Informations confidentielles : 25 janvier 2024 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/02040

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Informations confidentielles : 25 janvier 2024 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/02040
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-2

(Anciennement 6e chambre)

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 JANVIER 2024

N° RG 21/02040 –

N° Portalis DBV3-V-B7F-UTDT

AFFAIRE :

[M] [S]

C/

S.A.S. RUBICON GROUP

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01 Juin 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de DREUX

N° Section : E

N° RG : F 20/00144

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Laurence CIER

Me Martine DUPUIS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, devant initialement être rendu le 07 décembre 2023 et prorogé au 25 janvier 2024, les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :

Madame [M] [S]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentant : Me Laurence CIER, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1613 substitué par Me Isabelle CHRISTIAN-DEMANGEOT, avcoat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

S.A.S. RUBICON GROUP

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 et Me Carla DI FAZIO PERRIN de la SELARL RACINE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0301 substitué par Me Agatha CRUCERU, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 03 Octobre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Domitille GOSSELIN,

Vu le jugement rendu le 1er juin 2021 par le conseil de prud’hommes de Dreux,

Vu la déclaration d’appel de Mme [M] [S] du 25 juin 2021,

Vu les conclusions de Mme [M] [S] du 4 septembre 2023,

Vu les conclusions de la société Rubicon Group du 8 octobre 2021,

Vu l’ordonnance de clôture du 6 septembre 2023.

EXPOSE DU LITIGE

La société Rubicon Group, dont le siège social est [Adresse 1] à [Localité 5],est spécialisée dans l’achat, la souscription, la détention, la gestion, la cession, ou l’apport d’actions ou autres valeurs mobilières dans toutes sociétés, le rôle de holding animatrice du Groupe et la définition de ses orientations stratégiques, la fourniture de prestations de services et de conseils de toute nature au profit de ses filiales.

Suite au rachat en 2017 de la société Fillon entreprise par la société Rubicon Group, celle-ci gère notamment l’activité d’animation du groupe de la société Fillon.

Le groupe Fillon est un fabricant d’équipements pour la préparation des peintures en carrosserie automobile, disposant de plusieurs filiales.

La convention collective nationale applicable est celle des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972.

Mme [M] [S], née le 22 novembre 1975, a été engagée par contrat de travail à durée indéterminée du 15 septembre 1997 par la société Fillon Technologies en qualité de responsable des ressources humaines.

Une convention de mutation concertée a été établie entre la société Fillon investissement, la société Rubicon Group et Mme [S] aux termes de laquelle le contrat de travail de la salariée a été transféré à compter du 1er avril 2017 à la société Rubicon Group.

Selon cette convention et le contrat de travail annexé à celle-ci daté du 3 avril 2017, Mme [S] a été engagée par la société Rubicon Group, à effet du 1er avril 2017, en qualité de directrice des ressources humaines, moyennant une rémunération de 60 000 euros sur 14 mensualités, avec reprise de l’ancienneté au 15 septembre 1997.

Par avenant du 1er avril 2019, la société Rubicon Group et Mme [S] ont convenu d’une clause de non-concurrence aux termes de laquelle :

« La salariée reconnait que les fonctions qu’elle exerce et le caractère confidentiel de notre activité impliquent des contacts avec les clients de la société, et lui donnent largement accès aux savoir-faire, techniques, pratiques commerciales et secrets commerciaux de la société et du groupe et plus généralement à des nombreuses informations confidentielles.

Ces données confidentielles constituent un atout essentiel de la société, laquelle a donc un intérêt légitime à l’insertion d’une clause de non-concurrence, ce que la société reconnait expressément.

En conséquence, après son départ de la société pour quelque motif que ce soit, la salariée s’interdit expressément d’exercer, sous quelque forme que ce soit, une activité concurrentielle à celle de la société et du groupe et plus précisément :

– De posséder ou d’acquérir, directement ou indirectement, une participation dans une entreprise exerçant à titre principal l’activité de la Société ;

– D’exercer directement ou indirectement l’activité de la Société, tant pour son compte que pour le compte d’un tiers (que ce soit sous forme de contrat de travail, mandat social, prestation de services etc.).

L’activité de la société est définie comme suit :

· La conception, la fabrication et la commercialisation des équipements de stockage, de dosage ou d’homogénéisation de peinture ;

· La conception, la fabrication et la commercialisation des équipements et techniques de conception de formulation d’aérosols prégazés pour peinture et de systèmes pour les remplir unitairement ou par petite série ;

· La conception, la fabrication et la commercialisation des équipements de lavage de pistolets à peinture ;

· La conception, la fabrication et la commercialisation des équipements de séchage de peinture.

Cette interdiction est limitée à une durée d’un an renouvelable 1 fois et concerne le territoire géographique : EMEA.

La présente clause s’applique :

– A compter de la notification de la rupture du contrat de travail si le préavis n’est pas exécuté ou si aucun préavis n’est à exécuter ;

– A compter de la cessation effective des fonctions si le préavis est exécuté partiellement ou totalement, ou en cas de rupture conventionnelle.

Il est expressément entendu entre les parties, quelle que soit la partie à l’origine de la rupture et quelle qu’en soit la cause, que la société se réserve la possibilité de dispenser la salariée de cette clause de non-concurrence, sous réserve d’en informer cette dernière par écrit, à tout moment de l’exécution du contrat de travail ou :

– Au plus tard dans les 8 jours suivant la notification du licenciement lorsque le préavis existe et est exécuté par la salariée ;

– Dans la lettre de licenciement lorsqu’aucun préavis n’est à effectuer ou lorsque la salariée est dispensée de préavis ;

– En cas de démission par la salariée, dans les 8 jours qui suivent la réception par la société de la lettre de démission ;

– Ou par mention expresse dans la convention de rupture conventionnelle.

En cas d’application de la clause de non-concurrence, il est versé au salarié, conformément à l’article 28 de la convention collective nationale des cadres de la métallurgie, pendant toute la durée d’application de la clause, une contrepartie financière mensuelle correspondant à 5/10 du salaire mensuel moyen calculé sur les 12 derniers mois précédent la rupture du contrat de travail ou 6/10 en cas de licenciement tant que la salariée n’a pas retrouvé d’emploi.

Il est entendu que l’indemnité étant la contrepartie de la clause de non-concurrence, celle-ci cesse d’être due en cas de violation par la salariée de ses engagements, sans préjudice des dommages et intérêts qui pourraient lui être réclamés.

En cas de violation de l’obligation de non-concurrence, la société se réserve expressément le droit de poursuivre la salariée au remboursement du préjudice pécuniaire et commercial effectivement subi et/ou de faire ordonner la cessation sous astreinte de l’activité concurrentielle. »

La société Rubicon Group et Mme [S] ont signé une rupture conventionnelle le 18 novembre 2019 avec une date de rupture du contrat de travail fixée au 2 janvier 2020. La rupture conventionnelle a été homologuée par la Direccte le 11 décembre 2019.

Par requête reçue au greffe le 15 décembre 2020, Mme [S] a saisi le conseil de prud’hommes de Dreux aux fins de :

– faire constater à titre provisionnel par le bureau de conciliation et d’orientation que la société Rubicon Group n’a pas renoncé valablement à la clause de non-concurrence dans les formes et délais prévus par les dispositions contractuelles,

– faire ordonner le paiement de 66 846,60 euros au titre de l’indemnité de non-concurrence ainsi que 6 684,66 euros de congés payés y afférents, outre le paiement d’une somme de 10 000 euros de dommages et intérêts et la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et les dépens.

La société Rubicon Group avait, quant à elle, demandé à ce que Mme [S] soit déboutée de ses demandes et sollicité sa condamnation à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire rendu le 1er juin 2021, la section encadrement du conseil de prud’hommes de Dreux a :

– débouté Mme [S] de sa demande de paiement de la clause de non-concurrence et congés payés y afférents,

– débouté Mme [S] de sa demande de paiement des dommages et intérêts à hauteur de 10 000 euros pour non-paiement de la clause de non-concurrence,

– dit n’y avoir lieu au paiement d’intérêts de retard,

– laissé les dépens à la charge de chacune des parties,

– rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties.

Par déclaration du 25 juin 2021, Mme [S] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions en date du 4 septembre 2023, Mme [M] [S] demande à la cour de :

– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Dreux le 1er juin 2021 en toutes ses dispositions,

En conséquence et statuant à nouveau,

– juger que la société Rubicon Group n’a pas renoncé valablement à la clause de non-concurrence dans les formes et délais prévus par les dispositions contractuelles et conventionnelles,

– condamner la société Rubicon Group au paiement de l’indemnité de la clause de non-concurrence soit :

. à titre principal, la somme totale de 66 684,66 euros correspondant à la contrepartie financière de la clause de non-concurrence pendant 2 ans,

. à titre subsidiaire, la somme de 33 423,30 euros correspondant à la contrepartie de la clause de non-concurrence pendant 1 an,

– condamner la société Rubicon Group au paiement des congés payés afférents soit :

. à titre principal la somme de 6 684,66 euros,

. à titre subsidiaire la somme de 3 342,33 euros,

– juger que la condamnation à intervenir sera assortie des intérêts au taux légal à compter de l’introduction de la demande avec capitalisation des intérêts par application de l’article 1154 du code civil,

– condamner la société Rubicon Group au paiement de dommages et intérêts à hauteur de 10 000 euros pour non-paiement de la clause de non-concurrence,

– condamner la société Rubicon Group au paiement de la somme de 4 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Rubicon Group aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions en date du 8 octobre 2021, la société Rubicon Group demande à la cour de :

– confirmer le jugement de première instance du conseil de prud’hommes de Dreux en toutes ses dispositions,

Par conséquent,

– constater que la clause de non-concurrence de Mme [S] a été valablement levée et n’a pas été renouvelée,

– constater que Mme [S] n’a pas le droit au paiement de l’indemnité au titre de la clause de non-concurrence,

– constater que Mme [S] n’a pas droit au paiement de dommages et intérêts,

– rejeter les demandes de la salariée, tant principales que subsidiaires,

– condamner Mme [S] au paiement de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées, soutenues à l’audience et rappelées ci-dessus.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 6 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’appelante soutient que l’employeur n’a pas renoncé ou n’a pas levé la clause de non-concurrence dans les formes et les délais prévus. Elle expose que la clause a été levée tardivement le 7 janvier 2020 sans respect des dispositions conventionnelles et contractuelles.

L’intimée fait valoir qu’elle a levé la clause de non-concurrence par lettre du 7 janvier 2020 dès la rupture du contrat de travail.

En l’espèce, il résulte des termes de la clause de non-concurrence tels qu’énoncés dans l’exposé du litige, prévue à l’avenant au contrat de travail du 1er avril 2019 que :

“Il est expressément entendu entre les parties, quelle que soit la partie à l’origine de la rupture et quelle qu’en soit la cause, que la société se réserve la possibilité de dispenser la salariée de cette clause de non-concurrence, sous réserve d’en informer cette dernière par écrit, à tout moment de l’exécution du contrat de travail ou :

– Au plus tard dans les 8 jours suivant la notification du licenciement lorsque le préavis existe et est exécuté par la salariée ;

– Dans la lettre de licenciement lorsqu’aucun préavis n’est à effectuer ou lorsque la salariée est dispensée de préavis ;

– En cas de démission par la salariée, dans les 8 jours qui suivent la réception par la société de la lettre de démission ;

– Ou par mention expresse dans la convention de rupture conventionnelle”.

Il s’agit de la reprise des dispositions conventionnelles, l’article 28 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie applicable à l’entreprise stipulant notamment que : “L’employeur, en cas de cessation d’un contrat de travail qui prévoyait une clause de non-concurrence, peut se décharger de l’indemnité prévue ci-dessus en libérant l’ingénieur ou cadre de l’interdiction de concurrence, mais sous condition de prévenir l’intéressé par écrit dans les 8 jours qui suivent la notification de la rupture du contrat de travail. En cas de rupture conventionnelle du contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues par les articles L. 1237-11 et suivants du code du travail, l’employeur ne peut se décharger de l’indemnité de non-concurrence, en libérant l’ingénieur ou cadre de l’interdiction de concurrence, que par une mention expresse figurant dans la convention de rupture.”

Or, les parties ont convenu d’une rupture conventionnelle du contrat de travail signée le 18 novembre 2019, avec une rupture envisagée au 2 janvier 2020, homologuée par la Direccte le 11 décembre 2019 (pièces n°7 et 8 appelante).

Il résulte des dispositions conventionnelles et contractuelles que la levée de la clause de non-concurrence aurait dû figurer dans l’acte de rupture conventionnelle, mais elle n’y est pas mentionnée, l’employeur ayant levé la clause par lettre du 7 janvier 2020 (pièce n° 10 appelante).

En conséquence, l’employeur n’a pas respecté les dispositions précitées de sorte que la contrepartie financière de ladite clause qui n’a pas été dénoncée dans les formes et les délais prescrits, est due à la salariée.

1- sur le montant de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence

L’appelante soutient qu’elle a droit au paiement de la contrepartie financière sur une période d’un an renouvelable un an, soit deux ans au total. Elle indique que l’employeur ne peut se soustraire au paiement de la contrepartie pour la seconde année en “réitérant” la levée de la clause par lettre du 21 décembre 2020, la levée étant non valable juridiquement. Elle expose également qu’elle a respecté la clause ayant été indemnisée par Pôle emploi jusqu’en mai 2020 puis ayant occupé un poste à compter de cette période à la clinique Léopold Bellan qui relève du secteur social et médico-social.

L’intimée fait valoir que la clause ne prévoit pas de modalité de renouvellement pour un an supplémentaire. Elle se réfère à sa lettre du 21 décembre 2020 aux termes de laquelle, ayant manifesté son intention de lever la clause le 7 janvier 2020, elle n’a pas envisagé son renouvellement (pièce n°10 appelante).

Il est établi et non contesté par l’intimée que Mme [S] n’a pas violé la clause de non-concurrence puisqu’elle a été demandeur d’emploi de janvier à mai 2020, a retrouvé un emploi de responsable des ressources humaines à compter du 18 mai 2020 dans un secteur d’activité totalement différent de celui de son ancien employeur, s’agissant en l’espèce du secteur social et médico-social (pièces n°11 et 12 appelante).

La clause de non concurrence stipule que “En cas d’application de la clause de non-concurrence, il est versé au salarié, conformément à l’article 28 de la convention collective nationale des cadres de la métallurgie, pendant toute la durée d’application de la clause, une contrepartie financière mensuelle correspondant à 5/10 du salaire mensuel moyen calculé sur les 12 derniers mois précédent la rupture du contrat de travail ou 6/10 en cas de licenciement tant que la salariée n’a pas retrouvé d’emploi.

L’article 28 de la convention collective applicable indique effectivement que “[…] l’interdiction ne peut excéder une durée de 1 an, renouvelable une fois, et a comme contrepartie, pendant la durée de non-concurrence, une indemnité mensuelle égale à 5/10 de la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels dont l’ingénieur ou cadre a bénéficié au cours de ses 12 derniers mois de présence dans l’établissement.

Toutefois, en cas de licenciement, cette indemnité mensuelle est portée à 6/10 de cette moyenne tant que l’ingénieur ou cadre n’a pas retrouvé un nouvel emploi et dans la limite de la durée de non-concurrence.”

S’agissant du renouvellement de la clause de non-concurrence, celui-ci n’était pas automatique, aucune disposition contractuelle ou conventionnelle n’en prévoyant les modalités.

Or, l’employeur a dénoncé le 7 janvier 2020 la clause de non-concurrence, certes sans respecter les modalités prévues, de sorte que celle-ci s’applique, mais en faisant ainsi montre de sa volonté de ne pas l’appliquer. Il a également affiché, suite à la saisine du conseil de prud’hommes, sa décision de ne pas renouveler la clause pour une nouvelle durée de 12 mois à compter de janvier 2021, par lettre du 21 décembre 2020.

Si l’employeur avait renoncé à la clause selon les modalités prescrites, au regard de la situation de Mme [S] à compter de mai 2020, celle-ci ayant retrouvé un emploi dans un domaine sans rapport avec celui de la société Rubicon Group, cette dernière n’avait donc aucun intérêt à imposer le renouvellement de la clause à la salariée à compter de janvier 2021.

En conséquence, la contrepartie financière doit être versée conformément aux dispositions contractuelles et conventionnelles pendant douze mois à compter de la rupture du contrat de travail.

S’agissant d’une rupture conventionnelle et non d’un licenciement, la contrepartie mensuelle sera égale à 5/10 de la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels dont Mme [S] a bénéficié au cours de ses 12 derniers mois de présence dans l’entreprise.

Sur la base des bulletins de salaire de janvier à décembre 2019 et de l’attestation Pôle emploi, il sera fait droit à la demande de l’appelante à hauteur d’une indemnité de 2 785,27 euros mensuelle (5 570,55 euros x 5/10), soit sur 12 mois 33 423,30 euros, outre les congés payés afférents soit 3 342,33 euros.

Le jugement sera infirmé de ces chefs.

La société Rubicon Group sera condamnée à payer lesdites sommes avec intérêt au taux légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée en application de l’article 1343-2 du code civil.

Mme [S] sera déboutée du surplus de ses demandes à ces titres.

2- sur les dommages-intérêts

L’appelante soutient que c’est lors de la signature de la rupture conventionnelle qu’elle aurait dû être informée de la renonciation éventuelle de la clause de non-concurrence ; que cette donnée impactait nécessairement sa situation financière future et a été décisive dans son choix de signer la rupture conventionnelle ; que l’absence de mention dans le formulaire de rupture conventionnelle lui a causé un préjudice car elle n’a pas pu rechercher un emploi librement et sans condition dès la signature de la rupture début décembre 2020.

L’intimée fait valoir que Mme [S] procède par affirmation sans fournir aucun élément justifiant sa demande ; qu’elle ne conteste pas la validité de la rupture conventionnelle ; qu’elle a retrouvé un emploi en mai 2020 alors qu’à cette date elle était consciente que sa clause avait été levée depuis le 7 janvier 2020 de sorte que ses allégations sont incohérentes ; qu’elle a attendu un an avant de saisir le conseil de prud’hommes.

En l’espèce, comme le relève pertinemment l’employeur, Mme [S] était parfaitement informée dès le 7 janvier 2020 que la société Rubicon Group n’entendait pas faire valoir la clause de non-concurrence, de sorte qu’elle pouvait postuler à des emplois dans n’importe quel secteur d’activité à compter de cette date.

Elle ne justifie pas d’un préjudice qu’elle aurait subi entre la date de la rupture conventionnelle et celle de la dénonciation par l’employeur de la clause, notamment par des propositions d’emplois dans le secteur d’activité de l’employeur qu’elle aurait été contrainte de refuser.

Elle ne démontre pas non plus que l’information concernant la clause de non-concurrence était déterminante pour la signature de la rupture conventionnelle alors qu’elle n’a pas contesté la validité de celle-ci.

Elle sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts par confirmation du jugement.

3- sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement sera infirmé sur les dépens, le conseil de prud’hommes ne s’étant pas prononcé sur les frais irrépétibles.

La société Rubicon Group sera condamnée à payer à Mme [S] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour l’ensemble de la procédure.

Elle sera déboutée de sa demande à ce titre et condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Dreux du 1er juin 2021 sauf en ce qu’il a débouté Mme [M] [S] de sa demande de dommages-intérêts,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société Rubicon Group à payer à Mme [M] [S] les sommes suivantes :

– 33 423,30 euros à titre de contrepartie financière de la clause de non-concurrence,

– 3 342,33 euros à titre de congés payés afférents,

et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes,

Dit que les intérêts échus dus au moins pour une année entière, produiront intérêt,

Déboute Mme [M] [S] du surplus de ses demandes à ces différents titres,

Condamne la société Rubicon Group à payer à Mme [M] [S] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, pour l’ensemble de la procédure,

Condamne la société Rubicon Group aux dépens de première instance et d’appel.

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, président, et par Mme Domitille Gosselin, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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