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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
X… Guillaume,
contre l’arrêt de la chambre d’accusation de la cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE, en date du 29 avril 1999, qui, dans l’information suivie notamment contre lui des chefs de trafic d’influence, favoritisme, usage de faux et abus de biens sociaux, a prononcé sur sa demande d’annulation de pièces de la procédure ;
Y… Alain,
Z… Jacques,
A… Jean-Louis,
B… Jean-Pierre,
C… Jean-Luc,
D… Gilles,
E… Lucien,
F… Michel,
G… Daniel,
H… Pierre,
I… Jean-Marc,
J… Ange,
X… Guillaume,
K… Philippe,
L… Patrick,
M… Jean-Paul,
N… Alain,
O… Marc,
P… Alain,
Q… Michel,
R… Jean-Michel,
S… Yves,
T… Gérard,
U… Alain,
V… Michel,
XW… Claude,
XX… Patrick,
XY… Jean-Claude,
contre l’arrêt de la même cour d’appel, 5ème chambre, en date du 15 mai 2002, qui a condamné : I.Daniel G…, pour trafic d’influence, favoritisme et recel, abus de biens sociaux, escroquerie, abus de confiance, à 18 mois d’emprisonnement dont 1 an avec sursis et 7 500 euros d’amende ;
II.Jean-Paul M…, pour trafic d’influence, abus de biens sociaux, recel de favoritisme, à 10 mois d’emprisonnement avec sursis, 7 500 euros d’amende et 5 ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité ; III.Alain P…, pour trafic d’influence, favoritisme et recel, abus de biens sociaux et usage de faux, à 8 mois d’emprisonnement avec sursis, 7 500 euros d’amende et 5 ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité ;
IV.Philippe K…, pour trafic d’influence, favoritisme, escroquerie, recel d’abus de biens sociaux, à 6 mois d’emprisonnement avec sursis ;
V.Gilles D…, pour trafic d’influence et favoritisme, à 8 mois d’emprisonnement avec sursis, 1 500 euros d’amende et 5 ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité ; VI.Yves S…, pour trafic d’influence, à 3 mois d’emprisonnement avec sursis et 5 ans d’interdiction du droit de vote et d’éligibilité ;
VII.Michel F…, pour trafic d’influence, favoritisme, recel d’abus de biens sociaux, à 3 mois d’emprisonnement avec sursis ;
VIII.Lucien E…, pour trafic d’influence, recel d’abus de biens sociaux, à 8 mois d’emprisonnement avec sursis et 5 ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité ;
IX.Jean-Pierre B…, pour trafic d’influence, favoritisme, recel d’abus de biens sociaux, à 3 mois d’emprisonnement avec sursis ;
X.Alain Y…, pour trafic d’influence, favoritisme, faux, usage de faux, recel d’abus de biens sociaux, à 10 mois d’emprisonnement avec sursis et 1 500 euros d’amende ;
XI.Jean-Marc I…, pour trafic d’influence et usage de faux, à 6 mois d’emprisonnement avec sursis, 3 000 euros d’amende et 5 ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité ;
XII.Michel Q…, pour trafic d’influence, recel d’abus de biens sociaux, à 18 mois d’emprisonnement avec sursis, 4 500 euros d’amende et 5 ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité ;
XIII.Guillaume X…, pour trafic d’influence, recel de favoritisme et abus de biens sociaux, à 8 mois d’emprisonnement avec sursis, 4 500 euros d’amende et 5 ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité ; 1.Ange J…, pour trafic d’influence et abus de biens sociaux, à 1 an d’emprisonnement avec sursis, 7 500 euros d’amende et 5 ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité ;
XIV.Jacques Z…, pour trafic d’influence passif, usage de faux et abus de biens sociaux, à 6 mois d’emprisonnement avec sursis, 4 500 euros d’amende et 5 ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité ; et qui a prononcé sur les intérêts civils ; La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 25 février 2004 où étaient présents : M. Cotte président, M. Soulard conseiller rapporteur, MM. Pibouleau, Challe, Roger, Dulin, Mme Thin, MM. Rognon, Chanut conseillers de la chambre, Mme de la Lance, M. Samuel, Mme Salmeron conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Finielz ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD, les observations de Me BOUTHORS, de Me CHOUCROY, de Me FOUSSARD, de la société civile professionnelle GATINEAU, de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de la société civile professionnelle ANCEL et COUTURIER-HELLER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général FINIELZ ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que la Direction de la construction navale (DCN) a signé, en 1992, une convention avec l’Union générale des achats publics (UGAP), afin de simplifier les commandes publiques pour les achats de fournitures courantes, les marchés “UGAP” étant appelés à remplacer les marchés DCN ;
Qu’en 1996, Dominique XZ…, ancien mécanicien de la Marine nationale, a porté à la connaissance des services de la gendarmerie maritime de Toulon que Daniel G…, dirigeant de la société Sovamec, se serait livré à des actes de corruption afin d’obtenir des commandes publiques ; que l’information ouverte à la suite de ces révélations a fait apparaître qu’un certain nombre d’employés de la DCN favorisaient certaines entreprises dans l’attribution de commandes ou de marchés publics, en échange de compensations financières ;
Attendu qu’à l’issue de l’information, des employés de la DCN et des fournisseurs de cet établissement public ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel des chefs, suivant les cas, de trafic d’influence commis par un particulier ou par une personne exerçant une fonction publique, atteinte à la liberté d’accès et à l’égalité des candidats dans les marchés publics, escroquerie, abus de biens sociaux, faux et usage et recel de certains de ces délits ;
En cet état : I – Sur le pourvoi formé contre l’arrêt de la chambre d’accusation : Sur le premier moyen de cassation proposé pour Guillaume X…, pris de la violation des articles 311-1 et 226-13 du Code pénal, 171, 173, 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation du principe de la loyauté des preuves, violation des droits de la défense ;
“en ce que la chambre d’accusation a rejeté la requête de Guillaume X… invoquant la nullité de l’enquête préliminaire et de la procédure subséquente en raison de l’adjonction au procès-verbal n° 00528/96 de documents d’origine frauduleuse produits par le dénonciateur anonyme ;
“aux motifs que les seules déclarations, anonymes au début de la procédure, de Dominique XZ…, suffisent à justifier l’ouverture d’une enquête préliminaire et les documents invoqués dont la réalité n’est pas contestée, se révèlent dès lors superfétatoires ; qu’il ne peut être ainsi sérieusement soutenu que les conditions de versement au dossier et l’usage de ces documents constituent des preuves irrégulières ou obtenues frauduleusement ;
“1 – alors que, constituent indubitablement des preuves frauduleusement obtenues, des photocopies de documents d’opérations commerciales prélevés clandestinement durant son travail par un stagiaire dans une société et qu’en affirmant que de tels documents ne constituaient pas des preuves irrégulières ou obtenues frauduleusement, la chambre d’accusation a contredit le contenu des pièces incriminées ;
“2 – alors que, les poursuites ne doivent jamais s’appuyer, fut-ce pour partie, sur des preuves frauduleusement obtenues et que la chambre d’accusation, qui admettait implicitement mais nécessairement dans sa motivation que les documents incriminés avaient été joints au procès-verbal n° 00528/96, ce qui impliquait qu’ils donnent force et crédit aux déclarations du dénonciateur anonyme, ne pouvait, sans méconnaître le principe susvisé, refuser d’annuler la procédure ;
“3 – alors que, la Cour de Cassation est en mesure de s’assurer que les déclarations extrêmement vagues du dénonciateur anonyme se bornant à faire état sans autre précision de “manoeuvres frauduleuses constatées par lui durant son stage de reconversion à la vie civile qu’il effectuait au sein de la société Sovamec à La Garde entre novembre 1994 et mars 1995”, ne justifiaient pas à elles seules, abstraction faite des documents remis qui l’explicitaient, l’ouverture d’une enquête préliminaire ;
“4 – alors que, lorsque comme en l’espèce, des documents obtenus par des procédés frauduleux ont été versés irrégulièrement dans une procédure, la chambre d’accusation a l’obligation de rechercher si des actes de la procédure y font référence et qu’en omettant de procéder à cette recherche, la chambre d’accusation a méconnu ses pouvoirs ;
“5 – alors que, la Cour de Cassation est en mesure de s’assurer par l’examen de la procédure, que postérieurement au dépôt par lui de pièces d’origine frauduleuse, le dénonciateur anonyme, qui s’est ultérieurement identifié comme étant Dominique XZ…, a été entendu et a commenté au cours de son audition, pièce par pièce, les documents incriminés et que dès lors, en omettant d’annuler Ies auditions de Dominique XZ… et les actes qui en étaient la conséquence, la chambre d’accusation a méconnu les textes susvisés” ;
Attendu que, pour écarter les conclusions par lesquelles Guillaume X… invoquait la nullité de l’enquête préliminaire au motif qu’elle aurait été ouverte sur la base de documents d’origine frauduleuse, la chambre d’accusation énonce, notamment, que les seules déclarations anonymes, recueillies au début de la procédure, suffisent à justifier l’ouverture d’une enquête préliminaire ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que le pouvoir du procureur de la République d’ordonner une enquête sur des faits portés à sa connaissance ne comporte aucune restriction, la chambre d’accusation a justifié sa décision ;
Qu’il s’ensuit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Guillaume X…, pris de la violation des articles 80, 171,173, 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
“en ce que la chambre d’accusation a refusé d’annuler le réquisitoire introductif et la procédure subséquente ;
“aux motifs que le réquisitoire introductif fait référence au procès-verbal n° 00472/96 de la gendarmerie maritime daté du 23 septembre 1996 qui fait lui-même référence aux pièces dont celle cotée 528/96 ;
qu’il ne peut dès lors être prétendu que les pièces sont absentes du dossier ;
“alors que, ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale, le réquisitoire introductif qui ne vise pas l’ensemble des pièces qui servent de base à la poursuite et que, dans la mesure où il résulte des constatations de l’arrêt que le réquisitoire introductif ne vise que le procès-verbal n° 00472/96, lequel se contente “de faire référence” au procès-verbal n° 00528/96, formule impliquant que ce dernier procès-verbal n’est pas joint, alors cependant qu’il a nécessairement servi de base à la poursuite, la chambre d’accusation a, en s’abstenant d’annuler le réquisitoire introductif et les pièces subséquentes de la procédure, méconnu la règle susvisée” ;