Intermittents du spectacle en association : le risque Pôle Emploi

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Intermittents du spectacle en association : le risque Pôle Emploi
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En application de l’article L. 5425-8 du code du travail, tout demandeur d’emploi, artiste du spectacle, peut exercer une activité bénévole. Le cumul de fondatrice d’association et d’intermittente et légal.

Action en remboursement de Pôle Emploi

Pôle Emploi a poursuivi une cotisante, intermittente du spectacle, en remboursement d’un indu de plus de 50 000 euros, en faisant valoir que la cotisante avait effectué de fausses déclarations.

L’institution prétend que cette dernière déclarait une activité d’intermittente du spectacle entre les mois de février à juin de 2015 à 2018 alors même qu’elle disposait, en réalité, d’un emploi pérenne sur l’ensemble de l’année en qualité de professeur de danse et qu’elle ne peut être à ce titre, considérée comme artiste du spectacle et intermittente alors qu’elle gérait sa propre association.

Elle expose que Mme [Z] n’a pas déclaré l’ensemble des activités bénévoles ou rémunérées qu’elle exerçait au sein de cette association la moitié de l’année de septembre à décembre.

Elle ajoute qu’elle n’a pas plus déclaré ses changements de résidence ni ses vacances en violation de ses obligations déclaratives relevant des articles R. 5411-8 et R. 5411-10 du code du travail.

La cotisante estime qu’il appartient à Pôle emploi, pour bénéficier d’un délai de prescription allongée à 10 ans, de démontrer l’existence d’une fraude ou d’une fausse déclaration.

Elle allègue de l’effectivité de son activité salariée ainsi que de sa résidence sur le territoire français.

Délais de l’action en remboursement de l’allocation d’assurance chômage

Aux termes de l’article L. 5422-5 du code du travail, « l’action en remboursement de l’allocation d’assurance indûment versée se prescrit par trois ans. En cas de fraude ou de fausse déclaration, elle se prescrit par dix ans.

Ces délais courent à compter du jour de versement de ces sommes. »

En application de l’article L. 7121-2 3° du code du travail, est considéré comme artiste du spectacle l’artiste chorégraphique.

Statut de danseuse et chorégraphe intermittente

En l’espèce, il n’est pas contesté que Mme [Z] exerce de manière habituelle et depuis plusieurs années la profession de danseuse et chorégraphe.

Dans cette mesure, il doit être admis qu’elle doit être considérée comme un artiste de spectacle au sens de la disposition précitée.

Aux termes de l’article L. 7121-3 du code du travail, « tout contrat par lequel une personne s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un artiste du spectacle en vue de sa production, est présumée être un contrat de travail dès lors que cet artiste n’exerce pas l’activité qui fait l’objet de ce contrat dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce. »

Selon l’article L. 7121-4 du code du travail, « la présomption de l’existence d’un contrat de travail subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération, ainsi que la qualification donnée au contrat par les parties.

Cette présomption subsiste même s’il est prouvé que l’artiste conserve la liberté d’expression de son art, qu’il est propriétaire de tout ou partie du matériel utilisé ou qu’il emploie lui-même une ou plusieurs personnes pour le seconder, dès lors qu’il participe personnellement au spectacle. »

La disposition légale de salariat telle qu’édictée par les dispositions précitées implique qu’il appartient à Pôle emploi de la renverser en apportant la preuve que Mme [Z] a exercé son activité dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce.

Il est versé aux débats une trentaine de contrats d’engagement d’artiste intermittent à durée déterminée qui ont été conclus entre l’association [6] et Mme [Z] entre février 2016 et juin 2018.

Ces contrats sont de nature à démontrer que Mme [Z] a exercé la fonction d’artiste chorégraphe et de professeur de danse sous le statut d’intermittente.

Fondatrice d’association et intermittente : un cumul légal

À cet égard, l’intimée fait pertinemment valoir que le fait d’avoir fondé l’association ne lui interdit nullement d’en être occasionnellement la salariée alors qu’elle n’en est plus ni la présidente, ni membre du bureau.

Il en résulte que l’existence d’un lien de subordination n’est pas démontrée par Pôle emploi lorsqu’il est allégué que Mme [Z] était en réalité gérante de fait de l’association au regard de la signature de chèques de paiement de cotisations sociales.

Par ailleurs, l’existence d’une délégation ponctuelle de signature, ainsi que cela est confirmé par les attestant, peut effectivement être qualifié de participation ponctuelle et bénévole à la gestion de l’association et n’est donc pas de nature à renverser la présomption de salariat.

Au surplus, il doit être rappelé les dispositions de l’article L. 7121-4 aux termes duquel la présomption de salariat subsiste même s’il est prouvé que l’artiste conserve la liberté d’expression de son art et qu’il est propriétaire de tout ou partie du matériel utilisé.

S’agissant de la rémunération, les bulletins de salaires versés aux débats ainsi que les déclarations d’imposition font apparaître une différence d’un montant tout à fait minime selon le premier juge qui a exactement estimé que cet écart était insuffisant pour exclure la présomption de salariat.

À ce stade, il doit être rappelé la disposition précitée qui indique que la présomption de l’existence d’un contrat de travail subsiste quel que soit le montant de la rémunération.

S’agissant de l’activité bénévole, celle-ci est confirmée par les attestations versées aux débats.

Il n’est effectivement nullement démontré que celle-ci ait donnée lieu à une rémunération de la part de l’association.

Surtout, en application de l’article L. 5425-8 du code du travail, tout demandeur d’emploi peut exercer une activité bénévole.

D’autre part, il n’est pas plus démontré que cette activité ait été effective en dehors des périodes d’emploi à titre intermittent ni qu’elle se soit substituée à un emploi salarié.

Ainsi, la décision doit être confirmée en ce qu’elle a déduit de l’ensemble de ces éléments que l’institution ne rapportait pas la preuve de ce que Mme [Z] exerçait son activité au sein de l’association [6] dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce ou en dehors de tout lien de subordination, de sorte qu’il n’était pas démontré l’existence d’une fraude ou d’une fausse déclaration, la cour n’étant pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de répondre à des conclusions que les constatations précédentes rendent inopérantes.

Sur l’effectivité de la résidence sur le territoire français, les captures d’écran du compte Facebook de Mme [Z] produites sont insuffisantes à établir que celle-ci s’absentait régulièrement de son domicile en France pour des durées supérieures à 15 jours pour des vacances ou des manifestations.

En effet, ces photos ne sont pas nécessairement probantes car ayant pu être publiées à une date différente de leur capture.

Il en résulte donc que, de ce fait, la réalité de fausse déclaration n’est pas démontrée de sorte que le délai décennal n’a pas vocation à s’appliquer.


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