditionnent la mise en œuvre de la garantie à la circonstance que l’accident se réalise  » lorsque l’aéronef est exclusivement utilisé par le ou les pilotes mentionnés aux conditions particulières « , le moyen invoqué par M. [W] tenant à ce que la garantie pourrait être mobilisée en cas d’utilisation partagée de l’appareil par plusieurs pilotes, dont l’un au moins remplirait les conditions requises par les conditions particulières, doit être rejeté.

Il ressort du rapport du Bureau d’Enquête et d’Analyses que, lors de ce vol, l’expérience totale du pilote, situé en place avant gauche,  » s’élevait à 284 heures de vol « ,  » le passager en place avant droite [totalisant quant à lui] 1 260 heures de vol sur tous types « . Reprenant les déclarations alors faites par M. [W], le rapport ajoute que  » le passager en place avant droite  » indique qu’il s’est installé en place droite et (…) mentionne avoir proposé au pilote en place gauche de réaliser le décollage (…). Il indique qu’il a été surpris de la réduction puis de la soudaine remise de gaz réalisée par le pilote, sans que celui-ci ne lui en ait fait part. Il précise ne pas avoir rencontré de problème particulier lors de la navigation précédente réalisée entre [Localité 9] et [Localité 10]. Il ajoute également qu’il était aux commandes en place gauche lors de ce vol « .

Malgré les affirmations contraires de M. [W] dans ses dernières conclusions, le contenu de ce rapport démontre que M. [J] [M], positionné en place avant gauche dans l’aéronef, était bien le seul pilote au sens de la police d’assurance aux commandes de l’aéronef et avait été expressément chargé par M. [W] de réaliser le décollage de l’avion en direction de [Localité 11], peu important que M. [W] puisse le cas échéant être qualifié de commandant de bord au sens de la réglementation européenne. Parallèlement, aucune des pièces produites ne vient contredire ce rapport et démontrer que M. [W] serait intervenu dans le décollage litigieux.

Or, le nom de M. [J] [M] ne figure parmi les pilotes désignés dans les conditions particulières de la police d’assurance et ne dispose pas de l’expérience suffisante de 500 heures minimales aux termes de ces conditions particulières pour permettre de mobiliser la garantie du groupement LRA.

Dans ces conditions, le litige survenu le 7 juillet 2021 n’entre pas dans le champ d’application de la garantie souscrite le 17 mai 2021, de sorte que la garantie souscrite n’est pas mobilisable et que les demandes formées contre le groupement LRA par M. [X] [W] doivent être rejetées.

– Sur la demande d’indemnisation formée à titre principal par M. [F] [O]

M. [F] [O] entend obtenir l’indemnisation de son préjudice en formant à titre principal une action directe à l’encontre du groupement LRA.

L’article L. 124-3 du code des assurances permet effectivement au tiers lésé d’agir à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

La définition de l’étendue de la garantie due par l’assureur est cependant opposable au tiers lésé, de même que le sont les exceptions opposables au souscripteur du contrat.

Comme indiqué précédemment, selon la police d’assurance relative à la responsabilité civile de l’assuré (point II-1-1.I), dans sa rubrique  » événements garantis « , sont couverts les  » risques ordinaires  » dans les conditions suivantes :  » l’accident doit se produire lorsque l’aéronef est exclusivement utilisé par le ou les pilotes mentionnés aux conditions particulières « .

Or, contrairement à M. [X] [W], M. [J] [M] ne figure pas parmi les pilotes désignés à la page 3 des conditions particulières de la police d’assurance et ne dispose pas de l’expérience suffisante, aux termes de ces conditions particulières, pour entraîner la garantie du groupement LRA s’il est pilote sans être nommément désigné.

Dans ces conditions, la garantie du groupement LRA ne saurait être mobilisée, et les demandes formées à son encontre par M. [F] [O] doivent également être rejetées.

– Sur la demande subsidiaire formée par M. [F] [O]

M. [F] [O] sollicite à titre subsidiaire, et pour la première fois dans ses conclusions notifiées le 12 décembre 2023, la condamnation de M. [W] à l’indemniser de son préjudice.

L’article 17 de la Convention de Varsovie pose le principe de la responsabilité du transporteur aérien pour un dommage survenu en cas de blessure subie par un voyageur lorsque l’accident qui a causé le dommage s’est produit à bord de l’aéronef ou au cours de toutes opérations d’embarquement ou de débarquement.

S’agissant d’un vol gracieux, la notion de transporteur renvoie à la notion de pilote.

Or, comme indiqué précédemment, les pièces versées aux débats, et notamment le rapport d’enquête établi par le BEA, démontrent que seul M. [J] [M] avait la maîtrise de l’aéronef lors du décollage ayant conduit à l’accident du 7 juillet 2021, et possédait par conséquent la qualité de pilote de l’aéronef.

Dès lors qu’aucune des pièces versées aux débats ne démontre que M. [W] aurait pu être qualifié de pilote de l’aéronef lors du vol litigieux, M. [F] [O] est mal fondé à solliciter à titre subsidiaire sa condamnation à l’indemniser de son préjudice corporel, de sorte qu’il doit être débouté de ses demandes, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur la fin de non recevoir.

– Sur la demande d’expertise et de provision formée par M. [F] [O]

Il résulte de ce qui précède que la garantie du groupement LRA n’est pas mobilisable et que M. [W] n’est pas responsable du préjudice subi par M. [F] [O].

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’ordonner, dans le cadre de la présente instance, une expertise judiciaire visant à déterminer le préjudice corporel subi par M. [H] [F] [O] du fait de l’accident du 7 juillet 2021 aux frais avancés par le groupement LRA, ni de condamner le groupement LRA à lui verser une provision, et ces demandes, non fondées, sont rejetées.

Sur les frais du procès et l’exécution provisoire

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

M. [X] [W] et M. [H] [F] [O], qui succombent en leurs prétentions, sont condamnés aux dépens.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

Il est équitable de condamner M. [X] [W] et M. [H] [F] [O] à payer chacun au groupement LRA la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de rejeter leurs propres demandes au titre de leurs frais irrépétibles.

Les articles 514 et 514-1 du code de procédure civile disposent que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire, à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. Le juge peut écarter l’exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire.

Aucun motif ne justifie en l’espèce d’écarter l’exécution provisoire de droit du présent jugement.

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant, par jugement contradictoire rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,

DÉBOUTE M. [X] [W] de l’ensemble de ses demandes ;

DÉBOUTE M. [H] [F] [O] de l’ensemble de ses demandes;

CONDAMNE M. [X] [W] et M. [H] [F] [O] aux dépens;

CONDAMNE M. [X] [W] à payer au groupement LRA la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [H] [F] [O] à payer au groupement LRA la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE les autres demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire de l’entier jugement est de droit.

Fait et jugé à Paris le 06 Novembre 2024

Le Greffier Le Président
Marion CHARRIER Benoit CHAMOUARD


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