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COMM.
CGA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 3 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10223 F
Pourvoi n° K 17-15.027
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ la société 2 AST, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
2°/ la société Centre moteur énergie, société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 5 janvier 2017 par la cour d’appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige les opposant :
1°/ à la société ER2A, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
2°/ à M. Jacques X…,
3°/ à M. Stéphane Y…,
tous deux domiciliés […] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 6 mars 2018, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Z…, conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat des sociétés 2 AST et Centre moteur énergie, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société ER2A et de MM. X… et Y… ;
Sur le rapport de Mme Z…, conseiller référendaire, l’avis de Mme A…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés 2 AST et Centre moteur énergie aux dépens ;
Vu l’article 700 du de code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société ER2A et à MM. X… et Y… la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour les sociétés 2 AST et Centre moteur énergie
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR dit n’y avoir lieu à homologation du rapport d’expertise, D’AVOIR constaté que la société ER2A et ses dirigeants, es qualités, n’avaient pas commis de débauchage de salariés avec la volonté de nuire et l’existence de manoeuvres déloyales ayant entraîné la désorganisation du fonctionnement des sociétés CME et 2 AST et D’AVOIR débouté les sociétés CME et 2 AST de leur demande de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE l’action en concurrence déloyale qui ne repose pas sur une présomption de responsabilité suppose l’existence d’une faute, et le requérant doit justifier d’un préjudice en lien causal, même s’il s’infère nécessairement des actes déloyaux constatés ; que pour autant, le droit d’exercer une activité commerciale est une liberté fondamentale si elle s’exerce dans le respect des règles du commerce et de l’industrie ; que pour fonder leur action, les appelants visent une perte sur l’exercice 2008 de CME, cette année correspondant à l’année de création de ER2A (le 1er octobre) ; que la baisse de marge commerciale (brute globale) de CME entre 2007 et 2008 s’avère en réalité relative (57,47 % en 2007 puis 54,55 % en 2008 selon tableau communiqués par les appelants qui mentionnent curieusement une perte de 7 points alors qu’elle n’est que de 2,92 % chiffre retenu à bon droit par le premier juge) dès lors qu’elle est ensuite remontée en 2009 à 58,38 % sans incidence alléguée du comportement de ER2A ; qu’elle peut tout aussi bien être causée par des évènements structurels (au sein du groupe notamment) ou bien des évènements conjoncturels (crise économique) ; que de plus les mêmes tableaux visent entre 2007 et 2008 une augmentation de la « marge brute de production » (de 1458792 euros à 1563173 euros) en correspondance d’une progression du chiffre d’affaires (3572119 euros à 3737377 euros), soit des indicateurs positifs ; que les deux sociétés CME et ER2A qui oeuvrent sur le même secteur d’activité ont nécessairement des clients communs que l’expertise judiciaire a en effet révélés, au nombre de 14 à 17 selon les hypothèses retenues d’autant qu’elles répondent toutes deux à des marchés à bon de commandes et des marchés publics, en visée de clients nationaux ; que la corrélation entre les chiffres d’affaire sur ces clients communs visés par l’expert de 1257129,47 euros attribués à ER2A contre 498422,41 euros pour CME mais sur une période de 18 mois allant jusqu’au 31 décembre 2009 dépassant ainsi la date de clôture de l’exercice 2008 fondement de l’action des appelants (l’examen des factures 2008 et 2009 par l’expert correspondait à la mission qui lui a été confiée), doit être considéré avec prudence puisque 18 % du chiffre d’affaires de ER2A est affecté au client SDMO Industries chez qui M. X… était embauché avant son entrée chez CME justifiant des liens légitimes conservés avec SDMO ; que si, comme proposé par les intimés, suivant une hypothèse aussi crédible, les clients communs ne sont retenus qu’en fonction du domaine d’activité et du secteur géographique dans lesquels oeuvrent les deux parties, le comparatif des CA est moins pertinent conduisant à un CA de 302 398,03 euros pour ER2A et de 97664,75 euros pour CME et toujours sous la réserve que l’examen a porté sur les 18 mois d’examen de l’expert ; que les intimés font aussi valoir à juste titre que l’inclusion de CME dans un, groupe autorise d’autres calculs comparatifs qui ne sont plus alors à l’avantage des appelants, ce que l’expert judiciaire a aussi mentionné (p.14) en en tirant une conclusion peu exploitable (« on peut se demander si cette baisse – du CA TTC du groupe pour 2008 et 2009 – n’est pas la conséquence directe de l’intervention de ER2A ») ; que contrairement à la conclusion qu’en tirent les appelants, il ne peut donc être énoncé aucune certitude quant à l’imputation au comportement des intimés de la baisse du CA de CME et donc de sa perte de marge ; que la mesure d’instruction ne peut finalement servir d’élément à charge contre ces derniers ; que M. B… gérant de la société STCI expose dans son écrit du 30 août 2010 (confirmé par l’écrit de Mme C… comptable chez CME) que, alors qu’il assurait entre octobre et décembre 2008 des travaux à l’hôpital de Vichy pour le compte de CME, M. X… alors employé par CME lui avait demandé de prêter un salarié soudeur pour procéder à des travaux à la gendarmerie de Cosne-sur-Loire (chantier de ER2A), que M. D… (salarié de CME et désormais de ER2A) a assuré ce convoyage de 490 kms AR, et que, sur refus de CME d’acquitter les heures de ce travail, M. X… les lui a réglées par l’intermédiaire d’une société Claixoise d’Isolation ; que les intimés rétorquent utilement d’une part que ce paiement, qu’ils contestent, n’est pas démontré et qu’il n’est établi aucun lien entre M. X… et la société Claixoise d’Isolation, et d’autre part que le chiffre d’affaires de ce chantier (4.950 euros HT) n’est pas significatif par rapport au chiffre d’affaires du groupe. Il est ajouté qu’il ne l’est pas non plus relativement au chiffre d’affaires de CME ; que les appelants énoncent également que M. X… au travers de sa nouvelle société ER2a et alors qu’il était encore employé chez CME a détourné le chantier promis initialement à CME ; que ce qui n’est pas plus justifié dès lors que CME ne peut revendiquer une promesse pour s’attribuer un chantier tant que l’acceptation du client n’est pas formalisée ; que ce fait prétendu à la charge de M. X… ne caractérise pas une déloyauté dans un acte de concurrence ; que M. E… de la société Forclum, dans son e-mail du 26 juillet 2010, énonce que, suite à un dossier de consultation confié à CME, il a reçu deux offres signées de M. X… (salarié de CME) en octobre 2007 et novembre 2008, et qu’il a plus tard, le 26 janvier 2009, reçu une offre de ER2A qu’il l’a modifiée en février 2009, conduisant à son acceptation en juin 2009 ; qu’il s’est agi pour les appelants d’actes de détournement de clientèle, contesté par les intimés qui soutiennent que, selon l’usage de la profession, ER 2A a été consultée par le bureau d’étude Barnabel de Lyon et qu’elle a ainsi répondu à l’offre ; que les appelants, qui ont la charge de la preuve, ne démontrent nullement que ER2A a obtenu le chantier sans avoir soumissionné, et que M. X… et M. Y… ont été personnellement sollicités à une date à laquelle ER2A n’existait pas encore et à une date à laquelle ils étaient encore liés à CME [et à énergie plus pour M. Y…] et donc débiteurs d’un devoir de loyauté ; qu’il est rappelé en effet que M. X… a quitté CME le 31 décembre 2008 délié de toute obligation de non-concurrence que M. Y… a quitté énergie plus en juillet 2008 délié également de son obligation de non-concurrence, et encore que ER2A a été constituée le 1er octobre 2008 ; que ER2A a ainsi pu soumissionner à ce chantier, et rien ne justifie de la déloyauté de M. X… dont il n’est pas prouvé non plus qu’il ait permis cette soumission, ni de celle de M. Y… ; qu’au rappel des principes de liberté du travail et de libre concurrence, aucun acte de détournement de clientèle n’est démontré ; que par son courrier du 22 novembre 2010, Mme F… directrice du centre hospitalier d’Evaux les Bains (23) expose avoir reçu en juin 2010 de la part de M. X… et de M. Y… de la société ER2A des contrats dits remplacer ceux en cours conclus avec CME qui mentionnait aussi le nom de M. X… ; que contrairement à ce qu’allèguent les appelants, qui soutiennent à tort que le témoin a attesté que M. D… (ancien salarié de CME actuellement employé par ER2A) « est venu la voir pour lui indiquer que la société ER2A avait racheté CME (sic) et qu’à ce titre il fallait signer de nouveaux contrats au nom de ER2A, ceux précédemment signés et en cours avec CME étant prétendument caducs (resic) », Mme F… a écrit précisément « la secrétaire (de ER2A) m ‘a répondu que ces contrats remplaçaient ceux en cours de CME.. Vu la réponse de ER2A et le nom du responsable [M. X…] j’ai pensé à un rachat de CME par ER2A et signé les contrats » ; qu’au demeurant les contrats ont été signés par ce client en juin 2010 soit à une période ultérieure à celle incriminée ; qu’aucune confusion dans l’esprit de la cliente, aucune fausse qualité ou appartenance, aucun détournement de clientèle ne sont imputables à ER2A ou ses co-gérants, à qui les appelants reprochent aussi, mais sans preuves, une conservation de fichiers, des documents techniques et commerciaux et des informations privilégiées exploitées pour un prétendu démarchage systématique ; qu’il n’est pas plus prouvé des actes déloyaux de la part de M. X… et de M. Y… en leur qualité d’anciens salariés ; que notamment la similitude entre des contrats de maintenance proposés par ER2A et CME n’est pas avérée au vu des documents produits et ne permet aucune confusion sur son origine ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE la société CME invoque un détournement de clientèle par Monsieur X… qui aurait exercé des pratiques de concurrence déloyale s’agissant des chantiers de Cosne Sur Loire, Clermont Ferrand et aux Genêts d’Or ; qu’aucune volonté de la part de la part d’ER2A pour créer une confusion dans l’esprit des clients de CME n’est rapportée ; qu’il est rappelé que tous les clients communs sont issus d’un appel d’offre public et qu’ils arrivent ensuite sur consultations en sous-traitance auprès des fabricants ou installateur en groupe ; que le modèle de contrat de maintenance d’ER2A est différent de celui utilisé par CME ; que par ailleurs, au vu des pièces versées aux débats, il est constaté pour l’année 2008, que la marge brute de CME a très sensiblement baissé (-2,92 %) par rapport à l’année 2007 ; que toutefois l’année 2008 est celle de la constitution de la société ER2A et que le chiffre d’affaires de CME est de 4,63 % ; que le rapport de l’expert précise que le chiffre d’affaires réalisé par ER2A avec les clients communs à CME, représente une faible partie du chiffre d’affaires total de CME soit 1,13 % et ne justifie pas la perte de marge évoquée par CME ; qu’en tout état de cause, la preuve de manoeuvre déloyale de la part de ER2A ou M. X… constitutif d’une faute, n’est rapportée par CME, ni un préjudice subi ;
1°) ALORS QUE le préjudice s’infère nécessairement des actes de concurrence déloyale ; que dès lors en écartant l’existence d’une concurrence déloyale de la part de la société ER2A et de ses dirigeants au motif inopérant que la baisse de la marge commerciale de la société CME constatée par l’expert judiciaire au moment de la création de la société ER2A s’avérait « relative », la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QU’ il résulte des constatations de la cour d’appel que M. X…, lorsqu’ il était encore employé par la société CME, a demandé à un sous-traitant travaillant sur un chantier de son employeur d’intervenir sur un chantier de la société ER2A en facturant le coût de cette intervention à la société CME ; qu’en estimant que ce comportement, en lui-même, ne constituait pas un acte de déloyauté de la part de M. X…, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l’article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;
3°) ALORS QUE dans ses conclusions d’appel (p. 6 et 7), la société CME a fait valoir, preuve à l’appui, qu’elle avait directement été sollicitée par la société SDMO par un mail daté du 3 octobre 2008 pour intervenir sur le chantier de la gendarmerie de Cosne-sur-Loire, qu’elle avait à cette fin établi un devis et que M. X…, encore salarié de la société CME, avait détourné cette offre au profit de la société ER2A qui avait finalement obtenu ce chantier à peine créée ; qu’en écartant l’existence d’un acte déloyal de détournement de clientèle au motif inopérant que la société CME ne pouvait revendiquer la promesse de se voir attribuer un chantier tant que l’acceptation du client n’avait pas été formalisée, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;
4°) ALORS QU’en s’abstenant de rechercher, ainsi qu’elle était invitée à le faire, si le fait que M. X…, après avoir répondu à un appel d’offres directement adressé à la société CME par un de ses clients habituels pour le chantier de Centre Jaude de Clermont-Ferrand, ait également soumissionné à ce chantier pour le compte de la société ER2A n’était pas constitutif d’un procédé déloyal visant à détourner un client habituel de son ancien employeur, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard de l’article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;
5°) ALORS QUE la création d’une confusion possible dans l’esprit des clients caractérise un acte de concurrence déloyale ; qu’il résulte des constatations de l’arrêt que dans un courrier daté du 22 novembre 2010, Mme F…, directrice du Centre hospitalier Les Genêts d’Or, exposait avoir reçu de la part de M. X… et de M. Y… de la société ER2A des contrats dits remplacer ceux en cours conclus avec la société CME qui mentionnait aussi le nom de M. X… et avait précisément indiqué que« la secrétaire (de ER2A) m ‘a répondu que ces contrats remplaçaient ceux en cours de CME.. Vu la réponse de ER2A et le nom du responsable [M. X…] j’ai pensé à un rachat de CME par ER2A et signé les contrats » ; qu’en estimant néanmoins qu’aucune confusion dans l’esprit de la cliente n’était imputable à la société ER2A ou à ses co-gérants, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l’article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;
6°) ALORS QUE la création d’un risque de confusion est un acte déloyal de concurrence indépendamment de la volonté de son auteur ; qu’en retenant, à supposer les motifs du jugement adoptés, que la preuve de la volonté de la société ER2A de créer une confusion dans l’esprit des clients de la société CME n’était pas rapportée, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;
7°) ALORS QUE nulle part dans leurs conclusions d’appel, les sociétés 2AST et CME n’ont limité leurs demandes d’indemnisation au titre de la concurrence déloyale à la période examinée par l’expert judiciaire ; qu’en relevant, pour écarter tout acte de concurrence déloyale, que les contrats adressés au centre hospitalier les Genêts d’Or par la société ER2A avaient été signés par Mme F… en juin 2010 à une période ultérieure à celle incriminée, la cour d’appel a méconnu les termes du litige et a violé l’article 4 du code de procédure civile.