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COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 octobre 2020
Cassation
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 634 FS-P+B
Pourvoi n° Q 18-15.840
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 14 OCTOBRE 2020
1°/ Mme Q… R…, domiciliée […],
2°/ la société […] , société anonyme, dont le siège est […] ),
ont formé le pourvoi n° Q 18-15.840 contre l’ordonnance n° RG : 17/09697 rendue le 4 avril 2018 par le premier président de la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 7), dans le litige les opposant à l’Autorité des marchés financiers, dont le siège est […] , défenderesse à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lion, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme R… et de la société […] , de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de l’Autorité des marchés financiers, et l’avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l’audience publique du 15 septembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Lion, conseiller référendaire rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, Mmes Darbois, Poillot-Peruzzetto, Daubigney, Michel-Amsellem, M. Ponsot, Mme Boisselet, M. Mollard, conseillers, Mmes Le Bras, de Cabarrus, Lefeuvre, Bessaud, M. Boutié, Mmes Tostain, Bellino, conseillers référendaires, M. Debacq, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l’ordonnance attaquée, rendue par le premier président d’une cour d’appel (Paris, 4 avril 2018), un juge des libertés et de la détention a, sur le fondement de l’article L. 621-12 du code monétaire et financier, autorisé des enquêteurs de l’Autorité des marchés financiers (AMF), en charge d’une enquête ouverte par son secrétaire général portant sur l’information financière et le marché du titre de la société Marie Brizard Wine & Spirits (la société MBWS), à procéder à une visite au siège social de cette société, situé […] , à l’occasion de la tenue de son prochain conseil d’administration, et à saisir toute pièce ou document susceptible de caractériser la communication et/ou l’utilisation d’une information privilégiée au sens de l’article 621-1 du règlement général de l’AMF, notamment les ordinateurs portables et téléphones mobiles des représentants de la société […] participant à ce conseil d’administration, dont Mme R….
2. Ces opérations ont été effectuées le 25 avril 2017 et Mme R… a relevé appel de l’ordonnance d’autorisation de visite ainsi qu’exercé un recours contre leur déroulement. La société […] est intervenue volontairement à l’instance, à titre accessoire.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
3. Mme R… et la société […] font grief à l’ordonnance de déclarer irrecevable la demande d’intervention volontaire de la société […] , alors « que l’intervention volontaire accessoire est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir les prétentions d’une partie ; que la recevabilité de cette intervention ne suppose en revanche pas que son auteur ait été en droit d’exercer l’action engagée par la partie qu’il soutient ; que pour déclarer l’intervention volontaire accessoire de la société […] irrecevable, le premier président a relevé que l’autorisation de visite domiciliaire accordée par l’ordonnance du 19 avril 2017 “se limitait” au siège social de la société MBWS et aux lieux de résidence temporaire, en France de Mme Q… R…, de M. V… A… et de M. J… U… ; qu’en statuant de la sorte, cependant que la circonstance que la société […] n’ait pas été l’occupante des lieux que l’ordonnance autorisait à visiter n’était pas, en soi, de nature à rendre son intervention irrecevable, le premier président a violé l’article 330 du code de procédure civile, ensemble l’article L. 621-12 du code monétaire et financier. »
Réponse de la Cour
Vu l’article 330 du code de procédure civile :
4. Selon ce texte, l’intervention volontaire accessoire, qui appuie les prétentions d’une partie, est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.
5. Pour déclarer irrecevable l’intervention volontaire à titre accessoire de la société […] , l’ordonnance, après avoir relevé que ses locaux n’étaient pas visés par l’autorisation de visite, et énoncé qu’au stade de l’enquête préparatoire, aucune accusation n’est formulée à l’encontre des personnes concernées par les visites autorisées, et encore moins à l’encontre des personnes non concernées par ces visites, retient qu’aucune atteinte à la présomption d’innocence ne peut être retenue contre la société […] .
6. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à écarter l’intérêt, pour la société […] , à intervenir à titre accessoire pour soutenir les prétentions de Mme R… afin d’assurer la conservation de ses droits, le premier président a privé sa décision de base légale.
Et sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche
7. Mme R… et la société […] font grief à l’ordonnance de confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance du juge des libertés et de la détention et de rejeter la demande de Mme R… tendant à la restitution de l’intégralité des pièces et documents lui appartenant, qui avaient été saisis lors de la visite domiciliaire autorisée par cette ordonnance, alors « que la saisie de documents électroniques, qui constitue une ingérence de l’autorité publique dans le droit au respect de la vie privée et de la correspondance, n’est admise que si elle est prévue par un texte ; que l’article L. 621-12 du code de monétaire et financier permet au juge des libertés et de la détention d’autoriser les enquêteurs de l’AMF à visiter un lieu et à saisir les documents appartenant aux personnes occupant effectivement ce lieu ; qu’il ne permet en revanche pas d’autoriser les enquêteurs à saisir des documents détenus par des personnes simplement de passage dans le lieu en question lors du déroulement des opérations de visite domiciliaire ; que le premier président a constaté qu’à la date prévue pour la visite domiciliaire du siège social de la société MBWS, Mme R…, résidente marocaine, était simplement “de passage” à ce siège social, pour assister à un conseil d’administration ; qu’en jugeant néanmoins que le juge des libertés et de la détention aurait valablement autorisé la saisie de documents appartenant à cette dernière lors de cette visite domiciliaire, le premier président a violé l’article L. 621-12 du code de monétaire et financier, ensemble l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. »